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Journal de bord

Pour des institutions écrites par et pour les citoyens :
un plan C : une Constitution d’origine Citoyenne.
Il ne faut pas laisser les hommes au pouvoir
écrire eux-mêmes les règles du pouvoir.


18 novembre 2008

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BIEN FAIT POUR VOUS ! (18 novembre 2008) (Lien)

 

Chers amis, je suis malheureux. J’ai l’impression de travailler pour rien. Mon idée centrale ne progresse pas. Je dois mal m’exprimer, ou me tromper.

 

La passivité des gens qu'on viole chaque jour avec leur assentiment, dans l'indifférence générale, leur servitude volontaire, me décourage chaque jour un peu plus.

 

 

D’autre part, et surtout, l'incompréhension profonde des militants et des intellectuels que je respecte pourtant plus que tout me désespère complètement : les dizaines d'heures que j'ai passées avec Raoul Marc Jennar, Michel Onfray, Gérard Filoche, Jacques Généreux, Frédéric Lordon, Annie Lacroix-Riz, Paul Ariès, Jean-Marie Harribey, Bernard Manin, Jean Veronis, Daniel Schneidermann, Élisabeth Lévy et Philippe Cohen, Jean Lebrun, François Ruffin, Mona Chollet, Sébastien Fontenelle, Agnès Maillard, Stéphane Paoli, Serge Halimi, André Bellon, Maurice Allais, Paul Alliès, Thierry Meyssan, Jean-François Kahn, Jacques Cheminade, Pierre Rosanvallon, Daniel Mermet, et tant d'autres dont j'aime tant la pensée généreuse, la culture infinie et/ou le courage politique, toutes ces heures semblent n'avoir servi à rien :

 

Alors qu’ils sont précisément, selon moi, particulièrement sensibles, humanistes, agiles intellectuellement et ouvert à des idées nouvelles, aucun de ces valeureux n'a compris (mais j'en déduis que c'est probablement moi qui me trompe et qu'il faut peut-être tout laisser tomber et retourner voler dans mes montagnes chéries, ne pensant plus qu’à moi et mes proches, comme avant), aucun n'a compris l'importance première, prioritaire, inédite (jamais testée ailleurs qu’à Athènes il y a 2 500 ans), forcément fondatrice d’un véritable pouvoir de résistance des hommes contre les abus de pouvoirs, l’importance décisive de la Constitution — la seule règle de droit qui soit, PAR DÉFINITION, au-dessus des pouvoirs et qui s'impose donc à eux —, et, par voie de conséquence logique, l'importante majeure et évidente du DÉSINTÉRESSEMENT DES AUTEURS de ce texte supérieur.

 

Tous ces personnages passionnants m'écoutent gentiment, amicalement, amusés de mon insistance qu’ils qualifient parfois d’obsessionnelle, mais pas du tout convaincus que j'aie le moins du monde raison et... ils continuent TOUS à considérer comme une évidence que l'Assemblée Constituante doit être... ÉLUE.

 

 

J'en ai donc vraiment marre, en fait, et derrière mon front, commencent à s'afficher les mots BIEN FAIT POUR VOUS : pendant que le monde s'écroule, pendant que ces gredins de patrons continuent à se goinfrer après nous avoir tous ruinés, pendant que les serpillères gouvernementales nous font les poches en beuglant leur vertu et en couvrant de centaines de milliards les barons voleurs au lieu de les jeter en prison, de confisquer leurs biens et de nationaliser la finance tout entière, alors que ce désastre ne peut être freiné par aucune digue puisque la Constitution (relisez-la si vous ne me croyez pas, celle de France et celle de l’Union européenne) ne prévoit rigoureusement AUCUN moyen de résister même aux pires abus de pouvoirs, pendant que les pires ravages s’approchent, pendant que les journalistes salariés des (subordonnés aux) banques nous préparent déjà à la nécessité de nouvelles guerres, vous êtes tous là à dire : « oui, c’est une bonne idée, la constitution, c’est intéressant, mais ce n’est pas réaliste, il faut s’occuper d’abord de tous les problèmes des gens, les salaires, l’emploi, l’environnement… » et gna gna gna…

 

Mais bon sang, tous ces problèmes sont IMPORTANTS MAIS SECONDAIRES : tant que vous avez LES FERS AUX PIEDS, les fers constitutionnels, vous êtes tous, nous sommes tous, condamnés aux plus stériles bavardages.

 

Bla bla bla… et merde.

 

Les multinationales et les banques, moins stupides que nous, elles, ont compris que CE QUI COMPTE C’EST D’ÉCRIRE SOI-MÊME LES INSTITUTIONS et de prendre ainsi le contrôle réel des marionnettes gouvernementales : qui écrit le droit européen ? Pourquoi est-ce un banquier (américain de cœur) — Jean Monnet — qui a décidé de construire de nouvelles institutions (prétendument « européennes ») de cette façon (sans nous) ? Pourquoi tous ces banquiers poussent-ils ardemment le processus constituant européen (les Pompidou et autres Pascal Lamy) ? À votre avis ? Par philanthropie ?

 

Ils sont moins bêtes que nous, ça c’est sûr.

 

Ils doivent bien se marrer à nous voir tous gesticuler en tapant les murs sans sortir de notre prison, alors que la porte n’est même pas fermée à clef !

 

 

 

LE POUVOIR VA JUSQU'À CE QU'IL TROUVE UNE LIMITE.

 

Ce principe implacable, aussi fort qu'un principe physique universel, formulé au cordeau par Montesquieu, a une conséquence importante : de la même façon qu'on ne reproche pas à un malade d'être malade, de la même façon qu'on ne reproche pas à un objet de tomber vers la terre, il est inutile, il est presque stupide, d'en vouloir aux pouvoirs d'abuser : ils sont programmés pour abuser, ils abuseront, c'est leur nature.

 

Par contre, c'est à nous — les autres, ceux qui consentent à obéir aux pouvoirs —, de fixer des limites.

 

Et la Constitution, le droit du droit, la seule règle qui soit au-dessus des pouvoirs, sert précisément à cela.

 

Mais si vous laissez écrire ces limites par les hommes au pouvoir eux-mêmes... c'est idiot : vous creusez vous-même votre tombe politique, ils vont évidemment tricher.

 

Et il faut donc vous en prendre à vous, et à vous seul. Ce n'est pas la faute "des autres", et surtout pas des hommes au pouvoir dont il n'y a rien à attendre de ce point de vue.

 

Or, tous LES HOMMES DE PARTIS cherchent à accéder au pouvoir (et c'est légitime, ce n'est pas le problème) : ils sont TOUS POTENTIELLEMENT DES HOMMES AU POUVOIR, eux-mêmes ou leurs proches.

 

Donc, dans un processus constituant, à ce moment précis (et pas ailleurs, je ne généralise pas), les hommes de partis sont à la fois « juges et parties » , les hommes de partis ont, dans cette circonstance précise, absolument stratégique, un intérêt personnel contraire à l'intérêt général, ILS NE SONT PAS DÉSINTÉRESSÉS et ILS SERONT DONC TOUJOURS FORCÉMENT MALHONNÊTES : ils programmeront forcément, comme ils l'ont toujours fait, l'impuissance politique des citoyens entre deux élections.

 

Donc, SI ON ÉLIT l'Assemblée Constituante, LES PARTIS VONT NOUS IMPOSER LEURS CANDIDATS et, à nouveau, comme toujours, ce sont les hommes au pouvoir qui vont écrire les règles du pouvoir, et on n’en sortira pas, et merde.

 

 

 

 

Alors, si vous ne faites pas du TIRAGE AU SORT DE L’ASSEMBLÉE CONSTITUANTE une priorité absolue et immédiate, décisive et indispensable, non négociable,

 

alors oui,

 

BIEN FAIT POUR VOUS.

 

 


 

Réponse à Jean Quatremer, qui voudrait bien discréditer en bloc tous les « nonistes »
pour un "crime de la pensée" : le "conspirationnisme
"
(28 septembre 2008) (Lien)

 

Le 24 septembre, Jean Quatremer, journaliste à Libération, sur son blog Coulisses de Bruxelles, a publié la note suivante :

 

 

Quand l'euroscepticisme mène au conspirationnisme

11septembre200145

 

Une partie des tenants du « non » à la Constitution européenne a développé, durant la campagne référendaire, des arguments de nature "conspirationnistes", Étienne Chouard en premier lieu. Sur son site , créé pour l’occasion, le petit prof en informatique de Marseille s’est fait le héraut du « non » en clamant que le traité constitutionnel européen visait à mettre en place une dictature, pas moins. Une bonne partie de la gauche extrême (et de la droite extrême( a aussi joué sur le rejet des « élites » qui, bien sûr, ne peuvent que comploter dans le dos du citoyen, innocente brebis, en vue d’accomplir leurs buts inavouables.

 

L’antilibéralisme, qui n’est souvent que le nouveau nom de l'antiaméricanisme, se nourrit de cette paranoïa. « On » nous ment, « on » nous veut du mal, « on » veut nous mettre au chômage. Le "on" est au choix, l'Europe, les États-Unis, le libéralisme, le capital.

 

Je suis heureux de découvrir que la boucle est désormais bouclée, plusieurs tenants du « non » de gauche soutenant désormais officiellement les thèses conspirationnistes défendues notamment par Thierry Meyssan à propos des attentats du 11 septembre 2001 : en résumé, les attentats ont été organisés par les Américains eux-mêmes, voire n’ont tout simplement pas eu lieu ! Le lièvre a été levé par le Nouvel Observateur daté du 18 septembre. Sur le site de Chouard, on trouve un lien avec une interview de l’animateur du « Réseau Voltaire » ainsi présenté: "

 

Thierry Meyssan : « Il faut arrêter les processus de diabolisation :
désintoxiquez-vous ! Retrouver l’esprit critique »

 

"Passionnante interview donnée au site reopen911.info".

 

« Je ne sais pas si les États-Unis ont simplement laissé faire les attentats ou s’ils les ont déclenchés », déclare au NO ce noniste de choc qui prédisait une « guerre civile » si le traité de Lisbonne était ratifié en France sans référendum. « Ce que je sais c’est que les plus gros mensonges passent comme une lettre à la poste. Pour les dirigeants américains, 3000 personnes, ça compte pour rien : les gens ne sont que de la merde sous leurs chaussures. Ce que dit Thierry Meyssan, un homme intelligent et très cultivé, devrait être débattu et analysé par les journalistes, au lieu de se trouver balayé par un canon à merde, dont Bigeard est aussi la victime ». Subtil et raffiné, non ? Tout y est : antiaméricanisme primaire, méfiance à l’égard des médias menteur, mépris des élites.

 

Bellaciao , le site participatif de la gauche antilibérale, tout aussi hystèriquement anti-européen que Chouard et qui trouve que la LCR est aligné sur Sarkozy, c'est dire– et dont je suis une tête de Turc régulière —, y va aussi de son soutien aux thèses conspirationnistes (par exemple ici ou ici), tout comme le site Agoravox  qui prétend faire de chaque citoyen un journaliste (un exemple ici ) … À pleurer de bêtise. Mais je ne dirais pas comme Desproges : « Étonnant, non » ?

 

 

Ne pouvant répondre en semaine pour cause de cours au lycée, j’ai répondu avec le message suivant, le dimanche 28 septembre 2008, vers 22 h :

 


 

 

Bonjour à tous,

 

Une amie m’a prévenu tardivement de la publication de cette note. J’ai alors lu la première page en diagonale, mais je devais aller en cours et je ne pouvais pas répondre. Ce week-end, je viens de prendre connaissance des quatre pages de commentaires, dont certains sont tout simplement passionnants. Comme d’habitude, on ne progresse jamais tant que dans la contradiction (à condition, quand même, de se respecter, je pense).

 

À mon sens, « la théorie de la théorie du complot » — celle que semble défendre Jean Quatremer et qui traque de prétendues théories du complot — ressemble bien à une interdiction pour les citoyens de vérifier s’il n’y a eu complot ou pas, une sorte d’INTERDICTION DE DOUTER, sous peine de subir le ridicule réservé aux paranoïaques, suspicieux au point d’en être malades.

 

 

— Pour reprendre d’abord vos reproches un à un :

 

D’une part, je ne dis pas qu’il y a eu tel ou tel complot : je dis justement que je n’en sais rien et que j’aimerais bien lire TOUS les avis contradictoires sur la question pour me forger une opinion éclairée ; ce n’est pas pareil, il ne faut pas me faire dire ce que je n’ai pas dit. L’administration Bush développe sa propre théorie du complot, mais on n’est pas obligé de tout croire d’emblée, ni dans un sens ni dans l’autre, n’est-ce pas ?

 

J’ai expliqué à Ariane Chemin (une journaliste du Nouvel Obs qui avait écrit un papier sur mon site en 2005 quand elle travaillait au Monde) que les exécutifs à tendance tyrannique ont besoin de « terroristes » ou d’« ennemis extérieurs » pour obtenir la docilité d’une population effrayée (leçons bien connues d’Orwell et des différents anti-totalitaires). Pour ces chefs-là, les humains comptent moins que de la crotte sous leurs chaussures, je le crois effectivement.

 

Le moins que je puisse dire est que cette journaliste professionnelle, pourtant apparemment bienveillante au téléphone, probablement trop pressée, n’a pas retenu grand chose d’intéressant de notre long entretien, et que le choix de deux phrases avec deux gros mots (ce que je ne fais jamais à l’écrit, évidemment, quand j’ai le contrôle de mon registre de langage) n’est pas neutre.

 

Votre propre dénaturation de cette première déformation aboutit à une pensée méconnaissable où je ne me reconnais pas. Il faut vraiment que j’apprenne à me tenir sur mes gardes quand je reçois l’appel d’un « journaliste professionnel » car, comme dans un interrogatoire policier, tout ce que je dis peut alors être retenu contre moi, en trahissant s’il le faut la promesse d’une relecture de mes paroles citées.

 

De la même façon que je ne prétends pas qu’il y a eu complot de l’administration Bush (sans l’exclure) en vue de rendre acceptables les exactions qui ont suivi (Patriot Act et agressions armées, notamment), je ne « soutiens pas officiellement » Thierry Meyssan (comme le souhaite apparemment J4M pour me faire rentrer dans la boîte qu’il m’a attribuée) : je trouve Meyssan intéressant, souvent même très intéressant. Est-il possible de nuancer et ne pas voir le monde en noir ou blanc ? Votre sens du discernement devrait vous permettre de distinguer entre « trouver parfois très intéressant » et « soutenir officiellement » ?  Je trouve aussi très intéressantes les thèses radicalement inverses, mais argumentées, comme le lien donné par ‘Bouffon vert’ (25/9, 1h55) vers une réfutation méthodique des doutes exprimés.

 

D’autre part, je réfléchis effectivement à des institutions honnêtes, c’est-à-dire qui placent tous les pouvoirs sous un contrôle permanent des citoyens (voyez mon forum : http://etienne.chouard.free.fr/forum cela représente un certain travail). Je prétends en effet, comme bien d’autres avant moi, que, issu ou pas d’une élite, TOUT POUVOIR EST (À LA FOIS NÉCESSAIRE ET) DANGEREUX, et que les élites qui font tout pour s’affranchir des contrôles sont, elles aussi, (nécessaires et) dangereuses.

 

Est-ce une pensée anti-élite ? Pas du  tout : nous avons besoin de favoriser l’émergence d’une élite pour exercer le pouvoir, cela va sans dire. Mais d’où viendrait que cette élite pourrait gouverner sans un contrôle sourcilleux des citoyens à tout moment ?

 

Je dis donc que C’EST FOLIE DE LAISSER LES ÉLITES au pouvoir modifier elles-mêmes la Constitution c’est-à-dire de FIXER ELLES-MÊMES LES LIMITES DE LEUR PROPRE POUVOIR. Et pour l’instant, personne n’a réussi à me montrer que j’ai tort, loin de là. Je suis sûr que la stricte séparation du pouvoir constituant des pouvoirs constitués est une grande idée qui peut permettre aux hommes de s’émanciper enfin, vraiment.

 

Pour moi, les deux Congrès de 2008, au cours desquels les ministres et les parlementaires ont profondément modifié la Constitution sans même nous consulter par référendum, sont donc deux coups d’État.

 

Je connais un autre professeur — "petit" aussi ? — qui pense comme moi : http://www.marianne2.fr/Haute-trahison_a78911.html

http://www.debout-la-republique.fr/intervention-d-Anne-Marie-Le.html

 

 

Ensuite, je n’ai jamais prédit — et encore moins voulu — une guerre civile : j’ai seulement souligné qu’un pouvoir qui impose brutalement à un peuple l’exact contraire de ce que ce même peuple vient de décider clairement par référendum, sur un point fondamental du fonctionnement de la République, ce pouvoir à tendance tyrannique, effectivement, prend le RISQUE d’une guerre civile, je dis qu’il mérite une insurrection, oui (même si celle-ci n’aura sans doute pas lieu). Résumer cette évidence en disant que je veux la guerre civile ou que je la prédis, c’est de la diffamation ; c’est rendre responsable de l’incendie celui qui appelle les pompiers. C’est ce que j’appelle, à l’écrit, une « machine à salir » (et à l’oral, un canon à m.).

 

 

Donc, en me taxant d’anti-américanisme, d’anti-élite, et d’anti-européanisme, vous fabriquez de toutes pièces un diable qui n’existe que dans vos cauchemars caricaturaux ; la réalité est plus nuancée ; toute vigilance n’est pas fatalement paranoïaque, et l’existence de quelques paranoïaques avérés ne fait pas de tous les citoyens vigilants des paranoïaques.

 

La caricature des thèses adverses n’est-elle pas un aveu d’échec à les réfuter correctement ?

 

 

_______________________________________________________________________

 

 

 

— D’une façon plus générale et plus importante, au-delà du libre débat nécessaire sur le 11 septembre, je revendique le droit POUR TOUS de dire et de faire connaître les PENSÉES DISSIDENTES en vue d’un débat éclairant — qui montrera sans doute la faiblesse ou même l’inanité d’une thèse ou d’une autre. 

 

Je ne revendique là rien d’autre que l’iségoria, ce « droit de parole pour tous, à tout propos et à tout moment » que les Athéniens tenaient pour l’institution CENTRALE d’une démocratie authentique : les vrais démocrates, par des institutions appropriées, protègent les pensées dissidentes comme un rouage décisif qui dévoile toutes les intrigues et protège la démocratie elle-même, alors que les oligarques interdisent et pourchassent les pensées dissidentes pour des raisons que chacun peut deviner.

 

À propos de liberté d’expression, le mot « négationnisme » semble être le redoutable successeur du mot « blasphème », avec la même mission de fustiger des paroles radicalement interdites ; aux antipodes, donc, de l’iségoria et de la liberté d’expression chère aux vrais libéraux. Je n’aime pas le concept même de « négationnisme » qui impose une pensée officielle, interdit le débat et laisse présager une future police de la pensée. La réflexion de Noam Chomsky sur ce point est littéralement passionnante, je trouve.

 

C’est par cette porte-là, d’ailleurs, que je me suis intéressé au cas du 11 septembre : situation révélatrice, emblématique, de la difficulté pour les pensées dissidentes à se faire simplement respecter dans nos prétendues « démocraties ».

 

Les commentaires de Paul et d’Entada (28/9, juste après minuit) et celui de Jean-Luc Guilmot (28/9, 9h4) sont vraiment très intéressants.

 

 

Je rappelle que j’attends toujours de ce blog la réponse à mes questions précises sur l’Union européenne.

 

Par exemple :

***************************************

Comment J4M et ceux qui pensent comme lui justifient-ils la CONFUSION DES POUVOIRS qui règne à l’évidence dans les institutions qu’ils défendent —aussi bien dans les institutions européennes que dans les institutions françaises ?

***************************************

 

Les libéraux qui discutent ici devraient aimer les pensées dissidentes — on a envie de dire « par principe » —, au lieu de les pourchasser. C’est à n’y rien comprendre. Sont-ils vraiment libéraux ?

 

Ont-ils lu les penseurs libéraux (les vrais, pas les anti-libéraux que sont, en fait, les « néo-libéraux »), ceux qui se méfiaient comme de la peste de l’État Léviathan et de TOUS les pouvoirs à cause de leurs ABUS inévitables (ils s’en méfiaient radicalement sans qu’on les traite pour autant de conspirationnistes, j’insiste) ? Ont-ils lu Locke, Rousseau, Montesquieu, de Staël, Constant, Alain, Orwell, Aron, Rawls, Rosanvallon, Castoriadis, qui, tous, dénoncent la confusion des pouvoirs comme source mère de la tyrannie ?

 

N’est-il plus indispensable, selon vous, de dénoncer toute confusion des pouvoirs ?!

 

Pas de réponse sur ce blog.

 

Je n’arrive pas à trouver ici d’éclaircissements sur les « PROCÉDURES LÉGISLATIVES SPÉCIALES » qui, ce me semble, permettent à des organes non élus de nous imposer sans contrôle ce que j’appelle, moi, c’est plus clair, des « lois sans parlement » :

 

À mon sens, et jusqu’à ce qu’on m’ait démontré le contraire, DANS LES INSTITUTIONS DE L’UNION EUROPÉENNE, LES MINISTRES ET PRÉSIDENTS ACCUMULENT LES POUVOIRS EXÉCUTIF  ET LÉGISLATIF SUR UNE SÉRIE DE DOMAINES CACHÉS AU PUBLIC sous le nom trompeur de « procédures législatives spéciales » (art. 289 §2 TFUE pour le principe ; les autres articles sont disséminés (cachés) dans le TFUE) et d’« actes non législatifs » (exemples : art. 24 TUE, ou art. 290 TFUE). Les ministres — agents exécutifs, en principe — se rassemblent en un « Conseil » — en oubliant curieusement de préciser que c’est un conseil de MINISTRES — et se déclarent carrément co-LÉGISLATEURS (art. 16 TUE).

 

Ces violations caractérisées du principe essentiel de la séparation des pouvoirs révèlent une dérive considérée par la Déclaration des Droits de l’Homme elle-même (art. 16 DDHC) comme la marque la plus sûre du retour à la tyrannie : des pouvoirs non séparés sont des pouvoirs à la merci des puissances privées du moment.

 

Pour des exemples sur ces discrètes « lois sans parlement », voir http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Citoyens_d_Europe_Contre_le_Regime_Illegitime_references.pdf  pages 3, 4 et 5.

 

Je sais que je me trompe peut-être par endroit, comme vous — il n’y a pas de honte à se tromper, heureusement : qui donc ne se trompe jamais ? —, c’est même pour le vérifier que je vous interpelle, mais je ne me contente pas d’une insulte pour changer d’avis : montrez-moi calmement où je me trompe et je serai heureux, sincèrement, de progresser, je ne demande que cela.

 

Enfin, pour ce qui concerne l’accusation d’anti-américanisme, on croirait à une blague : je suis marié à une américaine (dont le père, accessoirement, fut blessé à Omaha Beach) et une partie de ma famille vit en Amérique du Nord… Pas la peine d’en rajouter, vous semblez avoir « une boîte à diables » et vous y collez tous ceux qui vous contrarient. Certes, je dénonce une administration US bien précise, cupide et cynique, qui multiplie les crimes contre l’humanité, c’est pourquoi je dis et je maintiens que la vie humaine n’a clairement aucune importance pour eux, ce sont leurs actes — pas des théories — qui me le prouvent tous les jours, mais cela n’a rien à voir avec un anti-américanisme général, en tout cas si on juge mes propos de bonne foi.

 

Les généralisations de cette note sont donc trop caricaturales et donnent une mauvaise image de leur auteur. Une image fausse d’ailleurs, j’en suis sûr, car personne n'est noir ou blanc et J4M est souvent intéressant, sur d’autres sujets.

 

Ça me rappelle ce que j’écrivais aux journalistes en 2005, et qui vaut encore tout à fait aujourd’hui : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/LettreAStephanePaoliEtBernardGuetta.pdf

 

Sans rancune.

 

Étienne.

 

Pour un résumé des observations qui me conduisent à considérer l’Union européenne comme un régime profondément ILLÉGITIME, et pour une PROPOSITION de résistance, concrète et libre :

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2008/04/08/93-manifestations-obstinees

 

Pour un aperçu des pensées qui m’intéressent et un peu mieux me connaître — moi, le diable hideux que vous étiquetez « rouge/brun/vert »… et bientôt antisémite ? —, vous pouvez consulter ma page ‘En vrac’ : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/En_Vrac.pdf  et bien sûr ma revue de presse quotidienne ‘Liens et documents utiles’ depuis trois ans : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Liens_en_totalite.pdf

 

 

Je suis un admirateur d’Alain — c’était lui aussi un professeur de lycée ; "petit prof" à vos yeux ? — et je reproduis ci-dessous un ‘propos’ qui discrédite assez bien l’interdiction de douter que certains ici voudraient imposer aux simples citoyens en les traitant aimablement d’« escadrille de crétins ».

 

On pourrait intituler cette réflexion (dont l’intérêt va crescendo) :

 

« Le citoyen a le devoir de penser librement, car les droits des citoyens crédules sont comme abolis. Obéissez, mais n’obéissez pas sans contrepartie : sachez douter, refusez de croire.

N’acclamez point : les pouvoirs seront modérés si seulement vous vous privez de battre des mains. »

 

 

Discours de l'instituteur. « Mes chers enfants, puisque le pouvoir aujourd'hui nous écoute, je veux rassembler en peu de mots ce que j'ai eu occasion de vous dire concernant la politique. Le premier article, le plus ancien, le mieux connu, est qu'il faut obéir aux pouvoirs, j'entends de bonne volonté, sans restriction, et au mieux. Cela va loin. Obéir aux lois d'abord, mais encore exécuter promptement les ordres reçus. Soit dans l'inondation, soit dans l'incendie, et surtout dans l'état de guerre, il y va de la vie peut-être ; mais je ne vois point de pouvoirs possibles sans cela, ni d'action commune possible sans cela. Le serment d'obéir doit donc être souvent renouvelé dans vos cœurs. Quand il serait renouvelé publiquement chaque année, je verrais là une belle fête. À tes ordres, César. » Il est bon de dire que l'homme qui parlait ainsi avait un bras de moins, avec la renommée d'un fantassin irréprochable. Son discours ne sonnait pas creux.

 

L'homme sans peur et sans reproche avait encore quelque chose à dire. « Il faut, dit-il, une contrepartie. Ce contrat entre les citoyens et le pouvoir ne peut être ainsi fait que l'un ait tous les droits et que l'autre n'en ait aucun. Ne discutons pas sur le droit d'agir, de posséder, de louer son travail, de le refuser, même d'exprimer ce que l'on pense. Ces droits, de même que le droit d'élire, de critiquer, de contrôler, sont réglés par des lois qui sont mieux que passables. Mais je laisse ce détail pour en venir à l'essentiel qui est le devoir de penser librement. Dès que le citoyen est crédule, tous les droits sont comme abolis. Il ne faut point croire. Cela est très pénible de ne point croire ce que dit un homme éloquent et qui occupe la plus haute place. Mais comprenez aussi qu'un tel homme plaide toujours pour lui-même, qu'il est juge et partie, qu'il est entouré de flatteurs, qu'enfin il exerce le pouvoir, chose enivrante, aveuglante. Il sera trompé, il se trompera lui-même. L'histoire des peuples, comme je vous l'ai montré, est l'histoire des erreurs où tombe naturellement tout pouvoir qui gouverne aussi les pensées. Donc examinez, instruisez-vous, écoutez les uns et les autres. Dans les cas difficiles, sachez douter. L'opinion règne toujours ; elle se fait sentir par le vote, mais bien avant le vote. Chacun de vous est partie de l'opinion et modérateur du pouvoir. Le muet refus de croire y suffit.

 

« Encore un mot là-dessus, mes amis. N'acclamez point. L'acclamation vous revient et vous prend au cœur. L'acclamation a fait tous les maux de tous les peuples. Le citoyen se trouve porté au delà de son propre jugement, le pouvoir acclamé se croit aimé et infaillible, toute liberté est perdue. Le lourd devoir d'obéir n'est plus limité ni tempéré par rien. Je décris ici des mœurs nouvelles; je vous trace un pénible devoir. Mais, mes amis, si l'on veut être libre, il faut le vouloir. Et n'oubliez jamais que les pouvoirs seront modérés, prudents, circonspects, préservés à jamais de l'infatuation, raisonnables enfin, et ménagers de vos biens et de vos vies, si seulement vous vous privez de battre des mains. »

 

Le plaisant est que le pouvoir le plus ombrageux ne peut rien trouver à reprendre dans ce discours ; mais il bouillonne à l'entendre ; il voudrait appeler ses gardes ; il espère, il appelle de tout son cœur la désobéissance, cette autre garde des rois.

 

Alain, 8 décembre 1923.

 

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Source : Alain, « Éléments d'une doctrine radicale », propos choisis de 1906 à 1924,  http://classiques.uqac.ca/classiques/Alain/elements_doctrine_radicale/elements_doctrine.html

 

 


 

Alain contre la proportionnelle, scrutin injuste qui abandonne le pouvoir aux partis
(20 septembre 2008)
(Lien)

 

Pendant que je vis, chaque jour je lis Alain et c’est pour moi une source claire d’intelligence pure ; à lire cet homme, comme à lire son extraordinaire élève Simone Weil, j’ai l’impression de grandir.

 

Je vous propose ici quatre ‘Propos’ sur le mode de scrutin, —tout à rebours de l’air du temps qui réclame aujourd’hui la proportionnelle comme un retour à la justice élémentaire—, où Alain souligne que la proportionnelle abandonne les citoyens aux luttes intestines des partis.

 

Chaque mot compte dans les Propos d’Alain, tout y est à la fois léger et dense, plaisant et puissant, sujet à réflexion.

 

Alain tenait à choisir un homme plutôt qu’un programme ; un homme vertueux (travailleur et honnête), un homme lui-même contrôlé par ceux qu’il représente.

 

(Les titres sont de moi.)

 

 

Entre le plébiscite et le référendum, une voie moyenne :
des députés indépendants des partis et le contrôle permanent des pouvoirs.

 

 

Le plébiscite consiste à demander au peuple : « Quels maîtres voulez-vous ? Voici un exposé de leurs principes, quant à la police, quant à la guerre, quant à la consommation, quant à la production ; réfléchissez et choisissez. Après cela, vous donnerez un long crédit aux maîtres que vous aurez choisis ; ils pourront légiférer et gouverner en regardant au loin, comme de bons pilotes, au lieu d'être arrêtés à chaque instant par les réclamations des uns et des autres. » Ainsi vivent tous les pouvoirs monarchiques ou oligarchiques ; car tous les citoyens ne sont pas malheureux en même temps, et les abus de pouvoir, si l'on n'y remédie sur l'heure, sont bientôt oubliés ; par-dessus tout le citoyen hésite devant une révolution qui est, dans un tel système, son unique ressource. Ajoutons que ce pouvoir fort a bientôt fait de rafraîchir les têtes chaudes et de bâillonner ceux qui parlent trop ; l'oubli vient ainsi avant que la réflexion s'éveille. Aussi la tyrannie, avec un peu d'adresse et de bonheur, peut durer longtemps.

 

 

Le référendum est un système tout à fait opposé à celui-là, car les pouvoirs ne font alors qu'appliquer les lois; ils ne sont que magistrats. Rien ne peut être changé dans les droits et les devoirs sans que le peuple soit consulté. Par exemple la solution du conflit entre la Marne et l'Aube serait demandée au suffrage universel ; la formule des assurances ouvrières et paysannes, de même ; le plan de notre action au Maroc, de même. Et l'on saisit sans peine pourquoi ce système est impraticable. Chaque citoyen devrait passer son temps à lire, à calculer, à discuter ; ou bien alors il devrait juger d'après l'expérience, je dis son expérience à lui ; mais les répercussions d'une loi sur les fraudes ne se font sentir à tous les citoyens qu'après un long temps ; et elles sont perdues presque toujours dans la masse des faits. Pour le problème marocain, c'est encore plus évident.

 

Ajoutons que le contrôle des gouvernants par les gouvernés, qui est ce à quoi le peuple tient le plus, et ce qu'il réclamerait certainement par voie de référendum, ne peut s'exercer par le référendum même. [Ah bon ? ÉC] Entre plébiscite et référendum, il faut donc choisir quelque système intermédiaire ; et l'on est ramené au parlementarisme, dans lequel les représentants du peuple exercent un contrôle sans limite sur les actes du pouvoir, et aussi prononcent sur les réformes, en tenant compte à la fois de leurs connaissances propres et de l'opinion de ceux qu'ils représentent. Par ce mécanisme, qui suppose une familiarité et des échanges continuels d'idées entre les électeurs et l'élu, le peuple ne choisit pas ses maîtres ; il fait bien mieux, il règle, il modère, il redresse l'action des maîtres qu'il a, quels qu'ils soient.

 

C'est pourquoi le caractère du député, ses habitudes de travail, sa clairvoyance, son indépendance sont le principal, une fois que le principe de la souveraineté du peuple est posé et maintenu. S'il s'agit de mettre au jour quelque friponnerie d'administration, un modéré, s'il n'est ni ignorant, ni faible, ni dépendant, vaut assurément mieux qu'un paresseux, un craintif, un sceptique, un prodigue, un brouillon qui aurait l'étiquette radicale. Et si, dans ma circonscription, mon candidat n'étant pas élu, l'élu est un homme intègre et qui travaille, je suis représenté tout de même ; car si je connais un abus de pouvoir ou quelque gaspillage dans l'administration, je saurai à qui m'adresser. Voilà pourquoi je veux que l'on considère plutôt le caractère d'un homme, sa probité et sa puissance de travail, que le parti organisé dont il aura reçu l'investiture.

 

30 juin 1911.

 

 

Mon commentaire :

 

Et comment contrôle-t-on les contrôleurs ? Qui juge et punit les parlementaires eux-mêmes ? Si ces contrôleurs écrivent eux-mêmes leur code de conduite —la Constitution—, nous sommes perdus.

 

Par ailleurs, je ne partage pas cette conviction d’Alain que le peuple ne peut pas contrôler ses élus par référendum. L’instruction et les moyens de communication ont beaucoup progressé et ce qui était impensable hier semble devenu possible et même souhaitable aujourd’hui. Cependant, les termes de l’alternative posés par Alain restent d’une pertinence lumineuse. J’aime lire cet homme.

 

 

Contre la proportionnelle, scrutin injuste.

 

Quand ils ont dit que la Proportionnelle est juste, ils croient avoir tout dit. Et je vois bien une espèce de justice au premier moment, c'est-à-dire quand on nomme les députés ; mais encore faudrait-il y regarder de près. Si l'électeur est moins libre et moins éclairé dans son choix, est-ce juste ? Si les comités départementaux ont tout pouvoir pour imposer tel candidat et surtout pour en éliminer un autre, est-ce juste ? Si un homme droit et sûr prête son appui, par nécessité, à des ambitieux aussi riches d'appétits que de talents, mais de pauvre caractère, est-ce juste ? Si un ferme et libre esprit ne peut être élu qu'en traitant avec un parti, est-ce juste ? Si les partis ainsi organisés ont presque tout pouvoir pour échapper à la pression des électeurs, et tromper leurs espérances, est-ce juste ? Si l'élite, déjà si puissante, se trouve fortifiée encore par ce nouveau système électoral, est-ce juste ? Si l'influence des politiciens sur les vrais amis du peuple, déjà trop forte, s'exerce alors irrésistiblement, par les délibérations et les votes à l'intérieur du parti, est-ce juste ? Et enfin, si l'écrasement des minorités est injuste dans la circonscription, par quel miracle devient-il juste au parlement ? Car il faut bien que l'on décide enfin, et que la majorité l'emporte. En somme, quand vous dites que la Proportionnelle c'est la justice, j'ouvre bien les yeux, car j'aime la justice, mais je ne comprends rien, je ne perçois rien de ce que vous annoncez.

 

 

En revanche, il y a quelque chose que je comprends très bien et que je perçois très bien, c'est que les opinions pour et contre la Proportionnelle correspondent à des opinions très bien définies concernant l'avenir de la République. Car les uns, qui sont l'élite, et que je reconnaîtrais presque au port de la tête, craignent par-dessus tout ce qu'ils appellent la démagogie et les intérêts de clocher. Ils veulent qu'en toute chose, armée, impôts, travaux publics, ce soient les compétences qui décident ; ils veulent que la grande politique, qu'ils appellent nationale, échappe tout à fait au contrôle des petites gens, pour qui vivre de leur travail et s'assurer contre les risques est la grande affaire. Enfin ils se défient de l'électeur. C'est contre l'électeur qu'ils ont inventé la Proportionnelle, et l'invention est bonne.

 

 

Les autres savent trop, par trop d'expériences, ce que devient la volonté populaire lorsqu'elle se heurte à l'action continue des grands Ambassadeurs, des grands Banquiers et des grands Bureaucrates. Ils savent trop comment les députés cherchent trop souvent autour d'eux, dans ce milieu parlementaire qui a ses préjugés propres, un appui contre l'électeur, et de beaux prétextes pour oublier leurs promesses. Ils savent que les grands intrigants sont déjà assez forts, et disposent déjà trop des réputations et des influences ; que l'air parisien est déjà assez mauvais et dangereux pour les provinciaux même les plus rustiques ; et qu'enfin le scrutin d'arrondissement est la meilleure arme de la province contre l'élite parisienne. Prise ainsi, la question est assez claire, il me semble. Et c'est parce que ces raisons commencent à se dessiner dans le brouillard, que cet accord apparent de la plupart des députés recouvre en réalité des divisions profondes et une résistance formidable.

 

14 juillet 1914.

 

Mon commentaire : D’accord, MAIS, même avec le scrutin d’arrondissement, les élections législatives restent une révoltante escroquerie. La raison en est que tout scrutin, s’il est dévoyé par les intrigues partisanes, devient un scrutin détestable malgré toutes ses belles promesses. Je continue à chercher, chez ce penseur exceptionnel qu’est Alain, des traces de mon idée centrale —« ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir. »

 


Dans la même veine, il y a cet autre propos, excellent lui aussi :

 

 

Un bon scrutin permet de contrôler, de blâmer et de détrôner tous les pouvoirs.
Le scrutin proportionnel, lui, offre un droit fictif et ne permet pas davantage que de choisir un tyran parmi plusieurs tyrans.

 

Je vois que la Ligue des Droits de l'Homme, dans son bulletin, recommande des cartes postales « proportionnalistes ». Il est remarquable que tant de Républicains éclairés se soient laissés prendre par les mots. Pour la Justice, pour le droit de l'électeur, ce beau programme devait plaire à la Ligue. Un homme raisonnable me disait encore il n'y a pas longtemps : « Je suis Proportionnaliste tout simplement parce que je veux conquérir mon droit d'électeur. Je suis républicain, et assez décidé ; j'appartiens à une circonscription où le royaliste est élu tous les quatre ans, sans lutte possible. Que je vote ou que je ne vote pas, le résultat est, le même ; je demande seulement que mon suffrage ne soit pas perdu ». Raison de belle apparence, mais qui ne me frappe point.

 

 

Voter, ce n'est pas précisément un des droits de l'Homme ; on vivrait très bien sans voter, si l'on avait la sûreté, l'égalité, la liberté. Le vote n'est qu'un moyen de conserver tous ces biens. L'expérience a fait voir cent fois qu'une élite gouvernante, qu'elle gouverne d'après l'hérédité, ou par la science acquise, arrive très vite à priver les citoyens de toute liberté, si le peuple n'exerce pas un pouvoir de contrôle, de blâme et enfin de renvoi. Quand je vote, je n'exerce pas un droit, je défends tous mes droits. Il ne s'agit donc pas de savoir si mon vote est perdu ou non, mais bien de savoir si le résultat cherché est atteint, c'est-à-dire si les pouvoirs sont contrôlés, blâmés et enfin détrônés dès qu'ils méconnaissent les droits des citoyens.

 

 

On conçoit très bien un système politique, par exemple le plébiscite, où chaque citoyen votera une fois librement, sans que ses droits soient pour cela bien gardés. Aussi je ne tiens pas tant à choisir effectivement, et pour ma part, tel ou tel maître, qu'à être assuré que le maître n'est pas le maître, mais seulement le serviteur du peuple. C'est dire que je ne changerai pas mes droits réels pour un droit fictif.

 

Or la Proportionnelle m'offre un droit fictif, qui est de choisir pour mon compte, entre trois ou quatre Partis, quel sera le Parti-Tyran. Mais que ce soit selon mon choix ou selon un autre, le Parti-Tyran sera toujours tyran, et mes droits seront toujours diminués. Dès que le député dépend plus d'un journal ou d'un comité, et moins de l'électeur, la liberté est menacée. Je dis la liberté de tous. Car si je suis radical, et si les radicaux sont les maîtres, j'aurai bien quelques faveurs si je les demande ; mais je n'appelle point cela liberté. Ce que j'appelle liberté, c'est la dépendance étroite de l'élu par rapport à l'électeur. C'est d'après cela seulement que je juge un système électoral. En termes bien clairs, il s'agit pour moi d'empêcher que les riches ajoutent le pouvoir politique au pouvoir économique qu'ils ont déjà. Or, avec les Partis et la Haute Politique, je suis assuré que les riches gouverneront. Tandis qu'avec notre système, et les perfectionnements qu'il peut aisément recevoir, comme limitation des dépenses électorales et secret du vote, nous arriverons à tenir en bride les Grands Politiques, et les Hommes d'État impatients qui ne parlent que de restaurer l'autorité. Merci du cadeau. Le meilleur des rois ne vaut rien.

 

6 décembre 1912.

 

Source de ces trois premiers 'propos' : « éléments d’une doctrine radicale »


 

 

Nécessaire indépendance des députés à l’égard des partis.
Tout contribue à jeter le chef dans de folles entreprises.
L’élection ne vaut pas contrôle.

 

Autant qu’un député juge à la manière d’un arbitre, et sans considérer un parti ou l’autre, le peuple est libre, aussi libre que la condition humaine le permet. Ce qui aura semblé nécessaire, utile, ou permis, au plus grand nombre de ces arbitres sera tenu pour tel, et très raisonnablement. Il n’en sera plus de même si le député considère les partis. Car, si l’accusé, ici le ministre, est un des chefs de son propre parti, il le soutiendra peut-être sans trop examiner, en vue de se rapprocher de la tête. Si l’accusé est soutenu par l’autre parti, encore bien mieux notre homme imaginera quelque ministère pour lui-même ou pour ses amis. Dans tous les cas il combattra comme soldat d’une armée ; il combattra au lieu de juger. C’est ce qu’on voit toujours à quelque degré, car rien n’est parfait ; mais le degré est ce qui importe. Supposez qu’un puissant parti occupe le pouvoir, et paraisse en mesure de punir les indisciplinés et les traîtres par une exclusion efficace, tout contrôle est rendu impossible et la liberté est perdue.

 

Les choses ne seront jamais tout à fait ainsi, parce que nul système électoral ne détournera tout à fait le peuple de disloquer les partis et de choisir des hommes. Mais il faut convenir que le système des listes, qui vise toujours à écarter les isolés, nuit au contrôle et donne plus de liberté aux pouvoirs quels qu’ils soient. Vouloir que le chef aime le scrutin d’arrondissement, c’est trop demander. Les hommes font voir ici une clairvoyance admirable. Observez les opinions, et vous remarquerez qu’elles dépendent des fonctions. Tout homme qui détient une parcelle des pouvoirs, quand ce ne serait qu’un chef de bureau, est pour le scrutin de liste et contre le scrutin d’arrondissement. Aux yeux de celui qui n’est point du tout chef, la proportionnelle est suspecte en ceci qu’elle suppose des listes et des partis. Par la même raison tous les tyrans, grands et petits, tiennent pour la représentation proportionnelle. Les socialistes ne sont pas loin de le comprendre, mais seulement par les effets, et non point par les causes ; sans compter qu’ils sont aisément un peu tyrans, et de bonne foi. « Si j’étais roi », telle est leur chanson.

 

 

Si tu étais roi sans contrôle, tu serais un mauvais roi. Il n’est point de sagesse qui ne s’use à exercer le pouvoir. L’importance, une pointe toujours d’entêtement, les difficultés réelles, l’excès même du travail et le poids de mille affaires, enfin la mécanique du pouvoir, qui est l’administration, tout contribue à jeter le chef en de folles entreprises. Je le suppose honnête, attaché au bien public, amoureux de la vraie gloire ; cela ne changera rien. Et pareillement je suppose que ceux qui l’ont choisi soient réellement le plus grand nombre, cela ne changera rien si ceux qui l’ont choisi n’ont pas le pouvoir de le modérer. Que les femmes votent, cela ne changera rien. Mais au contraire, soit que les hommes votent seuls, soit que les femmes s’y joignent, et que les chefs de famille aient plusieurs voix ou non, pourvu que le député soit tenu par les électeurs et non par les partis, le pouvoir sera tenu de dire ses secrets, d’exposer ses projets, d’étaler ses comptes ; et tout ira passablement.

 

12 janvier 1924.

 

Source de ce dernier 'propos' : « Alain, Propos sur les pouvoirs », propos choisis et classés par Francis Kaplan, Folio Essais n°1, 1985, p. 232.

 

 

 

Voyez aussi ALINALIA, le site des amis d'Alain : http://alinalia.free.fr.

 

 

 

Vous pouvez réagir sur ce billet du blog :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2008/09/20/95-alain-contre-la-proportionnelle-scrutin-injuste-qui-abandonne-le-pouvoir-aux-partis  

 


 

L’affaire DANON, révélatrice de l’escroquerie antidémocratique qu’est l’Union européenne, conçue par et pour les industriels et les banquiers, contre les citoyens, contrairement aux apparences trompeuses (12 mai 2008) (Lien)

 

J’ai rencontré Jacques Danon deux fois, et la position de l’UE sur son combat contre les multinationales de l’assurance (c’est vraiment David & Goliath) est à la fois révoltante et emblématique ; nous devrions tous être interpellés par le sort que lui réservent les institutions de l’Union européenne, cela n’arrive pas qu’aux autres. Sa solitude pourrait bien être prochainement la nôtre.  Voyez son blog, il est bien fait.

 

Voici un mail récent que m’a envoyé une des personnes qui se battent à ses côtés, qui insiste sur quelques points particulièrement choquants de l’affaire DANON :

 

 

Bonsoir Étienne

 

J’ai écouté très attentivement hier soir l’une de vos interviews datée du mois de janvier dernier qui se trouve sur votre blog. Vous dites, avec raison, que l’Europe n’est plus une démocratie, que les puissances financières font la loi, que le droit n’existe plus

 

L’affaire emblématique de Jacques illustre tellement bien ce que vous dites : les puissances financières qui dictent leurs lois, le droit qui n’est soumis qu’à leur arbitraire.

 

Vous avez dit que l’Europe est une fausse démocratie imposée en douce pour le compte d’une oligarchie et que les institutions de l’Union européenne ont été voulues par les banquiers.

 

Par rapport à vos considérants sur le comportement antidémocratique de l’UE, l’affaire de Jacques offre une opportunité unique d’expliquer et de démontrer de façon vivante et concrète comment les institutions européennes fonctionnent et que l’image de protection et de démocratie n’est qu’une façade et qu’ils sont complètement déconnectés de leurs citoyens.

 

La pièce maîtresse :

 

Sur ce blog, je me permets d’attirer votre attention toute particulière sur un document incroyable (Novas) (annexe 1, en attache) qui démontre que l’oligarchie financière s’approprie en toute impunité la puissance publique de l’Europe en se prévalant des Commissaire européens, de la Commission européenne, du Parlement européen et de son Président et des députés européens contre une victime européenne devant la justice suisse, justice qui accepte ces écritures, se transformant ainsi en tribune des institutions de l’UE contre des citoyens de l’UE ! ! ! ! ! !

 

La même philosophie est renouvelée par la suite dans la presse suisse transformant les Danon, en ennemis des relations bilatérales entre la Suisse et l’UE (comme amplement démontré sur le site de la Ligue des Droits de l’Homme belge).

 

L’appel au secours à l’Europe passe par le seul moyen qu’a le citoyen, à savoir le droit de pétition.

 

Les Danon demandent secours et protection auprès des Institutions européennes qui leur doivent protection.

 

Comment est traitée au Parlement européen
une pétition qui dérange l’oligarchie financière :

 

Le 14 février 2006, la pétition déposée le 22 septembre 2005 est déclarée recevable par la commission des pétitions du Parlement européen. (annexe 2, en attache).

 

Cette pétition met en avant que pour avoir eu le courage de faire valoir leurs droits pendant près d’un quart de siècle, les Danon, ont été ‘‘punis’’ et leur affaire transformée en une affaire d’Etat en utilisant, en toute impunité, les institutions de l’UE contre eux, mais bien pire encore, ils ont vu disparaître illégalement, arbitrairement et à leur insu leur outil de travail de 25 ans et détruits, leurs intérêts économiques vitaux et leur réputation équivalant à une mort économique et sociale. Leurs avocats belges ont souligné ‘‘le fascisme économique’’ dont ils font l’objet. Un éminent Professeur de droit bancaire suisse a conclu dans un avis de droit ‘‘boycott’’.

 

(Comme vous le dites si bien Étienne, l’Europe ne connaît plus le droit.)

 

Au mois de juin 2006, lors d’une audition au Parlement européen, le comité des pétitions décide de convoquer la Winterthur devenue AXA Winterthur, ainsi que la Suisse à l’audition du mois d’octobre 2006.

 

Au mois d’août 2006, AXA Winterthur essaye, par le biais de la justice belge d’obliger les Danon à retirer leur pétition.

 

Le 4 octobre 2006, la pétition (soutenue par la Ligue belge des droits de Homme) qui mettait en évidence les violations au droit international public, aux droits fondamentaux, aux traités internationaux, et qui demandait la protection des Danon de la part de l’UE, est clôturée à l’unanimité, en violant à l’unanimité le droit d’être entendu sur leurs moyens de défense présentés par les avocats belges

 

Par le suite, soutenus par des députés européens, par la Présidente de la Sous commission des droits de l’Homme du Parlement européen, ainsi que par la Ligue belge des droits de l’Homme, les Danon demandent, comme ils en ont le droit, la réouverture de cette pétition. Celle-ci leur est refusée.

 

Le 31 janvier 2007, la Présidente de la Sous Commission des droits de l’Homme du Parlement européen donne une conférence de presse sous le titre :

Affaire Danon: Violations des droits fondamentaux et atteinte aux accords bilatéraux UE-Suisse

Voir document en annexe 3 en attache.

 

Le service de presse des Verts du Parlement européen lance des centaines d’invitations à toute la presse européenne écrite et parlée. Seuls les journalistes de la presse suisse, plutôt agressifs, se présentent, ainsi que AXA Winterthur accompagnés d’un huissier…. ! ! ! ! !

 

Finalement les Institutions européennes se sont
pliées aux desiderata de l’oligarchie financière
au détriment de victimes européennes.

 

C’est là où cette histoire des Danon, qui concerne aussi tous les citoyens de l’UE, démontre avec force le bien-fondé de votre analyse de l’Europe que j’ai pu entendre dans votre interview.

 

Merci pour votre attention, je vous appelle tout prochainement,

 

Courtoises salutations,

 

MP

 

 

Il me semble que nous devrions nous montrer solidaires des Danon.

Ce cas est exemplaire.

 


 

Message collectif (email) : organisons partout des micro-résistances, avec des MOCRIEs, Manifestations Obstinées Contre le Régime Illégitime Européen,
à date et heure fixes dans toute l’Europe 
(13 avril 2008) (Lien)

 

Trets, le 13 avril 2008, à 01:34.

 

Chers amis,

 

Contre les abus de pouvoirs caractérisés que sont, à mon avis, tous les "traités constitutionnels", je voudrais vous décrire une nouvelle idée pour résister au sabordage de la démocratie par nos propres "représentants" : organiser partout une multitude de micro résistances contre la source même de nos impuissances politiques :

 

1) Relier les signes alarmants de l’actualité à l’impuissance politique des citoyens verrouillée par les institutions ;

 

2) Concentrer nos protestations sur l’honnêteté du processus constituant ;

 

3) Multiplier les micro résistances à travers des manifestations hebdomadaires obstinées, le même jour à la même heure, partout en Europe.

 

 

 

1) Les indicateurs alarmants sont nombreux qui devraient nous inciter à contrôler tous les pouvoirs à tout moment :

 

Parmi les indicateurs alarmants, on peut citer le crash financier majeur imminent, la dérive policière des "démocraties" prétendument "libérales" dans lesquelles même la torture — pratiquée sur des citoyens incarcérés sans procès et sans défense — est autorisée et même encouragée au prétexte de "lutte contre le terrorisme", l’usage massif d’armes nucléaires (des milliers de tonnes de munitions à l’uranium) dans des pays écrasés par des guerres contre d’insaisissables "terroristes", guerres déclenchées sans que les peuples puissent l’interdire, la prolifération exponentielle des OGM sans moyen de résister, le sabordage des services publics au prétexte d’une dette fabriquée de toutes pièces par l’abandon de la création monétaire aux banques privées, dette publique qui rend les prêteurs privés maîtres des principales décisions publiques, l’abandon des peuples par leurs propres représentants — politiciens de métiers qui doivent trop leur pouvoir aux puissances financières —, les mécanismes de dérégulation à cliquet (à petits pas irréversibles) qui dépouillent progressivement les États de leur droit d’interdire le plus élémentaire (liberté de mouvement des capitaux imposée par traité, AGCS négocié en secret, etc.), jusqu’aux constitutions ! écrites désormais directement par les présidents et leurs ministres et imposées sans référendum !

 

La coupe est pleine et ça urge ! Il est temps que les citoyens reprennent le contrôle de leurs représentants.

 

Pourtant, les militants de tous bords semblent mener leurs luttes sociales sans se préoccuper du tout de la Constitution : ils luttent vaillamment sans prêter attention aux fers que nous portons tous aux mains et aux pieds et qui nous contraignent au plus haut niveau du droit.

 

Il me semble que toutes nos luttes sociales sont vouées à rester de simples gesticulations sans effets durables tant que des verrous institutionnels privent les citoyens du contrôle des pouvoirs institués.

 

L’apparente indifférence des militants sur ce point décisif m’étonne d’autant plus que ces verrous, déjà redoutables dans les droits nationaux, sont terriblement renforcés, pérennisés, par les institutions européennes.

 

Ainsi, nous avons urgemment besoin du référendum d’initiative citoyenne (RIC) que nous garantiraient assurément d’honnêtes institutions. Et ce droit élémentaire, les politiciens de métier ne nous le donneront jamais, pour la raison simple que ce droit citoyen irait directement contre leur intérêt personnel en les privant d’une partie de leur pouvoir. C’est pourquoi je dis haut et fort que ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir ; ce n’est ni aux parlementaires ni aux ministres ni aux juges d’écrire ou de réviser la Constitution.

 

 

 

D’où cette idée, qui me semble doublement originale :

 

 

2) Nous devrions nous concentrer sur l’essentiel : l’honnêteté du processus constituant :

 

Il faudrait prioritairement protester contre l’essentiel et, comme je viens de le suggérer, il me semble que la source majeure de nos impuissances est l’illégitimité fondamentale des pouvoirs de l’Union européenne, conçue et imposée par des exécutifs qui sont évidemment juges et partie dans un processus constituant : ils s’écrivent des règles pour eux-mêmes et ça se voit partout.

 

Cette partialité au plus haut niveau du droit est extrêmement dangereuse pour les libertés et on peut le constater concrètement : ce qui est programmé grâce à l’UE, c’est l’impuissance politique des citoyens face au chômage, aux bas salaires, à la violence économique et bientôt à la guerre, et l’absence de contrôle public des pouvoirs dans les domaines qui comptent le plus pour les industriels et les banquiers : marché intérieur, concurrence, liberté de mouvement des capitaux, droit fiscal et droit social, notamment.

 

Alors qu’une Assemblée constituante désintéressée programmerait sans doute un véritable référendum d’initiative citoyenne (RIC), rouage central du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, qui nous permettrait enfin, par exemple, d’interdire nous-mêmes, rapidement et sans difficulté, à la fois les paradis fiscaux, les OGM en plein champ, les armes à l’uranium "appauvri", la privatisation des services publics, le cumul des mandats, la libre circulation des capitaux, l’abandon de la création monétaire aux banques privées, et bien d’autres fléaux dont, manifestement, les politiciens de métier s’accommodent fort bien malgré les souffrances des citoyens.

 

La première originalité de l’idée que je vous propose serait donc de se concentrer très prioritairement sur la source même de nos problèmes, c’est-à-dire le processus constituant : il s’agirait de lutter contre le régime illégitime européen.

 

 

3) Une autre originalité consiste à multiplier les micro-résistances et à protester toutes les semaines, le même jour et à la même heure, partout en Europe, par petits groupes au début mais tout le temps et partout :

 

Ensuite, deuxième originalité, plutôt que de faire une grande manif une fois tous les six mois ou tous les ans, et puis plus rien jusqu’à la prochaine, avec une frustration générale de ne rien pouvoir faire au quotidien, je propose de nous inspirer de l’exemple des Allemands de l’est et de leur idée, qui a très bien marché en 1989 (avec la chute du mur de Berlin), et qui s’appelait « les manifestations du lundi » :

 

Nous organiserions, modestement mais vaillamment, plein de petites manifestations, un peu partout, dans tous les quartiers et villages d’Europe, le même jour à la même heure, toutes les semaines : je propose le mercredi à 18 ou 19 h, mais il faut en parler entre nous, on fait ce qu’on veut :o)

 

Ce serait un rendez-vous régulier, facile à mémoriser et à rejoindre par les nouveaux mécontents ou les nouveaux courageux, à fréquenter sans peine puisque tout près de chez nous, et permettant d’être nombreux même en n’étant que 5 ou 10 personnes au même endroit puisque réunis un peu partout en Europe au même moment, avec un site central et un forum par manif pour faire connaître les initiatives et les infos utiles.

 

Ce serait surtout le spectacle permanent d’un mécontentent général et persistant, mécontentement opiniâtre et obstiné, pas résigné du tout, prêt à se cristalliser bientôt.

 

Ce serait des Manifestations Obstinées Contre Le Régime Illégitime Européen (MOCRIE), régime imposé aux peuples européens par voie de traités, sans Assemblée constituante ni Référendum.

 

 

Nota : pour permettre la cohabitation pacifique de tous les résistants, je recommande de s’interdire tout étendard ou drapeau partisan dans ces MOCRIEs : à l’évidence, le clivage « gauche droite » nous divise et nous affaiblit. Ce mouvement citoyen devrait se concentrer sur l’essentiel : rendre le contrôle des pouvoirs publics aux personnes physiques.

 

Il semble que des initiatives soient en train de naître dans le même esprit un peu partout en Europe.

 

Il y en a déjà cinq qui sont apparues en France en quelques heures (voir le blog) : ainsi, tous les mercredis à 18h, à partir du 16 avril, il y aura une petite MOCRIE à Trets, sur la place de la Mairie, une autre MOCRIE à Lyon, place de la République, une troisième MOCRIE à Montpellier, une autre MOCRIE à Rennes, place de la Mairie, et encore une à Nantes (44000) devant le château de la Duchesse Anne…

 

 

Vous aussi, n’hésitez pas à créer votre propre petite MOCRIE,
tout près de chez vous, simplement.

Puis, venez nous en avertir ici :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2008/04/08/93-manifestations-obstinees

 

Si l’idée vous plaît, j’ai besoin de vous, évidemment, pour la faire connaître entre simples citoyens et pour organiser les outils qui nous permettront de communiquer entre nous. Je vais créer un site qui centralise les infos et qui offre notamment un forum par MOCRIE, de façon à permettre aux participants de communiquer.

 

On verra si cette graine d’idée est assez simple et assez forte pour survivre dans la tourmente que vit en ce moment l’idéal démocratique.

 

Amicalement.

 

Étienne.

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/

 

 


 


Citoyens d’Europe Contre le Régime Illégitime : CECRI

Organisons des microrésistances au traité de Lisbonne,
et plus généralement à tous les « traités constitutionnels ».
Proposition pour une multitude de 
Manifestations Obstinées Contre le Régime Illégitime Européen
(MOCRIE)
 
à date et heure fixes dans toute l’Europe :


http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2008/04/07/93-pour-des-manifestations-populaires-obstinees-mpo


(Source : http://www.citizens-initiative.eu/)

 

 

Voici quelques articles sur l’expérience des Allemands de l’est :

 

« Allemagne : le retour des manifestations du lundi »

http://www.hns-info.net/article.php3?id_article=4340

 

« La contestation sociale s’amplifie »

http://www.rfi.fr/actufr/articles/056/article_29909.asp

 

« L’impact des manifestations du lundi »

http://www.humanite.fr/2004-09-20_International_L-impact-des-manifestations-du-lundi

 

« Contre les patrons voyous !

Appel pour les manifestations du lundi »

par Jean Dornac :

http://wb.attac.be/Contre-les-patrons-voyous.html

 

« Allemagne : les jeunes larouchistes relancent les manifestations du lundi ! »

http://solidariteetprogres.online.fr/Campagnes/Saxe.html

 

« Mouvements populaires en RDA »
Les manifestations du lundi replacées dans leur contexte sur wikipédia :

http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9unification_allemande#Mouvements_populaires_en_RDA

 

« Le pasteur qui a fait tomber le mur de Berlin se retire »

de Pierre Bocev, dans Le Figaro.fr :

http://www.lefigaro.fr/international/2008/03/29/01003-20080329ARTFIG00210-le-pasteur-qui-a-fait-tomber-le-mur-de-berlin-se-retire-.php

 

 

 


De mon côté, je propose ma première MOCRIE :
à TRETS (France 13530), le mercredi 16 avril 2008, à 18 h,

sur la place de la Mairie.


Je vais préparer une banderole, avec d’un côté
« CECRI : Citoyens Européens Contre le Régime Illégitime,
contre des pouvoirs imposés par voie de traités et sans référendum »

et de l’autre : 
« MOCRIE : Manifestations Obstinées Contre le Régime Illégitime Européen
 toutes les semaines, le même jour à la même heure, partout en Europe »

 


 

Organisation de la résistance au traité de Lisbonne,
et plus généralement à tous les « traités constitutionnels » :

proposition pour des Manifestations Populaire Obstinées (MPO)
à date et heure fixes dans toute l’Europe
(mardi 8 avril 2008) (Lien)

 

Les représentants politiques des différents pays européens, tout en affirmant leur amour de la démocratie, ont engagé depuis cinquante ans un processus constituant sans les peuples qu’ils sont pourtant censés représenter, et même parfois carrément contre eux, comme en France et aux Pays-Bas où les élus imposent par voie parlementaire ce que leur peuple vient de refuser expressément par référendum.

Les reproches majeurs que nous faisons aux institutions européennes (voir encadré page suivante), et notamment celui de verrouiller partout l’impuissance politique des citoyens, ne sont nullement pris en compte par les élites politiques, médiatiques et économiques : la démocratie imposée par nos élus est de plus en plus clairement factice.

Pourtant, les indicateurs alarmants sont nombreux qui devraient nous inciter à contrôler tous les pouvoirs à tout moment : le crash financier majeur imminent, la dérive policière des "démocraties" prétendument "libérales" où même la torture — pratiquée sur des citoyens incarcérés sans procès et sans défense — est autorisée et même encouragée au prétexte de "lutte contre le terrorisme", l’usage massif d’armes nucléaires (des milliers de tonnes de munitions à l’uranium) dans des pays écrasés par des guerres contre d’insaisissables "terroristes", guerres déclenchées sans que les peuples puissent l’interdire, la prolifération exponentielle des OGM sans moyen de résister, le sabordage des services publics au prétexte d’une dette fabriquée de toutes pièces par l’abandon de la création monétaire, dette publique qui rend les prêteurs privés maîtres des principales décisions publiques, l’abandon des peuples par leurs propres représentants — politiciens de métiers qui doivent trop leur pouvoir aux puissances financières —, jusqu’aux constitutions écrites désormais directement par les présidents et leurs ministres et imposées sans référendum ! La coupe est pleine et ça urge ! Il est temps que les citoyens reprennent le contrôle de leurs représentants.

Nous, citoyens européens de toutes tendances, attachés au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, contestons solennellement le droit des responsables politiques à redéfinir eux-mêmes leurs propres pouvoirs sans consulter directement les peuples concernés. Les élus ne sont pas propriétaires de la souveraineté populaire ; ils n’ont pas de légitimité à modifier eux-mêmes les institutions.

L’expression "traité constitutionnel" est un aveu d’abus de pouvoir : on n’écrit pas les constitutions par voie de traité. Ce n’est pas aux ministres, ni aux parlementaires ni aux juges d’écrire ou de modifier les institutions européennes : seuls les peuples eux-mêmes, — sur proposition d’une Assemblée constituante désintéressée, c’est-à-dire dont les membres n’écrivent pas des règles pour eux-mêmes —, seuls les peuples eux-mêmes ont la légitimité politique de fixer et limiter les pouvoirs de leurs représentants, par référendum, à l’issue d’un vrai débat public.

Au contraire, les gouvernants européens profitent de leur pouvoir pour en abuser : le processus constituant « par traités » rend les institutions européennes très profondément illégitimes. Il nous semble important et urgent de résister à cette dérive tyrannique et d’organiser cette résistance pour aussi longtemps qu’elle sera nécessaire.


Un souvenir : avant la chute du mur, les Allemands de l’est manifestaient tous les lundis à 18 h pour dire simplement : « le Peuple, c’est nous ». Ils étaient parfois une poignée, parfois des dizaines de milliers, mais ils étaient toujours là, visibles.

Ce geste courageux de résistance durable pourrait nous inspirer dans la lutte contre le processus despotique qui se joue avec les traités inconstitutionnels européens : nous pourrions, nous, institutionnaliser la résistance, autant que possible, en multipliant les lieux où se manifeste le mécontentement :

Dans toutes les villes d’Europe où il existe des résistants déterminés, seraient organisées
DES MANIFESTATIONS HEBDOMADAIRES
, tous les mercredis à 18 h par exemple.

Lors de ces manifestations, on pourrait médiatiser internationalement les principales initiatives citoyennes du moment, ce qui donnerait à ces initiatives de la visibilité, et donc de la force. Par exemple :

  •     la plainte de milliers de citoyens auprès de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) contre l’État pour violation du droit à élire notre Corps législatif, plainte d’origine citoyenne que soutient www.29mai.eu,

  •     la pétition contre le parasitisme financier, déchaîné par des institutions européennes complaisantes qui interdisent aux États de gêner la libre circulation des capitaux, pétition d’origine citoyenne que défend www.stop-finance.org,

  •     la pétition pour l’indispensable et très populaire Référendum d’Initiative Citoyenne (RIC), pétition et projet citoyen développés par www.ric-france.fr, etc.

Dans les grandes villes, c’est même chaque arrondissement (ou chaque quartier) qui pourrait organiser une telle manif hebdomadaire, pour que chacun puisse s’y associer souvent sans trop perdre de temps en transport inutile ; il est d’ailleurs sans doute plus efficace — pour signifier qu’une colère générale gronde — que les manifestations, même petites, soient très nombreuses, un peu partout en Europe.

Un site web (un wiki ou un spip pour permettre le travail collaboratif) centraliserait une carte européenne des manifestations et récapitulerait les villes et les villages européens actuellement en résistance affichée, ainsi que les meilleures initiatives populaires (slogans, visuels, plaintes, actions, événements, manifestes, images et textes…).

 

 

Est-ce cette petite graine d’idée saura germer partout en Europe ? Je l’espère :o)

Étienne Chouard.    
(8 avril 2008)
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2008/04/07/93-pour-des-manifestations-populaire-obstinees-mpo



 

 

 

Voyez, ci-après, la liste des principaux griefs contre les institutions européennes, ainsi que les textes de référence correspondants :

Liste des principaux malheurs programmés par les institutions européennes,
institutions écrites sans les citoyens, et même souvent contre eux :

a) D’abord et principalement, le chômage de masse est incroyablement encouragé par les institutions européennes à travers une politique monétaire contraire à l’intérêt général : la lutte contre l’inflation comme mission absolument prioritaire et intangible d’une Banque centrale européenne (BCE) rigoureusement indépendante des représentants du peuple (art. 119, 130 et 282 §2 et §3 TFUE) est une priorité contestable fixée au plus haut niveau du droit, donc inaccessible à tout revirement de l’opinion publique. Cette priorité qui n’avantage que les rentiers, imposée jusqu’à nouvel ordre par les institutions européennes, entretient délibérément un chômage massif et des bas salaires, ce qui présente l’avantage — pour certains — de rendre tout le monde très docile et ne profite qu’aux plus riches. Ce seul point devrait conduire tous les salariés (91% de la population active) dans la rue contre le dernier acte du coup d’État européen qu’est le traité de Lisbonne.

b) Ensuite, et c’est un vrai hara-kiri financier, la création monétaire est totalement abandonnée aux banques privées : la constitution européenne (art. 123 TFUE) interdit aux banques centrales de prêter de l’argent aux États — [prêts qui permettraient un financement des investissements publics sans subir la charge des intérêts]. Il est essentiel de comprendre que cette interdiction impose aux États d’emprunter cet argent — avec intérêts ! — aux acteurs privés qui ont de l’argent à placer (pour s’enrichir sans travailler). Cette règle scandaleuse contraint les États (c’est-à-dire nous tous) à payer des intérêts ruineux pour financer les investissements publics — et à accumuler rapidement une dette extravagante au regard de l’intérêt général (plus de 40 milliards d’euros par an d’intérêts pour la France) —, alors que, si notre banque centrale pouvait financer les équipements publics, les intérêts payés pourraient être redistribués à la collectivité au lieu d’enrichir les « investisseurs » privés. Non seulement elle nous ruine, mais en plus, la dette publique (rendue inexorable par les institutions dans le monde entier) verrouille au plus haut niveau du droit l’impuissance de nos représentants politiques, réduits au rôle de marionnettes dépendantes des puissances financières. Cet autre vice majeur devrait suffire, à lui seul, à alimenter une révolte générale.

c) L’interdiction faite aux États de limiter les mouvements des capitaux (art. 63 TFUE) et la liberté d’établissement (art. 49 TFUE) ont privé les travailleurs de tout contre-pouvoir face à la démesure des actionnaires, les livrant à la concurrence intégrale à tous niveaux ; elles exposent nos économies à la spéculation effrénée, aux crises boursières à répétition et bientôt à la faillite générale. Après avoir maté les travailleurs, les financiers leur feront bientôt payer la note, à travers leurs salaires et leurs impôts. Qui donc a intérêt à cette liberté absolue des renards libres dans le poulailler libre ? Sûrement pas l’intérêt général. Encore un vice majeur dont « l’élite » ne veut pas débattre et qui devrait lever les foules contre tous les « traités constitutionnels » européens.

d) La clause de défense mutuelle entre pays membres de l’UE ne met pas en cause les engagements souscrits au sein de l’OTAN (art. 42 §2 TUE). Cette clause, qui confirme l’art. 5 du pacte atlantique, soumet de fait toute défense européenne à celle de l’OTAN, puisque ce sont les États européens les plus puissants militairement, économiquement et politiquement qui ont la double appartenance. Cet assujettissement est d’autant plus grave que, d’une part, l’UE et l’OTAN permettent aux États qui en sont membre de s’associer pour des interventions ou des missions sur des « théâtres extérieurs » et que, d’autre part, les instances politiques et militaires de l’OTAN envisagent une restructuration de l’Alliance, fondée sur la possibilité de frappe nucléaire « préemptive » (en premier) et l’éventualité d’opérations engagées sans autorisation des Nations Unies décidées par un simple consensus.

e) Les Ministres et Présidents accumulent les pouvoirs exécutif  et législatif sur une série de domaines cachés au public sous le nom trompeur de « procédures législatives spéciales » (art. 289 §2 TFUE pour le principe ; les autres articles sont disséminés — cachés — dans le TFUE) et d’« actes non législatifs » (exemples : art. 24 TUE, ou art. 290 TFUE). Les ministres — agents exécutifs, en principe — se rassemblent en un « Conseil » — en oubliant curieusement de préciser que c’est un conseil de ministres — et se déclarent carrément co-législateurs (art. 16 TUE). Ces violations caractérisées du principe essentiel de la séparation des pouvoirs révèlent une dérive considérée par la Déclaration des droits de l’homme (art. 16 DDHC) comme la marque la plus sûre du retour à la tyrannie : des pouvoirs non séparés sont des pouvoirs à la merci des puissances privées du moment.

f) Les exécutifs contrôlent aussi la carrière des juges européens dont le pouvoir est considérable : les juges sont nommés pour six ans, ce qui est court, renouvelables, ce qui crée une dépendance dangereuse (art. 253 TFUE). Cette violation du principe essentiel de l’indépendance des juges par rapport aux autres pouvoirs bafoue encore le principe protecteur de la séparation des pouvoirs, et encore une fois au profit des ministres (qui nomment et renouvellent — ou pas — les juges) ; on voit partout que ce sont eux, ministres, qui ont écrit les règles.

g) Le pouvoir législatif — ordinaire, mais aussi constituant — est contrôlé, pour l’essentiel, par des organes non élus. Exemples : conférence intergouvernementale (composée de ministres) modifiant les institutions (art. 48 §4 TUE), Commission européenne (non élue) ayant l’exclusivité de l’initiative législative (art. 17 §2 TUE, ce qui est une véritable insulte à la démocratie représentative), ministres co-législateurs (!) (art. 16 TUE), Banque centrale productrice de normes obligatoires à portée générale (art. 132 TFUE), etc.

h) Les citoyens n’ont aucun moyen de résister à un abus de pouvoir et les initiatives citoyennes sont muselées à travers une procédure d’« initiative d’invitation » trompeuse car sans aucune force contraignante (art. 11 §4 TUE). On prend les citoyens pour des imbéciles en leur offrant bruyamment des cadeaux… absolument vides.

i) Les procédures de révision permettent aux exécutifs de modifier eux-mêmes les institutions, et surtout sans consulter les peuples concernés (art. 48 TUE). Ce sont d’abord toujours des organes non élus qui sont chargés de réviser la Constitution européenne, ainsi que de contrôler toute proposition de révision, et surtout les citoyens sont tenus bien à l’écart du processus constituant qui n’impose aucun référendum : la « démocratie » que nous imposent nos élus est factice.

j) Tout cela est dû, d’après nous, à ce que le processus constituant est lui-même profondément vicié par le fait que les hommes au pouvoir, à la faveur de la construction européenne, s’écrivent des règles pour eux-mêmes (art. 48 §4 TUE), alors que seule une Assemblée constituante désintéressée peut programmer de bonnes institutions : les membres de cette Assemblée ne doivent pas avoir un intérêt personnel à l’impuissance politique des citoyens : ils doivent donc, d’abord, être déclarés inéligibles aux fonctions qu’ils instituent, et surtout, ils ne doivent pas être élus parmi des candidats désignés par des partis, car ces hommes-là sont — forcément — à la fois « juges et parties » dans un processus constituant.

 

Consultez tous les textes de références cités à cette adresse :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Citoyens_d_Europe_Contre_le_Regime_Illegitime_references.pdf

 


Extraits (7 pages) des institutions européennes modifiées par le traité de Lisbonne :
articles incriminés  par l’appel à des Manifestations Obstinées Contre le Régime Illégitime (MOCRIE)
0Hhttp://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2008/04/08/93-manifestations-obstinees
[commentaires en vert et entre crochets] (Mise à jour du 18 avril 2008)
et autres documents (2 pages) propres à étayer les affirmations de cet appel :

[Nota : quand le traité parle de « Conseil », les juristes semblent, avec ce nom abrégé et ambigu, préférer que les citoyens oublient qu’il s’agit d’une assemblée de Ministres : la confusion des pouvoirs qui règne partout au profit des exécutifs se verrait davantage, sans doute, avec son vrai nom : « Conseil des Ministres ».

Ne pas oublier que les institutions européennes sont écrites, précisément, par les pouvoirs exécutifs, qui s’écrivent donc des règles pour eux-mêmes, et ça se voit partout.]

Article 16 TUE [confusion des pouvoirs : pouvoir législatif abandonné à des ministres, censés uniquement exécuter les lois, surtout sans les écrire !]

1. Le Conseil [des Ministres] exerce, conjointement avec le Parlement européen, les fonctions législative et budgétaire. Il exerce des fonctions de définition des politiques et de coordination conformément aux conditions prévues par les traités.

2. Le Conseil est composé d'un représentant de chaque État membre au niveau ministériel, habilité à engager le gouvernement de l'État membre qu'il représente et à exercer le droit de vote.

 

Article 17 TUE [exclusivité de l’initiative des lois (pouvoir législatif) donné à la Commission (non élue !)]

1. La Commission promeut l'intérêt général de l'Union et prend les initiatives appropriées à cette fin. Elle veille à l'application des traités ainsi que des mesures adoptées par les institutions en vertu de ceux-ci. Elle surveille l'application du droit de l'Union sous le contrôle de la Cour de justice de l'Union européenne. Elle exécute le budget et gère les programmes. Elle exerce des fonctions de coordination, d'exécution et de gestion conformément aux conditions prévues par les traités. À l'exception de la politique étrangère et de sécurité commune et des autres cas prévus par les traités, elle assure la représentation extérieure de l'Union. Elle prend les initiatives de la programmation annuelle et pluriannuelle de l'Union pour parvenir à des accords interinstitutionnels.

2. Un acte législatif de l'Union ne peut être adopté que sur proposition de la Commission, sauf dans les cas où les traités en disposent autrement. [Remarque : les cas en question ne prévoient jamais que le Parlement pourrait être autonome sur un sujet donné ou un autre, jamais : les exceptions à l’exclusivité de l’initiative sont toujours prévues pour donner du pouvoir aux exécutifs, toujours !] Les autres actes sont adoptés sur proposition de la Commission lorsque les traités le prévoient.

Article 119 TFUE [priorité absolue de la BCE = lutte contre l’inflation, et tant pis pour le chômage, tant pis pour les travailleurs, tant mieux pour les riches rentiers]

1. Aux fins énoncées à l’article 3 du traité sur l’Union européenne, l'action des États membres et de l’Union comporte, dans les conditions prévues par les traités, l'instauration d'une politique économique fondée sur l'étroite coordination des politiques économiques des États membres, sur le marché intérieur et sur la définition d'objectifs communs, et conduite conformément au respect du principe d'une économie de marché ouverte où la concurrence est libre.

2. Parallèlement, dans les conditions et selon les procédures prévues par les traités, cette action comporte une monnaie unique, l'euro, ainsi que la définition et la conduite d'une politique monétaire et d'une politique de change uniques dont l'objectif principal est de maintenir la stabilité des prix et, sans préjudice de cet objectif, de soutenir les politiques économiques générales dans l’Union, conformément au principe d'une économie de marché ouverte où la concurrence est libre.

3. Cette action des États membres et de l’Union implique le respect des principes directeurs suivants : prix stables, finances publiques et conditions monétaires saines et balance des paiements stable.

 

Article 282 TFUE [priorité absolue de la BCE = lutte contre l’inflation, et tant pis pour le chômage (2ème couche)]

1. La Banque centrale européenne et les banques centrales nationales constituent le Système européen de banques centrales. La Banque centrale européenne et les banques centrales nationales des États membres dont la monnaie est l'euro, qui constituent l'Eurosystème, conduisent la politique monétaire de l'Union.

2. Le Système européen de banques centrales est dirigé par les organes de décision de la Banque centrale européenne. L'objectif principal du Système européen de banques centrales est de maintenir la stabilité des prix. Sans préjudice de cet objectif, il apporte son soutien aux politiques économiques générales dans l'Union pour contribuer à la réalisation des objectifs de celle-ci.

3. La Banque centrale européenne a la personnalité juridique. Elle est seule habilitée à autoriser l'émission de l'euro. Elle est indépendante dans l'exercice de ses pouvoirs et dans la gestion de ses finances. Les institutions, organes et organismes de l'Union ainsi que les gouvernements des États membres respectent cette indépendance. (…)


Article 130 TFUE [parfaite indépendance de la BCE : interdiction d’essayer d’influencer la BCE en quoi que ce soit]

Dans l'exercice des pouvoirs et dans l'accomplissement des missions et des devoirs qui leur ont été conférés par les traités et les statuts du SEBC et de la BCE, ni la Banque centrale européenne, ni une banque centrale nationale, ni un membre quelconque de leurs organes de décision ne peuvent solliciter ni accepter des instructions des institutions, organes ou organismes de l’Union, des gouvernements des États membres ou de tout autre organisme. Les institutions, organes ou organismes de l’Union ainsi que les gouvernements des États membres s'engagent à respecter ce principe et à ne pas chercher à influencer les membres des organes de décision de la Banque centrale européenne ou des banques centrales nationales dans l'accomplissement de leurs missions.


Article 123 TFUE [interdiction faite aux États de créer la monnaie dont ils ont besoin pour financer les investissements publics, monnaie qui serait créée en empruntant sans intérêt à la BCE. Cet article est un vrai scandale.]

1. Il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées "banques centrales nationales", d'accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres ; l'acquisition directe, auprès d'eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite.

2. Le paragraphe 1 ne s'applique pas aux établissements publics de crédit qui, dans le cadre de la mise à disposition de liquidités par les banques centrales, bénéficient, de la part des banques centrales nationales et de la Banque centrale européenne, du même traitement que les établissements privés de crédit.

[Certains s’appuient sur le second paragraphe de cet article 123 pour soutenir l’idée que l’État, s’il le voulait, pourrait créer la monnaie de financement dont il a besoin  par l’intermédiaire de ces établissements publics de crédit. C’est méconnaître le fait qu’entre un tel établissement et le Trésor Public les échanges monétaires ne peuvent s’effectuer qu’en monnaie centrale (inutilisable pour les dépenses ordinaires). Dit autrement, un établissement public de crédit ne peut pas ouvrir un crédit à l’État. Cf. AJH dans son tout dernier livre : « La dette publique, une affaire rentable. »]


Article 63 TFUE [interdiction faite aux États de limiter la circulation des capitaux, ce qui rend possible et favorise même la folle spéculation qui va probablement, finalement, tous nous ruiner]

1. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites.

2. Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux paiements entre les États membres et entre les États membres et les pays tiers sont interdites.


Article 49 TFUE 
[interdiction faite aux États de limiter la liberté d’établissement des entreprises, ce qui rend possible et facilite même les délocalisations]

Dans le cadre des dispositions visées ci-après, les restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un État membre dans le territoire d'un autre État membre sont interdites. Cette interdiction s'étend également aux restrictions à la création d'agences, de succursales ou de filiales, par les ressortissants d'un État membre établis sur le territoire d'un État membre.

La liberté d'établissement comporte l'accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d'entreprises, et notamment de sociétés au sens de l'article 54, deuxième alinéa, dans les conditions définies par la législation du pays d'établissement pour ses propres ressortissants, sous réserve des dispositions du chapitre relatif aux capitaux.


Article 42 TUE [« Compatibilité » imposée de la défense européenne avec les choix de l’OTAN]

(…) 2. (…) La politique de l'Union au sens de la présente section n'affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres, elle respecte les obligations découlant du traité de l'Atlantique Nord pour certains États membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre.

(…) 7. Au cas où un État membre serait l'objet d'une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l'article 51 de la charte des Nations unies. Cela n'affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres.

Les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, qui reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l'instance de sa mise en oeuvre.


[Actes juridiques : règlement = loi, directive = loi-cadre, décision = décret avec le risque d’arbitraire lié à la confusion des pouvoirs correspondante.

Procédures législatives :      procédure législative ordinaire = codécision avec des Ministres tuteurs du Parlement,
                                               et procédures législatives « spéciales » qui sont carrément des lois sans Parlement du tout.

Les actes non législatifs ne sont pas bien définis et doivent se comprendre « en creux », par rapport à  l’art. 289 §3, quand les procédures législatives sont exclues : par exemple, en matière de PESC (à propos de la guerre, rien que ça), les décisions sont prises par les exécutifs à l’exclusion expresse de toute procédure législative, c’est-à-dire sans donner le moindre pouvoir au Parlement… (voir plus bas les art. 24, 26 et 28 TUE).]


Article 288  [Les actes juridiques de l’Union]

Pour exercer les compétences de l'Union, les institutions adoptent des règlements, des directives, des décisions, des recommandations et des avis.

Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État membre.

La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens.

La décision est obligatoire dans tous ses éléments. Lorsqu'elle désigne des destinataires, elle n'est obligatoire que pour ceux-ci.

Les recommandations et les avis ne lient pas.


Article 289 TFUE  [Actes législatifs = issus d’une des procédures législatives : soit ordinaire, soit « spéciale »]

1. La procédure législative ordinaire consiste en l'adoption d'un règlement, d'une directive ou d'une décision conjointement par le Parlement européen et le Conseil, sur proposition de la Commission. Cette procédure est définie à l'article 294.

2. Dans les cas spécifiques prévues par les traités, l'adoption d'un règlement, d'une directive ou d'une décision par le Parlement européen avec la participation du Conseil ou par celui-ci avec la participation du Parlement européen constitue une procédure législative spéciale.

3. Les actes juridiques adoptés par procédure législative constituent des actes législatifs.

[Pour un exemple d’actes non législatifs, voyez la PESC, dans la case suivante.

Pour comprendre ces « procédures législatives spéciales » — qu’on devrait plutôt appeler « lois sans parlement » —, il faut parcourir un à un les centaines d’articles des traités… Le fait de refuser de présenter la moindre liste de ces lois sans parlement est, en soi, éminemment suspect : pourquoi donc cacher ces domaines réservés où l’exécutif légifère seul ?

Voici un exemple de procédure législative ordinaire et de procédure législative spéciale, en matière de politique sociale : les domaines de codécision entre Parlement et Ministres sont surlignés en gris, les domaines où l’exécutif légifère seul (Montesquieu fait la toupie dans sa tombe) sont surlignés en rouge]


Article 153 TFUE  [domaines de la politique sociale et procédures législatives correspondantes]

1. En vue de réaliser les objectifs visés à l'article 151, l’Union soutient et complète l'action des États membres dans les domaines suivants :

a) l'amélioration, en particulier, du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs ;

b) les conditions de travail ;

c) la sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs ;

d) la protection des travailleurs en cas de résiliation du contrat de travail ;

e) l'information et la consultation des travailleurs ;

f) la représentation et la défense collective des intérêts des travailleurs et des employeurs, y compris la cogestion, sous réserve du paragraphe 5 ;

g) les conditions d'emploi des ressortissants des pays tiers se trouvant en séjour régulier sur le territoire de l’Union ;

h) l'intégration des personnes exclues du marché du travail, sans préjudice de l'article 166 ;

i) l'égalité entre hommes et femmes en ce qui concerne leurs chances sur le marché du travail et le traitement dans le travail ;

j) la lutte contre l'exclusion sociale ;

k) la modernisation des systèmes de protection sociale, sans préjudice du point c)

2. À cette fin, le Parlement européen et le Conseil :

a) peuvent adopter des mesures destinées à encourager la coopération entre États membres par le biais d'initiatives visant à améliorer les connaissances, à développer les échanges d'informations et de meilleures pratiques, à promouvoir des approches novatrices et à évaluer les expériences, à l'exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres ;

b) peuvent arrêter, dans les domaines visés au paragraphe 1, points a) à i), par voie de directives, des prescriptions minimales applicables progressivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des États membres.

Ces directives évitent d'imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu'elles contrarieraient la création et le développement de petites et moyennes entreprises.

Le Parlement européen et le Conseil statuent conformément à la procédure législative ordinaire après consultation du Comité économique et social et du Comité des régions.

Dans les domaines visés au paragraphe 1, points c), d), f) et g), du présent article, le Conseil statue conformément à une procédure législative spéciale, à l'unanimité, après consultation du Parlement européen et desdits Comités.

Le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission après consultation du Parlement européen, peut décider de rendre la procédure législative ordinaire applicable au paragraphe 1, points d), f) et g), du présent article. [Mystère : le point c, et lui seul, ne pourra en aucun cas relever de la codécision. Domaine réservé des ministres.]

3. Un État membre peut confier aux partenaires sociaux, à leur demande conjointe, la mise en oeuvre des directives prises en application du paragraphe 2 ou, le cas échéant, la mise en oeuvre d'une décision du Conseil adoptée conformément à l'article 155.

Dans ce cas, il s'assure que, au plus tard à la date à laquelle une directive ou une décision doit être transposée ou mise en oeuvre, les partenaires sociaux ont mis en place les dispositions nécessaires par voie d'accord, l'État membre concerné devant prendre toute disposition nécessaire lui permettant d'être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par ladite directive ou ladite décision.

[Est-ce qu’on pourrait expliquer aux citoyens pourquoi « la sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs » (point c) sont rigoureusement exclues du pouvoir du Parlement et réservées au pouvoir sans contrôle du Conseil des ministres ?]

[Actes non législatifs : pas facile de comprendre quelle est la portée de ces normes européennes qui ressemblent à notre pouvoir réglementaire en France :

On a un bel exemple de ces "actes non législatifs" à propos de la PESC, politique étrangère et de sécurité commune : où, quand et comment allons-nous faire la guerre… Le Parlement n’a aucun pouvoir en la matière : les exécutifs semblent y avoir confisqué tous les pouvoirs, sans contre-pouvoir (vous avez dit "démocratie" ?) :]


Article 24 TUE

1. La compétence de l'Union en matière de politique étrangère et de sécurité commune couvre tous les domaines de la politique étrangère ainsi que l'ensemble des questions relatives à la sécurité de l'Union, y compris la définition progressive d'une politique de défense commune qui peut conduire à une défense commune.

La politique étrangère et de sécurité commune est soumise à des règles et procédures spécifiques. Elle est définie et mise en oeuvre par le Conseil européen et le Conseil, qui statuent à l'unanimité, sauf dans les cas où les traités en disposent autrement. L'adoption d'actes législatifs est exclue. Cette politique est exécutée par le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et par les États membres, conformément aux traités. Les rôles spécifiques du Parlement européen et de la Commission dans ce domaine sont définis par les traités. La Cour de justice de l'Union européenne n'est pas compétente en ce qui concerne ces dispositions, à l'exception de sa compétence pour contrôler le respect de l'article 40 du présent traité et pour contrôler la légalité de certaines décisions visées à l'article 275, second alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

[Les Présidents des États membres fixent les grandes lignes de la PESC,
les Ministres décident les détails…
Donc, notez : sur la PESC, le Parlement semble n’avoir AUCUN pouvoir…
PESC = domaine désormais strictement réservé aux exécutifs. Vous avez dit « démocratie » ?]


Article 26 TUE

1. Le Conseil européen identifie les intérêts stratégiques de l’Union, fixe les objectifs et définit les orientations générales de la politique étrangère et de sécurité commune, y compris pour les questions ayant des implications en matière de défense. Il adopte les décisions nécessaires.

Si un développement international l'exige, le président du Conseil européen convoque une réunion extraordinaire du Conseil européen afin de définir les lignes stratégiques de la politique de l'Union face à ce développement.

2. Le Conseil élabore la politique étrangère et de sécurité commune et prend les décisions nécessaires à la définition et à la mise en oeuvre de cette politique, sur la base des orientations générales et des lignes stratégiques définies par le Conseil européen.

Le Conseil et le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité veillent à l'unité, à la cohérence et à l'efficacité de l'action de l'Union.

3. La politique étrangère et de sécurité commune est exécutée par le haut représentant et par les États membres, en utilisant les moyens nationaux et ceux de l'Union.


Article 28 TUE

1. Lorsqu'une situation internationale exige une action opérationnelle de l'Union, le Conseil adopte les décisions nécessaires. Elles fixent leurs objectifs, leur portée, les moyens à mettre à la disposition de l'Union, les conditions relatives à leur mise en œuvre et, si nécessaire, leur durée.

2. S'il se produit un changement de circonstances ayant une nette incidence sur une question faisant l'objet d’une décision visée au paragraphe 1, le Conseil révise les principes et les objectifs de cette décision et adopte les décisions nécessaires.

3. Les décisions visées au paragraphe 1 engagent les États membres dans leurs prises de position et dans la conduite de leur action.

4. Toute prise de position ou toute action nationale envisagée en application d’une décision visée au paragraphe 1 fait l’objet d’une information par l’État membre concerné dans des délais permettant, en cas de nécessité, une concertation préalable au sein du Conseil. L'obligation d'information préalable ne s'applique pas aux mesures qui constituent une simple transposition sur le plan national des décisions du Conseil.

5. En cas de nécessité impérieuse liée à l'évolution de la situation et à défaut d’une révision de la décision du Conseil visée au paragraphe 1, les États membres peuvent prendre d'urgence les mesures qui s'imposent, en tenant compte des objectifs généraux de ladite décision. L'État membre qui prend de telles mesures en informe immédiatement le Conseil.

6. En cas de difficultés majeures pour appliquer une décision visée au présent article, un État membre saisit le Conseil, qui en délibère et recherche les solutions appropriées. Celles-ci ne peuvent aller à l'encontre des objectifs de la décision visée au paragraphe 1 ni nuire à son efficacité.


[Autre exemple d’« actes non législatifs », sortes de « lois sans Parlement », voici les « actes délégués », sur le modèle de nos ordonnances, (emblématiques de la mise au pas du Parlement par l’exécutif sous la cinquième République en France). Toute notre sécurité juridique — dans ce contexte de confusion des pouvoirs dans les mains de non élus — va reposer sur l’interprétation par les juges de l’expression « éléments non essentiels » :]


Article 290 TFUE

1. Un acte législatif peut déléguer à la Commission le pouvoir d'adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l'acte législatif.

Les actes législatifs délimitent explicitement les objectifs, le contenu, la portée et la durée de la délégation de pouvoir. Les éléments essentiels d'un domaine sont réservés à l'acte législatif et ne peuvent donc pas faire l'objet d'une délégation de pouvoir.

2. Les actes législatifs fixent explicitement les conditions auxquelles la délégation est soumise, qui peuvent être les suivantes :

a) le Parlement européen ou le Conseil peut décider de révoquer la délégation ;

b) l'acte délégué ne peut entrer en vigueur que si, dans le délai fixé par l'acte législatif, le Parlement européen ou le Conseil n'exprime pas d'objections.

Aux fins des points a) et b), le Parlement européen statue à la majorité des membres qui le composent et le Conseil statue à la majorité qualifiée.

3. L'adjectif "délégué" ou "déléguée" est inséré dans l'intitulé des actes délégués.


Article 253 TFUE

Les juges et les avocats généraux de la Cour de justice, choisis parmi des personnalités offrant toutes garanties d'indépendance et qui réunissent les conditions requises pour l'exercice, dans leurs pays respectifs, des plus hautes fonctions juridictionnelles, ou qui sont des jurisconsultes possédant des compétences notoires, sont nommés d'un commun accord pour six ans par les gouvernements des États membres, après consultation du comité prévu à l’article 255.

Un renouvellement partiel des juges et des avocats généraux a lieu tous les trois ans dans les conditions prévues par le statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

Les juges désignent parmi eux, pour trois ans, le président de la Cour de justice. Son mandat est renouvelable.

Les juges et les avocats généraux sortants peuvent être nommés de nouveau.


 


Article 48 TUE
  [Révision des institutions : ce sont les exécutifs qui écrivent les propositions de révisions et qui, de surcroît, les font valider sans référendum, c’est-à-dire sans les peuples concernés, c’est à pleurer.]

1. Les traités peuvent être modifiés conformément à une procédure de révision ordinaire. Ils peuvent également être modifiés conformément à des procédures de révision simplifiées.

Procédure de révision ordinaire

2. Le gouvernement de tout État membre, le Parlement européen ou la Commission peut soumettre au Conseil des projets tendant à la révision des traités. Ces projets peuvent, entre autres, tendre à accroître ou à réduire les compétences attribuées à l’Union dans les traités. Ces projets sont transmis par le Conseil au Conseil européen et notifiés aux parlements nationaux.

3. Si le Conseil européen, après consultation du Parlement européen et de la Commission, adopte à la majorité simple une décision favorable à l’examen des modifications proposées, le président du Conseil européen convoque une Convention composée de représentants des parlements nationaux, des chefs d’État ou de gouvernement des États membres, du Parlement européen et de la Commission. La Banque centrale européenne est également consultée dans le cas de modifications institutionnelles dans le domaine monétaire. La Convention examine les projets de révision et adopte par consensus une recommandation à une Conférence des représentants des gouvernements des États membres telle que prévue au paragraphe 4.

Le Conseil européen peut décider à la majorité simple, après approbation du Parlement européen, de ne pas convoquer de Convention lorsque l’ampleur des modifications ne le justifie pas. Dans ce dernier cas, le Conseil européen établit le mandat pour une Conférence des représentants des gouvernements des États membres.

4. Une Conférence des représentants des gouvernements des États membres est convoquée par le président du Conseil en vue d’arrêter d’un commun accord les modifications à apporter aux traités. [Ce sont donc exclusivement des membres de l’exécutif qui écrivent désormais la Constitution des « démocraties » européennes… Fin de l’état de droit, relire la Déclaration des droits de l’homme, article 16.]

Les modifications entrent en vigueur après avoir été ratifiées par tous les États membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

5. Si à l’issue d’un délai de deux ans à compter de la signature d’un traité modifiant les traités, les quatre cinquièmes des États membres ont ratifié ledit traité et qu’un ou plusieurs États membres ont rencontré des difficultés pour procéder à ladite ratification, le Conseil européen se saisit de la question.

Procédures de révision simplifiées

6. Le gouvernement de tout État membre, le Parlement européen ou la Commission peut soumettre au Conseil européen des projets tendant à la révision de tout ou partie des dispositions de la troisième partie du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, relatives aux politiques et actions internes de l’Union.

Le Conseil européen peut adopter une décision modifiant tout ou partie des dispositions de la troisième partie du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Le Conseil européen statue à l’unanimité, après consultation du Parlement européen et de la Commission ainsi que de la Banque centrale européenne dans le cas de modifications institutionnelles dans le domaine monétaire. Cette décision n’entre en vigueur qu’après son approbation par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.

La décision visée au deuxième alinéa ne peut pas accroître les compétences attribuées à l’Union dans les traités.

7. Lorsque le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ou le titre V du présent traité prévoit que le Conseil statue à l’unanimité dans un domaine ou dans un cas déterminé, le Conseil européen peut adopter une décision autorisant le Conseil à statuer à la majorité qualifiée dans ce domaine ou dans ce cas. Le présent alinéa ne s’applique pas aux décisions ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense.

Lorsque le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne prévoit que des actes législatifs sont adoptés par le Conseil conformément à une procédure législative spéciale, le Conseil européen peut adopter une décision autorisant l’adoption desdits actes conformément à la procédure législative ordinaire.

Toute initiative prise par le Conseil européen sur la base du premier ou du deuxième alinéa est transmise aux parlements nationaux. En cas d’opposition d’un parlement national notifiée dans un délai de six mois après cette transmission, la décision visée au premier ou au deuxième alinéa n’est pas adoptée. En l’absence d’opposition, le Conseil européen peut adopter ladite décision.

Pour l’adoption des décisions visées au premier ou au deuxième alinéa, le Conseil européen statue à l’unanimité, après approbation du Parlement européen, qui se prononce à la majorité des membres qui le composent.


 


Article 132 TFUE 
[pouvoir normatif autonome de la Banque centrale européenne (BCE) :
pouvoir législatif, pouvoir exécutif et pouvoir judiciaire concentrés dans un seul organe, non élu !
Une invraisemblable confusion des pouvoirs sur un sujet essentiel pour la société, la monnaie.]

1. Pour l'accomplissement des missions qui sont confiées au SEBC [système européen des banques centrales], la Banque centrale européenne, conformément aux traités et selon les conditions fixées dans les statuts du SEBC et de la BCE :

- arrête des règlements dans la mesure nécessaire à l'accomplissement des missions définies à l'article 3.1, premier tiret, aux articles 19.1, 22 ou 25.2 des statuts du SEBC et de la BCE, ainsi que dans les cas qui sont prévus dans les actes du Conseil visés à

l'article 129, paragraphe 6,

- prend les décisions nécessaires à l'accomplissement des missions confiées au SEBC en vertu des traités et des statuts du SEBC et de la BCE,

- émet des recommandations et des avis.

2. La Banque centrale européenne peut décider de publier ses décisions, recommandations et avis.

3. Dans les limites et selon les conditions arrêtées par le Conseil, conformément à la procédure prévue à l'article 129, paragraphe 6, la Banque centrale européenne est habilitée à infliger aux entreprises des amendes et des astreintes en cas de non-respect de ses règlements et de ses décisions.


Article 11 TUE

(…)

4. Des citoyens de l'Union, au nombre d'un million au moins, ressortissants d'un nombre significatif d'États membres, peuvent prendre l'initiative d'inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire aux fins de l'application des traités.

[Nota : cet article ne comporte rigoureusement aucune force contraignante : la Commission fait ce qu’elle veut, sans même avoir à motiver sa décision : elle peut jeter l’initiative à la poubelle, elle peut la déformer ou la vider de son sens… Et ensuite, le Conseil des Ministres et le Parlement peuvent faire de même… On se moque des citoyens en prétendant leur offrir un droit démocratique tant attendu avec cet article 11 qui est, en fait, une véritable insulte.]


Source pour le TUE et le TFUE consolidés (avec la nouvelle numérotation) :
Rapport d’information de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale (publié en décembre 2007) 
(
1Hhttp://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i0439.pdf)


Art. 16 Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 (DDHC)

Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a pas de Constitution.
Source : 2Hhttp://www.conseil-constitutionnel.fr/textes/d1789.htm

[Le principe de la séparation des pouvoirs est enseigné partout dans le monde comme le premier principe fondateur qui doit guider des institutions républicaines, l’exigence la plus importante pour protéger les hommes contre l’arbitraire.

 

Ce que tout citoyen devrait savoir dès son plus jeune âge, c’est que sa principale protection contre les abus de pouvoir réside dans la séparation des pouvoirs, et que cette séparation des pouvoirs ne peut être imposée qu’au plus haut niveau du droit, dans un texte essentiel pour les libertés qui s’appelle Constitution, qui se sert — pour ainsi dire — qu’à cela : séparer les pouvoirs pour les empêcher de nuire.

C’est pour cela que les révolutionnaires de 1789 ont signalé solennellement dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen qu’une société qui ne garantit pas la séparation des pouvoirs n’a pas de constitution : cette société est gravement exposée aux abus de pouvoir.

Par exemple, notre propre Constitution, celle de 1958 qui institue la 5ème République, précise expressément :]

Art 23-1 Constitution française de 1958 :

Les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec l'exercice de tout mandat parlementaire.

Source : http://www.conseil-constitutionnel.fr/textes/constit.htm

 


 

 

Documents complémentaires pour étayer/illustrer les affirmations de la proposition :

 

Indicateurs alarmants évoqués :

« En octobre 2006, le Congrès étasunien a franchi le pas et a approuvé un projet de loi légalisant la torture, en flagrante violation des principes même de la démocratie. La majorité républicaine ainsi que plusieurs élus démocrates de la Chambre des représentants et du Sénat ont autorisé l’utilisation des preuves obtenues sous la torture contre le « combattant ennemi illégal ». Le texte, intitulé Loi des commissions militaires, 2006 , reconnaît l’existence de tribunaux secrets pour juger tout ressortissant étranger soupçonné de porter atteinte aux intérêts des États-Unis. L’accusé ne pourra pas prétendre au choix de son avocat, ni connaître les charges qui pèsent contre lui. De plus, les preuves présentées contre lui pourront rester secrètes. Bien évidemment, il pourra également être détenu sans pouvoir réclamer d’être présenté devant un juge, et ce indéfiniment. Il ne pourra pas contester la légalité de sa détention, ni les tortures dont il aura été victime [6].

 

La loi confère également au président étasunien « l’autorité [pour] interpréter la signification et l’application des conventions de Genève » prohibant la torture. Ces dernières ne pourront pas être invoquées « comme source de droit devant aucun tribunal des États-Unis ». La section V de la législation stipule que « personne ne pourra invoquer les conventions de Genève ni aucun de leurs protocoles dans une quelconque action d’habeas corpus ou tout autre acte civil ou toute poursuite judiciaire dans lesquels les États-Unis, un fonctionnaire en activité ou non, un employé, un membre des forces armées ou tout autre agent des États-Unis est partie en tant que source de droit ». En outre, « aucun tribunal, aucun juge n’aura le pouvoir d’entendre ou de prendre en considération une demande en assignation d’habeas corpus introduite par un ressortissant étranger (ou en son nom) qui est ou qui a été détenu par les États-Unis et qui a été considéré comme étant correctement détenu comme combattant ennemi ou en instance de cette qualification [7] ».

 

Non seulement cette loi liberticide, d’essence totalitaire, représente une menace pour n’importe quel citoyen du monde ne bénéficiant pas de la nationalité étasunienne, mais elle octroie une impunité totale aux responsables des traitements cruels, inhumains et dégradants. L’Union européenne et la France en particulier ont maintenu un silence scandaleux au sujet de cette législation. Que se serait-il passé si la Chine, Cuba, l’Iran, la Russie ou le Venezuela avaient adopté une loi similaire ? Qui peut encore parler, en référence aux États-Unis, de modèle de démocratie ? »

 

[6] et [7] : voir « Quand Washington légalise la torture » 5Hhttp://www.humanite.fr/popup_imprimer.html?id_article=838696

 

Source : « Quand Reporters sans frontières légitime la torture »  6Hhttp://www.voltairenet.org/article151200.html


Autres points évoqués, à étayer :

Lire JP Fitoussi, Professeur des Universités à l'Institut d'Études Politiques de Paris, Président du Conseil Scientifique de l'IEP de Paris, Président de l'OFCE et Secrétaire général de l'Association Internationale des Sciences Économiques, entretiens avec JC Guillebaud, « La politique de l’impuissance », 2005, Arléa. 

Extrait édifiant :

- JCG : « Vous êtes en train de dire qu’au fond, obsédé par la lutte contre l’inflation, on a littéralement consenti au chômage. »

- JPF : « Pis que ça ! On a dans une première phase instrumentalisé le chômage pour combattre l’inflation. Chaque "banquier central" de la planète sait que, dès qu’il augmente les taux d’intérêts, il met au chômage une partie des catégories les plus vulnérables de la population. Non seulement il le sait, mais c’est précisément pour ça qu’il le fait. Pourquoi augmente-t-on les taux d’intérêts ? Parce qu’on est persuadé que la demande est trop forte et que les entreprises produisant à pleine capacité ne pourraient la satisfaire qu’en augmentant leurs prix. La douche froide des taux d’intérêts réduit ainsi la demande et incite les entreprises à licencier. »
(p. 45)   
(…)

- JCG : « Que pensez-vous des deux arguments martelés à cette époque [après 1982] à propos de l’inflation et du respect des grands équilibres ? Premièrement on a dit qu’il était légitime (y compris moralement) de lutter contre l’inflation parce qu’elle pénalisait les plus pauvres ; deuxièmement, qu’il fallait maintenir les grands équilibres par simple respect et générosité pour les générations à venir, afin de ne pas faire peser une charge trop lourde sur la tête de nos enfants. On a habillé, en quelque sorte, cette politique d’un discours de générosité… »

- JPF : « C’était un double mensonge. En augmentant les taux d’intérêts, et surtout en les maintenant à un niveau élevé une fois l’inflation vaincue, on savait qu’on favorisait ceux qui détiennent le capital financier, et que l’on excluait de l’accès aux biens durables (qui exigent un recours à l’emprunt) les catégories les plus vulnérables de la population. (…) Le second mensonge, c’est qu’en augmentant les taux d’intérêt on faisait du service de la dette un des postes les plus importants du budget de l’État. » (P. 46)


- JPF : « Que l’orientation des politiques économiques de l’Union soit, pour l’essentiel, indépendante de tout processus démocratique est à la fois contraire aux traditions politiques des peuples européens, et dangereux pour l’efficacité économique de l’ensemble. » (p. 72)

- JPF : « En forçant le trait, on pourrait affirmer que le « gouvernement économique » de l‘Europe se rapproche à s’y méprendre d’un despote éclairé qui, à l’abri des pressions populaires, chercherait le bien commun au travers de l’application d’une doctrine rigoureuse – le libéralisme -, supposée supérieure à toutes les autres en termes d’efficacité économique. La démocratie ne serait donc pas le système politique le mieux à même d’appréhender l’intérêt général ; elle placerait les gouvernements en position de vulnérabilité devant les pressions des populations en faveur de la redistribution.  Le pouvoir a ainsi changé de mains. Les politiques ont préféré le confier à des agences indépendantes.  (…)

Mais il est vrai aussi que, dès l’origine, la construction européenne fut l’œuvre d’une démocratie des élites, plutôt que de la démocratie tout court. Cependant les élites ont changé (…) aujourd’hui elles ont tendance à assimiler le bien public au marché.»


La suite est proprement incroyable… Un petit livre important, à lire…

 


 

La panne (Vendredi 15 février 2008) (Lien)

 

Vendredi 15 février 2008, 10 h : mon site est en panne depuis lundi 11,
en panne dans toutes ses pages interactives (blog, forum, wiki).
La base de données est inaccessible pour les visiteurs, depuis trois jours entiers.
Le support de Free me certifie qu’il ne peut rien faire.

J’ai l’impression de n’avoir aucun moyen de régler le problème moi-même.
C’est peut-être fini. Désolé.

J’en ai marre de toutes ces impasses.
J’ai encore une idée à essayer…

Après, je vais recommencer à voler.


Vendredi 15, 14 h : j’ai trouvé. C’est réglé. C’était de ma faute.

Mais cette longue interruption m’a fait mal. Un mal profond et inattendu.
J’ai senti comme je suis devenu accro à l’échange, devenu si simple sur le net.
J’ai senti comme je suis devenu dépendant de vos émotions et réactions, chez moi.
J’ai senti comme vous étiez devenu un moteur essentiel de mon travail quotidien.

Je crois qu’il faut que je retourne voler un peu ; je deviens trop « One track Minded ».
Je vais aller retrouver mes montagnes chéries, mes herbes folles dans la brise parfumée, et mes cumulus adorés.
Je vais retrouver mes amis les rapaces et les martinets, et enrouler avec eux de beaux thermiques jusqu'aux barbules odorantes, merveilleuse odeur des nuages.
Je vous raconterai.

Merci d’être toujours là, malgré les pannes.

:o)

Étienne.

 

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2008/02/15/90-la-panne

 

 

 

Les banquiers ont peur de voir les salariés recommencer à se défendre : bonne année ! (1er janvier 2008) (Lien)

 


Chers amis,

 

Le lien entre nos institutions — malhonnêtes dès leur constitution, de façon à bien verrouiller notre impuissance politique — et les intrigues des banques privées — qui sont capables, pour nous asservir, de voler la création monétaire à la collectivité, et même de contraindre les représentants politiques à livrer le pays à des bourreaux qu’elles ont fait naître —, est pour moi la découverte de l'année 2007.     

Cette découverte permet de progresser dans notre réflexion sur une Constitution d'origine citoyenne. Ceux qui disent qu'on ne progresse pas se trompent.

 

Alan Greenspan vient de déclarer : « je dois prévoir que quelque chose d’inattendu va arriver et nous mettra à terre... » « ... Nous, ainsi que toutes les autres banques centrales, perdons le contrôle des forces qui accroissent les prix. »

 

C'est évoqué là : http://www.solidariteetprogres.org/spip/sp_article.php3?id_article=3655

 

Et on dirait bien que c'est le pire cauchemar des banquiers : le cauchemar des banquiers, c'est de lâcher par mégarde la gorge des salariés (80% de la population active), et de les voir s'échapper pour recommencer à lutter victorieusement pour augmenter leurs salaires...

 

 

C'est cette obsession viscérale des salaires chez les banquiers qu'a utilement soulignée Annie Lacroix-Riz dans ce livre important qu'est "Le choix de la défaite" (*) (ne ratez pas cette vidéo) : sabordage historique dont la preuve formelle apportée par l'historienne pour les années 30 met en lumière (et permet d'enfin comprendre) le même choix — pour les mêmes raisons : tenir en cage les salaires —, à travers la construction européenne ardemment voulue et imposée par les banquiers, à commencer par Jean Monnet...    

Des salariés dotés d'institutions leur permettant de se défendre financièrement... Une République, quoi... L'horreur absolue de tous les banquiers et de tous les rentiers du monde...

 


Je trouve qu'entendre Greenspan redouter sérieusement cette perspective d'inflation est un vrai bon pronostic de bonne année... :o)

 

Bonne année à vous tous, chers amis !

 

Étienne.

 



(*) Annie Lacroix-Riz souligne fortement, — preuves formelles à l'appui, ce qui la distingue bien de nombreux historiens contemporains faux-nez du MEDEF — que, même en 1936, le Ministre des finances avait promis au Gouverneur de la Banque de France (également maître du Comité des Forges, MEDEF du moment) de bien tenir les salaires (comme le faisaient, et le font toujours ?, tous les ministres des finances avant de prendre leurs fonctions), et que c'est uniquement sous la pression irrésistible de la rue, sous la contrainte de centaines de milliers de salariés en colère et prêts à en découdre physiquement, que les Ministres (et leurs banquiers matons) ont dû lâcher les congés payés, les 40 heures, les hausses de salaires, etc.

 

Annie Lacroix-Riz souligne qu'aujourd'hui encore, comme hier, il n'y a pas grand-chose à attendre de l'initiative de nos "représentants" puisque leurs vrais maîtres sont les banquiers : rien ne se fera de bon si les salariés ne prennent pas eux-mêmes en charge la défense de leurs intérêts.

 

Elle souligne aussi que l'obsession des banquiers contre les hausses de salaires était telle que la Banque de France a soutenu activement Hitler depuis le début, que la même Banque de France a soutenu d'autres dictateurs, que la même Banque de France a rendu possible le financement de l'effort de guerre de l'Allemagne et que la même Banque de France a finalement voulu et imposé la capitulation rapide de la France devant Hitler, carrément... car Hitler était formidable du point de vue des salaires : exactement l'homme dont la Banque de France aimait les méthodes pour traiter les syndicats et autres agitateurs d'esclaves... Tout ça est passionnant. Cette historienne est un phare, un des derniers qui soient allumés.

 

Voyez aussi cette deuxième longue et intéressante vidéo :
http://www.solidariteetprogres.org/spip/sp_article.php3?id_article=3024.

 

Voir aussi cette bonne recension du livre :
http://www.solidariteetprogres.org/spip/special/Ent-Lacroix-Riz.pdf

 

Sur la profonde malhonnêteté de nombreux historiens actuels, grassement payés par les plus riches (et encensés publiquement tous les jours par des médias aux ordres — qui peut résister à cette corruption ?) pour réécrire une histoire sur mesure — et sans preuves —, il faut absolument lire cet autre livre, tout petit celui-là mais décapant au possible : « L'histoire contemporaine sous influence » ;        
voir cette bonne recension :
http://www.voltairenet.org/article13259.html.

 


 

Au revoir - Un message bouleversant de Raoul Marc Jennar (15 août 2007) (Lien)

 

 

Je viens de recevoir ce message qui me peine profondément.

 

 

 

Au revoir

 

« C’est avec beaucoup d’émotion que je vous écris ces lignes. Toute ma vie, j’ai payé cash le prix de mes choix. Il en est allé ainsi, une fois encore, lorsque j’ai pris la décision de soutenir la candidature de José Bové.

 

Je suis sans emploi et sans ressources. Depuis des mois, je cherche. En dépit d’un curriculum vitae bien fourni, qui, ailleurs, m’aurait très vite ouvert de nombreuses portes, notamment à l’Université, en France, mon pays d’adoption, je n’ai trouvé ni soutien sérieux, ni proposition crédible.

 

Au Cambodge, où on n’a pas oublié le rôle que j’y ai joué pendant douze ans pour l’aider à sortir des séquelles d’une des plus grandes tragédies du XXe siècle, certains ont appris ma situation. Ils ont considéré que ce n’était pas acceptable. Une offre m’est faite de travailler comme expert-consultant auprès du gouvernement cambodgien sur certains dossiers où je peux apporter quelque chose à ce pays. Je l’ai acceptée. Comme j’ai accepté une autre offre sur le Liban. Je vais partager les quatre années qui me séparent de la retraite entre ces deux pays.

 

Depuis sept ans, je me suis impliqué, avec toute la force de mes convictions, dans l’action citoyenne. Comme militant altermondialiste d’abord, au nom d’une certaine idée de l’Europe ensuite, dans la recherche d’une gauche de gauche enfin. Je l’ai fait en toute liberté, sans souci de carrière. En restant fidèle à mes convictions et en n’obéissant qu’à ma conscience.

 

Ce qui me peine le plus au moment de me retirer de l’action militante, c’est de laisser derrière moi un champ de ruines où gisent toutes les gauches. Dans les gravats, on ne trouve que sauve-qui-peut carriériste ou sectarisme. Le socialisme a contribué de manière décisive à la mondialisation néolibérale et à son extension aux champs européen et français. Les disciples de Lénine, quelle que soit la secte qu’ils dirigent, ont tué l’espérance née le 29 mai 2005. Les militants altermondialistes sont repliés sur des combats certes essentiels, mais dans une approche trop sectorielle.

 

Le mot « gauche » ne porte plus aucune espérance. Il demeure néanmoins, pour ceux qui entendent mettre leurs actes en cohérence avec leurs convictions, une certaine manière de penser et d’agir qui allie liberté, égalité et fraternité, qui recherche le beau et le bien, qui ne renonce jamais à l’engagement. C’est à cela que j’entends rester fidèle, plus que jamais disciple des Lumières et attaché aux idéaux de Mai 68.

 

Je ne serai pas là pour participer à la création d’une gauche nouvelle fondée sur des valeurs et une pratique où la fin se trouve déjà dans les moyens. Je le regrette profondément. Je ne serai cependant pas absent du débat européen grâce à un livre que je termine ces jours-ci.

 

Je souhaite à chacune et à chacun du bonheur dans vos vies et vos combats.

 

Raoul

15 août 2007

 

Raoul Marc JENNAR
consultant - questions internationales
7, place du Château, 66500 Mosset
Email : raoul.jennar@wanadoo.fr »

 

 

Je suis ému et triste. Raoul a profondément changé ma vie avec son immense livre « Europe, la trahison des élites », puis avec son amitié chaleureuse et exigeante. Je n’ai pas su l’aider comme il en avait besoin dans cette difficile passe "après-Bové" ; je me sens nul. Nous aurons du mal à nous battre sans lui : c’est un fin connaisseur des tromperies de l’Union européenne et un des plus solides résistants au féodalisme des multinationales et des banques qui s’en va.

C'est incroyable que les dizaines de milliers de résistants qui lui doivent tant — et qui vont tant avoir besoin de lui dans les années qui viennent — soient incapables de se grouper et de se cotiser durablement (ou de l'aider à trouver un poste de chercheur en faculté) pour lui permettre simplement de vivre et pour qu'il puisse continuer de lutter à nos côtés. Notre (éternelle) indifférence au sort d'autrui et notre manque de discernement sont désespérants.

J’ai le bourdon.

 

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/08/16/81-au-revoir-un-message-bouleversant-de-raoul-marc-jennar


 

Non, ce n'est pas "trop cher" : le financement des besoins collectifs est rendu sciemment ruineux par un sabordage monétaire étonnant
(texte écrit sur le blog le 1er mai, puis repris et complété ici le 26 juillet 2007) (Lien)


Je suis en train de découvrir le détail d'une situation financière incroyable.

Vous croyez que la monnaie est créée par l'État ? Vous vous trompez : ce sont les banques privées qui créent la monnaie, et qui en perçoivent le prix (l'intérêt).

Si c'était l'État qui créait la monnaie, il pourrait l'investir directement lui-même (sans devoir payer le moindre intérêt jusqu'au remboursement) ; il pourrait aussi prêter cette monnaie nouvelle aux banques (charge à elles de la prêter à leur tour) et en percevait le premier intérêt (des milliards d'euros), ce qui pourrait aussi financer les services publics, au lieu de garnir des poches de soie au prix d'un déficit paralysant pour l'État.

L'État (c'est-à-dire nous tous) a perdu le droit de battre monnaie et ce sont des banques privées à qui nos soi-disant "représentants" ont abandonné ce pouvoir décisif.

Vous pensez que la monnaie est un outil qui sert l'intérêt général ? Vous vous trompez : la monnaie est devenu (discrètement) un outil qui sert d'abord des intérêts privés.

La construction de l'Union européenne pourrait bien être motivée principalement par ce détournement de la richesse publique, notamment à travers à l'article 104 du traité de Maastricht : « Il est interdit à la BCE et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées « banques centrales nationales » d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions ou organes de la Communauté, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publiques des États membres; l’acquisition directe des instruments de leur dette, auprès d’eux, par la BCE ou les banques centrales nationales, est également interdite. »

Par cet article (repris quasiment tel quel dans le TCE, art. III-181), les États (c'est-à-dire nous tous) ne peuvent plus financer les investissements publics qu'en empruntant à des acteurs privés, et en leur payant un intérêt.

Cette prise de conscience m'a conduit à écrire un billet à Judith Bernard, sur le Big Bang Blog, qui s'inquiétait du sort des services publics et de leur financement prétendument problématique (d'après nos représentants politiques).

Je reproduis ci dessous le billet en question et je le fais suivre de quelques citations importantes pour étayer mon propos. Tout ça est un peu long mais de la plus haute importance : avec le contrôle de l'argent, on est au coeur du problème des hommes avec le pouvoir : ça vaut le coup de lire pour comprendre. Les citoyens sont fous de ne pas approfondir personnellement cette cause majeure de leur travail forcé.

 

Non, ce n'est pas "trop cher" : pour financer nos services publics,
il nous suffit de reprendre aux banques privée la création monétaire
que la puissance publique n'aurait jamais dû abandonner

27 avril 2007.

Bonjour Judith,

D’abord, merci pour tout ; d’ordinaire silencieux, je savoure vos textes, forts et beaux, dans mon coin, comme on goûte du lait au miel :o)

Ceux qui vous maltraitent cette fois, en faisant comme si vous étiez à la fois utopique et irresponsable à tant apprécier la dépense publique sans vous soucier des financements, ceux-là se trompent : nous n’aurions aucune peine à financer TOUS les investissements utiles à notre collectivité si nous avions le contrôle de notre monnaie, au lieu de l’avoir — c’est proprement incroyable — abandonné aux banques privées.

Ceux qui vous vilipendent font comme si la monnaie, aujourd’hui rare, était forcément rare, ce qui n’est pas le cas. Ils vous enferment ainsi dans une économie de rareté. Mais cette rareté est artificielle, elle est voulue, elle est fabriquée, et elle est la source de la richesse immense de certains acteurs qui savent rester discrets.

Bien sûr, si la monnaie est rare, elle est chère et son prix s’ajoute aux prix de toutes choses ; les échanges sont pénalisés par le coût des crédits. Mais la monnaie pourrait être abondante, ou plus exactement suffisante. Pour cela, il faudrait que l’État (c’est-à-dire nous) ait le contrôle de sa création.

Or il se trouve — vous n’allez pas me croire — que les États ont abandonné la création monétaire aux banquiers privés. Les États (c’est-à-dire nous) ne peuvent plus créer la monnaie dont ils ont besoin pour fluidifier l’économie. Quand l’État (c'est-à-dire nous) a besoin d’argent (pour construire des hôpitaux ou des crèches), il doit aujourd’hui emprunter cet argent aux acteurs privés et leur payer un intérêt, au lieu de créer lui-même l’argent dont il a besoin. C’est idiot. Non, c’est criminel. En tout cas, ce n’est pas une fatalité : c’est un choix politique et un choix qui n’a rien à voir avec l’intérêt général.

Quand une banque vous prête 100 000 €, elle ne les a pas. Elle les crée (par une simple écriture) pour vous les prêter, et elle les détruira quand vous lui rendrez. Mais au passage, elle aura perçu un intérêt (considérable) qui ne correspond à aucun service, aucune privation de sa part : l’intérêt que perçoivent les banques privées sur la monnaie créée ex nihilo (à partir de rien) est foncièrement injuste, une sorte de paiement de l’indu, un racket gigantesque de toute l’économie par des acteurs privilégiés.

Quelle est la raison de ce sabordage monétaire qui asphyxie notre économie ? Une volonté politique. Un phénomène réversible, donc. Il ne tient qu’à nous de récupérer notre souveraineté monétaire.

Tous les citoyens devraient prendre quelques heures pour étudier l’histoire du racket financier imposé par les banques (en France, en Europe, aux États-Unis) : ils comprendraient les solutions qui s’imposent, à la fois simples et fortes ; la création monétaire doit impérativement et exclusivement relever de la puissance publique.

Ne croyez pas les épouvantails et autres chiffons rouges qu’on va agiter devant vos yeux pour vous persuader que l’État créateur de monnaie est forcément imbécile : de bons contrôles sont évidemment imaginables pour que la création publique de monnaie soit raisonnable. Ce qu’on appelle la « planche à billet » n’est pas forcément une catastrophe, bien au contraire, c’est le sens de mon message : c’est l’abus de la planche à billets qui est une catastrophe, OK ; mais son utilisation raisonnable est non seulement utile, mais indispensable pour un bon fonctionnement de l’économie. Ceux qui prétendent le contraire ont souvent une idée derrière la tête et pas seulement l'intérêt général en ligne de mire.        

D’ailleurs, la masse monétaire augmente d’environ 10% tous les ans sans déclencher d’inflation, ce qui est bien la preuve que ce spectre de la planche à billets n’est qu’un épouvantail (bien commode pour nous conduire à accepter que l'État soit dépouillé de ce droit essentiel).

Par contre, les banques privées devenues créatrices (et vendeuses) de notre monnaie (ces banques à qui on a abandonné la « planche à billets », précisément) sont, effectivement, de véritables parasites, à très grande échelle. Rien n’impose, économiquement, que ce soit des acteurs privés qui maîtrisent la planche à billets, au contraire.

Nous sommes fous d’accepter de perdre ce levier vital des politiques publiques, aussi bien en France qu’en Europe.

Les soi-disant "libéraux" font tout pour ruiner les États, ce qui offrira plusieurs avantages aux acteurs privés déjà très riches : une fois ruiné, l’État ne pourra plus assumer que les fonctions sécuritaires (armée, police, justice), bien utiles aux très riches (ces fonctions étatiques là, ils y tiennent, curieusement). Une fois ruiné, l’État vendra les services publics aux copains privés des prétendus « hommes d’État » complaisants. Je vous laisse imaginer les yeux cupides avec lesquels les compagnies d’assurance lorgnent le marché du financement de la santé publique, pour s’en tenir à votre exemple. Les "libéraux" vont leur vendre tous nos plus précieux services publics.

Et l’Union européenne, l’OMC, le FMI sont leurs principaux outils de désarmement politique des populations, d’affaiblissement des États, de renoncement au peu de démocratie que ces populations avaient pourtant chèrement payée.

Si on ne se paie pas de mots en ne lisant, dans les institutions, que les préambules et les généreuses déclarations d’intention liminaires, si on va lire tous les articles en détail pour contrôler que la séparation des pouvoirs existe bien, vérifier si le contrôle des pouvoirs est effectif, surveiller l’indépendance des juges qui doit être réelle, s’assurer que l’information honnête des citoyens soit protégée et garantie, prendre garde à ce que des moyens soient offerts aux citoyens pour résister vraiment à d’éventuels abus de pouvoir, si on contrôle tout ça, Judith, et bien c’est une catastrophe : ils sont en train de nous piquer la démocratie. Et en jurant le contraire !

Et pour l’urgence, il y a un des deux candidats qui nous promet de nous violer dès qu'il sera élu (au moins, on est prévenus) : le « mini traité » imposé par voie parlementaire, c'est un cauchemar : c'est dans la partie 1 que se trouvent les dispositions les plus dangereuses pour la démocratie (les autres parties sont déjà en vigueur et le resteront : ça ne les gêne pas de les retirer de la "réforme").

Lire à ce sujet C'est la partie 1 du TCE qui est la plus dangereuse, celle qui nous retire la démocratie : pas question de l'accepter sans référendum].

Mais le cœur de l’impuissance politique grandissante des hommes est encore plus difficile à percevoir : comme je vous le disais, la grande absente de nos débats publics est la monnaie. Pourtant, nous pourrions satisfaire bien des besoins vitaux en reprenant son contrôle.

Il tient aux journalistes et aux citoyens « donneurs d’alerte » de faire monter le sujet sur la place publique : je vous conseille la lecture de cette page « La vérité sur la dette » (http://tiki.societal.org/tiki-index.php?page=La+v%C3%A9rit%C3%A9+sur+la+dette), mais aussi celle d’un petit livre formidable et important : « Les 10 plus gros mensonges sur l’économie » (http://www.10mensonges.org/) ; ne pas rater les mensonges 1 à 4, essentiels.

Prenez surtout le temps d’étudier le tableau de la page 73 qui montre de façon pédagogique que toute somme dépensée par l’État se retrouve dans ses caisses au bout de quatre ou cinq ans d’impôts (ce qui montre la bêtise des politiques frileuses réclamant un État pingre) et que cet investissement a été multiplié (on parle d’ailleurs de multiplicateur d’investissement) et a répandu ses bienfaits dans des proportions immenses.

Les difficultés financières de l'État ne viennent pas du tout de son incurie, mais de sa pauvreté artificiellement programmée à travers un système bancaire inique, un privilège de type féodal discrètement consenti aux banques privées —le droit de créer la monnaie et de prélever un intérêt sur cette monnaie neuve, et l'obligation pour l'État de s'endetter auprès des acteurs privés pour financer les besoins publics— système bancaire qui met le pays en coupe réglée, sans aucun espoir de jamais rembourser une dette sans fin puisque la création monétaire est rançonnée.

Nous sommes victimes d’un sabordage monétaire de la part de nos propres « représentants » et la construction européenne permet de verrouiller ce sabordage monétaire au plus haut niveau : européen et constitutionnel. Normalement, si leur plan aboutit, aucun peuple ne pourra plus jamais s’affranchir de la tutelle du système financier privé.

Consultez aussi le site passionnant http://www.fauxmonnayeurs.org/.

Pour relier cette affaire à mon idée fixe — « ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir » ; il nous faut un processus constituant honnête pour nous protéger enfin des abus de pouvoir ; les candidats pour l’assemblée constituante ne doivent surtout pas être désignés par les partis —, je pense que les politiciens professionnels actuels, tels qu’ils sont élus, ont trop d’"ascenseurs à renvoyer", ils sont trop ligotés par ceux qui ont financé leurs campagnes électorales : seul le référendum d’initiative populaire rendra aux peuples le pouvoir d’imposer, avec une légitimité politique incontestable, aux acteurs privés les plus puissants ce que les hommes politiques ne peuvent déjà plus faire.

Nous sommes donc au cœur de votre billet : dans l’état actuel d’affaiblissement des puissances publiques face aux multinationales privées, la protection des services publics passe, à mon sens, par une réforme institutionnelle qui rend du pouvoir aux peuples, pouvoir nécessaire pour défendre eux-mêmes les services auxquels ils tiennent, et cette réforme n’est possible que si l’assemblée constituante n’est pas composée d’hommes de partis car les partis ont un intérêt personnel à l’impuissance politique des citoyens, ce qui explique qu’ils ne nous donneront jamais le pouvoir qui nous est dû. Cela vaut pour la France comme pour l’Europe.

Je sais que tout cela n’est pas très poétique, pardonnez-moi, mais les attaques qui fusent contre vous sont injustes et me hérissent car elles révèlent et défendent une idéologie inepte (ou plutôt très intelligente) qui nous ruine tous, chaque jour un peu plus.

Amicalement.

Étienne.
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Liens.php
(Cette page de ‘liens et documents’ est assez lourde à charger (environ 4 Mo), mais elle est incroyablement riche en informations pour résister ; je l’actualise presque tous les jours.)

 

PS : encore un mot, chère Judith : je suis sûr que vous apprécierez les derniers textes que j’ai publié sur la partie blog de mon site : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php.

Je découvre et dévore des auteurs immenses comme Alain (extraordinaire blogueur), Jacques Duboin, Simone Weil, George Orwell… autant de résistants dont les pensées gagnent à être remises en avant pour nous défendre contre les affreux.

PPS : l'immense économiste Maurice Allais (http://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Allais) ("prix Nobel" d'économie, considéré à l'étranger comme un vrai génie) —assez à droite sur certains points, mais plutôt à gauche sur d'autres—, traite les banques privées de « faux-monnayeurs », et il le démontre fortement. Il écrit : « Par essence, la création monétaire ex nihilo que pratiquent les banques est semblable, je n'hésite pas à le dire pour que les gens comprennent bien ce qui est en jeu ici, à la fabrication de monnaie par des faux-monnayeurs, si justement réprimée par la loi. »

PPPS : il faut aussi lire deux petits livres formidables, de Jacques Généreux, chez Seuil : "Les vrais lois de l'économie" et "Pourquoi la droite est dangereuse". Ce sont deux petits bijoux d'intelligence, de concision, de précision... Cet homme porte bien son nom et ferait un excellent Président.

Au passage, je réclame le droit d'élire un citoyen non candidat. Pourquoi sommes-nous limités à l'offre politique des partis, pourquoi devons-nous choisir parmi ceux qui veulent le pouvoir alors qu’ils sont sans doute les plus dangereux pour l'exercer ? Bon, j'arrête, car je suis intarissable là aussi... :o)

Merci pour tout ce que vous faites, ne changez pas :o)

 

 

Voici maintenant quelques citations importantes pour appuyer mes dires (ne ratez pas les textes formidables de Bernard Maris) :

Citation n°1, de Denis Clerc :

« Les banques créent de la monnaie très simplement. Lorsque le titulaire d’un compte obtient un prêt à court terme (moins d’un an), par exemple une avance sur salaire : dans ce cas, la banque inscrit au crédit du bénéficiaire la somme demandée (d’où le terme de crédit). Elle a créé de la monnaie scripturale à partir de rien. Une inscription sur un compte lui a suffit. »

Source : Denis Clerc, « Déchiffrer l’économie », Chapitre 4 La monnaie et le crédit, p. 163.

Citation n°2, de la Banque de France :

En 1971, la Banque de France éditait un opuscule dénommé « la Monnaie et la Politique monétaire » dans lequel elle précisait : « Les particuliers — même paraît-il certains banquiers — ont du mal à comprendre que les banques aient le pouvoir de créer de la monnaie ! Pour eux, une banque est un endroit où ils déposent de l'argent en compte et c'est ce dépôt qui permettrait à la banque de consentir un crédit à un autre client. Les dépôts permettraient les crédits. Or, cette vue n'est pas conforme à la réalité, car ce sont les crédits qui font les dépôts. » [et pas l’inverse. (ÉC)]

Source : Banque de France, donc pas vraiment des mickeys :o)

Citation n° 3, de Maurice Allais :

« Fondamentalement, le mécanisme du crédit aboutit à une création de moyens de paiements ex nihilo [(à partir de rien (ÉC)], car le détenteur d’un dépôt auprès d’une banque le considère comme une encaisse disponible, alors que, dans le même temps, la banque a prêté la plus grande partie de ce dépôt, qui, redéposée ou non dans une banque, est considérée comme une encaisse disponible par son récipiendaire. À chaque opération de crédit, il y a ainsi duplication monétaire. Au total, le mécanisme de crédit aboutit à une création de monnaie ex nihilo par de simples jeux d’écritures (*).

(*) Ce n’est qu’à partir de la publication en 1911 de l’ouvrage fondamental d’Irving Fisher, The purchasing Power of money, qu’il a été pleinement reconnu que le mécanisme du crédit aboutit à une création de monnaie. »

Source : Maurice Allais, "Prix Nobel" de sciences économiques, « La crise monétaire d’aujourd’hui. Pour de profondes réformes des institutions financières et monétaires. », Éd. Clément Juglar, 1999, p. 63.

Citation n°4, de Maurice Allais :

« Le jugement éthique porté sur le mécanisme du crédit bancaire s'est profondément modifié au cours des siècles. (...) À l'origine, le principe du crédit reposait sur une couverture intégrale des dépôts. (...) Ce n'est que vers le XVII e siècle, avec l'apparition des billets de banque, que les banques abandonnèrent progressivement ce principe. Mais ce fut dans le plus grand secret et à l'insu du public » (...) « En abandonnant au secteur bancaire le droit de créer de la monnaie, l'État s'est privé en moyenne d'un pouvoir d'achat annuel représentant environ 5,2 % du revenu national. »

Source : Maurice Allais, Prix Nobel d’économie 1988, La réforme monétaire, 1976).

Citation n°5, de Bernard Maris :

Création et destruction monétaire

« (…) C’est le principe fondamental de la création monétaire : si je fais un crédit papier de 100 et si je sais qu’une grande partie de ce crédit reviendra chez moi banquier, je peux multiplier le crédit bien au-delà du stock d’or dont je dispose. (…) Le mécanisme est décrit dans l’adage : « les prêts font les dépôts ». Le crédit fait les dépôts, il fait l’argent. Et non l’inverse ! Avis à ceux qui croient que l’épargne fait l’argent. Quel contresens économique !

(…) Mais la vraie garantie de la création monétaire, c’est l’anticipation de l’activité économique, du cycle production consommation. Encore faut-il que cette anticipation soit saine : toute création monétaire saine débouche sur une destruction monétaire équivalente.

(…) Nous percevons mieux la nature de la monnaie : des dettes (des créances sur la banque émettrice) qui circulent. Des dettes qui, si elles sont saines, doivent, par l’activité économique, provoquer leur remboursement.

Aujourd’hui, la monnaie est détachée de tout support matériel, on peut en créer à l’infini. »

Source : Bernard Maris, professeur d’université en France et aux États-Unis, « Anti-manuel d’économie », éd. Bréal, oct. 2003, p. 219.

Citation n°6, de Bernard Maris :

Le déni d'existence

« Longtemps, les économistes ont négligé l’argent. Les économistes libéraux, orthodoxes s’entend. Encore aujourd’hui, nombre d’économistes considèrent que l’argent, la monnaie, ne sont pas des questions en soi. La monnaie est neutre. Elle n’a pas d’incidence sur l’économie réelle (souligner dix fois), l’économie véritable, profonde, celle qui parle des produits, des services, de l’emploi, des prix.

Il y a deux aspects de l’économie, disent les grands économistes classiques, Ricardo, Say, Smith, Malthus, et après eux les grands monétaristes, Friedman, Patinkin, Lucas aujourd’hui : 1) l’économie d’échange, où les produits s’échangent contre les produits, le travail contre des biens, par exemple, et, à côté, la monnaie. Elle est en plus. Elle vient définir le niveau des prix, mais ça n’a pas d’incidence fondamentale sur le fonctionnement de la production, du commerce, et sur l’emploi. Cela paraît extravagant, mais c’est comme ça ! Aujourd’hui encore, en 2003, on enseigne dans les universités la « théorie du cycle réel », Real Business Cycle, qui s’efforce d’expliquer les fluctuations cycliques des économies par les goûts des consommateurs, le progrès technique, en supposant que l’argent n’existe pas. (…)

Même les autoproclamés monétaristes, comme le prix Nobel Milton Friedman, ont échafaudé leur scolastique pour annihiler la monnaie, pour démontrer qu’elle n’avait pas d’influence sur le réel, sur la réalité des productions et des échanges, mais simplement sur les prix. Cette conception aberrante de la neutralité de la monnaie ne mériterait-elle pas, pour elle seule, qu’on rejette la théorie orthodoxe aux poubelles des stupidités idéologiques ? Oui, mais il faut comprendre ce que cache ce rejet systématique de la monnaie.

(…)

Pourquoi les économistes classiques, néoclassiques, orthodoxes, monétaristes, nient-ils l’argent ? Parce qu’ils nient le pouvoir de l’émetteur, le pouvoir du seigneur, le seigneuriage, ils nient la politique, gravée sur le denier par l’effigie de César, et au-delà, [ils nient] tout ce que l’argent contient de « sociétal » (…)

Ricardo et les classiques considéraient que le travail mesure la valeur des choses. Dès lors, il est clair que la valeur relative des objets et des services s’exprime en termes de travail : s’il faut deux fois plus d’heures de travail pour produire une table qu’une chaise, une table vaut deux chaises. On peut tout mesurer dans l’économie à partir des chaises, tout exprimer en termes du numéraire « chaise », les voitures comme les services d’avocat. L’économie montre les échanges d’objets et de services contre des objets et des services, chacun valant une certaine quantité de travail.

Alors, à quoi sert la monnaie, les pièces d’or ? À rien, si ce n’est à faciliter les échanges. « La monnaie est un voile posé sur les échanges » disaient les classiques, une sorte de fluide ou d’éther qui facilite la circulation des choses mais qui ne leur donne aucune valeur, et qui elle-même n’en a aucune. La valeur de l’or est la quantité de travail nécessaire à produire l’or. Certes, l’or est plus facile à manipuler que les chaises pour l’échange. Mais on aurait pu prendre des coquillages ou des cigarettes comme unité de monnaie.

Supposons qu’une pièce de 1 euro circule 10 fois en une journée entre les consommateurs. 10 est la vitesse de rotation de la monnaie, soit V. Supposons que le prix P des objets échangés soit de 2, et que 500 objets soient échangés. La valeur des échanges de la journée est donc 2 x 500 = 1000. Combien faut-il de pièces de monnaie de 1 euro, M, pour permettre les échanges ? Il en faut 100, car 100 pièces qui circulent 10 fois permettent de réaliser 1000 euros d’échanges. On obtient donc une relation comptable, une tautologie, que l’on va baptiser « équation monétaire » : MV=PQ.

Cette équation résume toute la théorie monétaire. Elle dit : la monnaie, multipliée par sa vitesse de circulation, est égale au niveau général des prix multiplié par le volume des transactions. Elle valut un prix Nobel à Milton Friedman. La monnaie fixe le niveau général des prix. Plus il y a de monnaie en circulation, plus les prix augmentent. Mais l’économie réelle, elle, ne bouge pas. La monnaie détermine seulement l’inflation : 10% de hausse de monnaie en volume conduira à 10% de hausse de prix, c’est mécanique. D’une équation comptable, on a fait une théorie niant l’impact de la monnaie sur l’économie. Tout se passe comme s’il y avait deux secteurs dans l’économie : le secteur réel, les entreprises, les usines, le travail, les consommateurs, et le secteur monétaire, une banque qui injecte de la monnaie et qui fixe les prix.

Petit aparté : toute la conception européenne de la Banque centrale, indépendante du pouvoir politique et interdite de recevoir des ordres des gouvernements, tient à la « neutralité » de la monnaie. La Banque centrale est là pour maintenir la valeur de la monnaie, éviter qu’il y ait trop d’inflation. Ne pas trop donner de monnaie revient donc à faire des économies, car plus il y a de monnaie, plus les prix augmentent. Cette obsession de la monnaie rare et forte relève de la neutralité, de la théorie classique (Ricardo, Friedman).

Ordre des débiteurs et ordre des créanciers  

Mais pourquoi faut-il que l’argent soit rare ? Nous retrouvons ici notre vieil ami, le problème économique, le problème de la rareté. Partout, les économistes promeuvent la rareté. L’argent rare sera cher, surévalué peut-être même. Qui a de l’argent ? Les riches, les épargnants, ceux qui ont pu accumuler ou hériter. Si le taux d’intérêt est élevé, le taux d’intérêt étant le prix de l’argent, l’argent est demandé, il s’évalue. Le capital est rare et cher. Les créanciers, les détenteurs d’argent, sont contents, tout comme les prêteurs et les rentiers sont contents. Les rentiers dont les loyers des maisons sont élevés. Les créanciers ont une certaine vision de l’ordre économique.

Qui sont ces créanciers ? Des personnes riches, âgées. À qui prêtent-ils ? À des personnes sans argent, des locataires ou des entrepreneurs, qui empruntent pour leur entreprise. Ce sont des débiteurs. Ils préfèrent que l’argent soit bon marché, et même qu’il se dévalue. L’inflation ruine les créanciers et enrichit les débiteurs. Un emprunteur, si la hausse des prix est constante, et si son salaire suit cette montée, rembourse de moins en moins. Alors que les salariés et les entrepreneurs sont contre l’argent cher, les épargnants et les rentiers sont pour.

Lorsqu’une activité est endettée et ne peut plus rembourser ses dettes par son activité, soit on la maintient sous perfusion en lui donnant d’autres crédits sans contrepartie, puisqu’il n’y aura pas de sa part création de richesses matérielles, soit on lui dit : « Fini ! Vous remboursez ! » Si elle ne rembourse pas, elle est mise en faillite, et avec la faillite s’opère un redéploiement de la propriété industrielle (ce que Schumpeter appelait la destruction créatrice) : l’ordre des créanciers décide de ce redéploiement. Plus de textile en France. Plus d’acier de basse qualité. En échange, se développent des services, des logiciels…

L’ordre des débiteurs, l’ordre économique du point de vue des débiteurs, est radicalement opposé à celui des créanciers. L’antagonisme débiteur-créancier est total : ce qui profite à l’un nuit à l’autre. La lutte des débiteurs et des créanciers, terrible, occulte, est une lutte pour la définition de la propriété industrielle : dans quels secteurs les entrepreneurs sont-ils autorisés à travailler par l’ordre des créanciers ? Ils peuvent se tourner vers Internet, par exemple, ce qui a créé une bulle énorme et un endettement terrible des entreprises comme Vivendi ou France Telecom. L’histoire économique est faite de ces affrontements.

En 1976 en France, le ministre Raymond Barre prend une décision historique : il décide que l’État paiera les intérêts de sa dette au-delà du taux d’inflation. Il dit : « Je place l’État au service des créanciers, des épargnants. Finie l’inflation qui érode le capital. Vive les rentiers ! » Fini l’ordre des salariés et des entrepreneurs, finies les Trente Glorieuses, la monnaie se renforce, le chômage augmente, les salaires stagnent, la rente réapparaît. Dix ans plus tard, en 2003, le partage du produit national s’est fait au profit des créanciers : 10% du PIB a basculé du côté du profit et de la rente. (…)

La mondialisation, d’une certaine manière, est un basculement de l’économie au profit des créanciers, des boursiers, des rentiers, des financiers. »

Source : Bernard Maris, « Anti-manuel d’économie », éd. Bréal, oct. 2003, p. 206 s.

Citation n°7, de Bernard Maris :

La Banque de France

« La Banque de France était à l’origine une banque privée, dotée d’une assemblée ou d’un conseil de deux cents gros actionnaires. Ces deux cents actionnaires les plus puissants de la place de Paris ont donné naissance au mythe des « deux cents familles », les deux cents familles bourgeoises contrôlant l’argent en France et cimentant le « mur de l’argent », ce mûr contre lequel se heurtaient les gouvernements progressistes. Les régents de la Banque de France étaient recrutés dans les deux cents familles, les Mallet, Vernes, Rothschild, Hottinger, Wendel. La loi de Germinal an XI définissait la parité du franc par rapport à deux métaux, l’or et l’argent, la Banque de France devant, statutairement, garantir la solidité du franc, en contrôlant le volume de la création monétaire. En gros, la Banque suivait le principe du « tiers » : le crédit consenti à l’économie était égal à trois fois les réserves d’or et d’argent contenues dans les caisses. C’était une gestion prudente, et le franc germinal se révéla le plus solide de toutes les monnaies, résistant le dernier à la crise de 1929 et restant convertible en or jusqu’en 1926, alors que la livre, le dollar, le mark étaient depuis longtemps inconvertibles. (Déjà politique du franc ultra fort, déflationniste, qui fit dire à Keynes que « les français étaient des paysans assis sur leur tas d’or ».)

Mais les banquiers et les industriels du conseil de la Banque de France, contrôlant le crédit, contrôlaient d’une certaine manière la politique de la France. Ainsi l’État s’était ruiné après la guerre de 14. Les dépenses de reconstruction étaient importantes. Le chômage menaçait. La politique coloniale était coûteuse. Les dépenses à caractère social pointaient leur nez, l’éducation coûtait cher. En 1924, arrive au pouvoir le Cartel des gauches, qui demande des avances à la Banque de France pour boucler son budget. Une avance de la Banque de France à l’État, autrement dit au Trésor, se traduit dans le langage populaire par : « faire marcher la planche à billets ». Moreau, le régent de la Banque de France refuse. Herriot le radical, Président du Conseil, démissionne ! La Banque de France a fait chuter le gouvernement ! La gauche s’est fracassée sur le mur de l’argent !

En 1934, Pierre Laval, chef du gouvernement, et surtout Léon Blum, Président du conseil, en 1936, du gouvernement du Front Populaire, soumettent la Banque de France à la tutelle publique. Vincent Auriol, ministre des Finances du Front déclare : « Les banques je les ferme, les banquiers je les enferme ! » Il décrète le franc inconvertible. Les régents de la Banque de France, transformés en gouverneurs, et des sous-gouverneurs sont nommés par l’État. En 1945, le général de Gaulle, chef du gouvernement provisoire, nationalise la Banque de France : c’est fini. En même temps, les trois grandes banques de dépôt, le Crédit Lyonnais, le Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP) et la Banque nationale pour le commerce et l’industrie (BNCI) sont nationalisées. Le crédit est sous tutelle publique. L’État a recouvré son autorité sur la monnaie, ce qui ne durera pas.

Retour de la création monétaire au privé

1945-1993 : presque un demi siècle de tutelle publique. En fait, l’État cesse de contrôler le crédit en 1983, lorsque le gouvernement socialiste décide d’arrimer le franc au mark, monnaie forte, de stabiliser la France dans l’Europe, et de laisser le contrôle du crédit et de l’émission monétaire (à nouveau !) à la Banque de France. L’État a donc contrôlé le crédit de 1934 à 1983, pendant cinquante ans.

En 1993, l’État prend acte de l’indépendance de la Banque de France par la loi de décembre. Désormais, le gouverneur est nommé mais ne peut plus être « démissionné » par l’État. Il est interdit à la Banque de France de financer le déficit du budget de l’État, autrement dit de faire marcher « la planche à billets ». Si l’État a besoin de sous, qu’il les emprunte et qu’il les rembourse ! Les nouveaux statuts de la Banque interdisent aux membres de son conseil (art. 1) « de solliciter ou d’accepter d’instruction du gouvernement ou de toute personne ». Et voilà. Le pouvoir politique est soumis. La dictature des rentiers a triomphé.

Les statuts de la Banque de France, calqués (et « aggravés » en quelque sorte) sur ceux de la Bundesbank, gardienne du temple de la monnaie forte, seront copiés par la Banque centrale européenne. L’ordre des créanciers règne en Europe.

Aux États-Unis, c’est l’inverse. La Banque fédérale de réserve est responsable devant le Congrès. La planche à billets fonctionne toujours. Le statut d’hyper puissance permet aux États-Unis d’accaparer, chaque année, les deux tiers de l’épargne nouvelle dans le monde, essentiellement en provenance de l’Europe et du Japon. Les États-Unis, souverains du monde, fonctionnent selon le principe régalien de la création monétaire.

Voilà une question essentielle d’économiste : qui fabrique l’argent qui nous fait vivre ? Au profit de qui ? Pour quelles activités ? De 1945 à 1976, l’État fabrique l’argent au profit de la reconstruction, puis de la croissance. Et puis, après cette très brève parenthèse du capitalisme, le privé reprend ses droits. »

Source : Bernard Maris, « Anti-manuel d’économie », éd. Bréal, oct. 2003, p. 221 s.

On comprend avec ce dernier extrait que rien n'est inéluctable et que la lutte politique permet de progresser.

Citation n°8, de Éric Dillies :

Naissance de la Banque d'Angleterre

« "Le passé est pour les économistes l'objet d'un mépris sans borne". Ainsi s'exprimait Tocqueville dans "L'Ancien Régime et la Révolution". En effet, s'il est un événement peu connu dans l'histoire économique, c'est bien celui de la naissance de la Banque d'Angleterre. Guillaume d'Orange, gendre de Jacques II qui s'était converti au catholicisme, usurpa le trône d'Angleterre après la Révolution de 1588.

Gaston Bardet écrit qu'"en 1694, Guillaume d'Orange, devenu Guillaume III d'Angleterre; n'avait plus d'argent pour payer son armée. Ce hollandais dont le succès avait été financé par les banquiers protestants de son pays, va — juste retour des choses — être pris dans l'engrenage des usuriers anglo-hollandais. Un syndicat d'usuriers, dirigé par William Paterson, lui proposa la combinaison suivante :

a)   Le syndicat privé avancera au gouvernement un prêt en or de 1 200 000 livres au taux de 6 %, le capital et l'intérêt étant garanti par l'État et payés en or ;

b)   En récompense, le syndicat privé a le droit de s'appeler Banque d'Angleterre ;

c)   Comme le syndicat se démunissait de tout son capital pour financer le prêt, il avait en échange le droit d'émettre et de négocier des billets à ordre jusqu'à concurrence des 1 200 000 livres prêtées en or à l'État".

Ainsi l'Angleterre fut le premier État à se départir de son droit régalien de battre monnaie au profit d'un "syndicat privé" (à l'intérieur duquel Isaac Newton était grand Maître de la monnaie), qui s'en arrogeait le droit contre un intérêt... financé par l'impôt.

Si l'on veut aller plus loin, l'une des causes fondamentales de la Révolution d'Indépendance des États-Unis fut provoquée en 1751 par l'Angleterre qui obligea ses colonies d'Amérique à utiliser dorénavant sa monnaie à intérêt au lieu de leur monnaie gratuite. Et d'après Benjamin Franklin "La Nouvelle Angleterre mit moins d'un an à passer de la plus extrême prospérité au plus extrême marasme".

Irruption de la monnaie de crédit dans la pensée économique

1) C'est certainement à l'œuvre de Clément Juglar (1859-1905) : "Des crises commerciales et de leurs retours périodiques", en 1860, que l'on doit la connaissance de la première intrusion de la monnaie de crédit dans l'économie.

En effet, Juglar constate que l'économie enchaîne des phases de croissance rapide et de récession en des cycles de 7 à 10 ans. Après avoir rejeté comme origine de crises, les saisons agricoles et climatiques, retenues par Jevons (1835-1882), il considère qu'elles sont le produit du mécanisme monétaire de l'économie de marché et des variations de la masse monétaire et du crédit. Ainsi, les banques prêtent au-delà de leurs encaisses métalliques grâce aux billets de banque jusqu'au jour où la confiance des agents économiques disparaît et entraîne la conversion de leurs avoirs en or. Cela entraîne des faillites de banques, la réduction drastique de la masse monétaire et la récession jusqu'au retour à l'équilibre.

On le voit, contrairement aux [sornettes et superstitions] classiques, l'équilibre économique est instable et la monnaie intervient directement dans l'économie.

2) Knut Wicksell (1859-1926), économiste suédois, est le premier à reconnaître l'importance du système bancaire dans l'offre de crédit. Il met en évidence que ce n'est pas l'épargne qui paie les investissements mais le crédit bancaire par la monnaie scripturale.

Il sépare épargne et investissement et montre que ce ne sont pas "les dépôts qui font les crédits mais les crédits qui font les dépôts", et démontre par là l'inanité de la loi de Say. Ce n'est pas l'offre qui crée sa propre demande, mais le crédit.

Je pourrais citer d'autres exemples qui ne feraient que confirmer l'intuition selon laquelle la monnaie n'est ni neutre, ni externe. Comme le pensait Schumpeter (1883-1950), par le crédit la monnaie est au commencement de l'économie capitaliste, et le banquier "est l'éphore de l'économie d'échange". "La monnaie préexiste aux marchés" rappelle Michel Aglietta.

(…)

D - Les instruments de la Banque Centrale

Le système est dit hiérarchisé car les agents économiques empruntent auprès de leurs banques secondaires qui se refinancent auprès de la Banque Centrale au taux de réescompte.

Il est appelé à réserves fractionnaires, car chaque banque secondaire doit avoir un compte auprès de la Banque Centrale où elle doit déposer des réserves, en monnaie fiduciaire, non rémunérées.

Et chaque emprunt nouveau de la part d'un agent économique doit être gagé pour partie en monnaie centrale (actuellement entre 1 et 5 %).

Pendant "les Trente Glorieuses", 80 % des financements accordés aux agents économiques (ménages et entreprises) se faisaient par le canal bancaire et permettaient un pilotage direct de la masse monétaire par la Banque Centrale.

Avec l'ouverture des marchés monétaires aux entreprises au début des années 80, les banques secondaires ont perdu leur monopole de financement. On a appelé cela la désintermédiation bancaire. La déréglementation des marchés sous la pression des firmes multinationales s'est faite sous le couvert du renouveau des idées libérales. En effet, l'ouverture des marchés financiers était perçue comme un moyen de limiter le niveau des taux d'intérêt, grâce à la concurrence, et d'assurer une allocation optimale des moyens de financement. La substitution s'est faite rapidement car les crédits bancaires ne représentent plus que 20 % du financement de l'économie.

Le seul instrument qui reste à la Banque Centrale pour piloter la politique monétaire est le taux d'intérêt ou taux directeur établi par les appels d'offre ou les prises en pension (l'appel d'offre est l'un des deux outils de la politique monétaire de la Banque Centrale). Deux fois par semaine, après consultation des banques, la Banque Centrale procède à l'achat ou à la vente sur les marchés financiers d'un certain volume de titres (bons du trésor) qu'elle échange contre de la monnaie au taux d'appel d'offre. La prise en pension est le deuxième outil de la politique monétaire. Au lieu d'acheter et de vendre des titres, la Banque Centrale peut "prendre en pension" pendant cinq à dix jours, des effets de commerce détenus par les banques en échange de la monnaie au taux de prise en pension).

Dans "La monnaie dévoilée", Galand et Grandjean étudient les conséquences du pilotage de la politique monétaire par les taux d'intérêts. En résumé, pour relancer l'activité, la Banque Centrale baisse les taux qui facilitent le crédit et dynamisent l'économie. Mais pour éviter l'emballement par le levier du crédit, la Banque Centrale va augmenter ses taux progressivement et rendre l'investissement non rentable, produisant par là même le retournement de conjoncture. Mais comme les effets de cette politique se font sentir dans une période de 6 à 18 mois, l'économie retombe en récession sans que la Banque Centrale puisse l'éviter.

Le cycle de ce "stop and go" est non seulement inefficace mais démontre l'instabilité intrinsèque de toutes économies financées par la monnaie d'endettement. À cela s'ajoute, dans une économie mondialisée où chaque pays s'endette de plus en plus avec l'extérieur, la contrainte du taux de change. Pour maintenir le taux de change, la Banque Centrale doit rendre attractive sa monnaie par des taux d'intérêt suffisamment élevés. La Banque Centrale doit donc arbitrer entre croissance économique et stabilité des changes.

Pour des raisons d'unification monétaire, Bérégovoy, Balladur et Juppé ont choisi la deuxième solution et ont jeté des millions de personnes dans la misère et la pauvreté, réduisant la politique économique au "traitement social du chômage".

Or, nous rappelle Jean-Paul Fitoussi, président de l'OFCE, le taux d'intérêt est la variable sociale par excellence, car plus il est élevé, plus il va récompenser les richesses accumulées au détriment des futurs créateurs de richesse qui ne pourront emprunter à cause de la cherté de l'argent. Il va déprécier le futur et lui préférer le présent en donnant de l'importance au passé. Il empêche toute mobilité sociale et renforce les inégalités.

Aussi, comme l'avait parfaitement compris Keynes, dans une économie d'endettement, il faut euthanasier le rentier-accumulateur au profit du débiteur-créateur par des taux d'intérêt nominaux inférieurs aux taux d'intérêt réels. Ce fut, entre autres, la politique des Trente Glorieuses.

E - Les marchés financiers

Il y a une quinzaine de jours, M. Kessler (celui du MEDEF, pas le grand écrivain) expliquait que les marchés financiers qui ont mauvaise presse, ne sont en fait que le marché mondialisé de l'allocation optimale de l'épargne de chacun d'entre nous. Ce n'est pas faux, mais est-ce seulement cela ?

Pour comprendre ce qui se cache derrière, faisons un peu d'histoire, chose que les économistes n'aiment pas, comme le rappelait Tocqueville.

Au sortir de la seconde guerre mondiale fut institué par les accords de Bretton-Woods, un système de change fixe reposant sur un dollar convertible en or (35 dollars l'once). Morgenthau, secrétaire au Trésor, avait voulu faire du dollar le reflet de la suprématie totale de l'Amérique dans le domaine politique, industriel et financier et "mettre le dollar au centre du système monétaire international" (Michel Aglietta, le FMI).

Il fallait, pour cela, "transférer le centre financier du monde de Londres et de Wall Street vers le gouvernement des États-Unis". Car, comme le rappelle Armand Van Bormael, dans La guerre des monnaies, après la crise de 29, "seul le contrôle de la politique monétaire et financière par les autorités pouvait assurer le plein-emploi, des prix stables et le bien être général". Et Morgenthau avait la ferme intention de "chasser les usuriers du Temple de la finance internationale".

Ce système a relativement bien fonctionné jusqu'à la fin des années cinquante, période de redémarrage des économies européennes favorisant les échanges, donc... des transactions financières. Les banques américaines répondant à la demande de médiation et de crédit de la part des entreprises européennes, installèrent des succursales en Europe, en particulier à la City de Londres où les contraintes financières étaient quasi inexistantes.

Ainsi, ces succursales émirent des lignes de crédits pour financer les entreprises et... les déficits publics des états européens. L'Eurodollar était né, c'est-à-dire des dollars émis de l'étranger et circulant à l'étranger en dehors du contrôle de la Federal Reserve.

L'apparition de l'eurodollar sur la scène internationale est équivalent à ce que fut, au XIXe siècle, l'apparition de la monnaie de crédit. On assista sur l'euromarché, libéré de toutes contraintes étatiques, au miracle de la multiplication des pains : un empilement gigantesque de moyens de paiement privés n'ayant comme contrepartie que "la plume du comptable" comme le rappelle Milton Friedman.

Face à la multiplication des Eurodollars, les États-Unis se retrouvèrent dans l'incapacité d'assurer la convertibilité en or du dollar, et le 15 août 1971, Richard Nixon décida de laisser flotter le dollar.

Avec la naissance de l'Eurodollar, les banquiers avaient remporté leur première victoire sur les États ; avec les changes flottants, ils venaient d'en remporter une seconde. En effet, avec l'instabilité des changes, chaque transaction internationale devenait périlleuse et obligeait chaque opérateur à s'assurer contre les risques de changes. Le marché des changes était né et procurait aux banquiers de confortables bénéfices d'un système qu'ils avaient instauré.

En 1965, les eurodollars représentaient 11 milliards de dollars, en 1972, 82 milliards, en 1980, 700 milliards. Aujourd'hui, " une masse de plus en plus monstrueuse de monnaie apatride en progression géométrique, dont le total dépasse 4 000 milliards de dollars, est animée de mouvement échappant à tout contrôle et à toute justification économique réelle ". Jean Remy, Aux sources de l'erreur libérale. Actuellement, le marché des changes totalise 1 500 milliards par jour et le montant des engagements de gré à gré sur les marchés dérivés atteint 72 000 milliards de dollars.

Comme le signale Maurice Allais, tout ceci ne fut rendu possible que par la multiplication des "faux-droits", par la création ex nihilo de moyens de paiement privés qui accaparent la planète. Pour conclure, je citerai Jean Remy parlant de l'internationalisation des monnaies rendues pleinement convertibles et donc privatisées : "cette privatisation bien que résultant de la volonté des États, porte en elle-même dans un effet de rétroaction, la destruction de leurs souverainetés".

 

V - Monnaie et Souveraineté

A - La souveraineté mondiale

Après ce survol rapide de l'évolution monétaire, nous voilà ramenés au dilemme de départ: la monnaie est-elle un bien public ou un bien privé ?

Face à cette privatisation du monde, deux postures se dégagent. La première est de dire que face à la mondialisation par le privé, il faut opposer une mondialisation par le public. Il faut faire, à l'échelle mondiale, ce qui s'est produit au début du XXe siècle et en particulier après la crise de 29 au niveau national : la Banque Centrale qui encadre et qui gouverne le crédit, donc le pouvoir financier. Les institutions pour accomplir cette mission existent déjà en germes, l'ONU pour édicter les règles de droit, le FMI, comme prêteur en dernier ressort. C'est la thèse de nombreux économistes dont Michel Aglietta est la figure emblématique.

La fonction de prêteur en dernier ressort est apparue à la fin du XVIIIe siècle et a été conceptualisée par Bagehot, banquier et économiste, en 1873. "En cas de crise, le prêteur en dernier ressort assure la liquidité des banques de second rang, de façon à leur permettre de faire face à leurs engagements. En se posant comme ultime recours dans les périodes de "courses à la liquidité", la Banque Centrale apporte au marché la régulation qu'il ne peut trouver en lui-même". Ruffini op. cit.

Cependant, cette gouvernance mondiale ne règle pas le problème de l'émission anarchique de crédit. Et comme le défend Maurice Allais, à la suite de Hayek et de Fisher, seule une couverture intégrale des dépôts à vue et a terme, peut mettre un terme à "la spéculation gigantesque que l'on constate [...] parce que l'on peut acheter sans payer et vendre sans détenir". C'est-à-dire que chaque crédit émis doit correspondre à une épargne correspondante.

Comme cette condition sine qua non pour assainir la finance n'est pas réclamée par les défenseurs de la gouvemance mondiale, ce droit exorbitant de prêteur en dernier ressort peut être assimilé à un pousse-au-crime : en effet, le banquier prête jusqu'au-delà du raisonnable, et la Banque Centrale intervient pour rembourser le créancier avec l'argent... des contribuables (cf. L'affaire du Crédit Lyonnais et des caisses d'épargne américaines).

Dans un tel système, le banquier peut s'écrier "pile je gagne, face tu perds". On appelle cela pudiquement l'aléa moral.

D'ailleurs, le FMI s'en est bien rendu compte, car dernièrement il a refusé d'intervenir dans l'affaire argentine, laissant les créanciers en face de leurs responsabilités.

L'autre reproche que l'on pourrait faire à cette thèse est : "Comment une autorité mondiale pourrait-elle s'imposer et faire respecter l'universalité de ses lois à des pays aussi différents, aux intérêts aussi divergents, sans l'avènement d'une puissance impériale ?" Les États-Unis pourraient éventuellement, à terme, assurer ce rôle, mais il faudrait une crise autrement plus grave que celle du 11 septembre.

Face à cette impasse idéologique, il faut faire un retour à l'État national.

 

B - Le droit régalien de battre monnaie

Il est de bon ton depuis la révolution monétariste initiée par Milton Friedman de reprendre le célèbre jugement de David Ricardo : "l'expérience prouve que toutes les fois que le gouvernement ou une banque ont eu la faculté illimitée d'émettre du papier-monnaie, ils en ont toujours abusé". Pour le courant monétariste, la monnaie est chose trop sérieuse pour la laisser entre les mains des gouvernants.

[Curieusement], cela ne semble pas heurter les monétaristes que ce pouvoir illimité ait été confié à des intérêts privés. Maurice Allais rappelle que "pendant des siècles, l'Ancien Régime avait préservé jalousement le droit de l'État de battre monnaie et le privilège exclusif d'en garder le bénéfice ; la république démocratique a abandonné pour une grande part ce droit et ce privilège à des intérêts privés. Ce n'est pas le moindre paradoxe de notre époque".

Maurice Allais a démontré de manière définitive que l'origine de l'inflation est due essentiellement à la multiplication des moyens de paiement par la création ex nihilo dans les banques secondaires, entraînant l'inflation qui a détruit l'épargne dans les années soixante-dix. Si elle n'apparaît plus actuellement, c'est à cause des politiques restrictives menées depuis 20 ans, qui ont pour but de contracter la masse salariale, donc la demande solvable, mais elle est bien présente sur les marchés financiers.

Maurice Allais propose donc l'interdiction totale de toute création monétaire à l'intérieur des banques secondaires par le taux de couvertures intégrales des prêts, et l'exclusivité de l'émission monétaire à la Banque Centrale.

 

C - Conséquences pour notre économie

Il est un phénomène curieux qui ne cesse d'interroger les politiques et les économistes, c'est la progression croissante de la dette publique. De 79 milliards de francs en 1975, elle est passée à plus de 5 000 milliards en 2000. Elle est concomitante à la progression des marchés financiers.

Pourtant cela s'explique très facilement. Jusque dans les années soixante-dix, l'inflation était supérieure au taux d'intérêt, donc l'intérêt réel (intérêt nominal déduit de l'inflation) était négatif et favorisait le débiteur-investisseur face au créancier. Cela dynamisait l'économie car le poids de la dette diminue avec le temps.

Sous l'influence des idées monétaristes, les États se mirent à lutter contre cette inflation en augmentant considérablement les taux d'intérêt, rendant le taux d'intérêt réel positif. En 1973, une loi interdit tout concours de la Banque Centrale au trésor, c'est-à-dire pour 1'Etat de créer de la monnaie.

Face à ce renversement, les entreprises virent leurs projets devenir moins rentables, voire pas rentables du tout. La longue litanie de faillites et de chômage commença. Cette politique restrictive, dite aussi de désinflation compétitive, obligea les entreprises à augmenter leur autofinancement car elles ne pouvaient plus accéder au crédit devenu usuraire, en comprimant la masse salariale et diminuant par là même la demande solvable.

Comme la nature a horreur du vide, c'est l'État, contraint et forcé, qui se substituera au désendettement des entreprises et des ménages en voyant sa dette croître de manière géométrique, entre autres à cause de la montée inexorable du chômage.

Les États, pris dans le piège récessif firent appel aux marchés financiers pour emprunter, alourdissant par la charge des intérêts le poids de la dette. En 1995, les intérêts de la dette représentaient 19 % des recettes fiscales, soit 72 % de l'impôt sur le revenu.

En refusant d'exercer son droit régalien de battre monnaie, l'État s'est mis à l'encan [s’est vendu au plus offrant] des financiers au détriment de tous. Or comme l'enseigne Abraham Lincoln, "le privilège de créer de la monnaie est le plus opportun dessein d'un gouvernement. Par l'adoption de ces principes, le besoin ressenti depuis longtemps d'uniformiser la monnaie aux besoins sera satisfait. Les assujettis aux taxes seront libérés des intérêts. L'argent cessera d'être le maître pour devenir la servante de l'humanité".

 

D - Le caractère récessif de l'économie d'endettement

Il y a près de 80 ans, le Major Clifford Hugh Douglas, fondateur du "social credit movement" mettait en évidence avant la crise de 1929, par le théorème A + B, le caractère nécessairement récessif des économies d'endettement.

Chaque prix d'un bien se décompose en deux parties. L'une A, comprend les salaires et les revenus immédiatement disponibles. L'autre B, est formée des charges fixes, financières, sociales, fiscales et des bénéfices réinvestis. Elles ne sont pas immédiatement disponibles. Le prix du produit est formé de A + B, or seul A est immédiatement disponible. Donc pour acheter A + B, il faut faire appel au crédit. Et plus la production va croître et plus la dette va devenir pesante.

 

Tovy Grjebine, par sa "théorie séquentielle de la récession" qu'il expose dans Récession et Relance et Théories de la crise et politiques économiques arrive à la même conclusion. Il remarque cependant que dans une économie en croissance, tant que les agents économiques augmentent leurs endettements, la production peut être écoulée. Mais quand ils atteignent le seuil d'endettement, et ne peuvent plus aller au-delà, les stocks d'invendus se forment, l'économie entre en récession.

Toute croissance économique suppose une croissance de la masse monétaire similaire. Mais il est fondamental que cette croissance monétaire n'ait pas comme contrepartie une dette.

Il est intéressant de noter qu'Aristote est hostile à toute forme d'intérêt et qu'à l'origine, la monnaie est considérée comme un moyen d'éteindre la dette [cf. notre citation d'Aristote plus haut]. .

Grjebine considère alors que seul l'État est capable de changer les contreparties de la monnaie et opérer le désendettement de tous les agents économiques par la mise en place d'une monnaie libre et franche d'intérêt, en permanence au service de la communauté.

S'il est à la fois sain et nécessaire de désendetter notre économie, M. Grjebine signale que si 25 % des entreprises le faisaient en même temps, cela entraînerait l'effondrement de l'économie par la diminution drastique de la masse monétaire.

Toutes les études démontrent que la monnaie endogène ou de crédit est nécessaire pour stimuler l'économie mais qu'elle n'est qu'un palliatif qui se révèle à terme pire que le mal. Il faut donc remplacer la monnaie d'endettement par une monnaie permanente.

 

E - la politique de changement des contreparties de la monnaie

Initiateur et concepteur de la proposition de loi organique 157 déposée par l'intergroupe conjoncture à l'Assemblée Nationale en 1981, Tovy Grjebine proposait de stimuler le désendettement des agents économiques par des crédits d'impôt correspondants. Ce qui, nécessairement, entraînerait l'augmentation du déficit public qui serait compensé par une injection égale de monnaie de la Banque Centrale.

Il n'y aurait pas d'augmentation de la masse monétaire mais simplement changement des contreparties de la monnaie qui assainirait l'économie et diminuerait la charge des frais financiers. L'opération pourrait être renouvelée plusieurs années de suite, elle stimulerait l'économie. Des études prospectives ont été faites en France et aux États-Unis qui donnèrent comme résultat une croissance de 5 % par an et une éradication du chômage en une législature.

Malheureusement ce projet de loi ne fut examiné qu'en juillet 1981. Le nouveau gouvernement socialiste avait pris une autre voie dont chacun se souvient des pitoyables résultats.

 

Avant de conclure ce chapitre et d'aborder le dernier par un aperçu historique des politiques de relance par le désendettement, je citerai cette phrase de Marcel Macaire, professeur d'économie à Nanterre : "la création monétaire par la Banque Centrale est par nature une dette sans créancier puisque l'État se prête à lui-même. C'est parce qu'il se croit obligé d'en avoir, qu'il emprunte à d'autres que lui-même et crée de ce fait un déficit budgétaire. C'est cette méprise — et elle seule — qui crée la dramatique situation du chômage dans laquelle nous nous débattons aujourd'hui".

 

VI - Aperçu historique des politiques de relance

 

A - Moïse

Curieusement la première analyse sur la tyrannie de la dette et les moyens de s'en défaire se trouve dans le Lévitique 25, 10-11: Un des livres du Pentateuque que la tradition attribue à Moïse (treize siècles av. J-C). Il proclame l'extinction de toutes les dettes et la libération de tous les hébreux mis en esclavage pour cause de dettes tous les 49 ans, année du Jubilé. Ce texte n'est évidemment pas argumenté puisque c'est un décret divin, mais l'on ne peut qu'y constater sa pré-science dans une économie non monétaire.

Je signale qu'un gramme d'or épargné à la naissance de Jésus Christ à 3,25 % par an représenterait actuellement 6,1026 tonnes d'or, soit l'équivalent de la masse de la terre.

Deux économistes genevois, Dembinski et Bovin ont repris récemment l'idée jubilaire de remise des dettes et de créances dans Rapport moral sur l'argent dans le monde, 2000 (www.obsfin.ch).

 

B - L'Antiquité

Le monde grec traversa au VIIe siècle av. J-C. une crise qui fit croître les domaines des grands propriétaires terriens et réduisit les paysans pauvres à la misère et à l'esclavage pour dette. Constatant que l'armée athénienne se réduisait de manière dramatique (car seuls les hommes libres pouvaient combattre), Solon (640-561) libéra les athéniens mis en esclavage et éteignit toutes les dettes. Il procéda en même temps à une dévaluation de 30 % et développa l'artisanat en vue de l'exportation.

Petite ville au VIIe siècle, Athènes était devenue une ville prospère au début des guerres médiques (490-479). Mais, c'est à la suite de la découverte des nouveaux filons argentifères dans les mines du Laurion, qu'Athènes doit sa splendeur. En effet, cet afflux soudain de métal précieux fut utilisé par Thémistocle (524-459) en 483 pour la construction d'une flotte gigantesque de 200 trirèmes qui lui permit de remporter la victoire de Salamine en 480 contre les Perses. Il assurait à l'avenir l'hégémonie d'Athènes sur le monde grec jusqu'à la fin de la guerre du Péloponnèse en 404. La ville d'Athènes tirait l'essentiel de ses ressources de l'exploitation des mines lui procurant une richesse inégalée dont il reste encore actuellement tant de vestiges.

Face à l'afflux de richesses, les Athéniens étaient confrontés au danger de l'accumulation et de la thésaurisation. Ils l'évitèrent par une politique active de grands travaux (la construction du Pirée, de l'Acropole...) et par les lois de liturgie qui obligeaient les citoyens les plus riches et les métèques à des dépenses de service public dont la plus coûteuse était l'équipement des trières.

Il est intéressant de noter que la chute d'Athènes, d'après Thucydide, fut due à la trahison d'Alcibiade qui conseilla aux Spartiates d'occuper en 413 la Décélie qui contrôlait les mines du Laurion. Alcibiade ajouta "des richesses que compte le pays, la majeure partie vous reviendra" et du même coup, "les Athéniens se trouveront privés des revenus des mines d'argent du Laurion" [Histoire de la guerre du Péloponnèse, VI, chap. XCI].

À l'origine, Rome ne connaissait que la monnaie de bronze, l'as qui suffisait aux échanges de la cité. Mais à la fin du IIIe siècle, la deuxième guerre punique (218-202) contre Carthage entraîna des dépenses telles que Rome dut faire appel à l'emprunt privé. Dans l'incapacité de rembourser ses créanciers, Rome dévalua progressivement sur 16 ans des 5/6èmes de sa valeur, monétisant en grande partie l'Ager Publicus. Heureusement, la victoire souriait aux Romains qui s'accaparèrent les mines argentifères espagnoles de la région de Carthagène jusqu'alors sous domination carthaginoise qui rapportèrent à Rome 25 000 deniers d'argent par jour.

L'État romain conserva jusqu'à sa chute le monopole de la frappe des monnaies dont les quantités quintuplèrent annuellement entre 140 et 90 avant J.-C., pour se stabiliser jusqu'à l'avènement de l'Empire. Pour avoir un ordre de grandeur, quelques années de monnayages romains représentaient l'équivalent d'un siècle de monnayage athénien. Cependant, Rome connut de nombreuses crises d'endettement et de paiement, en particulier au 1er siècle avant notre ère, qui étaient souvent dues à des crises extérieures comme la guerre d'Asie contre Mithridate (89-85 av. J-C) qui entraînaient la perte de confiance, la rides publica, la thésaurisation et le manque de liquidités, l'inopia nummorum. L'État procédait alors à des injections massives par le canal des dépenses militaires, décidait un moratoire des dettes et octroyait des crédits d'impôt. L'équilibre serait rétabli avec la victoire par le butin ou le tribut. Ainsi l'Asie et la Grèce seront pressurées de telle manière que cela prendra des allures de cataclysme économique. Son " endettement " vis-à-vis de Rome était de 720 millions de deniers qu'il faut rapporter à ce que coûtait la distribution de blé annuelle à Rome, 15 millions, soit à peine 2 % de la dette de l'Asie.

Un autre phénomène intéressant est l'absence de dette publique à Rome. Différence notable avec l'Occident qui connut le problème insurmontable de la dette publique dès le début du XIVe siècle et créa une classe inconnue de l'Antiquité : les financiers.  Claude Nicolet dans Rendre à César, conclut que "l'absence de dette publique explique que les entreprises financières et le système de crédit ne se soient pas transformés à Rome". Rome ne connaissait pas la monnaie d'endettement.

L'observation de l'histoire monétaire nous montre que toute grande renaissance politique fut précédée par un afflux massif de numéraire. Le siècle d'Auguste, le "siècle d'or", fut financé par le pillage des temples égyptiens après la victoire d'Actium contre Marc-Antoine, la renaissance carolingienne par la découverte de mines d'argent en Dacie, la Renaissance par l'afflux d'or des Amériques, la révolution industrielle en Europe par la découverte des mines d'or de Californie...

 

 

C - L'époque contemporaine

Mais ceci s'est produit sous le régime de la monnaie métallique. Il en va autrement avec la monnaie d'endettement dont nous avons vu qu'elle résout le problème de l'écart récessionniste en le reportant dans le temps jusqu'au moment où est atteint le seuil d'endettement qui ne permet plus de l'utiliser, c'est alors la crise.

Or, la crise la plus exemplaire et qui a laissé le plus de traces dans la mémoire européenne est celle de 1929. Sans entrer dans les détails, son origine est due au rétablissement de la convertibilité du Franc et de la Livre en or en 1925-1928.

En effet, dans le système de Gold Exchange Standard, l'or se trouvait aux États-Unis et uniquement le dollar était convertible. Churchill et Poincaré en rétablissant la convertibilité de leur monnaie, échangèrent des dollars contre de l'or, ce qui diminua le stock aux USA, et qui par contrecoup réduisit la part de la monnaie permanente dans la masse monétaire. Les premiers signes d'essoufflement de l'économie américaine apparurent au début de 1929.

Malgré les discours rassurants, la production industrielle se mit à baisser. Dès septembre, la spéculation boursière financée essentiellement par le crédit bancaire commença à montrer des signes d'inquiétudes, les ventes s'accélérèrent et en octobre, le jeudi 24, les prix dévissèrent entraînant dans leur chute la faillite du système bancaire américain.

La répercussion en Europe ne se fit pas attendre, et dès les premières semaines de 1930, elle entrait en dépression. L'Allemagne et l'Autriche furent les plus touchées car leurs économies étaient extrêmement liées au secteur bancaire américain (qui avait prêté énormément par les plans Dawes et Joung décidés à la Conférence de Gênes en 1922. Il s'agit à l'époque de trouver une solution aux questions des réparations).

En 1931, la moitié du système bancaire allemand et autrichien avait fait faillite, entraînant une diminution formidable de la masse monétaire en jetant dans la misère des millions de personnes. En 1932, l'Allemagne connaîtra 7 millions de chômeurs, et 25 % de la population sera plongée dans la mendicité.

Face à l'incapacité de la République de Weimar et face au péril de la révolution bolchevique, les Allemands se jetèrent dans les bras d'Adolf Hitler en janvier 1933, seule planche de salut dans un monde qui venait de chavirer.

Ici apparaît un homme, ignoré de l'histoire économique et dont il faut remercier M. Grjebine d'avoir eu le courage de le ressusciter, M. Ernst Wagemann. Il rentrait des États-Unis, où il enseignait l'économie, avec une solution : ce que nous vivons actuellement est le contraire de l'hyper-inflation du début des années vingt où il y avait trop de monnaie en circulation par rapport à la production. Maintenant, nous sommes en déflation, il manque de la monnaie par rapport à la production. Il faut donc en émettre. La nouvelle équipe dirigeante fut séduite et Schacht, le magicien de la finance, fut chargé d'appliquer cette solution.

Il est intéressant de signaler que la préface de la Théorie Générale de J. M. Keynes, publiée en 1936, était consacrée à la politique du docteur Schacht et faisait l'apologie de la méthode de préfinancement de l'économie par le troisième Reich. Cette méthode était considérée par l'auteur comme le seul moyen efficace de lutter contre la crise et le chômage. Mais Keynes ne s'arrête pas là, et au cours de son ouvrage, il défend les thèses de Silvio Gessell et du major Cliford Hugh Douglas et pense qu'il y a encore beaucoup à trouver dans ces deux économistes qui sont restés dans l'anonymat.

En quoi consistait-elle ? L'État passa commande de travaux auprès des entreprises privées qu'il paya avec des bons de travail escomptables auprès de la Banque Centrale. Les entrepreneurs payèrent leurs salariés et leurs fournisseurs avec ces moyens de paiement, qui furent ensuite présentés et escomptés auprès d'une banque secondaire qui elle-même les présenta et se les fit escompter auprès de la Reichbank, qui ne se les fit jamais rembourser par l'État. L'État avait procédé à une émission ex nihilo de monnaie permanente. Les résultats ne se firent pas attendre ; en 1937 le chômage avait disparu, l'économie connaissait une croissance formidable et en 1938, l'Allemagne dut faire appel à de la main-d'ceuvre étrangère.

L'expérience venait de démontrer que l'argent n'est pas gagé parce qu'il y a derrière lui, mais parce qu'il y a devant, le travail et la production de la communauté.

En 1938, aux États-Unis, malgré les plans de relance par le déficit public, le chômage touchait encore 8 millions d'américains. Les bruits de bottes venant d'Europe se faisant entendre, le gouvernement fédéral décida la loi prêt-bail de financement de l'effort de guerre. Il émit des bons du trésor qui furent rachetés par la Federal Réserve. 20 % de l'effort de guerre furent financés par ce principe. En 1941, les États-Unis ne connaissaient plus le chômage.

D'autres expériences ont été menées depuis. Pendant les Trente Glorieuses parce qu'on appelle "le circuit du trésor", au Japon entre 1975 et 1980 et plus récemment aux États-Unis en 1991, la Federal Réserve a monétisé 100 milliards de dollars de bons du trésor dont chacun a pu mesurer les conséquences par l'expansion et le dynamisme de l'économie américaine pendant 7 ans.

 

Conclusion

Pour reprendre une métaphore chère aux Anciens, la monnaie est à l'économie ce que le sang est au corps humain; s'il en manque, c'est l'anémie, s'il y en a trop, c'est la congestion. Il ne viendrait à l'idée de personne d'emprunter son propre sang. Alors, il revient à l'État, pour le service du bien commun, d'assurer l'offre à la demande de monnaie pour qu'enfin l'économie soit au service de l'homme. »

 

 

Source : Éric Dillies, dans une synthèse passionnante intitulée « Monnaie et souveraineté » :  
http://fragments-diffusion.chez-alice.fr/monnaieetsouverainete.html.

(Extrait du Bulletin Science et  Foi n°64 et 65, 2e Trime 2002, CESHE France - B.P. 1055 - 59011 Lille cedex)

Il faut absolument lire les parties III à VI de ce document exceptionnel.

 

Citation n°9, de Jacques Généreux :

 

« L’acceptation du chômage et le culte de la désinflation

 

Le mal politique de l’époque n’est plus le chômage, c’est l’inflation. En effet, en 1979 aux États-Unis et en Grande-Bretagne, puis au début des années 1980 en Europe continentale, on fait le deuil de l’objectif du plein emploi qui faisait l’unanimité depuis des années 1940, pour se convertir au culte d’une nouvelle priorité, la désinflation.

Le fondement officiel de cette conversion est la nécessité d’être compétitif dans un monde où la concurrence internationale est de plus en plus vive.

En réalité, si tout le monde réduit son inflation, personne ne devient plus compétitif. On n’est donc contraint à la désinflation que parce que quelqu’un a initié le mouvement et que les autres sont obligés de s’aligner, non pas pour être plus compétitifs, mais pour éviter de l’être moins.

Si les pays n’avaient aucun intérêt propre à la désinflation, ils tenteraient probablement de se dissuader les uns des autres de se lancer dans une guerre des prix, exactement comme ils s’entendent pour éviter des pratiques de concurrence déloyale. Ainsi, quoique la concurrence internationale ait certainement joué un rôle, la conversion générale et rapide aux dogmes de la rigueur monétaire et de l’inflation minimale n’a pu se produire que parce qu’elle présentait un autre intérêt pour les élites dirigeantes. Mais lequel ? Pourquoi cette conversion est-elle désirée par les politiques ? Pourquoi est-elle somme toute acceptée par la société ? Pourquoi à ce moment-là et pas avant ? Si l’inflation est le mal absolu que l’on dénonce alors, pourquoi l’avoir toléré si longtemps ?

C’est que jusqu’alors, précisément, hormis les rentiers, tout le monde trouvait son compte dans les politiques d’expansion monétaire modérément inflationnistes.

D’abord, parce que les revenus nominaux des salariés et des entreprises progressaient plus vite que l’inflation.

Ensuite et surtout, parce qu’une telle politique monétaire se traduisait par des taux d’intérêt réels faibles ou négatifs, ce qui, pour faire simple, signifie que le crédit est gratuit, voire rapporte de l’argent à celui qui s’endette !

Cette politique très favorable à l’investissement et au financement bancaire des entreprises n’était pas moins avantageuse pour les ménages : ceux-ci pouvaient accéder plus vite aux biens d’équipement et devenir propriétaires de leur logement.

Les seuls vrais perdants de cette politique monétaire étaient ceux qui tiraient une part essentielle de leurs revenus de placements financiers : ne pouvant trouver dans les taux d’intérêt une rémunération stimulante, ils investissaient dans les actions des grandes sociétés cotées en Bourse. Mais, là aussi, leurs exigences en matière de rendement étaient limitées par celles des managers qui privilégiaient d’autres objectifs (croissance de la firme, prestige, etc.). Les dirigeants disposant d’un accès aisé au financement bancaire étaient relativement indépendants de leurs actionnaires.

D’autant que ces derniers, dans un espace financier réglementé et cloisonné à peu près partout dans le monde, n’avaient pas la liberté ni l’opportunité de chercher ailleurs des managers plus complaisants à leur égard. En un mot, les actionnaires n’étaient pas alors en position de force pour exiger les meilleurs dividendes.

Si les rentiers avaient donc, à l’évidence, intérêt au retournement des politiques monétaires en faveur de la désinflation et d’une meilleure rémunération de l’épargne, ils restèrent longtemps isolés dans une société qui tolérait l’inflation et jouissait du crédit gratuit.

Mais au tournant des années 1970-1980, leurs aspirations sont devenues celles de toute une génération de cadres économiques et politiques accédant alors au pouvoir.

Ces derniers appartenaient en effet aux classes aisées et intermédiaires qui, durant les Trente Glorieuses, avaient pu constituer un patrimoine immobilier et une épargne financière, grâce à la progression des revenus et à la faiblesse des taux d’intérêt.

Mais une fois leur patrimoine constitué, les quadragénaires et quinquagénaires des années 1970-1980 n’avaient plus besoin du crédit gratuit. Ils espéraient au contraire des taux d’intérêt plus élevés qui rémunéreraient mieux leur épargne. L’inflation n’avait plus à leurs yeux la moindre vertu, tandis qu’elle érodait la valeur réelle de leur patrimoine. Aussi devint-elle un souci majeur dans les années 1970 (…) »

 

Source : Jacques Généreux, professeur d’économie à Sciences Po, La Dissociété, Seuil, 2006).

Il faut absolument lire ce livre formidable : c’est un chef-d’œuvre de clarté et de pédagogie.        
Chaque paragraphe est important, du début à la fin.

 

 

 

 

Ainsi, l’âge et la fortune des hommes au pouvoir permet de comprendre enfin pourquoi la misère perdure pour le plus grand nombre !

 

Je ne peux m’empêcher de penser au tirage au sort comme une véritable panacée juridique pour nous affranchir des effets pervers de l’élection qui est largement une illusion, celle de dominer nos maîtres en les désignant… Pure illusion, à l’expérience des faits.

 

Si vous avez des infos complémentaires sur ce scandale du hara-kiri monétaire accepté discrètement par les politiciens de métier, vous êtes bien sûr les bienvenus :o)       
Vous pouvez réagir, critiquer ou compléter ces idées sur la partie ‘blog’ de ce site :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/05/01/72-non-ce-n-est-pas-trop-cher-le-financement-des-besoins-collectifs-est-rendu-sciemment-ruineux

 

Surtout, ne ratez pas le très précieux http://www.fauxmonnayeurs.org/

 


 

Le projet de "TRAITÉ MODIFICATIF" du Conseil européen : le viol politique reprend son cours habituel : les chefs d'État violentent leurs peuples (26 juin 2007) (Lien)

Je viens de lire le projet de "traité modificatif" du Conseil européen et j’en ai encore des bosses sur la tête. Tout d’abord il faut expliquer qu’il s’agit d’une feuille de route, ce n’est pas encore un nouveau Traité. Il faut être prudent sur la critique car on ne connaît pas encore le contenu du  futur document. Mais en lisant cette simple feuille de route, j’ai sursauté à tous les paragraphes. Il est souvent répété dans ce document que les travaux de la Convention Giscard de 2004 devront être intégrés dans le Traité. Cela signifie tout simplement que le Traité constitutionnel Européen, celui qui a été conçu par la Convention Giscard et qui a été expressément refusé par les Français et les Hollandais, à quelques détails près, va nous être imposé par la voie parlementaire.

J'analyse cette démarche autoritaire des exécutifs contre leur propre peuple comme une reprise du viol politique qui dure depuis cinquante ans — et qui n'a été interrompu que par les cris de la victime le 29 mai 2005, le temps qu'on lui remette rapidement son bâillon.

Dans le détail du texte, c’est indéniable, il y a un certain nombre de changements. Mais c'est surtout le fait d’évolution de la terminologie pour effacer l'idée qu'il s'agirait d'une constitution. Ainsi les termes de « loi » et « loi cadre » sont abandonnés au profit de « règlements » et « directives » qui n’évoquent pas ce coté institutionnel, et l'usage du mot "Constitution" est expressément proscrit. Mais ce sont des détails, des manoeuvres rhétoriques.

En réalité, ce texte est un danger pour ce qu'il dit,  mais aussi pour ce qu’il ne dit pas : il ne permet toujours pas le contrôle des pouvoirs (personne n'est responsable de ses actes dans les institutions européennes) ; l'exécutif bénéficie toujours de la même confusion des pouvoirs sur des sujets cachés (sous le nom trompeur d'"actes non législatifs" et de "procédures législatives spéciales", art. I-34 et I-35 du TCE) ; il laisse perdurer l'extravagante dépendance des juges européens envers les exécutifs qui les nomment (art. I-29.2), et n'organise pas l'indépendance des médias ; la Banque centrale y a toujours une mission chômagène favorable aux rentiers (I-30.3) ; les citoyens y sont toujours aussi impuissants contre les abus de pouvoir ; etc.

En fait, le plus important dans cette affaire est soigneusement éludé dans les débats par les politiciens de métier, vous le constaterez : les hommes ont inventé le concept de Constitution non pas pour organiser les pouvoirs (qui sont bien capables de s'organiser tout seuls) mais pour affaiblir les pouvoirs, pour les diviser, pour les contrôler. Ceci est essentiel.

Donc, de la même façon que ce n'est pas l'étiquette "Constitution" qui est dangereuse pour les citoyens, ce n'est pas l'absence d'étiquette "Constitution" qui peut nous rassurer : ces institutions, par les pouvoirs qu'elles mettent en place, SONT une Constitution PAR NATURE et elles sont, par là même, dangereuses pour tous ceux qui vont obéir à ces pouvoirs ; et nous sommes bien fous de laisser les exécutifs écrire eux-mêmes les limites et les contrôles de leurs propres pouvoirs.

En proclamant que leur texte "n'est plus une constitution", les auteurs sont doublement en situation d'abus de pouvoir caractérisé : il ne leur appartient pas d'écrire ce texte — la Conférence Inter Gouvernementale (CIG) est profondément illégitime dans ce rôle — et il ne leur appartient pas davantage de le requalifier. Ce processus malhonnête est un coup d'État de nos propres exécutifs contre les principes de base de la démocratie.

 

Vous pouvez réagir (sur le site www.marianne2007.info) :
http://www.marianne2007.info/Etienne-Chouard-Avec-le-traite-modificatif,-les-chefs-d-etat-violentent-leurs-peuples-_a1625.html

 

 


 

Plaidoyer pour un peuple constituant et vigilant  (31 mars 9 avril 2007) (Lien)

Chers amis, je résume ici, sur une page, ma critique de nos soi-disant « démocraties » :

C’est aux Citoyens d’écrire eux-mêmes leur Constitution et ensuite de la protéger.
Pour rester libres, les citoyens doivent toujours rester vigilants à l’encontre des pouvoirs.


1      La démocratie est une réponse des hommes au problème qu’ils ont avec les pouvoirs.

2      En effet, sans exception, le pouvoir corrompt et le pouvoir absolu corrompt absolument.

3      Depuis la nuit des temps, aussi vertueux soient-ils au départ, tous les hommes au pouvoir « changent » et finissent par abuser de ce pouvoir, s’ils restent longtemps au pouvoir.

4      Tous les pouvoirs, et notamment les exécutifs (les gouvernements), tendent à « s’autonomiser », c’est-à-dire à concentrer le plus possible de pouvoirs et surtout à s’affranchir de tout contrôle rigoureux.

5      Donc, pour les humains, les pouvoirs sont à la fois nécessaires et dangereux.

6      C’est pourquoi les gouvernés ont imposé à leurs gouvernants de signer un pacte, appelé « Constitution », qui institue les pouvoirs et qui fixe surtout les limites de chaque pouvoir, sans exception. Une Constitution est un acte de défiance.

7      Montesquieu a montré qu’il fallait, par le moyen de la Constitution, affaiblir les pouvoirs, —notamment le pouvoir exécutif qui est le plus dangereux—, en séparant les pouvoirs et en contrôlant les pouvoirs (à tout moment, évidemment, et non pas seulement au moment des élections).

8      Mais Montesquieu a oublié de dire de faire très attention à QUI va écrire la Constitution : en effet, si les citoyens laissent les hommes au pouvoir écrire eux-mêmes les limites de leurs propres pouvoirs, c’est perdu : cette négligence citoyenne conduit naturellement à l’institution­nalisation de l’impuis­sance politique des gouvernés : transformation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes en un droit des élus à disposer des peuples.

9      Ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir ; ce n’est pas aux ministres, ce n’est pas aux parlementaires, ce n’est pas aux juges, d’écrire ou de réviser la Constitution, car ils sont, en l’occurrence, à la fois juges et parties : ils ont un intérêt personnel dans les règles qu’ils instituent et ils trichent en établissant des contrôles simulés et des pouvoirs citoyens factices.

10   Quand des ministres, des présidents, des parlementaires ou des juges créent ou modifient une Constitution, c’est un abus de pouvoir. Ils ont un pouvoir important et ils en profitent pour en abuser. C’est une juste cause d’insurrection.

11   Les parlementaires et les ministres ne sont pas propriétaires de la souveraineté nationale, ils n’en sont que les dépositaires temporaires. Quand ils transfèrent notre souveraineté sans notre accord direct, sans référendum, ils se comportent comme des locataires qui vendraient la maison en douce…

12   Pour comprendre ce qui nous est arrivé à l’occasion de la construction de l’Union européenne, il faut voir que l’important, ce n’est pas qui VOTE la constitution, ce qui compte, c’est qui ÉCRIT la Constitution.

13   Le "Traité établissant une Constitution pour l’Europe" est            
un traité anticonstitutionnel :

14   d’abord parce que, précisément, il est constitutionnel : le TCE crée une constitution de fait, par la nature même des règles qu’il impose en matière de pouvoir, règles dangereuses par essence : pouvoir de légiférer, pouvoir de gouverner, pouvoir de juger… De fait, sans notre accord, les institutions européennes remplacent progressivement les institutions nationales.


15   Indépendamment de l’étiquette que lui collent ses auteurs, —"traité" ou "constitution"—, c’est assurément une (mauvaise) constitution qui n’avait jamais dit son nom que nos ministres ont écrite depuis 50 ans :

a.     faiblesse extrême du parlement (masquée par de petits progrès montés en épingle),

b.     confusion des pouvoirs dans les mains de l’exécutif (dans des domaines importants et dissimulés),

c.     dépendance étroite des juges envers les exécutifs,

d.     non contrôle des pouvoirs (aucun organe n’est responsable de ses actes),

e.     protection excessive et injustifiée des fonctionnaires,

f.       impuissance politique des citoyens (pas de référendum d’initiative populaire),

g.     information manipulable : médias, organes statistiques et instituts de sondage sous influence (aucune règle constitutionnelle ne protège l’indépendance politique et économique des organes d’information).

h.     révisions constitutionnelles à deux vitesses : impossibles avec le peuple (procédure "ordinaire" à triple unanimité) et faciles sans le peuple (procédure "simplifiée" sans référendum).

16   Ensuite parce qu’on n’impose pas une Constitution par traité, la seule source acceptable du pouvoir étant la souveraineté populaire, le TCE, comme tous les traités qui l’ont précédé, fondamentalement inacceptable pour les peuples qu’il viole, le TCE est un traité anticonstitutionnel.

17   Les Citoyens doivent se réapproprier la Constitution. Ils doivent l’écrire eux-mêmes et c’est ensuite encore à eux de la protéger comme leur outil le plus précieux contre les abus de pouvoir. On peut tout déléguer, sauf ce pouvoir-là.

18   Donc, il nous faut un processus constituant honnête, une Assemblée Constituante dans laquelle les membres n’écrivent pas des règles pour eux-mêmes, des membres indépendants des partis et de toute organisation qui exerce ou brigue le pouvoir.

19   Et le seul moyen de désigner des constituants indépendants des hommes de pouvoir, c’est de faire parrainer des volontaires par chaque citoyen, sans se laisser imposer les candidats des partis.

20   On peut ensuite choisir les constituants parmi ces volontaires hors partis :          
a) soit par tirage au sort,              
b) soit avec plusieurs tours successifs d’élection.

21   Enfin, sans doute, les constituants doivent se déclarer inéligibles aux fonctions qu’ils instituent.

22   En somme, il faut rigoureusement séparer le pouvoir constituant des pouvoirs constitués. Quand les citoyens auront réussi à imposer cette hygiène démocratique fondamentale, ils sortiront enfin de la « préhistoire de la démocratie ».

23   Et bien sûr, inutile de compter sur les partis et leurs amis pour débattre et faire connaître cette thèse : c’est aux simples citoyens de faire circuler cette idée, s’ils la trouvent bonne, pour s’émanciper des voleurs de pouvoir. Ça ressemble bien au débat référendaire de 2005.

24   Les trois "principaux" candidats à la présidence, ceux que nous imposent les partis et les médias, vont tout faire pour être élus sans avoir à débattre une seule fois de leurs abus de pouvoir au plus haut niveau. Tous vont faire diversion avec des non sujets. À nous d’imposer que ces abus de pouvoir soient débattus publiquement.

Version pdf de ce texte


 


Une « insurrection électorale » pourrait tout changer :
le seul moyen de nous émanciper de la tutelle des partis, c’est d’élire un candidat hors parti 
et d’écrire nous-mêmes la Constitution qui nous protègera enfin des abus de pouvoir.


Pour réagir : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/03/31/61-pour-un-peuple-constituant-et-vigilant

 


 

SOS journaliste en panne : réservoir à questions impertinentes (9 mars 2007) (Lien)

Le travail des journalistes, c’est d’inquiéter les pouvoirs.

Les journalistes sont des « sentinelles du peuple », comme on disait en 1789 : ils doivent veiller, surveiller, et nous alerter en cas de danger.

Les journalistes sont — devraient être — un contre-pouvoir efficace contre la tyrannie.

L’expression « journaliste rebelle » devrait être un pléonasme.

La place des journalistes est donc de rester à distance des hommes de pouvoir, pour garantir leur vigilance et leur exigence.

Pourtant, la plupart des journalistes se sont fait apprivoiser, acheter, salarier, précariser et au final, subordonner par les plus riches.

Aujourd’hui, quand ils ne sont pas pigistes hyper-dépendants, ils déjeunent et s’amusent avec les ministres et les parlementaires qu’ils embrassent au lieu de les inquiéter.

L’expression « journaliste rebelle » est en train de devenir un oxymore.

Les débats politiques sont donc devenus insipides et creux : personne ne pose plus les bonnes questions, épineuses, prenant le temps d’argumenter pour les épuiser. La télévision est devenue un outil radical pour dépolitiser les citoyens, pour les distraire de l’essentiel.

J’ai listé, sans espoir, quelques unes des piques qu’oublient de lancer nos soi-disant « journalistes » à nos soi-disant « représentants ».

J’aimerais connaître vos propres questions impertinentes.

Bien entendu, ce message est désespéré : tout est verrouillé pour que ces questions ne soient jamais posées publiquement à ceux qu’elles concernent.

 

·           Comment vous croire après que vous ayez menti, ne serait-ce qu’une seule fois ?        
Éventuellement compléter la question en rappelant les deux ou trois mensonges les plus récents du politicien interrogé : la promesse sur l’honneur de Nicolas Sarkozy de ne jamais nationaliser GDF ; ou l’aveu de François Hollande que le PS aurait évidemment mené une campagne pour le Non au TCE si seulement Chirac avait engagé son mandat sur le résultat du référendum ; ou le fait, pour Ségolène royal, de nous présenter le droit de pétition (sans garantie de résultat) comme s’il s’agissait du référendum d’initiative populaire (RIP) et de la démocratie participative tant attendue ; ou encore la promesse formelle par TOUS les partis d’instituer le RIP et le mensonge prouvé en fin de mandat quand on constate que le RIP n’a même pas été débattu, etc.   Voir un récapitulatif consternant au sujet des énormes mensonges du PS dans le n°6 du journal « Le Plan B », p. 4 et 5 : « Comment le PS a "réformé" les services publics" ».

 

·           Autre façon de poser la question : après 25 ans de mensonges impunis du PS (menteur A) et de l’UMP (menteur B), — mensonges apparemment bien repérés par 70 % des citoyens —, considérez-vous que le choix imposé aujourd’hui entre un menteur A et un menteur B soit un choix démocratique ? D’après vous, quel est le sens politique du vote blanc ? Pourquoi le vote blanc est-il confondu avec les votes nuls par le code électoral ? Pourrait-il y avoir, par hasard, un lien avec le fait que le code électoral est écrit par les parlementaires et les ministres eux-mêmes ? Trouvez-vous normal que le code électoral soit rédigé et révisé par les élus ?

 

·           Les institutions devraient-elles prévoir une procédure radicale pour éliminer définitivement du pouvoir les menteurs et les voleurs ? Ou bien l'élection est-elle, pour vous, une sorte de gomme à turpitudes ? Qui aurait la légitimité pour institutionnaliser de telles procédures ?

 

·           Le mensonge est-il inscrit (programmé) dans le génome de l’élection, tant que les institutions ne prévoient aucun contrôle citoyen entre deux élections ? Comment expliquez-vous l’absence totale de contrôle du respect des promesses électorales ? Le fait que ceux qui écrivent la constitution sont ceux-là mêmes qui exercent ensuite le pouvoir peut-il avoir un lien avec cette absence de règles contraignantes dans la constitution ? 

 

·           Les politiciens peuvent-ils écrire eux-mêmes les limites de leur propre pouvoir (la Constitution) ? N’est-ce pas trop leur demander ? Est-il raisonnable, de la part des citoyens, de laisser les politiciens fixer eux-mêmes les contre-pouvoirs qui seront censés les limiter eux-mêmes ? N’y a-t-il pas là LA source principale —évidente— de la détestable impuissance politique des citoyens ?

 

·           Si vous nous imposez par voie parlementaire, comme vous le promettez, le maudit "traité constitutionnel" que nous venons de refuser expressément par référendum, quels moyens techniques comptez-vous utiliser pour réprimer l’insurrection ?

 

·           Pouvez-vous nous expliquer à quoi sert une Constitution, selon vous ?

 

·           Quand peut-on dire qu'on a affaire à une "Constitution" ? Suffit-il que les auteurs aient placé l'étiquette "Constitution" en tête de leur texte (ou qu'ils n'aient justement pas mis cette étiquette) pour répondre à la question précédente, ou bien faut-il plutôt considérer ce que contient vraiment le texte pour en déterminer la nature ? Est-il utile, pour savoir si le texte est une "constitution", de vérifier si le texte met en place des institutions et un pouvoir contraignant pour les citoyens ?

 

·           Quel rôle les citoyens doivent-ils jouer dans l'élaboration de leur Constitution ? Quel problème posent les traités à cet égard ? Trouvez-vous légitime d'imposer des institutions aux peuples par voie de traité ? À partir de quand parlez-vous d'abus de pouvoir ?

 

·           Quels sont les signes concrets qui, d’après vous, permettent de parler de dérive tyrannique ?

 

·           D'après vous, la démocratie est-elle acquise pour toujours et peut-on se contenter de faire confiance aux pouvoirs en place, ou bien est-elle au contraire toujours en danger et faut-il la protéger contre toute atteinte ? L'article 35 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1793 dit "Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs." Qu'en pensez-vous ?

 

·           Un candidat devient-il un saint par le seul fait d'avoir été élu ? À quels contrôles acceptez-vous de vous soumettre entre deux élections ? Pourquoi pas plus ?

 

·           Quelle est la légitimité de vos décisions passées qui ont abandonné aux banques privées le droit public décisif de battre monnaie ? À choisir entre l’intérêt des banquiers (et de la finance) et l’intérêt général, que choisissez-vous ? Pourquoi ?

 

·           Quel lien de causalité faites-vous entre la rareté de la monnaie (créée chichement aujourd’hui —uniquement contre endettement et avec intérêt — par des acteurs privés privilégiés — les banques privées — qui ont un intérêt personnel à ce que la monnaie soit rare et chère puisque ce sont eux qui la prêtent) et le chômage et la misère ?

 

·           Quel lien faites-vous entre la dette publique (astronomique) et l’obligation pour l’État d’emprunter pour financer la dépense publique ? Avez-vous comparé les courbes de l’endettement public et les avez-vous rapprochées de la date de la dernière émission de monnaie par la Banque de France (1973) ?

 

·           Avez-vous déjà étudié la thèse selon laquelle la dette de l’État est largement artificielle et créée au profit des banques privées auprès desquelles l’État a mystérieusement consenti à s’endetter pour se financer (au lieu de créer l’argent dont il a besoin au fur et à mesure, comme il a toujours fait auparavant) ? Quelle est, d’après vous la part que représente ce sabordage monétaire au profit des banquiers dans le montant actuel de la dette publique ?

 

·           Pourquoi renoncez-vous à ce que l’État crée sans intérêt autant de monnaie que ce dont les citoyens auraient besoin pour leur activité économique ? (Soyez précis, s'il vous plaît.) 

 

·           Quelle est la légitimité des banquiers pour conserver le droit de battre monnaie et d’y percevoir un intérêt (sans travail) alors que c’est, à l’évidence, un privilège digne de l’Ancien Régime ?

 

·           Est-ce que je peux, moi aussi, être banquier, parce que ça a l’air génial, comme boulot : plus t’es riche, plus t’es riche… sans rien faire… Est-ce que je peux être banquier ? Pourquoi pas ?

 

·           Pourquoi laissez-vous la monnaie devenir une marchandise, avec un marché, une rareté, un prix, des spéculations, des accumulations, des confiscations, au lieu de forcer tous les acteurs à n’y voir qu’un moyen d’échange abondant ?

 

·           Au début du 20e siècle, le président américain Lincoln disait qu’il avait deux ennemis : un à l’extérieur et un à l’intérieur, les banquiers, ceux-ci étant de loin les plus redoutables. Il avait juré de s’occuper d’eux sérieusement (de reprendre la souveraineté de l’État sur la monnaie) dès après sa réélection. Cinq jours après cette réélection, il fut assassiné... comme Kennedy le fut à son tour après avoir fait des annonces comparables. Vous sentez-vous en danger de mort si vous osiez remettre en cause les privilèges féodaux des banquiers ?

 

·           Vous sentez-vous propriétaire de la souveraineté nationale ou seulement locataire ? Un locataire peut-il disposer librement du bien qu’il loue, ou bien doit-il évidemment en référer au propriétaire ? Les élus ont-ils la légitimité pour modifier eux-mêmes la Constitution ? 

 

·           Être élu donne-t-il tous les pouvoirs ? Vous sentez-vous tout puissant par rapport à vos électeurs (entre deux élections) ? 

 

·           Avez-vous conscience du sentiment d’impuissance que vous laissez à vos électeurs entre deux élections ? Pensez-vous que ce soit supportable longtemps pour des gens éduqués ? À partir de quand, à votre avis, les gens sont-ils prêts à faire la révolution ?

 

·           Comment pourrait-on séparer le pouvoir constituant des pouvoirs constitués ? Au moment de désigner les membres d’une Assemblée Constituante, pour éviter que les partis ne nous imposent des hommes de pouvoir (qui n’ont pas à écrire eux-mêmes les règles de leur propre pouvoir), que pensez-vous d’une assemblée constituante tirée au sort (parmi les volontaires ou parmi les meilleurs élus non candidats) plutôt qu’élue ?

 

·           Quelle réalité reconnaissez-vous au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ? Quels exemples concrets de l’exercice de ce droit pouvez-vous donner, en France d’abord, en Europe ensuite ? Que pensez-vous de l’expression « droit des élus à disposer des peuples » ? 

 

·           Comment, selon vous, les citoyens peuvent-ils reprendre le contrôle des pouvoirs ? Comment peuvent-ils se protéger contre les abus de pouvoir ?

 

·           Acceptez-vous d’être contrôlé ? À tout moment et à tout propos ? Comment ? Pourquoi pas ?

 

·           Les salariés peuvent-ils faire comme vous (n’accepter, de fait, aucun contrôle entre deux renouvellements de contrat) ? Allez-vous annoncer cette bonne nouvelle plutôt à la radio ou plutôt à la télé ?

 

·           Qu’est-ce qui vous permet de dire que la vente des autoroutes n’est pas un abus de pouvoir ? 

 

·           Est-il trop bon de jeter en prison ceux qui ont signé le traité de Nice et privatisé TF1 ? Quelles autres sanctions pourrait-on prévoir ?

 

·           Était-il aberrant, même pour un politicien de métier habitué à décider à la place de ses électeurs, de nous demander notre avis sur chaque privatisation ? Surtout sur des ventes non annoncées dans votre programme électoral ? (Question destinée aussi bien à l'UMP qu'au PS.)

 

·           Comment jugez-vous un élu qui privatise (qui vend des biens publics, parfois à des acteurs privés avec qui il déjeune souvent) comme s’il en était propriétaire, sans l’avoir annoncé et sans consulter directement les véritables propriétaires (les citoyens) ? Que signifie, pour vous, le mot éthique ?

 

·           Même question sur le CNE, ni annoncé avant les élections, ni confirmé par référendum. Pourquoi pendant les vacances scolaires ? Faut-il que la Constitution interdise au Parlement de voter des lois pendant les vacances ? Pourquoi par ordonnances ? 

 

·           Que devient la séparation des pouvoirs quand le gouvernement légifère par ordonnance ? 

 

·           Pouvez-vous nous rappeler à quoi sert précisément la séparation des pouvoirs ?

 

·           À partir de quand un chef devient-il un tyran ?

 

·           Nos élus sont-ils nos chefs ou nos porte-parole ?

 

·           Qui doit décider si nous élisons des chefs ou des porte-parole ? Est-ce que les élus ne sont pas, en l’occurrence, juges et parties pour décider quel est leur rôle, et ne sont-ils donc pas, forcément, malhonnêtes ? Vous trouvez-vous, vous-même, bien placé pour décider de la nature du mandat qui vous est confié par votre élection ? Est-ce à vous de décider ça ? Serait-il aberrant, à vos yeux, de trancher ce choix de société par référendum ?

 

·           Vous connaissez le grand principe : « La loi est l’expression de la volonté générale ». Vous savez qu’en droit, l’indicatif vaut impératif et que cette formule signifie « la loi doit être l’expression de la volonté générale » : dans votre travail de parlementaire ou de ministre, cherchez-vous à savoir finement quelle est la véritable volonté générale, pour vous en faire ensuite le porte-parole, ou bien substituez-vous votre volonté personnelle à la volonté générale ?

 

·           Parlementaire ou ministre, êtes-vous en situation d’écrire honnêtement le code électoral ? Êtes-vous bien désintéressé, en l’occurrence ? Quelle importance accordez-vous au mot honnêteté ?

 

·           Quelle pourrait être l’autorité indépendante (et sous contrôle citoyen) qui fixe les règles constitutionnelles, au dessus des pouvoirs constitués ? Comment garantir à la fois l’indépendance par rapport aux autorités politiques et aux puissances économiques, tout en conservant un contrôle citoyen ?

 

·           Que pensez-vous d’une autorité indépendante de cette sorte pour surveiller les médias, les juges, les parlementaires, les ministres ? Une Assemblée Constituante convocable à tout moment, tirée au sort chaque fois parmi un réservoir d'élus non candidats (hors partis), est-elle meilleure institution que notre soi-disant "Conseil des sages" hyper politisé et illégitime ?

 

·           Quelle est la légitimité du Conseil Constitutionnel ? Trouvez-vous normal qu’un organe nommé, qui ne rend de comptes à personne, ait l’ascendant sans appel sur l’assemblée élue au suffrage universel ? Que signifie précisément le mot démocratie ?

 

·           Est-il normal que les juges soient jugés par d’autres juges ? Des réflexes corporatistes évidents ne les conduisent-ils pas à se protéger mutuellement ? Où est la justice dans des institutions qui prévoient de telles erreurs ?

 

·           Les juges européens dépendent directement, pour leur carrière, des exécutifs qui les nomment (dans la plus grande opacité) pour six ans, ce qui est court, renouvelables (!)… Connaissez-vous l’étendue des pouvoirs de ces juges ? Quelle importance accordez-vous à l’indépendance de la magistrature ? Et si les mots ont un sens, si on ne peut pas dire impunément une chose et son contraire, comment arrivez-vous, intellectuellement, à soutenir le TCE qui prévoit la subordination directe des juges européens aux pouvoirs exécutifs ? 

 

·           Comment allez-vous arriver à nous protéger après nous avoir conduit dans une telle nasse, au niveau européen ?

 

·           En plein scandale des pesticides, où la corruption et l’irresponsabilité des fonctionnaires est gravement engagée, que proposez-vous, concrètement, pour que les citoyens puissent à tout moment résister eux-mêmes à l’empoisonnement et mettre en œuvre des protections quand l’État fait clairement défaut ? (Ne répondez pas que les élections servent à ça : tout le monde sait que c’est un mensonge inopérant, de la langue de bois.)

 

·           Du point de vue de l’intérêt général, est-ce que ceux qui veulent le pouvoir sont les plus indiqués pour l’exercer ? Le fait de vouloir le pouvoir est-il une garantie qu’on y est apte ? 

 

·           Comment se fait-il que les partis puissent imposer les candidats à tout le pays, après avoir eux-mêmes filtrés les individus en leur sein ? Comment rendre la liberté de candidature aux citoyens qui ne veulent pas entrer dans la camisole de force intellectuelle d’une ligne de parti et d’une discipline de parti ?

 

·           Pourquoi m'interdisez-vous de choisir librement les citoyens que je trouve valeureux pour me représenter ?

 

·           Comment pourrait-on élire des citoyens qui ne seraient pas candidats et qui, une fois acclamés, accepteraient d’exercer temporairement et exceptionnellement le pouvoir, sous contrôle citoyen ? Combien de tours faut-il prévoir pour écrémer progressivement le grand nombre d’élus au départ avec cette méthode ?

 

·           Ne lutter que contre l’inflation est une politique de rentiers, vivant du seul fait d’être propriétaires sans avoir à travailler. Pourquoi la Banque Centrale Européenne n’a-t-elle que cette mission prioritaire, de façon irréversible et hors contrôle des citoyens ? Voyez-vous un rapport avec la moyenne d’âge et la fortune des élus ?

 

·           Un journaliste riche est-t-il vraiment un journaliste ?

 

·           Les auditeurs et les téléspectateurs devraient-ils avoir voix au chapitre pour décider de ce qu’ils veulent faire des leurs médias ? Quelles modalités proposez-vous pour collecter l’avis des citoyens sur le sujet des médias et pour en tenir compte dans les grilles des programmes ? Le concept de référendum d’initiative populaire ne pourrait-il pas être institué aussi à propos des médias pour permettre aux auditeurs de s’insurger contre une dérive ?

 

·           Les médias sont-ils un outil de propagande (politique, économique et sociale) à sens unique (de l’émetteur vers les auditeurs) ou les médias sont-ils un outil qui peut servir de tribune pour relayer les aspirations et les luttes sociales (en laissant circuler l’information dans les deux sens) ?

 

·           La télévision est-elle une chance ou un danger pour la démocratie ? À quelles conditions ?

 

·           Quelle est la place de l'expression publique des opinions dissidentes dans une démocratie digne de ce nom ? Quelles conséquences en tirez-vous sur le plan des institutions ? Êtes-vous satisfait de la façon dont sont exposées et traitées (méthodiquement réfutées) les opinions dissidentes, en France et en Europe ?

 

·           Quelle différence faites-vous entre la République et la Démocratie ? 

 

·           À qui revient-il de faire le choix de société entre République et Démocratie ?

 

·           Quel rapport voyez-vous entre la durée du travail et l’émancipation politique des humains ?

 

·           Pourquoi gardez-vous l’initiative populaire sous votre contrôle étroit ? Qui êtes-vous pour nous imposer cette férule ?

 

·           Pourquoi n’y a-t-il aucun ouvrier à l’assemblée nationale ? L’Assemblée nationale a-t-elle été volée aux pauvres par les riches ?

 

·           Quels sont les moyens institutionnels et législatifs utilisés par les riches pour empêcher les pauvres d’accéder au pouvoir ?

 

·           Certains disent que le tirage au sort est équitable et incorruptible, qu’il est le seul à respecter l’égalité politique affichée partout par la République, qu’il était, pour les antiques démocrates grecs, la seule bonne manière de désigner les représentants et leurs contrôleurs de façon incontestable. Qu’en pensez-vous ?

 

·           Les citoyens ont-ils raison, au regard de leur sécurité et de leur bonheur, de laisser acheter les journalistes, comme on achète des savonnettes, par les plus riches d’entre eux ?

 

·           Quel inconvénient y aurait-il à nationaliser le pétrole et la grande distribution ? Les profits faciles de ces entreprises en situation de rentes avec des publics captifs ne seraient-ils pas mieux utilisés si l’État les percevaient directement (pour construire des crèches, des hôpitaux, etc.) ? Quels intérêts les citoyens ont-ils à protéger les très gros actionnaires des ces entreprises-là ? Pourquoi préférez-vous défendre davantage ces intérêts privés plutôt que de défendre l’intérêt général ?

 

·           Merci d’avoir accepté ce débat d’une heure, à la télévision aux meilleures heures, en face-à-face avec un citoyen résistant qui ne fait pas partie de « la famille » des élus (liste indicative, à compléter) :        


o        Robert Joumard

o        Frédéric Lordon

o        Serge Halimi

o        Raoul Marc Jennar

o        Maxime Vivas

o        François Asselineau

o        Danielle Bleitrach

o        Michel Onfray

o        Daniel Mermet

o        François Ruffin

o        Christian Darlot

o        Étienne Chouard :o)

o        Gérard Filoche

o        Jean-Jacques Chavigné

o        Maurice Allais

o        Jacques Rancière

o        Jacques Cheminade

o        Yvan Bachaud


Vous pouvez proposer vos propres questions ici :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/03/09/59-sos-journaliste-en-panne

 

 


 

Nous devrions reprendre l’initiative et ÉLIRE DES NON CANDIDATS (8 mars 2007) (Lien)

 

Le Monde du 6 mars 2007 résume les abus de pouvoir programmés sans vergogne par les trois soi-disant "grands" candidats :

« Le traité de Sarkozy face au référendum de Royal »
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-823448,36-879503,0.html

« (…) Ce n'est qu'après un accord sur ces politiques qu'elle [Ségolène Royal] pourrait imaginer, dit-elle, de faire ratifier, par un nouveau référendum avant ou lors des élections européennes de juin 2009 un traité reprenant les dispositions institutionnelles de celui qui a été rejeté par les Français en 2005. "Je suis prête à consulter de nouveau les Français, mais je demande qu'entre-temps l'Europe fasse ses preuves sur les politiques communes et sur le social", a-t-elle réaffirmé dans Le Monde du 6 mars.

Cette position suscite de fortes réserves à Berlin, où le gouvernement d'Angela Merkel, qui allie la droite chrétienne démocrate aux sociaux -démocrates, tente de trouver une issue au blocage de l'Union. La crainte est forte outre-Rhin de voir la candidate socialiste s'enfermer, pour des raisons internes au parti socialiste, dans une position d'affrontement dont les dirigeants ne voient pas l'issue. L'obligation qu'elle s'est donnée d'organiser un nouveau référendum sur tout nouveau traité est ouvertement critiquée par ses propres amis du parti social-démocrate. "Un second échec serait une catastrophe pour l'Union", s'évertue à expliquer l'eurodéputé Jo Leinen, président de la commission institutionnelle du Parlement européen, rallié à l'idée d'un processus par étapes après s'être battu pour garder le traité au plus prêt du projet initial de Constitution.

François Bayrou s'étant lui-même prononcé pour un référendum sur un nouveau texte qu'il veut ambitieux, sans vraiment en préciser les contours, les discussions se sont du coup nouées autour de la proposition de "mini-traité" institutionnel lancée en septembre dernier, à Bruxelles, par Nicolas Sarkozy.

Cette proposition, qui a déclenché dans un premier temps une levée de boucliers dans les pays qui ont déjà ratifié le traité actuel, a fait son chemin.
Elle a le mérite, pour ces derniers, de prévoir une ratification par le seul parlement et de pouvoir aller vite sur la réforme des institutions avant de relancer une nouvelle grande négociation sur le contenu politique de l'Europe. (…) »


Mon commentaire :

On n’impose pas une Constitution par Traité, et encore moins sans consulter directement le peuple.

Un "traité constitutionnel" est un abus de pouvoir, une profonde atteinte à la démocratie.
Les locataires de la souveraineté en disposent comme s'ils en étaient propriétaires.

Ce n’est évidemment pas aux hommes au pouvoir d’écrire les limites de leur propre pouvoir.

Si on élit ces gens-là, on sait où on va, et on aura ensuite ce qu’on mérite.
Si on est assez bête pour désigner ceux qui nous annoncent qu’ils vont nous violer, tant pis pour nous.

Mais les autres candidats sans parti, de gauche ou de droite, ne valent guère mieux (José Bové, Nicolas Dupont-Aignan, etc.) s’ils nous imposent une Assemblée Constituante élue, car ses membres proviendront alors fatalement des partis et ces hommes-là, comme ils l'ont toujours fait, parce que c’est dans leur intérêt personnel, programmeront fatalement notre impuissance.

...

Hum…

 

Et si on élisait des NON CANDIDATS ?

Pourquoi nous laissons-nous imposer les candidats des partis ?

Pourquoi ne pouvons-nous pas désigner librement le ou les citoyens que nous jugeons valeureux ?

Puis, parmi ces milliers d’élus non candidats,
on choisirait par plusieurs tours successifs (5 ou 6 ?)
ou bien on tirerait au sort parmi ceux qui ont été les plus appelés (et qui ont accepté).

Dans les deux cas, on aurait alors à la fois l'élection et l'émancipation des partis

On aurait enfin un vrai filtre honnête de compétence fabriqué directement et exclusivement par nous tous et non pas réduit malhonnêtement par ce deuxième filtre qu'est l'autoproclamation de compétence de la part de tous les candidats des partis qui, pour l'instant, s'imposent à notre choix.

Pourquoi est-ce que ce sont les élus qui nous imposent le mode d’élection et de sélection des candidats ?

Qui est légitime pour faire cet immense choix de société ?

Les élus eux-mêmes ou les citoyens ?

 

Nous devrions reprendre l'initiative du choix des candidats, comme l'initiative du choix des questions importantes auxquelles nous souhaitons répondre.

Établissons une véritable initiative populaire, libérée des idéologies partisanes.

 

Tout ça passe par les institutions.

Le seul moyen de nous émanciper vraiment est d'écrire nous-mêmes notre Constitution.

On n'en sortira pas sans une Constitution d'origine Citoyenne.

 

Si vous connaissez des pays ou des époques où les hommes ont institué de telles élections sans candidats, faites-nous passer l'information : avantages, inconvénients, modalités, pièges à éviter, etc.   Merci :o)

 

Amicalement.

Étienne.

 

 

Vos réactions :

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/03/08/58-nous-devrions-elire-des-non-candidats

 

 


 

José Bové, homme libre sans parti, peut nous aider à sortir de la préhistoire de la démocratie en déclenchant un processus constituant honnête, c’est-à-dire une Assemblée Constituante tirée au sort parmi les volontaires (8 février 2007)  (Lien)

Voici ce que j'avais prévu de dire mercredi soir, 7 février, à Aubagne, au cours du premier meeting de José Bové (je n'ai pas tout dit : 3 minutes max, c'est une terrible tenaille).

Souvenez-vous : pour des dizaines de milliers de citoyens, la campagne référendaire de 2005 fut un révélateur de notre impuissance politique, en Europe comme en France :

·       ni contrôle de nos élus, qui substituent sans frein leur volonté propre à la volonté générale,

·       ni pouvoir d’initiative, pour nous autres citoyens, même sur les sujets que nous considérons massivement comme importants.

Pourtant, nous pourrions gagner la plupart de nos luttes sociales avec le référendum d’initiative citoyenne (ou populaire), RIC ou RIP, — version moderne, pour une population devenue nombreuse, de l’isègoria, droit antique essentiel, droit pour tous les citoyens de prendre la parole à l’assemblée, à tout moment et à tout propos : 1 % posent les questions qui leur semblent importantes et 50 % (ou plus) décident éventuellement que la question est effectivement importante et imposent la volonté populaire avec une légitimité incontestable (directe). Ce droit existe en Suisse, entre autres, et les Suisses s’en félicitent.

Avec le RIC, donc, nous pourrions nous opposer efficacement et définitivement aux privatisations, au CNE, aux OGM en plein champ, à notre intoxication par les fabricants de produits chimiques, aux transferts de souveraineté sans contrôle populaire vers l’Union européenne, nous pourrions imposer les scrutins proportionnel et préférentiel, le respect du vote blanc, nous pourrions imposer que la création monétaire soit retirée aux banques privées pour être rendue à l’État, décider d’un revenu maximum, etc.

POURQUOI cette impuissance ? Parce qu’elle est programmée quelque part.  Où ça ? Dans la Constitution. Et qui écrit la Constitution (jusqu’à présent) ? Les élus, les ministres, les juges, les hommes de partis... Or, tous ces gens ont un intérêt personnel à ce que nous soyons impuissants politiquement : il ne faut donc pas s’étonner que nous n’ayons aucun moyen de résister aux abus de pouvoirs ; ce qui compte, ce n’est pas qui vote la Constitution, ce qui est essentiel, c’est qui écrit la Constitution.

Et ma thèse est celle-ci : ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles de leur propre pouvoir. Ce n’est pas aux parlementaires ni aux ministres d’écrire ou modifier la Constitution car ils sont juges et parties et que leur intérêt personnel est contraire à l’intérêt général.

Et il ne sert à rien d’incriminer les élus, il faut nous en prendre à nous-mêmes car c’est bien nous qui sommes négligents et qui les laissons faire, en nous désintéressant de cet outil essentiel : c’est parce qu’on leur abandonne l’écriture de la Constitution que l’on est privé du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes au profit d’un incroyable droit des élus à disposer des peuples.

C’est à nous d’exiger que soient rigoureusement séparés le pouvoir constituant des pouvoirs constitués (séparation des pouvoirs plus importante, finalement, que l’autre séparation des pouvoirs qu’on doit aussi respecter ensuite, entre les pouvoirs législatif, exécutif, judiciaire et (bientôt) les médias).

Alors COMMENT séparer ces pouvoirs ? Avec une Assemblée Constituante, mais attention pas une Assemblée Constituante élue, sinon les partis vont nous imposer leurs candidats via les commissions d’investiture et ce sont de nouveau des hommes de parti, des hommes de pouvoir, qui vont écrire les règles du pouvoir et des contrôles factices. Non, la seule Assemblée Constituante qui vaille doit être tirée au sort, parmi les citoyens volontaires : tout vaut mieux, pour nous tous, que des auteurs qui écrivent des règles pour eux-mêmes.

Et QUI donc va déclencher ce processus constituant honnête, avec une assemblée constituante tirée au sort ? Un candidat de parti, un homme de parti ? Jamais de la vie : si on attend ça on va attendre longtemps. Seul un candidat hors parti peut nous offrir cette libération.

Et c’est là que la candidature de José est historique, très originale, incroyablement porteuse d’espoir : José est un homme libre, il n’a de comptes à rendre à personne et s’il a compris l’importance de cet enjeu, son rôle historique, et s’il est honnête et courageux, ce que je crois, il est le seul crédible aujourd’hui et il peut convaincre des millions de personnes, bien au-delà des seuls militants.

Pensez à ces 70 % de citoyens qui ne font plus confiance à aucun parti, ni de gauche ni de  droite : c’est un homme sans parti qu’il leur faut, un homme qui leur dise : « je ne veux pas être votre chef, je veux être votre porte-parole, je veux vous rendre la parole et vous laisser décider vous-même de ce que vous considérez comme important. Ne me demandez pas quel est mon programme, habitués que vous êtes à ce que des élus décident à votre place ; je vous propose une évolution démocratique : mon programme est de vous laisser écrire le programme, librement, intelligemment, au fur et à mesure, projet par projet, sans nous figer dans une ligne de parti, sans nous emprisonner dans le carcan d’une discipline de parti, sans nous enfermer dans des clans hostiles par principe. Je protègerai des valeurs, mais vous déciderez vous-même de votre sort, au fur et à mesure. Je vous rendrai le contrôle réel de vos médias, de votre monnaie, de vos représentants, de vos institutions, de votre politique. »

Aujourd’hui, s’il arrive à déjouer les manipulations des partisans, fussent-ils "dissidents", qui ne manqueront pas de s'approcher de lui, et s’il reste bien à l’écoute des sans partis, José Bové semble bien capable de nous sortir de ce que j’appelle la préhistoire de la démocratie.

 

PS : je trouve très troublante l'observation qu'aucun syndicat ne réclame le RIC, alors qu'ils devraient évidemment tous marteler cette revendication décisive tous les jours ! C'est consternant, je ne comprends pas : ces gens qui prétendent faire le métier de nous défendre ne réclament pas fortement l'arme suprême, l’arme absolue, le RIC, qui nous permettrait de vaincre à tout propos.

De la part des partis de droite, je le comprends, c'est cohérent : les riches dominent les pauvres et les institutions sont un verrou parfait, OK.

Mais de la part des partis de gauche (y compris les partis d'extrême gauche !) et même des syndicats, je trouve cette impasse consternante. Si vous avez une explication, ce serait intéressant de nous la faire connaître.

Vos réactions : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/02/08/56-jose-bove-homme-libre-sans-parti-peut-nous-aider-a-sortir-de-la-prehistoire-de-la-democratie

 

 

C'est la partie 1 du TCE qui est la plus dangereuse, celle qui nous retire la démocratie :
pas question de l'accepter sans référendum !
(26 janvier 2007)  
(Lien)

Quand j'entends Nicolas Sarkozy, ce soi-disant "représentant" des Français, en plus de détruire le droit du travail (avec un CNE qui deviendrait la règle générale, à vie), promettre de nous imposer la partie 1 du TCE par voie parlementaire — sans référendum ! — s’il est élu Président, au motif que ce serait une partie faisant consensus, je fais des bonds au plafond :

La partie 1 du TCE est la plus dangereuse de toutes : c’est la partie 1 qui programme l’irresponsabilité de tous les acteurs politiques (aucun mécanisme de destitution du Parlement, du Conseil des Ministres, du Conseil européen, de la Banque centrale, etc.), c’est la partie 1 qui scelle l’impuissance des citoyens pour décider de leur sort ou contrôler leurs élus, c’est la partie 1 qui nous fait prendre des vessies pour des lanternes avec son misérable droit de pétition (1-47-4), c’est la partie 1 qui prévoit la dépendance des juges européens (hyper puissants) envers les exécutifs qui les nomment et qu’ils auront pourtant à juger (1-29-2), c’est la partie 1 qui fait de notre Parlement national un assemblée sans pouvoirs (1-33), c’est la partie 1 qui nous impose l’indépendance de la Banque centrale et nous prive du droit de battre monnaie au profit des voleurs, des faux monnayeurs que sont les banquiers privés (1-30-3), etc. etc. etc. Je m’étrangle de tant de félonie impunie.

C’est la partie 1 du TCE qui scelle l’assassinat de la démocratie au profit des banquiers.

Consensus ? Tu parles… Menteur !


Vos réactions :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2007/01/26/52-c-est-la-partie-1-du-tce-qui-est-la-plus-dangereuse-c-est-elle-qui-scelle-la-mort-de-la-democratie

 


 

Nécessaire lutte de survie du peuple contre les banques ? (23 janvier 2007)  (Lien)

Je viens de recevoir copie d’un message bouleversant.

Je le reproduis ici pour qu’on en parle ensemble, que vous me disiez ce que ça vous inspire.



Mais qu’attend ATTAC France ?

par Alain Vidal

 

Même Benjamin Franklin, même Abraham Lincoln, même Sir Josiah Stamp, gouverneur de la Banque d'Angleterre… Mêmes eux l’ont dit. Mêmes eux…

Tous ont dénoncé l’imposture des intérêts, le vol des richesses commis par les banques privées.

 

ATTAC France qui prétend s’attaquer à la finance internationale, ne dit toujours rien publiquement… ne lance toujours pas de campagne nationale sur la monnaie, n’incite pas, nationalement, à un travail d’éducation populaire qui expliquerait simplement, comme beaucoup le font depuis 250 ans que :

les intérêts bancaires sont la première cause d’exclusion, de chômage, de misère, de malnutrition, de maladies,  de famine... et de guerre dans le monde.

 

Documentation extraite de « Vers Demain » (http://www.michaeljournal.org/accueil.htm)

« Dans les colonies, nous émettons notre propre papier-monnaie, nous l’appelons Colo Script, et nous en émettons assez pour faire passer facilement tous les produits des producteurs aux consommateurs. Créant ainsi notre propre papier-monnaie, nous contrôlons notre pouvoir d’achat et nous n’avons aucun intérêt à payer à personne. » (Benjamin Franklin 1750).

Les banquiers anglais, mis au courant, firent adopter par le Parlement anglais une loi défendant aux colonies de se servir de leur monnaie script et leur ordonnant de se servir uniquement de la monnaie-dette d’or et d’argent des banquiers qui était fournie en quantité insuffisante. La circulation monétaire dans les colonies se trouva ainsi diminuée de moitié.

« En un an, dit Franklin, les conditions changèrent tellement que l’ère de prospérité se termina, et une dépression s’installa, à tel point que les rues des colonies étaient remplies de chômeurs. »

Alors advint la guerre contre l’Angleterre et la déclaration d’indépendance des États-Unis, en 1776.

Les manuels d’histoire enseignent faussement que la Révolution Américaine était due à la taxe sur le thé.  Franklin déclara: « Les colonies auraient volontiers supporté l’insignifiante taxe sur le thé et autres articles, sans la pauvreté causée par la mauvaise influence des banquiers anglais sur le Parlement: ce qui a créé dans les colonies la haine de l’Angleterre et causé la guerre de la Révolution. »

Les Pères Fondateurs des États-Unis, ayant tous ces faits en mémoire, et pour se protéger de l’exploitation des banquiers internationaux, prirent bien soin de stipuler clairement dans la Constitution américaine, signée à Philadelphie en 1787, dans l’article 1, section 8, paragraphe 5 : « C’est au Congrès qu’appartiendra le droit de frapper l’argent et d’en régler la valeur. »

Abraham Lincoln , Président des États-Unis étant à court d’argent pour financer les armées du Nord, partit voir les banquiers de New-York, qui lui offrirent de l’argent à des taux allant de 24 à 36 %. Lincoln refusa, sachant parfaitement que c’était de l’usure et que cela mènerait les États-Unis à la ruine. Son ami de Chicago, le Colonel Dick Taylor, vint à la rescousse et lui suggéra la solution: « Que le Congrès passe une loi autorisant l’émission de billets du Trésor ayant plein cours légal, payez vos soldats avec ces billets, allez de l’avant et gagnez votre guerre. »

C’est ce que Lincoln fit, et il gagna la guerre: de 1862 à 1863, Lincoln fit émettre 450 millions $ de « greenbacks ».

 

Lincoln appela ces greenbacks « la plus grande bénédiction que le peuple américain ait jamais eue. » Bénédiction pour tous, sauf pour les banquiers, puisque cela mettait fin à leur « racket » du vol du crédit de la nation et de création d’argent avec intérêt. Ils mirent donc tout en oeuvre pour saboter l’oeuvre de Lincoln. Lord Goschen, porte-parole des Financiers, écrivit dans le London Times :

«Si cette malveillante politique financière provenant de la République nord-américaine devait s’installer pour de bon, alors, ce gouvernement fournira sa propre monnaie sans frais. Il s’acquittera de ses dettes et sera sans aucune dette. Il aura tout l’argent nécessaire pour mener son commerce. Il deviendra prospère à un niveau sans précédent dans toute l’histoire de la civilisation. Ce gouvernement doit être détruit, ou il détruira toute monarchie sur ce globe.» (La monarchie des contrôleurs du crédit.)

Lincoln déclara tout de même:

«J’ai deux grands ennemis: l’armée du Sud en face et les banquiers en arrière. Et des deux, ce sont les banquiers qui sont mes pires ennemis.»

Lincoln fut réélu Président en 1864 et fit clairement savoir qu’il s’attaquerait au pouvoir des banquiers une fois la guerre terminée. La guerre se termina le 9 avril 1865, mais Lincoln fut assassiné cinq jours plus tard, le 14 avril.

Une formidable restriction du crédit s’ensuivit, organisée par les banques. L’argent en circulation dans le pays, qui était de 1907 millions de $ en 1866, soit 50,46 $ pour chaque Américain, tomba à 605 millions de $ en 1876, soit 14,60 $ par Américain. Résultat: en dix ans, 54 446 faillites, pertes de 2 milliards de $. Cela ne suffisant pas, on alla jusqu’à réduire la circulation d’argent à 6,67 $ par tête en 1867 !

En 1896, le candidat démocrate à la présidence était William Jennings Bryan déclare, (et encore une fois, les livres d’histoire nous disent que ce fut une bonne chose qu’il ne fut pas élu président, car il était contre la monnaie « saine » des banquiers, l’argent créé sous forme de dette, et contre l’étalon-or) :

« Nous disons dans notre programme que nous croyons que le droit de frapper et d’émettre la monnaie est une fonction du gouvernement. Nous le croyons. Et ceux qui y sont opposés nous disent que l’émission de papier-monnaie est une fonction de la banque, et que le gouvernement doit se retirer des affaires de la banque. Eh bien ! moi je leur dis que l’émission de l’argent est une fonction du gouvernement, et que les banques doivent se retirer des affaires du gouvernement... Lorsque nous aurons rétabli la monnaie de la Constitution, toutes les autres réformes nécessaires seront possibles, mais avant que cela ne soit fait, aucune autre réforme ne peut être accomplie. »

Et finalement, le 23 décembre 1913, le Congrès américain votait la loi de la Réserve Fédérale , qui enlevait au Congrès lui-même le pouvoir de créer l’argent, et remettait ce pouvoir à la «Federal Reserve Corporation». Un des rares membres du Congrès qui avait compris tout l’enjeu de cette loi, Charles A. Lindbergh (le père du célèbre aviateur), déclara:

« Cette loi établit le plus gigantesque trust sur terre. Lorsque le Président (Wilson) signera ce projet de loi, le gouvernement invisible du Pouvoir Monétaire sera légalisé... le pire crime législatif de tous les temps est perpétré par cette loi sur la banque et le numéraire. »

Qu’est-ce qui a permis aux banquiers d’obtenir finalement le monopole complet du contrôle du crédit aux États-Unis ? L’ignorance de la population sur la question monétaire. John Adams écrivait à Thomas Jefferson, en 1787 :

« Toutes les perplexités, désordres et misères ne proviennent pas tant de défauts de la Constitution, du manque d’honneur ou de vertu, que d’une ignorance complète de la nature de la monnaie, du crédit et de la circulation. »

Salmon P. Chase, Secrétaire du Trésor sous Lincoln, déclara publiquement, peu après le passage de la loi des Banques Nationales:

« Ma contribution au passage de la loi des Banques Nationales fut la plus grande erreur financière de ma vie. Cette loi a établi un monopole qui affecte chaque intérêt du pays. Cette loi doit être révoquée, mais avant que cela puisse être accompli, le peuple devra se ranger d’un côté, et les banques de l’autre, dans une lutte telle que nous n’avons jamais vue dans ce pays. »

Et l’industriel Henry Ford: «Si la population comprenait le système bancaire, je crois qu’il y aurait une révolution avant demain matin.»

(Fin d’extraits)

 

« Fondée en 1998, Attac (Association pour la Taxation des Transactions pour l’Aide aux Citoyens) promeut et mène des actions de tous ordres en vue de la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle dans l’ensemble du monde. Mouvement d’éducation populaire, l’association produit analyses et expertises, organise des conférences, des réunions publiques, participe à des manifestations… »

 Alors qu’il n’y a pas  de travail d’éducation populaire permanent sur cette arme de domination massive que sont les intérêts de la monnaie marchandise, ATTAC France affirme  participer à  « la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle dans l’ensemble du monde. »

Mais qu’attend ATTAC France ??????????????

Alain Vidal, groupe monnaie, ATTAC 44 (17 janvier 2007). 

 


 

Alain Vidal, instituteur de son état, semble bien être un grand homme. Lisez aussi cette histoire :


« Pour un colloque sur l'enseignement de l'Histoire » :

http://www.michelcollon.info/articles.php?dateaccess=2002-10-06%2021:12:01&log=lautrehistoire

Superbe lettre, vraiment !

 

On peut débattre de tout ça là : http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?pid=2344#p2344

 

 

 

Source : http://www.michaeljournal.org/galerie.htm

 

 

 

Source : http://www.michaeljournal.org/galerie.htm

 


Éloge superbe de la clérocratie (22 janvier 2007) (Lien)

Mes amis, je lis des livres enthousiasmants et je manque de temps pour vous en parler. Parmi ceux-ci, vient de paraître un éloge vibrant, excitant, passionnant, de la clérocratie :    
« Pour en finir avec la démocratie », par François Amanrich (éd. Papyrus), candidat à la présidentielle 2007 et animateur du site
www.clerocratie.com.

Je reproduis ici le sommaire, très détaillé, qui montre la richesse, l’inventivité, la pertinence et la rigueur de ce citoyen pétillant. Je vous recommande chaleureusement ce livre, il est ex-ce-llent.

 

Chaque chapitre se termine avec un exemplaire choisi de La lettre clérocratique, à laquelle je vous recommande de vous abonner (http://www.clerocratie.com/index.php?page=29&lg=1), c’est savoureux :o)

 

« Pour en finir avec la démocratie », un livre de François Amanrich – Sommaire :

Chapitre 1 : En finir avec la démocratie ?

  Peut-on remplacer la démocratie par un autre système politique ?

  Est-ce vraiment réaliste ?

  Pourquoi les intellectuels, les politiques, répètent qu’il n’y a rien de mieux que la démocratie, et qu’hors d’elle il n’existe que le chaos et la dictature ?

  La démocratie actuelle est-elle bien consciente des difficultés qui la mine et les politiques se rendent-ils bien compte du mécontentement populaire ?

  Quelle a été la principale erreur de la démocratie ?

  Que proposer à sa place ?

  Le conte de la marionnette (La « Lettre clérocratique » de juin 2006)

 

Chapitre 2 : Allons voir chez les Grecs !

  Définition globale du système clérocratique

  Que signifie le mot "clérocratie" ?

  Dans la démocratie athénienne, le hasard servait à désigner les élus

  Pourquoi ont-ils choisi le hasard ?

  Un boulanger pouvait-il représenter les architectes ?

  Qui pouvait accéder à un poste de responsabilité ?

  À part Athènes, y a t-il eu d’autres pays qui adoptèrent le tirage au sort pour désigner leurs représentants ?

  Qu’est-ce que la clérocratie veut prendre des expériences du passé ?

  Y a-t-il, aujourd’hui en France, des exemples où des organismes se servent du hasard dans leur fonctionnement ?

  Le CSFM, un des plus importants syndicats de France, désigne ses représentants par tirage au sort !

  S'il vous plaît… dessine-moi une démocratie ! (La « Lettre clérocratique » de mai 2006)

 

Chapitre 3 : La clérocratie, comment ça marche ?

  En quoi le système clérocratique peut être une alternative crédible à un système démocratique actuel

  Le parcours d'une personne désirant participer à la vie politique dans un tel système

  En clérocratie c’est la "base" qui choisit ses élus

  Comment se faire élire ?

  De l’intérêt d’une présentation individuelle

  Des "filtres" pour sélectionner les candidats.

  Quel est l’intérêt de limiter les mandats locaux ?

  Qu’adviendra-t-il des " désignés "qui ne seront pas élus par le sort ?

  En quoi le mode de désignation clérocratique est un mieux par rapport au système démocratique actuel ?

  En quoi le citoyen pourra t-il avoir plus confiance dans le "désigné" clérocrate que dans l’élu démocrate ?

  Combien d’années faudra t-il pour qu’un ou une "désigné" clérocrate devienne président de la république ?

  Si la démocratie était une entreprise (La « Lettre clérocratique » de septembre 2005)

 

Chapitre 4 : L'impossible choix.

  Le vote populaire n’a été qu’un prétexte pour permettre à la classe dirigeante de prendre le pouvoir.

  Toutes les personnes composant une démocratie sont-elles capables de voter ?

  Pourquoi la classe dirigeante finit-elle par donner le droit de vote à tous les citoyens ?

  Le droit de vote implique aussi des devoirs. Comme de voter, par exemple.

  Il est indispensable de savoir exactement pour quoi ou pour qui l’on vote avant de se prononcer

  Le résultat des élections est surtout fonction des personnes qui ne connaissent pas ou peu la politique.

  Les programmes politiques sont de vrais fourre-tout ayant pour but de ratisser le plus large possible. Les référendums sont trop souvent incompréhensibles.

  Un vote n'a aucun sens, aucune valeur, lorsqu’il repose sur un choix fait en non connaissance de cause

  Les consultations électorales où une décision est prise par une toute petite minorité de votants.

  Dans le système clérocratique les électeurs se prononcent par référendum.

  Alors, à quelles occasions les citoyens clérocrates votent-ils ?

  Si l’électeur ne peut pas réellement choisir, que lui reste-t-il ?

  Voter à coté de ses urnes (La « Lettre clérocratique » de janvier 2005)

 

Chapitre 5 : Un coup de pied dans les urnes

  Le désintérêt de la "chose" politique atteint à la crédibilité même de la démocratie.

  Quand, dans un système participatif comme la démocratie, ceux qui le constituent refusent de jouer le jeu, il est urgent de se poser la question de savoir qui des joueurs ou du jeu n'est plus adapté à l'autre ?

  Que se passera-t-il en démocratie le jour où les non-joueurs dépasseront le nombre des joueurs ?

  Lors des résultats d’une élection ou d’un référendum les chiffres sont biaisés.

  Le manque d’intérêt pour l’élection explique le taux élevé d’abstention.

  Les citoyens sont les spectateurs d’une comédie qui les dépasse.

  L’abstention est la conséquence directe du système actuel.

  Ne pas changer un système qui génère plus d’abstention que de participation est très risqué.

  Une démocratie peut se transformer en dictature.

  Il faut revoir toute la notion du droit de vote.

  La clérocratie fait donc appel à la responsabilité populaire basée sur la connaissance, et non sur le credo démocratique qui veut que tout citoyen, par le seul fait de sa citoyenneté, est capable du bon choix.

  La clérocratie ne supprime pas le suffrage universel.

  Supprimer ces élections où l’on doit choisir un homme ou un parti, ce qui revient à élire un maître ou un groupe de maîtres qui vont décider ce qui est bon ou mauvais pour la nation.

  Un coup de pied dans les urnes (La « Lettre clérocratique » de juillet 2006)

 

Chapitre 6 : La démocratie impopulaire

  Outre les dangers liés à l’abstention le désintérêt des citoyens mène à une perte de confiance envers les élus.

  Les pouvoirs de gestion sont confiés aux élus par un faible pourcentage d'électeurs. Que représentent véritablement aujourd'hui ces élus ?

  Il arrivera un moment où les élus de la nation ne devront leur poste qu'à une poignée d'électeurs. Faudra-t-il attendre ce jour pour se poser des questions sur la pérennité de ce système ?

  En démocratie, le dogme donne la primauté du légal sur le légitime, même si cela va à contresens de la raison.

  À quelques voix près, il y aura deux vainqueurs.

  Le peuple n’a pas de mémoire et oublie très vite ?

  Ce que propose la clérocratie pour faire face à ces difficultés.

  Le peuple souverain, le gouvernement du peuple par le peuple, toutes ces grandes phrases, ne sont que des mots creux.

  Dans le système clérocratique, les "désignés" sont légitimes.

  Contrairement aux politiciens démocrates, les "désignés" n’exercent pas de mandat politique. Ils remplissent une mission. Quelle est la différence ?

  En démocratie le mieux du mandataire se confond avec le mieux de ses propres intérêts.

  La clérocratie est une garantie contre la corruption de la classe politique.

  Le système clérocratique instaure une véritable répartition des postes, en fonction de la représentativité réelle de toutes les composantes de la nation.

  Tout est fait aujourd'hui pour que les femmes qui désirent s'investir dans la vie politique aient toutes les chances de perdre.

  Voici venu le temps des politocrates (La « Lettre clérocratique » d’avril 2005)

 

Chapitre 7 : Professionnels de la politique

  Les politiques doivent-ils être de véritables professionnels ?

  Le système démocratique n'échappe pas à la professionnalisation.

  Dans le système clérocratique, les désignés seront des professionnels

  Comment seront-ils formés ?

  Dans le système démocratique, les hommes politiques ont tendance à aller du haut vers le très haut en faisant abstraction du bas.

  En démocratie, les politiques sont plus animés par la recherche du pouvoir que par un véritable travail de professionnels dont le but devrait être d’accomplir pleinement leur métier

  Dans le système démocratique actuel, la professionnalisation présente de tels handicaps qu'elle va à l'encontre de l'idée même de la démocratie.

  Le fameux recyclage des politiques battus lors d’élections

  En démocratie, l'électeur est impuissant, et pire, conscient de son impuissance.

  Dans le système politique actuel, le peuple est gouverné par une "élitocratie", forme moderne de "l'aristocratie.

  Comment concilier la nécessité d'une professionnalisation du personnel politique tout en l'empêchant de se regrouper en caste ?

  Aujourd’hui le recrutement des politiques est basé sur l’appartenance à un même milieu socioéconomique.

  Plus de 60 % des députés sont des fonctionnaires

  Le déséquilibre de la représentation de la société.

  L‘émergence de fonctionnaires politiques est un avatar de la professionnalisation du monde politique dans le système démocratique.

  Actuellement, pour se lancer dans la carrière politique, il faut être fonctionnaire d'état.

  La mainmise sur la politique par les fonctionnaires. En clérocratie, l'ensemble des "désignés" répond aux critères indispensables à une véritable représentation populaire.

  Le système clérocratique rend donc possible une professionnalisation de la fonction politique, tout en sauvegardant les intérêts de l'ensemble de la population et non ceux d'une caste minoritaire comme actuellement.

  La première étude sur la démographie démocratique (La « Lettre clérocratique » d’avril 2004)

 

Chapitre 8 : Menteur professionnel ?

  Comment concilier le professionnalisme qui oblige à des anticipations qui vont à l'encontre des souhaits populaires, et l'obligation de recueillir un maximum de suffrages pour être élu ?

  Comment agir lorsque la déraison majoritaire l'emporte sur la raison minoritaire.

  Les décisions prises qu'en temps "opportuniste"… pour le politique.

  Dans le système démocratique, l'homme politique ne peut pas agir autrement.

  Les "acrobaties" démocratiques, indispensables et nécessaires, ne peuvent que ternir la classe politique et le régime qu'elle représente.

  En démocratie, le politique ne peut que favoriser le superficiel.

  Le système démocratique oblige ses dirigeants à avoir une vision à court terme.

  En clérocratie, il n'y a pas d'hommes politiques comme en démocratie, il n'y a que des hommes d'état.

  En clérocratie, le "désigné" a les mains libres.

  Du rififi chez les Pères Noël (La « Lettre clérocratique » de décembre 2005)

 

Chapitre 9 : La démocratie des petits copains

  Le suffrage universel suppose que la masse des citoyens aura la volonté du bien général, plutôt que de ses intérêts particuliers.

  L'intérêt personnel l’emporte toujours sur l'intérêt du plus grand nombre.

  Le bien général cède la pas au bien particulier, comme l’égalité au privilège.

  Que reste-t-il de l'électeur éclairé qui vote dans l'intérêt du plus grand nombre ?

  En démocratie, une tirelire bien garnie vaut mieux qu'une urne bien pleine.

  Tous les Français ont-ils vraiment le droit de grève ?

  Actuellement, seuls les employés du secteur public ou parapublic peuvent se permettre ce luxe, inaccessible à la majorité des Français.

  Quand tout le monde a les mêmes droits, mais que certains peuvent s’en servir et d’autres non, où est le droit ?

  Lorsqu'un droit n'est réservé qu'à certaines catégories sociales, il se transforme en un privilège !

  Le triptyque révolutionnaire "Liberté, Égalité, Fraternité" a du plomb dans l’aile !

  Dans le système démocratique, le peuple est donc devenu un moyen alors qu'il devrait être un but ?

  Peut-on légitiment considérer qu’actuellement certains électeurs possèdent plusieurs bulletins de vote ?

  Soyons sacrilège (La « Lettre clérocratique » de mars 2004)

 

Chapitre 10 : 1789, c’est pour quand !

  Les classes sociales ont elles été supprimées ?

  Avant, le pouvoir monarchique était absolu. Aujourd'hui il y a un l’absolutisme présidentiel. Avant, il y avait la noblesse, aujourd'hui il y a les politiques.

  Avant, il y avait le clergé, aujourd'hui, il y a la fonction publique. Avant il y avait le Tiers état, aujourd'hui aussi.

  Le système démocratique a laissé se recréer les trois ordres monarchiques.

  Les leçons de l’Histoire ne servent à rien !

  L'Ancien régime s’est appuyé sur le clergé, comme la démocratie d’aujourd’hui sur la fonction publique ?

  Les fonctionnaires, champions du civisme.

  La classe politique, n’a plus l'indépendance nécessaire à l'exercice du pouvoir.

  Quelle solution permet de sortir de cette ornière ?

  Seul un système comme la clérocratie peut y réussir.

  Ce que la noblesse de l'ancien régime parvint à réaliser, c'est-à-dire à garder entre ses mains les rênes du pouvoir, les hommes politiques modernes ont fait pareil.

  La manière dont sont "choisis" les élus dans notre système actuel.

  Le "droit du sang" de l'Ancien régime s'est transformé en "droit de l'école".

  La place et le rôle de la fonction publique en clérocratie ?

  Le mode de fonctionnement du système clérocratique empêche la prise du pouvoir et sa confiscation par une minorité au détriment de la majorité.

  C’est pour quand 1789 ? (La « Lettre clérocratique » de janvier 2005)

 

Chapitre 11 : Démocratie : attention danger !

  Les dangers que le système démocratique actuel présente pour l’ensemble de notre pays.

  Il faut mettre en place une nouvelle approche politique.

  Le pouvoir doit être fort, car un contrepoids doit avoir la même importance que ce à quoi il s'oppose s'il veut servir d'équilibre.

  Les groupes les mieux organisés accentuent leurs privilèges.

  Le pouvoir politique doit imposer le respect des règles et des lois.

  La force, indispensable au pouvoir politique pour gouverner, n'est acceptable que lorsqu'elle est légitime.

  Ce pouvoir, la démocratie ne l'a plus.

  Dans le système clérocratique, ces écueils sur lesquels s’abîme la démocratie n'existent pas.

  Le contrôle de l'exécution des missions confiées aux "désignés" renforce leur légitimité.

  Par son mode de sélection, la clérocratie offre aux "désignés" une indépendance indispensable à la bonne gestion d'un pays.

  L’arbitrage sous influence qu'impose le système démocratique aux élus actuellement n'est plus supportable.

  Le saumon démocratique (La « Lettre clérocratique » d’août 2004)

 

Ce livre est littéralement passionnant !

On peut en parler sur le forum : http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?pid=2341#p2341

Klérotérion, machine à tirer au sort les jurys, Musée de l'Agora antique d'Athènes

Klérotérion, machine à tirer au sort les jurys
(source : http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9mocratie_ath%C3%A9nienne

 


 

Tirage au sort ou élection ? Démocratie ou aristocratie ?
Qui est légitime pour faire ce choix de société ?
Le peuple lui-même ou ses élus ?
(5 décembre 2006)
(Lien)

(Résumé)

Dans un contexte de méfiance générale à l’encontre des responsables politiques, —qui semblent défendre de plus en plus les personnes "morales", les géants économiques, contre les personnes "physiques"—, Ségolène Royal a eu le courage de proposer que l’action des élus soit évaluée par des jurys citoyens tirés au sort. Cette idée doublement formidable met en cause à la fois l’élection et l’irresponsabilité politique entre deux élections ; elle a évidemment déclenché une bronca chez les élus et leurs sponsors.

C’est une occasion pour nous tous de débattre publiquement (enfin !) du mode de désignation de nos représentants : élection ou tirage au sort ? Et pour quel mandat ? Quand on étudie la question, on s’aperçoit avec surprise que l’élection n’est pas l’icône idéale qu’on nous présente tous les jours de façon un peu mystique et qu’elle est même, peut-être, un outil parfait pour nous manipuler, via nos représentants rendus vulnérables par le coût de leur campagne électorale. On s’aperçoit aussi que le tirage au sort a été trop vite jeté aux orties alors qu’il présente des qualités inestimables pour le plus grand nombre. On s’aperçoit enfin que le choix de l’élection, il y a deux cents ans, a été imposé… par des élus… et n’a plus jamais été débattu depuis.

On présente souvent le "gouvernement représentatif" comme "le moins mauvais système". Résignation trop rapide ; on pourrait concevoir de bien meilleurs systèmes, qui associeraient élection et tirage au sort, par exemple, à condition toutefois de faire attention à ceux qui les écrivent : le plus important n’est pas qui vote la constitution, mais qui la propose ; selon le choix des auteurs des institutions, on peut bloquer l’évolution démocratique.

Et si on osait s’approprier les choix confisqués par des experts et faire nous-mêmes le point ?

1. D’un côté, chacun constate que le suffrage universel ne tient pas ses promesses d’émancipation : l’élection induit mécaniquement une aristocratie élective, avec son cortège de malhonnêtetés et d’abus de pouvoir.

Vers le XVIIIe siècle, une grande idée est venue soutenir l’élection : toute autorité n’est légitime que par le consentement de ceux sur qui elle s’exerce (consentement que ne permet pas le tirage au sort, ce qui explique sa mise à l’écart).

Mais après deux siècles de pratique, on constate que l’élection :

·         pousse au mensonge, avant l’élection et avant la réélection,

·         impose la corruption : campagnes électorales ruineuses ; "ascenseurs à renvoyer",

·         étouffe les résistances contre les abus de pouvoir : droit de parole réduit à un vote épisodique, déformé par un bipartisme de façade,

·         et finalement s’avère naturellement élitiste, verrouille l’exclusion du grand nombre de l’accès au pouvoir, et crée des surhommes qui se croient tout permis, jusqu’à imposer eux-mêmes les institutions…

Hum… Et c’est censé être le meilleur système ? Peut-être, mais pour qui ?...

2. D’un autre côté, chacun devrait apprendre (à l’école ?) que le tirage au sort a longtemps été reconnu, d’Athènes à Montesquieu, d’Aristote à Rousseau, comme la modalité principale, incontournable, des valeurs d’égalité et de liberté. Il a sombré dans l’oubli sous d’injustes critiques : il ne pose aucun problème insurmontable.

Le tirage au sort respecte fidèlement la règle démocratique de l’égalité : arbitre idéal, impartial et incorruptible, il protège la liberté de parole et d’action de chacun, il facilite la rotation des charges (qui empêche la formation de castes et qui rend les gouvernants sensibles au sort des gouvernés car ils reviendront bientôt à la condition ordinaire) et il dissuade les parties d’être malhonnêtes au lieu de les inciter à tricher.

Par ailleurs, le tirage au sort ne présente aucun danger de désigner des personnes incompétentes ou malhonnêtes si on lui associe des mécanismes complémentaires, établis dans le souci de l’intérêt général et non de l’intérêt personnel des élus :

·         on ne confie pas le pouvoir à un homme seul mais à des groupes,

·         ne sont tirés au sort que les volontaires (chacun se comporte ainsi comme un filtre),

·         les tirés au sort sont soumis à un examen d’aptitude,

·         ils sont surveillés en cours de mandat et révocables à tout moment,

·         ils sont évalués en fin de mandat, et éventuellement sanctionnés ou récompensés.

Montesquieu fait remarquer que c’est la combinaison des contrôles et du volontariat qui donne la garantie de la meilleure motivation.

Une telle organisation protègerait mieux l’intérêt général que les institutions actuelles.

3. Concrètement, on pourrait imaginer des systèmes mixtes, prenant le meilleur des deux idées en les combinant astucieusement.

·       Pour la sélection des représentants, les citoyens devraient pouvoir proposer librement les représentants qu’ils préfèrent. Par exemple, un tirage au sort de quinze personnes serait effectué parmi les 5% des citoyens les plus soutenus, volontaires, et la sélection pourrait se terminer par un vote parmi ces quinze : le principe du consentement préalable des citoyens serait ainsi maintenu et même renforcé. La corruption serait efficacement combattue.

·       Pour l’organisation des débats au Parlement, on pourrait prévoir une Assemblée Nationale élue, qui serait chargée d’écrire les lois mais qui, avant d’imposer ces lois, devrait convaincre de leur utilité une Assemblée des Citoyens tirée au sort (une assemblée qui nous ressemble aurait ainsi un droit de veto, en plus d’un droit d’initiative et de contrôle). Plus démocratiques, ces institutions imposeraient aux professionnels de l’AN d’écouter et de respecter le peuple qu’ils représentent, tous les jours et pas tous les cinq ans, à travers un débat permanent et honnête.

Les Athéniens faisait de l’isègorié —le droit de parole égal pour tous à l’assemblée— le pilier fondamental de toutes leurs libertés.

Mais aujourd’hui, qui pose les questions dans notre prétendue démocratie ?

En France comme ailleurs, ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire eux-mêmes les limites de leurs propres pouvoirs (la constitution). Ce n’est pas aux élus de décider à notre place si l’élection vaut mieux que le tirage au sort : ce choix de société ne peut être tranché que par référendum.

(Fin du résumé)      
Vous pouvez lire
ici l’article intégral (8 pages, format rtf ou format pdf).

 

 

J’aimerais que vous me donniez votre avis sur cette mise au point, un peu longue, pardonnez-moi, mais importante pour nous tous, je crois.

Ce sujet me semble décisif et pourtant, il est occulté, maltraité, déformé, bâclé… (interdit ?)

J’aimerais savoir si vous voyez des failles graves dans le raisonnement que j’essaie de synthétiser ici.

 

Je vous propose deux lieux de débat, cette fois : sur le site de Marianne2007.info où j’ai publié ce texte : http://www.marianne2007.info/Etienne_Chouard_r80.html et sur la partie du forum que j’ai dédiée au choix entre élection et tirage au sort : http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?pid=2261#p2261.

 


 

La « synthèse » d’un demi-débat (13 octobre 2006)  (Lien)

Le Monde a publié une « synthèse » sur papier des échanges du 9 octobre où j’étais invité à débattre. Je suis peu coutumier du fait et je suis un peu long à analyser les événements, mais ça vient doucement.

D’abord, je dois être reconnaissant aux journalistes qui m’ont ainsi gentiment offert une tribune très inhabituelle. Leur accueil fut chaleureux et sympathique et je les remercie.

Je reste pourtant un peu sur ma faim sur le fond de ce qui occupe désormais mes jours et mes nuits : d’abord parce que la « synthèse » papier ne garde presque aucune trace de ce que j’ai pu dire ce soir-là.

Mais surtout parce que nous étions trop nombreux pour qu’un vrai débat s’instaure, une échange argumenté qui aurait pu permettre aux points de vue de se rapprocher : en effet, sur chaque point, où j’exposais une thèse, on formulait ensuite des objections, que je trouvais faibles ou inadaptées, mais je ne pouvais pas leur répondre (alors que c’était facile) car il fallait bien sûr laisser la parole aux autres et qu’il y avait beaucoup de sujets graves à évoquer… Il valait donc mieux, ce soir-là, parler en dernier, car on ne parlait qu’une fois de chaque sujet. Un demi-débat ou même un fragment de micro-débat, en quelque sorte. C’est frustrant.

Ceci dit, les interventions des uns et des autres étaient très intéressantes.

Pour savoir ce qui s’est vraiment dit, je vous conseille d’écouter la bande son car la « synthèse » papier n’est pas très fidèle. Et pour m’exprimer librement et complètement, décidément, il n’y a pas de meilleur moyen que l’Internet (voir ci-dessous) J

 

 

 

 

L’Internet est l’outil révolutionnaire qui va permettre de connaître enfin (et respecter !) la volonté générale, mais sans remplacer les institutions démocratiques qui restent indispensables pour organiser et pacifier les débats (9 octobre 2006) (Lien)

 

Voilà, je viens de participer au débat organisé par Le Monde au théâtre du Rond-Point, à Paris, sur le thème Démocratie.fr : comment Internet bouscule la politique, sa communication et sa pratique.

 

Je m’attendais à avoir trop peu de temps (nous étions une dizaine et n’avions que deux heures devant nous) et j’ai noté par écrit ce que j’avais à dire pour publier ici une version complète de ce que pense du sujet, au calme.

 

Voici donc le texte (prévu mais pas bien respecté J), et je vais me coucher (il est 3 heures du matin et j’ai cours demain ;o)

 


                                                    

Bonsoir, merci pour cette tribune.

Je n’ai que 5 minutes, ce qui est un espace minuscule pour résumer un sujet qui a pris toute la place dans ma vie depuis deux ans, mais c’est un espace suffisant pour semer les graines qui germeront ensuite comme elles peuvent.

Pour détailler un peu ce qui mérite vraiment de l’être, je publierai sur mon site une version écrite de ce que j’ai à dire ici à propos du thème de ce soir : démocratie.fr, qu’est-ce qu’on peut espérer, et redouter, d’Internet à propos de notre démocratie ?

 

Je suis un simple citoyen et, par là même, sans tribune et sans moyen de résister aux abus de pouvoir. Pour moi, Internet est donc une lumière au bout du tunnel, un tunnel d’obéissance entre deux élections où nous ont enfermés nos propres élus.

J’ai pris conscience de cet enfermement au moment de la campagne référendaire sur le TCE : j’ai réalisé que, dans les institutions de l’Union européenne, il n’y avait, pour les personnes physiques, AUCUN moyen de résister aux abus de pouvoir de la part d’organes qui se sont placés eux-mêmes hors du contrôle des citoyens.

J’ai aussi découvert, à l’opposé et comme par effet de miroir, que les personnes morales (lobbies) dictent le droit dans l’ombre, loin des procédures démocratiques.

 

La situation est à peu près la même en France et je me bats depuis pour rendre honnêtes les institutions, aussi bien nationales qu’internationales.

C’est Internet qui m’a servi de tribune. C’est Internet qui nous a servi d’Agora. Faute de mieux.

 

Un an après le « non » des électeurs au projet de « traité constitutionnel » (sic) de leurs représentants, il est utile de faire le point de ce qu’Internet représente, en espoir et en menaces, pour la démocratie.

 

1. Internet est d’abord un espoir quand il offre à tous une tribune libre contre les abus de pouvoir.

• Abus de pouvoir en provenance d’institutions dévoyées par nos propres élus qui s’écrivent pour eux-mêmes des institutions sur mesure où les citoyens, entre deux élections, ne comptent pour RIEN.

Je prétends que ce n’est pas aux hommes au pouvoir d’écrire les règles du pouvoir. Ce n’est pas aux parlementaires, aux présidents, aux ministres, aux juges… d’écrire eux-mêmes la Constitution, car ils sont à la fois juges et parties dans le processus constituant et qu’ils ont un intérêt personnel à l’impuissance politique des citoyens, un intérêt personnel qui s’oppose frontalement à l’intérêt général.

Ce n’est même pas leur faute s’ils trichent en écrivant la Constitution : n’importe qui ferait de même, sans doute ; ce n’est donc pas du tout un complot ou une maffia, je ne dis pas du tout « tous pourris » : mais comme Aristote et Montesquieu, je dis « tous dangereux » ; on a besoin d’eux, mais ce n’est simplement pas à eux d’écrire la Constitution et c’est bien notre faute à nous, les autres, ceux qui acceptent de n’avoir jamais le pouvoir et de le déléguer, c’est notre négligence quand nous laissons n’importe qui écrire la Constitution, nous sommes fous : tout est là, ce qui compte, ce n’est pas qui VOTE la Constitution, ce qui compte, c’est qui ÉCRIT la Constitution.

• Abus de pouvoir à travers des médias achetés et vendus comme des savonnettes par les plus riches et qui fonctionnent à sens unique comme des instruments de propagande, sans donner la parole aux citoyens. Je ne développe pas, tout le monde en parle, mais les médias devraient devenir très largement interactifs pour satisfaire le besoin des citoyens de devenir ACTIFS.

Internet et des sites comme celui d’ACRIMED jouent donc un rôle essentiel de surveillance et d’alerte.

 

2. Internet est une menace pour le débat et pour l’élaboration d’un monde commun car il radicalise les opinions (mais attention, il n’est pas le seul : mal organisé, mal composé, le Parlement peut présenter le même défaut).

Sur Internet on choisit ses interlocuteurs et, par confort, nous avons tous tendance à éviter les forums qui nous sont hostiles et à fréquenter plutôt les forums qui sont du même avis que nous. Or quand des semblables parlent à leurs semblables, mécaniquement, ils se radicalisent. Bernard Manin, penseur politique d’une exceptionnelle clarté, a formidablement souligné cette faiblesse importante dans un document que je signale et commente sur ma page ‘Liens’.

Mais il faut comprendre que si nous n’utilisons qu’Internet, c’est faute de mieux, car nous n’avons, pour l’instant, que cet outil pour participer vraiment au débat public.

Il faut signaler aussi que les radios et la télévisions ne font pas mieux, elles qui invitent sans cesse les mêmes éditorialistes, les mêmes prêtres de la pensée unique, sans contradicteur le plus souvent, ce qui, là aussi, radicalise les opinions.

 

La démocratie, comme l’explique fort bien Pierre Rosanvallon, c’est beaucoup plus que le droit de s’exprimer librement : c’est la discussion obligatoire avec nos adversaires avant de décider : le rôle majeur des institutions démocratiques, c’est de nous forcer, tous, à entendre et à réfuter les opinions contraires aux nôtres pour bâtir un monde commun en connaissance de cause.

De ce point de vue, avec un mode de scrutin inique qui exclut carrément du débat des millions d’électeurs, qui écrase les minorités en amplifiant le fait majoritaire ou qui nous impose des « têtes de listes » choisies sans nous, nos institutions ne sont pas démocratiques et le Parlement lui-même n’organise pas toujours comme il faut la contradiction publique indispensable avant de décider : il existe bien trop de moyen de tricher et de passer en force sans débattre.

Donc, l’Internet ne peut pas se substituer à des institutions démocratiques, mais celles-ci restent à imaginer car les nôtres ne le sont pas du tout.

 

 

3. Internet est un espoir historique, inédit, enthousiasmant, pour connaître enfin la volonté générale, la vraie !

Depuis toujours, on butte sur l’aporie, la difficulté insurmontable, de l’impossible démocratie directe à cause de notre grand nombre. La volonté générale est une sorte de Graal jusqu’ici inaccessible et la représentation électorale est un pis-aller, faute de pouvoir, matériellement, consulter tout le monde à tout propos.

La difficulté du nombre nous oblige depuis toujours à déléguer, à nous faire représenter, malgré tous les risques de confiscation du pouvoir par les élus que l’on constate tous les jours. On voit bien que les élus substituent souvent leur volonté personnelle à la volonté générale en se gardant bien, le plus souvent, de nous consulter sur les grands dossiers : OGM, OMC, AGCS, privatisations, etc.

Aujourd’hui, on a enfin le moyen de consulter tout le monde, à tout propos et à tout moment : on peut même poser nous-mêmes les questions qui nous semblent essentielles. Il faut absolument découvrir le site de l’Expérience démocratique, c’est peut-être la meilleure idée du monde pour nous sortir de l’âge de la pierre démocratique.

Ce que nous offre ici la technique de l’Internet est absolument historique, nouveau et tout à fait enthousiasmant et cela devrait révolutionner les principes mêmes du droit constitutionnel.

Mais cela risque de mettre nos représentants politiques au chômage partiel, et donc, il ne faut attendre d’eux aucune proposition honnête sur ce point (vous allez voir qu’il vont vous expliquer, eux et leurs amis intellectuels et journalistes du bon côté du manche, que tout le monde sait depuis longtemps que la volonté générale nécessite absolument, oui Monsieur, absolument, une intermédiation, une représentation, qui permet à cette volonté générale de prendre forme, de se cristalliser, de s’organiser) : c’est donc à nous de leur imposer, à travers une Constitution d’origine citoyenne, notre participation directe à tous les grands débats, puisque c’est aujourd’hui possible mais que nos élus ne nous la rendront jamais de leur plein gré. Et c’est précisément le sens de mon dernier point :

 

4. Internet est un espoir historique pour écrire nous-même une Constitution d’origine citoyenne

J’ai expliqué pourquoi ceux qui ont écrit un aussi mauvais plan A que le TCE ne peuvent pas écrire un bon plan B : ce n’est pas au ministres ou aux parlementaires d’écrire la constitution. Le seul plan qui vaille est le Plan C, C comme Constitution Citoyenne dont les auteurs ne sont pas à la fois juges et parties.

Je ne partage pas le pessimisme de Pierre Rosanvallon, (dont je dévore les livres les uns après les autres même si ses conclusions me font souvent grimper aux rideaux), quand il renonce à institutionnaliser les pouvoirs de surveillance.

Jamais nous n’avons eu à notre disposition un outil de communication comme Internet, jamais nous n’avons pu disposer d’un outil de travail collaboratif comme les sites WIKI. Pensez à l’encyclopédie Wikipédia, le plus grand recueil de savoir humain bâti à partir de la générosité et la collaboration des hommes, sans compétition, sans profit, sans rentabilité financière… Nous pourrions mettre au point non pas un mais quelques projets constituants innovants sur cet espace de liberté inouï.

Après huit mois passés sur le forum à débattre des principes à respecter dans une Constitution honnête, j’ai créé au mois d’août une partie wiki pour enfin écrire de vrais articles. C’est un bébé, ça commence à peine, mais je vous invite à nous rejoindre et à écrire vous-mêmes la constitution idéale, à vos yeux.

Il me semble que chaque citoyen devrait faire cet effort d’écrire lui-même les quelques articles de constitution qui lui semblent prioritaires : dites-vous pendant une heure (et plus si ça vous intéresse) que c’est vous qui avez le pouvoir d’organiser les pouvoirs, la participation des citoyens, les contrôles des organes et des médias, etc. Vous verrez que c’est passionnant (la constitution n’est pas ce texte ennuyeux et poussiéreux dont on voudrait nous éloigner : le débat de l’an passé montre bien l’intérêt que tous peuvent y porter, pour peu que notre réflexion ait une chance d’être prise en compte réellement, tout est là) et que vous lirez ensuite avec beaucoup plus d’acuité et de discernement les projets de constitution qui vous seront soumis.

Quand nous aurons écrit ce projet, ce ne sera plus une utopie : nous aurons montré 1) que c’est possible (de simples citoyens peuvent très bien écrire une bonne Constitution), et 2) que c’est beaucoup mieux (les contre-pouvoirs y sont effectif et pas factices).

Tout compte fait, je vois l’Internet comme une technologie nouvelle et révolutionnaire rendant les citoyens capables d’écrire eux-mêmes leur Constitution et faire surgir la volonté générale, la vraie ! dans le débat public. J’appelle cela « sortir nous-mêmes de la préhistoire de la démocratie ».

À bientôt sur le forum et le wiki J

(Projet d’intervention au débat du Monde du lundi 9 octobre 2006, au Théâtre du Rond-Point, Paris.)

 

 

 

Le Monde a rédigé une « synthèse » des débats : http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3224,36-822246@51-822051,0.html.

 

L’enregistrement audio est là : http://www.lemonde.fr/web/son/0,54-0@2-3208,63-822031@51-822051,0.html

 

On peut en parler , si vous voulez : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/09/25/46-les-resistances-aux-pouvoirs-abusifs-sont-elles-une-contre-democratie&cos=1#c1258.

 

 

Bonne nuit J

 


 

Réflexion de Marat sur la taille limite d'un État démocratique (28 septembre 2006) (Lien)

Pierre Rosanvallon fustige souvent Marat en dénonçant son "populisme".

Pourtant, en lisant Marat dans le texte, on trouve souvent des réflexions plutôt censées et utiles, exprimées dans un style délicieux, et pas tant les excès maladifs qu'on voit dénoncés partout.

Par exemple, j'attire votre attention sur un passage qui évoque la difficulté à contrôler les pouvoirs, difficulté qui grandit avec la taille des États :

De l'étendue de l’État.

C'est à la violence que les États doivent leur origine ; presque toujours quelque heureux brigand en est le fondateur, et presque partout les lois ne furent, dans leur principe, que des règlements de police, propres à maintenir à chacun la tranquille jouissance de ses rapines.

Quelqu'impure que soit l'origine des États, dans quelques-uns l'équité sortit du sein des injustices, et la liberté naquit de l'oppression.

Lorsque de sages lois forment le gouvernement, la petite étendue de l'État ne contribue pas peu à y maintenir le règne de la justice et de la liberté ; et toujours d'autant plus efficacement qu'elle est moins considérable.

Le gouvernement populaire parait naturel aux petits États, et la liberté la plus complète s'y trouve établie.

Dans un petit État, presque tout le monde se connaît, chacun y a les mêmes intérêts ; de l'habitude de vivre ensemble naît cette douce familiarité, cette franchise, cette confiance, cette sûreté de commerce, ces relations intimes qui forment les douceurs de la société, l'amour de la patrie. Avantages dont sont privés les grands États, où presque personne ne se connaît, et dont les membres se regardent toujours en étrangers.

Dans un petit État, les magistrats ont les yeux sur le peuple, et le peuple a les yeux sur les magistrats.

Les sujets de plainte étant assez rares, sont beaucoup mieux approfondis, plutôt réparés, plus facilement prévenus.

L'ambition du gouvernement n'y saurait prendre l'essor sans jeter l'alarme, sans trouver des obstacles invincibles. Au premier signal du danger, chacun se réunit contre l'ennemi commun, et l'arrête. Avantages dont sont privés les grands États : la multiplicité des affaires y empêche d'observer la marche de l'autorité, d'en suivre les progrès ; et dans ce tourbillon d'objets qui se renouvellent continuellement, distrait des uns par les autres, on néglige de remarquer les atteintes portées aux lois ou on oublie d'en poursuivre la réparation. Or, le prince mal observé, y marche plus sûrement et plus rapidement au pouvoir absolu.

Extrait (page 22) de "Les chaînes de l'esclavage" de Jean-Paul Marat (1792) :

De quoi nous faire réfléchir avant de créer de nouveaux empires, non ?

Moi, je trouve ce "dangereux populiste" bien humain et bien séduisant :o)

Si vous connaissez, vous aussi, d'autres "populistes" qui s'expriment si finement, soyez gentils de me les faire connaître :

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/09/28/47-reflexion-de-marat-sur-la-taille-limite-d-un-etat-democratique

 


 

Manifeste pour la vraie démocratie (10 juin 2006) (Lien)

Chers amis,

Vous vous souvenez peut-être de ce livre de Pierre, « Manifeste pour la vraie démocratie », dont je vous avais parlé juste avant Noël (voir plus bas, le 23 décembre) parce qu’il avait enclenché chez moi une vraie mutation.

On pourrait écrire cette quatrième de couverture :

« L’auteur nous fait une démonstration implacable de l’absurdité et des dangers de la course au pouvoir organisée par nos institutions politiques prétendument “démocratiques”.

Pour ce faire, il s’attaque à un tabou politique : les élections au suffrage universel ! Il nous montre qu’elles mènent à un résultat inverse de l’idéal démocratique. Mais il ne se contente pas de condamner le système : il nous en offre un autre, sur un plateau, à la portée immédiate de tout un chacun. Un système qui libère les citoyens “d’en bas” de l’emprise des pouvoirs “d’en haut”.

Le “Manifeste pour la vraie démocratie” est peut-être la bombe politique du 21ème siècle : une bombe non-violente capable de neutraliser les principales sources de violences. Un pavé jeté par un simple citoyen dans le marigot fangeux des politiciens professionnels. Il remet à plat les principes fondateurs de la démocratie pour la reconstruire sur des bases incontestables. Au probable grand dam des “notables” de tous bords.

Dès lors, des perspectives formidables s’ouvrent aux citoyens de bonne volonté avec ce projet généreux et désintéressé. »

 

Pierre, que je n’ai jamais rencontré, écrit sous le pseudo d’André Tolmère et il a du mal à trouver un éditeur. Je ne comprends pas cette situation car je trouve son livre original, important et détonnant : il m’a remué en profondeur et ce séisme intérieur m’a conduit à lire bien d’autres livres importants consacrés, eux aussi, à ce choix décisif (ou équilibre) entre élection et tirage au sort (Bernard Manin, Philippe Braud, Mogens H. Hansen, Pierre Rosanvallon…). Écrit au vitriol dans un style vif et rapide, solidement argumenté (sa bibliographie est passionnante), illustré d’exemples concrets, astucieux, c’est un outil politique écrit par un simple citoyen, c’est captivant, on se sent directement concerné à toutes les pages, on parle de choses essentielles.

Je suis sûr que des éditeurs militants comme Raisons d’agir, Agone, La Découverte ou L’Éclat (en lyber, gratuit sur le net et payant sur papier) seraient intéressés s’ils connaissaient son existence. Fayard ou Albin Michel pourraient également publier ce livre de résistance, il me semble. Si l’un d’entre vous connaît quelqu’un chez ces éditeurs, il faudrait leur signaler ce manuscrit décapant.

Dépité par le silence des éditeurs, Pierre me permet de publier son livre. C’est une chance pour nous tous. Imprimez ce texte, mes amis, (j’ai réglé la mise en page pour permettre le recto verso), et lisez-le, c’est un document considérable. Vous y passerez une après-midi ou deux qui, directement ou indirectement, peuvent changer votre vie.

 

Vous pouvez télécharger cet étonnant manifeste ici :
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/messages_recus/Manifeste_pour_la_vraie_democratie.rtf  

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/messages_recus/Manifeste_pour_la_vraie_democratie.pdf

Et, comme d’habitude, vous pouvez réagir ici :

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/06/10/43-manifeste-pour-la-vraie-democratie

 


 

La démocratie bloquée au sein même des partis : l’exemple emblématique du PS
et de ses éléphants (7 juin 2006)
(Lien)

Gérard Filoche, un inspecteur du travail qui fait honneur à sa profession, un authentique défenseur des salariés (80% de la population active, n’est-ce pas ?), m’a envoyé ce matin un message que je trouve important et que je vous livre ici, puisqu’il est probable qu’aucun "média d’information" ne vous en parlera jamais… (Attention pourtant : ces journalistes, si discrets sur la véritable tyrannie des élus qui règne souvent au sein des partis politiques, sont des pros de l’information fiable, alors que nous, simples citoyens, ne sommes, bien sûr, que des charlots) :

De : Démocratie et socialisme democratie.et.socialisme@wanadoo.fr
Date : Wed, 07 Jun 2006 02:48:34 +0200

Objet : BREF COMPTE RENDU DU BN DU PS DU 6 JUIN 2006

Le Bureau National s'est tenu de 16 h à 1 h 30 du matin.

Nous y étions invités, Marc Dolez et Gérard Filoche pour défendre notre point de vue.

Dés le début François Hollande a voulu interdire Marc Dolez de parole. Présent oui, mais sans droit d'expression.

Personne ne s'est opposé à cet interdit, personne.

Il a fallu attendre une vingtaine de minutes pour que lors de son tour de parole, Dsk en profite pour préciser que si nous étions invités nous devions pouvoir parler.

Cela a fait reculer François Hollande qui nous alors laissé parler ensuite.

Ce que Marc Dolez a fait en expliquant le sens de notre démarche, un “contre projet”, mais puisque il nous était refusé de le soumettre au vote des militants, nous avions fait dix amendements.

François Hollande a dit "pas de contre projet"

Personne n'a rien dit.

Ensuite on est passé à l'examen des 34 pages du projet une à une. Nous découvrions le projet au fur et a mesure, les autres l'avaient eu la veille.

Nos amendements écrits n’ont pas été distribués aux 100 camarades présents. Pas plus que aucun autre amendement de quiconque n’a été communiqué par écrit a l’assemblée de ce BN pendant les 9 h 30 de débat.

Nous sommes intervenus les premiers pour dire

- qu'il fallait rejeter la "retraite à la carte" mot d'ordre du medef

- qu'il fallait défendre la retraite à 60 ans

- refuser le temps partiel dit choisi mais subi,

- rapprocher la durée réelle du travail des 35 h en abaissant la durée maxima de 48 à 44 h, en majorant le taux des heures supplémentaires et en diminuant le nombre, le contingent, le compte épargne temps, les deux jours de repos consécutifs, etc.

- contrôler les licenciements abusifs et boursiers.

On a sauvé le parti (et le peuple français) de “la retraite à la carte”,

... et fait réintroduire le chiffre de 60 ans dans la partie retraite, mais pas l'indexation sur les salaires, ni les 10 meilleures années, ni  le taux de remplacement à 75 %, ni fait revenir le nombre d'annuités de cotisations au nombre moyen réel d'années travaillées par les salariés français (37 annuités).

On a fait quelques amendements de sauvegarde (la date des élections prud'hommes, le doublement des effectifs de l'inspection du travail... etc.)

À la fin, il n'y a toujours pas les modalités de la retraite à 60 ans, rien sur le droit du licenciement, rien de correct sur les 35 h, (on a fait revenir faiblement le mot "loi"), rien de substantiel sur les salaires...

 

Bon voilà...

 

À la fin, vers 1 h,  François Hollande a encore refusé que nos amendements non intégrés soient soumis au vote des militants pour le 22 juin...

Personne n'a rien dit... Aucun courant, aucune sensibilité, aucune personnalité présente n’a demandé la démocratie...

À la fin, il y eu trois abstentions (François Delapierre, Mariane Louis, Arnaud Montebourg)  et nous étions deux à voter contre : mais François Hollande a déclaré que nos voix ne comptaient pas...

 

Pas de démocratie, pas de liberté de choix, pas de droit de décider, pas de possibilité de proposer des amendements aux militants...  Ce, en dépit des statuts et traditions de ce parti, il avait toujours été possible de déposer des amendements au “projet”,  différents, aussi bien en 1980 qu’en 1988...

 

Le projet qui nous est soumis là sera le projet de “tout” le parti s’il est voté par les militants...

Il est un des textes les plus modérés que le parti ait voté depuis plus de dix ans...

Pas de mesure phare, que des demies mesures !

Pas de transformation sociale pour redistribuer les richesses, pas question de reprendre aux profits les 10 points qu’ils ont pris aux salaires, donc pas de financement, donc peu d’avancées in fine...

Tous les artisans de la synthèse du Mans se sont donc retrouvés sur un texte en retrait même de ladite synthèse, non seulement rien n’a avancé vers la gauche, mais c’est plutôt de façon droitière que des mois de discussion, d’états généraux internes, se concluent !

 

Nous allons attirer l’attention de tous les militants, anciens et nouveaux, par tous les moyens possibles de communication, certes limités  par la volonté de François Hollande et de tous les membres présents qui n’ont pas levé le petit doigt pour défendre le droit de déposer et de faire voter des amendements...

Nous allons demander partout ou c’est possible à nos camarades de faire circuler les amendements et de le soumettre au vote de leurs fédérations, des militants et appeler a rejeter le projet en l’état.

Gérard Filoche


Il se trouve que je suis en train de lire un livre décapant que m’a spontanément envoyé un lecteur canadien (merci François :o) qui s’intitule « Abolir les partis politiques » de Jacques Lazure (édition Libre pensée, 2006). Le plan de ce livre donne une idée forte de ses thèses qui résonneront dans toutes vos têtes avec des exemples infinis puisés dans la vie politique française :

 

Abolir les partis politiques, de Jacques Lazure (Libre pensée, 2006)

Introduction

I - Les méfaits des partis politiques

Chapitre 1 : la quête de pouvoir

Les partis stratégiques

Les partis idéologiques

Course à la direction d’un parti

Le chef de parti en campagne électorale

Le chef de parti au pouvoir

Les nominations partisanes

Le bâillon gouvernemental

Un gouvernement minoritaire

Chapitre 2 la quête de la belle image

Les sondages

Le vedettariat

Les partis politiques en spectacle

Agents de publicité et conseillers en communication

Chapitre 3 : la quête de l’argent

Avant la loi électorale du gouvernement Lévesque

La loi électorale du gouvernement Lévesque

Le gouvernement fédéral et le financement des partis

Chapitre 4 : la dépersonnalisation

Les candidats bidon et les exclus

Le chef et son cabinet ministériel

La ligne de parti

Les votes libres

II - Par quoi remplacer les partis politiques ?

Chapitre 5 : préalables au nouveau régime gouvernemental

Chapitre 6 : esprit du nouveau régime

Foin de la partisanerie !

La personnalisation

Le service du bien commun

Le dialogue et la coopération entre les députés

Une démocratie plus forte pour les citoyens

Chapitre 7 : élection des députés

Présentation d’un curriculum vitae public

Le problème de la représentation proportionnelle

Des élections à date fixe

Un nombre important de signatures

Dépenses électorales à payer par l’État

Des élections à deux tours de scrutin

Le droit de démettre les députés

Chapitre 8 : le fonctionnement de l’Assemblée nationale

L’exercice d’un plein pouvoir législatif

Premières séances de l’assemblée nationale

            Information mutuelle

            Décisions préalables

            Choix politiques et budgétaires

            Nominations importantes

Commissions parlementaires

Chapitre 9 : le pouvoir exécutif et les ministres

Chapitre 10 : le premier ministre

Chapitre 11 : mouvements politiques et sociaux

Conclusion


En cherchant des infos sur ce livre, j’ai trouvé ce blog canadien :
http://steveproulx.typepad.com/steve_proulx/2006/05/abolir_les_part.html

Je tiens évidemment aux partis comme un moyen important de se regrouper pour résister à l’oppression, et je pencherais plutôt, pour l’instant, pour un tirage au sort au sein des partis pour désigner des porte-parole temporaires plutôt que des élections qui désignent des chefs indéboulonnables : on se heurte au sein même des partis au même problème, exactement, de la confiscation de la démocratie par les élus qu’on observe dans la Cité.

Comment nous débarrasser des arapèdes cratocrates ?

Je vous recommande le site www.democratie-socialisme.org/, un lieu de résistance réelle.

 


 

Un plan B démocratique (5 juin 2006)  (Lien)

Je viens de recevoir un message très intéressant et je voudrais, avec l’accord de son auteur, vous le faire connaître :


De : Troy Davis <troydavis@post.harvard.edu>

Date : 29 mai 2006 09:45:08 HAE (ÉUA)

À : Etienne Chouard <etienne.chouard@free.fr>

Objet : Un Plan B démocratique


Bonjour Étienne,

vous serez peut-être intéressé par mon travail :

-    Le concept d'ingéniérie démocratique rationnelle (sans le savoir et sans théorie pré-établie, vous êtes ce que j'appelle un "ingénieur en démocratie", qui sera je l'espère un des grands nouveaux métiers du XXI siècle).

-    Le projet de l'École de la démocratie, la première de ce type au monde, basé à l'origine sur la notion philosophique de dignité égale de tous et de citoyenneté mondiale :  http://www.ecoledelademocratie.org, de niveau universitaire, recherche et formation inter- et supradisciplinaire, pour former des politiques, des hauts fonctionnaires et des conseillers indépendants en démocratie.

-    L'application de la théorie de l'ingéniérie démocratique au processus européen, qui m'a mené même avant le 29 mai à théoriser un Plan B démocratique et INTRINSÈQUEMENT participatif, en trois étapes fondamentales:

1.  Référendum européen sur les questions fondamentales et le cadre politique fondamental :

- Voulez-vous une constitution européenne ?

- Une telle constitution devrait-elle définir une citoyenneté européenne et des droits fondamentaux ?

Si oui, on continue ; si non, on arrête les frais.   Si oui, on a un mandat politique clair qui court-circuite les interférences de politique nationale, et qui "sépare" ceux qui ont voté Non contre l'Europe en tant que telle, ou Non contre UNE Europe spécifique, trop libérale etc.  Donc fini de l'amalgame droite anti-européenne et gauche pro-Europe anti-libérale.

2. L'élaboration par les grands groupes politiques européens de projets de constitution, pendant un an par exemple.

Parlements nationaux + Parlement Européen (cela rapprocherait aussi les deux niveaux ce qui aurait des avantages connexes non négligeables)

On peut imaginer d'autres constellations mais l'idée non négociable est que les Européens doivent avoir le CHOIX entre plusieurs versions de l'Europe.   Après tout, imposer une constitution fourre-tout n'est ce pas aussi démocratique que d'imposer un parti unique à des élections ?   Où alors est la démocratie ?

3.  Référendum européen sur les diverses propositions constitutionnelles mises en lice.  

Si une proposition retient 65% des voix (quasiment impossible si on a 4 ou 5 propositions de constitution), elle passe, sinon les deux avec le plus grand pourcentage de vote sont mis en panachage un mois plus tard.  Pourquoi un mois et pas une semaine ?   Pour, encore une fois, permettre une vrai discussion en Europe sur les mérites respectifs de ces propositions pendant plusieurs semaines.   Une semaine ne suffit pas.

Résultat :  un processus possible, plausible, qui maximalise la participation citoyenne de manière naturelle et non forçée ou non dépendante du civisme supposé de 500 millions d'Européens.

Voyez sur ce blog aussi: http://www.europeus.org/troy_davis/   (mais là, je n'avais pas encore mis les parlements nationaux dans le coup).

Le plus inédit, c'est la mise en concurrence démocratique de plusieurs projets, qui est à l'opposé de la "tyrannie de l'unité", à laquelle malheureusement presque tous se soumettent en voulant faire UNE constitution quasiment idéale par une démarche participative maximale.  Ce qui intrinsèquement amènera beaucoup moins de gens à participer que dans l'approche que je propose, car des millions de gens se diront que "puisqu'on concocte de toute façon une grosse soupe, que ma contribution ne sera pas décisive, j'y vais pas".   Tandis qu'en permettant aux grandes formations de chacune créer sa recette et de la défendre, les gens auront plus de chances de faire passer leurs idées, et surtout, le fait que les versions différentes seront soumises au vote souverain des Européens, fera que NATURELLEMENT, les groupes politiques feront des tas de consultations dans toute l'Europe pour, d'une part, écouter les citoyens et augmenter leurs chances de gagner la compétition constitutionnelle et, d'autre part, juste psychologiquement pour pouvoir dire qu'ils les ont écoutées, et là aussi, augmenter leur chances.

Ma proposition met également dans le coup les politiques et les partis, qui, quoi qu'on en pense, sont impossibles à évacuer de la scène politique.  Ceux qui ne proposent pas d'alternative plausible (en évacuant les partis) ne rendent pas service à notre cause commune d'une europe démocratique, car on ne fait qu'augmenter le cynisme des gens qui verront dans ces propositions qu'un idéalisme impossible et une sorte de méthode coué, seulement réalisable si la nature humaine était meilleure qu'elle ne l'est.

Amicalement,

Troy Davis
Consulting democracy engineer / ingénieur-conseil en démocratie
Président, Association de soutien à l'Ecole de la Démocratie
http://www.ecoledelademocratie.org

 

 

Comme je le disais dans ma page ‘Liens’ quand je vous en ai parlé la demaine dernière :

« Troy Davis envisage de faire rédiger ces projets par des parlementaires (nationaux et européens), ce qui revient à continuer à faire écrire les règles du pouvoir par les hommes au pouvoir, ce qui constitue, pour moi, on le sait, un sabordage en bonne et due forme (du point de vue de ceux qui tiennent à se protéger contre les abus de pouvoir, c’est vrai, pas pour les autres).  Cela ne fait rien, débattons : cet homme est intéressant :o) »

J’ai répondu à Troy, bien sûr, et je lui ai dit combien je trouvais séduisante cette belle idée d’une École de la démocratie, même si je trouve le site un petit peu "sec"… Je lui ai suggéré d’y proposer :

 

 

Ce qui m'intéresse, vous l'avez compris, ce sont des outils pour aider les gens normaux à s'approprier l'acte constituant et se passer des experts. J'ai été profondément marqué par cette thèse d'Aristote selon laquelle un vrai citoyen est capable de gouverner comme d'être gouverné et la politique ne doit surtout pas être un métier.

 

Si vous avez, chers lecteurs, d’autres idées pour enrichir son projet et préparer notre réappropriation du fait démocratique, faites-le savoir sur le blog où je vais créer un billet correspondant à cet article de journal :

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/06/05/42-un-plan-b-democratique .

 


 

 

Chômage, dividendes et Constitution d’origine citoyenne :
la seule vraie solution contre le chômage de masse est, pour les citoyens, d’écrire eux-mêmes une Constitution qui impose la démocratie dans l’entreprise, rendant enfin possible une juste répartition des richesses.
(14 mai)
Ce combat-là devrait, logiquement, être prioritaire sur tous les autres. 
(Lien)

 

Chers amis,

 

J'ai besoin de votre esprit critique.

 

En marge de ma bagarre pour faire valoir que, pour bâtir une juste démocratie, "ce n'est pas aux hommes au pouvoir d'écrire les règles du pouvoir", (nous devrions rendre parfaitement distincts et incompatibles le pouvoir constituant et les pouvoirs constitués), je cherche à vérifier (avec vous, si vous le voulez bien) une thèse économique, plutôt mal vue par la pensée unique du moment, et pourtant fort séduisante pour nous tous :

 

Ce ne serait pas, comme on nous le serine tous les jours, le coût du travail (des actifs) qui est trop important pour que le moteur économique tourne correctement, ni la rigidité des employés devant la nécessaire flexibilité, mais bien le coût de l'actionnariat (des oisifs) qui serait confiscatoire : l'inquiétante panne économique que nous vivons depuis plus de vingt ans serait due à un assèchement des richesses par des "parasites", exactement comme à l'époque de Keynes qui avait déjà bien identifié le poison mortel de la rente au centre de son analyse en préconisant finalement d’"euthanasier le rentier".

 

 

 

Pour étayer cette thèse, je cherche les chiffres exacts de la ponction exercée chaque année sur la richesse nationale au profit des actionnaires.

 

J'ai trouvé sur le site de l'INSEE un tableau que j'ai peur de mal utiliser et je vous sollicite pour me corriger si je me trompe :
1 Lien : http://www.insee.fr/fr/indicateur/cnat_annu/base_2000/cnat_annu_2000.htm,

2 cliquer sur Tableau économique d'ensemble (TEE), lien en bas à gauche,

3 puis, sur la ligne 4.30, "Comptes courants…", choisir l'année 2004 (car on n'a pas encore les chiffres d'ensemble pour 2005),

 

Le tableau s'appelle "Tableau Économique d'Ensemble : comptes courants de l'année 2004 base 2000".

 

Il y a là beaucoup de chiffres, mais justement : seuls quelques chiffres sont importants et vous allez voir que vous allez comprendre parce que vous êtes tous directement et personnellement concernés.

 

• D'abord, est-il correct de considérer que la référence des richesses à distribuer (à répartir entre le facteur travail et le facteur capital qui ont tous deux contribué à la créer) se trouve à l'intersection de la ligne 14 nommée "B1 /PIB Valeur ajoutée brute", et des colonnes D et E "Sociétés financières" (les banques, etc.) et "Sociétés non financières" ?

Si vous êtes d'accord, on pourrait mettre en jaune les cellules D14 et E14 :

828,5 + 67,2 = soit 895,7 milliards d'euros de valeur ajoutée (VA) pour la France en 2004.

 

• Ensuite, est-ce qu'il est juste de lire ces chiffres en disant que la part de VA affectée aux salaires en 2004 est sur la ligne 19 intitulée "D1 Rémunération des salariés" ?
Encore un peu de jaune sur D19 et E19 ?
539,2 + 40,5 = soit 579,7 milliards d'euros de salaires versés en 2004 (prélevés sur la VA).

 

• Enfin, est-ce qu'on peut dire que le prélèvement des actionnaires sur cette richesse est sur la ligne 35 intitulée "D42   Revenus distribués des sociétés" ?

Si cela vous semble correct, on mettrait en jaune les cellules D35 et E35 :
145,7 + 31.8 = soit 177,6 milliards d'euros de dividendes versés en 2004 (prélevés sur la VA).

 

Si ces coups de projecteur jaune sont pertinents, ce grand tableau de chiffres imbuvables gagne en lisibilité et devient une clef importante pour comprendre, non ?

 

 

• En pourcentage, en 2004 :
la part des salaires serait donc de  64,72 % (579,7 / 895,7)
et celle des actionnaires serait de 19,82 % (177,6 / 895,7)

 

Est-ce que ce sont ces pourcentages qui se sont déplacés de 10 points depuis vingt ans ? (On lit souvent que 10 points de richesse ont été perdus pour les salaires en vingt ans, et 10 gagnés par les actionnaires.)

Pour le vérifier, j'ai fait les mêmes calculs avec les chiffres de 1993 (chiffres les plus anciens disponibles sur la page de l'INSEE ci-dessus), et j'ai trouvé deux pourcentages étonnants : 65,16% pour les salaires (en 93), soit sensiblement le même qu'aujourd'hui, et 11,43% pour les dividendes (70 Mds sur 600 de VA en 1993), soit une augmentation de 74% en 10 ans. Si ce n'est pas sur les salaires, sur quel(s) poste(s) les dividendes ont-ils été conquis en 10 ans ? Sur les impôts ?

 

Et est-ce que vous savez où trouver les chiffres d'il y a vingt ans, pour observer ce prétendu déplacement dans la répartition des richesses entre les actifs et les oisifs ?

 


 

 


De mon côté, j’ai trouvé ce passionnant graphique, publié par l’OCDE (qui n’est pas vraiment une officine révolutionnaire) :

J’observe ici deux phénomènes qui passionneront tout le monde, y compris les damnés de la terre non formés à l’économie :

·  Les profits augmentent depuis trente ans, mais l’investissement baisse sur la même période ! Ce qui tord le cou à un gros mensonge "gros profits=gros investissements=enrichissement de tous".

·  La courbe du chômage évolue depuis trente ans exactement comme celle des profits non investis (distribués), ce qui accuse les profiteurs à qui sert directement le chômage de masse.

 

En tout cas, 180 milliards d'euros par an de richesses siphonnées (20%... un cinquième de la richesse créée !) (passez-moi les décimales), ça représente combien de SMIC annuels ?

 

Le coût d'un SMIC annuel tout compris (sans réduction de charges) avoisine les 22 000 € par an, n'est-ce pas ?

 


Le paiement de la rente aux actionnaires
nous coûterait donc chaque année
plus de 8 millions de SMIC annuels !

 

Chers amis, est-ce que j'ai commis une erreur quelque part ?

 

Est-il farfelu de rapprocher ce chiffre de celui des chômeurs, officiels et officieux ?

 

Est-ce que tout cet argent ne manque pas aux grandes entreprises, très simplement, pour investir et pour embaucher ?

 

Est-ce que ces 180 milliards par an ne leur font pas défaut pour payer convenablement (au lieu d'étrangler par les prix) les PME qui sont leurs fournisseurs ? La pénurie de richesse qui naît de cette incroyable ponction ne se propage-t-elle pas dans toute l'économie jusqu'aux plus petites PME en rendant tous les acteurs pingres parce qu'appauvris ?

 

Je pense, par exemple, à l'étranglement des PME par la grande distribution, sociétés cotées en bourse et extrêmement profitables, mais pour qui ?

 

 

Est-ce qu'on ne se moque pas de nous quand on prétend combattre le chômage avec de la précarisation des salariés, des aides aux entreprises, de la "flexibilité" des salariés, des diminutions des impôts des plus riches, des efforts des salariés dans tous les sens pour se serrer la ceinture depuis des décennies, alors qu'un véritable racket s'enracine et s'amplifie impunément de l'autre côté des (soi-disant) "facteurs de production", le "facteur" qui décide, pas celui qui travaille ?

 

Est-ce que vous avez entendu parler du NAIRU (Non-Accelerating-Inflation Rate of Unemployment : "taux de chômage non accélérateur de l'inflation"), et qu'est-ce que vous en pensez ?

(Voyez http://web.upmf-grenoble.fr/espace-europe/publication/cah_e_e/9/eisner.pdf et http://lenairu.blogspot.com/)

 

Est-ce qu'on peut accepter un cynisme pareil ? (un taux de chômage minimum pour protéger le tas d'or des rentiers du danger de l'inflation !)

 

 

Vous sentez probablement comme moi qu'il est tentant de se déplacer alors sur des considérations juridiques, totalement intriquées avec les données économiques :

 

Qui décide de cette répartition de la valeur ajoutée ? De quel droit ?

 

Les dirigeants des entreprises cotées ? Par qui sont payés ces dirigeants ? Qui contrôle leur rémunération ? Les actionnaires ? Tiens, tiens…

 

Y a-t-il un lien entre le niveau de rémunération des dirigeants et leur choix de répartition des richesses ?

 

Qui vote aux assemblées d'actionnaires ? Y a-t-il des salariés représentés dans ces assemblées où se décide (confirme) la répartition des richesses créées par tous ? Tiens… et pourquoi pas ?

 

Pour créer des richesses, il faut deux facteurs de production : le travail et le capital. Comment se fait-il qu’un seul facteur, le capital, dispose de 100% du pouvoir ? Qui a écrit ce droit-là ?

 

Quel pourrait être, quel devrait être, le rôle du droit pour permettre enfin une certaine démocratie dans l'entreprise et, plus largement, dans toute la société tant les choix évoqués ont de répercussions sur la vie de tous les hommes ?

 

Où sont les verrous qui interdisent aux citoyens de reprendre la barre sur les sujets qui leur paraissent essentiels et sur lesquels leurs "représentants" déméritent gravement ? Quelle est la réalité que nous avons su donner, aujourd'hui, au précieux droit des peuples à disposer d'eux-mêmes ? Qui écrit les Constitutions ? Qui devrait écrire la Constitution ?

 

Est-ce que vous trouvez aberrante l'idée d'imposer un droit de vote des salariés, aux côtés des actionnaires et à part égale, dans ces assemblées générales où des décisions essentielles (pour toute la Cité) sont prises (ou validées) ?

 

Est-ce qu'on peut attendre de la loi qu'elle limite le droit à distribuer des dividendes ?
Selon quelle référence, quelle quotité ?

 

Est-ce qu'il est souhaitable d'interdire de payer les dirigeants en actions ?

 

Est-ce qu'on peut imposer une limite à l'amplitude de l'échelle des salaires dans une entreprise ? Un revenu maximum ?

 

Est-ce qu'on peut revenir à un mode de financement classique des entreprises (par prêts bancaires et la liberté après remboursement, plutôt que l'impôt à vie que sont les dividendes), moins dangereux que la Bourse Casino ? Est-ce qu'on peut se débarrasser carrément des Bourses ?

 

Comment décontaminer tous ceux qu'on a déjà empoisonnés en les payant avec de gros paquets d'actions ?

 

Est-ce qu'on peut sortir du piège qui a consisté à embarquer de nombreux retraités qui sont bien obligés aujourd'hui de vivre avec cette technique de financement "casino roulette black jack" que, souvent, ils n'ont pas choisie ? Est-il concevable de revenir du mode de financement des retraites par fonds de pension à un financement par répartition ?

 

Bon, je pose trop de questions, pardon.

 

Surtout, que pensez-vous des chiffres que j'ai relevés sur le TEE de l'INSEE ?

Est-ce comme ça que vous les lisez de votre côté aussi ?

 

C'est bien 180 milliards ?

 

Remarques : j’ai vérifié auprès de l’INSEE, on ne peut pas invalider ce chiffre en précisant qu'une (parfois large) partie de la VA  de ces entreprises cotées est créée à l'étranger : cet argument ne vaut rien car les chiffres de l’INSEE en question ont déjà été corrigés des opérations réalisées à l’étranger (les chiffres de l’activité dans le ‘reste du monde’ sont isolés dans une colonne à part).

 

De toutes façons, la richesse créée à l'étranger, si elle peut, malgré cette externalité de la source, profiter aux actionnaires, elle pourrait tout aussi bien profiter aux salariés, ou à la recherche, ou aux fournisseurs, non ?

 

J’ai également consulté quelques éminents économistes qui valident ma lecture des chiffres de l’INSEE.

 

Rejoignez le débat qui est lancé sur cette question de la démocratie dans l’entreprise imposée par une Constitution citoyenne, pour éradiquer le chômage, sur ces discussions de mon forum :

·         "Limiter le droit de propriété avec un droit des salariés sur l'entreprise où ils travaillent" :
http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?id=25

·         "Rendre certains services publics indépendants du pouvoir exécutif" (les médias, les instituts de sondage et ceux de statistiques, notamment) :
http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?id=45

 

J'ai hâte de vous lire :o)

 

Vous pouvez réagir à cette adresse :

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/05/14/40-chomage-dividendes-et-constitution-d-origine-citoyenne

 

Vous pouvez aussi réagir sur Agoravox, où j’ai également mis cette hypothèse en débat, suscitant de très nombreuses réactions, assez virulentes parfois, mais l’ensemble est intéressant :

http://www.agoravox.fr/auteur.php3?id_auteur=5765

 


Évolution nécessaire de notre démocratie - L’apport de Pierre Rosanvallon :
Importance cardinale des pouvoirs de surveillance (25 avril 2006)
(Lien)

Voici le texte intégral de la leçon de Pierre Rosanvallon au Collège de France diffusée le vendredi 14 avril 2006 sur France Culture (dans l’émission "Éloge du savoir", de 6 h à 7 h le matin).

La retranscription et le contrôle d’une seule heure (sur quatorze) m’a demandé plus de dix heures de travail, mais je tenais à vous faire connaître ce travail important d’historien car je l’ai trouvé proprement passionnant : on est là au cœur de toutes nos difficultés modernes. J’ai hâte que Pierre Rosanvallon publie le livre correspondant à tous ses cours intitulés « La démocratie du 21ème siècle – Les voies nouvelles de la souveraineté du peuple », et je ne manquerai pas de vous le faire connaître dès que je le saurai moi-même.

Sa culture et son esprit de synthèse sont une arme pour nous aider tous à défendre la démocratie : il ramène à la surface des penseurs oubliés et il articule leurs arguments de façon éclairante.

D’abord, la présentatrice introduit la leçon, toujours de façon très synthétique :

« Nous sommes à peu près tous d’accord pour penser que nous vivons une crise de la démocratie. Si certains pessimistes en prophétisent le déclin, Pierre Rosanvallon, au contraire, nous propose, lui, de remettre en mouvement une réflexion vivante sur les possibilités que cette crise offre à la démocratie.

On pourrait résumer grossièrement ses cours en disant que la démocratie est un régime toujours en crise qui ne peut régler ces crises qu’en devenant plus démocratique, faute de quoi… on connaît la suite.

Il s’agit donc pour le peuple, auquel le pouvoir appartient, de rompre avec le comportement du spectateur passif, de réveiller sa liberté et son esprit critique.

Pour Pierre Rosanvallon en effet, la démocratie est indissociable d’un travail d’exploration et d’expérimentation, de compréhension et d’élaboration d’elle-même. Elle doit donc être sans cesse réinventée.

Et par exemple, dans les cours que nous écoutons cette semaine, Pierre Rosanvallon réfléchit avec nous sur les pouvoirs de surveillance que le peuple exerce sur les gouvernants et sur les conditions qui pourraient faire en sorte que ces pouvoirs de surveillance échappent à une simple délégation et donc à une récupération de la part du Parlement.

Pierre Rosanvallon a interrogé cette semaine plusieurs formes de l’exercice de cette surveillance, celles produites notamment par de nouveaux militantismes qui s’élèvent contre les abus de pouvoir et interpellent le gouvernement, on peut penser par exemple à l’Observatoire sur les prisons, certaines de ces formes très efficaces remontent parfois historiquement bien avant le suffrage universel.

Ce matin, Pierre Rosanvallon se propose de penser les conditions qui rendraient possible l’institu­tion­nali­sation d’organes de contrôle du pouvoir. »

Puis, Pierre Rosanvallon commence :

« Dans l’Athènes de l’âge classique, on le sait, c’est essentiellement le tirage au sort des magistratures, beaucoup plus fréquemment que l’élection, qui est considéré comme le propre de la démocratie.

La première procédure, le tirage au sort, est en effet regardée comme la plus radicalement égalitaire puisqu’elle présuppose que tous les citoyens ont une capacité équivalente d’exercer les charges publiques. Ce point a été très largement documenté et discuté par les historiens. On peut se reporter à l’ouvrage classique sur la démocratie athénienne de Hansen, ainsi que pour faire le lien avec les travaux de sciences politiques, à l’ouvrage de Bernard Manin publié en 1995 "Principes du gouvernement représentatif" qui a eu pour mérite important de redonner toute son importance à cette procédure du tirage au sort.

Mais si on a parlé du tirage au sort, on a par contre, oublié ce qui était pour les contemporains, un autre caractéristique, toute aussi essentielle, de la démocratie. Cette autre caractéristique, c’est l’institution de procédures systématiques de contrôle de l’action de ceux qui exerçaient une fonction publique ou de ceux qui géraient des fonds publics.

Dans son enquête, Hérodote est le premier à souligner cette dimension. "Dans un régime populaire, écrit-il, le sort distribue les charges, le magistrat rend compte de ses actes, toute décision y est portée devant le public." La reddition de comptes en fin de mandat était la forme principale de ce type de contrôle. Même s’il se démarque des prudences aristocratiques et, pourrait-on dire, presque technocratiques de Platon, concernant la nomination des gouvernants, ce n’est significativement pas sur ce dernier point qu’Aristote met l’accent pour appréhender la définition de la démocratie : la surveillance étroite des magistrats par les citoyens est, pour Aristote, l’élément clef de la démocratie.

Si la politique propose des approches différentes de la démocratie, et si Aristote semble parfois lui-même hésiter dans sa définition du bon régime, ce principe du contrôle populaire reste toujours affirmé avec force chez lui.

Même dans les cas où il ne confie au citoyen que des pouvoirs restreints, Aristote ne limite jamais leur pouvoir d’inspection sur les magistrats. C’est ce pouvoir qui constitue, en fin de compte, le véritable pivot des différentes catégories de constitutions mixtes qu’il appelle de ses vœux.

Si la démocratie est au premier chef le règne de l’isonomie [égalité devant la loi (ÉC)], la souveraineté des citoyens dérive ainsi de leurs qualités (…) de redresseur et de surveillant. Je m’appuie là sur un ouvrage récent publié chez Droz (?) de Pierre Fröhlich : "les cités grecques et le contrôle des magistrats du 4ème au premier siècle avant JC" qui présente l’état le plus avancé de la recherche sur ces modalité de redressement et de surveillance, cet ouvrage ayant en outre l’avantage considérable de ne pas simplement se fonder sur une étude du cas athénien, mais d’avoir pris en compte dans son investigation l’ensemble des matériaux épigraphiques concernant les autres cités grecques, ce qui est très rarement le cas dans la plupart des travaux sur la Grèce antique qui se cantonnent le plus souvent à Athènes et en outre, à Athènes de l’âge classique.

Il y a bien des façons d’envisager en Grèce les modalités de ce contrôle. Dans l’Athènes classique dont parle Aristote, il y a même plusieurs catégories de magistrats, qui sont tirés au sort, chargés de contrôler les agents, eux-mêmes tirés au sort ou parfois élus, de l’exécutif.

Sont ainsi distingués les "redresseurs", (…) les auditeurs de comptes (…), les contrôleurs (…) ou encore les avocats publics (…).

La plupart des autres cités grecques connaîtront aussi, jusqu’à la fin de la période hellénistique, des mécanismes équivalents, qu’il s’agisse de reddition de comptes en fin de mandat ou de contrôle des magistrats en cours de charge.

Les modalités de ces procédures et la part prise par les citoyens ordinaires dans leur mise en œuvre ont constitué le meilleur indicateur du degré de démocratie des différentes cités, et c’est leur affaiblissement, puis leur disparition, qui marquera de la façon la plus tangible le déclin de la démocratie.

Cette vision originaire du peuple surveillant permet également de comprendre pourquoi le mode de sélection des magistrats par tirage au sort avait pu aussi facilement s’imposer. Si les gouvernants ne sont que de simples exécutants, soumis à des contrôles aussi stricts que réguliers, leurs qualités personnelles peuvent en effet être considérées comme des variables relativement secondaires.

L’existence d’un bon gouvernement ne dépend pas seulement de leur vertu ou de leur talent : c’est l’efficacité des procédure de surveillance qui doit jouer le rôle moteur.

Il y a ainsi un système qui allie une légitimation faible par le tirage au sort et un pouvoir fort de surveillance.

Légitimation faible par le tirage au sort et pouvoir fort de surveillance ont composé à Athènes un dispositif institutionnel cohérent, de la même façon que dans d’autres cités.

On pourrait paraphraser sur ce point Adam Smith en disant que ce n’est pas de la bienveillance et de la vertu du gouvernement que les grecs attendaient la réalisation du bien commun, mais plutôt de l’intérêt des gouvernants à ne pas être redressés, les sanctions pouvant être très lourdes, parfois même la mort.

On ne dispose pas d’éléments pour apprécier comment s’est précisément forgée cette vision liant légitimation faible par le tirage au sort et pouvoir fort de surveillance, mais il n’est pas déraisonnable d’estimer que c’est l’expérience historique de l’exposition des régimes politiques aux phénomènes de corruption qui a progressivement conduit à faire de la mise à l’épreuve de la responsabilité des gouvernants l’instrument d’intervention le plus efficace.

Il semble d’ailleurs bien que ce soit l’opinion d’Aristote : lorsqu’il critique la corruptibilité des gérontes de Sparte, il impute ainsi essentiellement le phénomène à l’absence de contrôle de ses magistrats. « il est notoire, écrit-il ainsi, que ceux qui détiennent collectivement cette charge se laissent corrompre pas des cadeaux et sacrifient au favoritisme dans bien des affaires communes. C’est pourquoi, conclut-il, il aurait mieux valu qu’ils ne soient pas irresponsables, or ils le sont actuellement. »

Dans cette perspective, c’est donc le contrôle citoyen, bien plus que la simple désignation populaire des dirigeants qui définit la démocratie. Mais cette dualité est progressivement devenue illisible à nos yeux modernes tant l’élection a fini par s’imposer comme une sorte d’institution démocratique totale, censée superposer une technique de sélection des gouvernants, un mode d’organisation de la confiance entre les citoyens et le pouvoir, en même temps qu’un système de régulation de l’action publique.

Il est décisif, à mes yeux, de bien prendre la mesure de ce fait pour réinterpréter l’histoire de la démocratie et comprendre aussi de cette façon les racines les plus profondes du malaise contemporain.

Le regard du XVIIIè sur Athènes n’était pas le nôtre. La centralité de la question des pouvoirs de surveillance à Athènes restait alors fortement perçue. L’époque, on le sait, est nourrie par la lecture de Plutarque et les institution de l’antiquité sont familières pour tous ceux qui fréquentent alors un collège.

La référence aux censeurs romains et aux éphores de Sparte se trouve ainsi sous toutes les plumes : Montesquieu fait grand cas de ces "éphoroi" [prononcer éphoroye, ÉC], c’est-à-dire étymologiquement de ceux qui regardent, ceux qui observent, ceux qui surveillent, les pouvoirs en place. Rousseau apprécie aussi leur rôle et consacre un chapitre entier du "Contrat social" aux censeurs romains qui étaient chargés de contrôler les comptes publics et qui jouissaient d’une certaine juridiction propre dans les affaires judiciaires.

Des auteurs très importants de l’époque, comme Delolme, le grand historien de la Constitution britannique, ou Filangieri, le grand juriste italien, soulignent aussi l’importance d’un pouvoir censorial.

L’encyclopédie, de Diderot et d’Alembert, consacre de son côté des articles informés à ces institutions chargées, selon son expression, de "contrebalancer les autorités gouvernantes".

Tous ces auteurs appellent à la fois de leurs vœux le développement d’institutions représentatives et l’instauration de pouvoirs de surveillance inspirés de ces modèles anciens.

La perspective de la mise en œuvre de contrepouvoirs de cette nature est alors, il est vrai, libérale autant que démocratique.

Elle est d’essence libérale car elle conduit à encadrer l’action des gouvernements suspectés de tendre naturellement au despotisme. C’est ce qui a fait dire à Montesquieu, je l’ai déjà cité en exprimant l’esprit de l’époque, que : "tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser, et qu’il va jusqu’à ce qu’il trouve des limites. Et donc, pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, écrit-il, le pouvoir arrête le pouvoir."

Si le pouvoir du Monarque est visé, l’auteur de "L’esprit des lois" se préoccupe aussi de canaliser les débordements d’un éventuel pouvoir populaire : il se félicite ainsi que les éphores aient été capables à Sparte de "mortifier, je le cite, les faiblesses des rois mais aussi celles des grands et celles du peuple."

Cette approche libérale de la surveillance se retrouve aussi bien en Angleterre, on la retrouve formulée tout au long du XVIIIè siècle, et un des grands esprits de l’époque, une des grandes voix républicaines de l’époque, je veux parler de Tranchard et de Thomas Gordon qui écrivent dans l’Independant Wigg (?), font de l’exercice de surveillance et d’une censure protectrice la raison d’être essentielle de la liberté.

Mais cette surveillance est parallèlement bien appréhendée par d’autres comme étant d’essence franchement démocratique, conduisant à étendre les modalités de l’intervention populaire. C’est la conception d’un Rousseau. Mais c’est aussi celle d’un Richard Price qui en parle avec des accents empruntés au genevois autant qu’à Montesquieu : voir ses observations sur la nature de la liberté civile de 1776.

"Le sommeil dans un État, dit-il, est toujours suivi par l’esclavage."

La liberté implique donc que les citoyens restent éveillés en permanence.

Mais avec ces auteurs, nous en sommes resté à des considérations générales sur l’utilité ou l’importance de pouvoirs de surveillance.

Cela va être surtout l’adoption d’une Constitution, celle de Pennsylvanie, en 1776, qui va donner un corps sensible, qui va donner un visage organisé, à ce pouvoir de surveillance.

Cette Constitution de Pennsylvanie, elle a joué un rôle intellectuel extrêmement important dans toute l’Europe. Ce texte avait alors été reconnu, en effet, comme établissant le régime le plus démocratique de toutes les provinces américaines. Un certain nombre de ses modalités méritent, à cet égard d’être rappelées : il y a une assemblée unique, il y a un droit de suffrage qui est accordé à tous ceux qui payaient un impôt, quel qu’en soit le montant, il y même un système de rotation qui est organisé pour les membres de la Chambre des Représentants.

On a donc, avec toutes ces mesures, tout un ensemble de textes qui vont même beaucoup plus loin que ce que définira la Constitution de Philadelphie, et qui va beaucoup plus loin que ce que prévoira, en France, la Constitution de 1791.

Mais la disposition la plus singulière, et la plus remarquée à l’époque, de cette Constitution résidait dans son article 47 : cet article 47 mettait en place un Conseil des Censeurs. Ce Conseil était composé d’élus populaires, choisis dans les différentes villes et comtés, et il était chargé de vérifier que les pouvoirs exécutifs et législatifs remplissaient correctement ou non leurs fonction de gardiens du peuple.

L’article 47 note : "le Conseil des censeurs doit être le gardien des intérêts du peuple."

Ce Conseil des Censeurs avait pour caractéristique de délibérer en public, et il avait autorité pour faire des remontrances au Gouvernement. Il pouvait engager des poursuites judiciaires, renvoyer les agents jugés fautifs, recommander l’abrogation de lois qui étaient jugées contraires à la Constitution.

Il pouvait même décider de convoquer une Convention pour modifier, voire pour établir une nouvelle Constitution.

Les Américains de l’époque avaient été abreuvés, comme les Européens, de références à Rome, à Sparte et à Athènes. Les "Roman antiquities" de Kenneth étaient alors lues dans l’Amérique du nord-est dans tous les collèges. Éditorialiste et pamphlétaires, peut-être encore plus volontiers en Amérique qu’en Europe, étaient alors fiers de signer Cato, Cassandra ou Spartacus.

Mais ces américains, férus d’antiquité, et peut-être encore plus que les Européens, étaient, eux, passés à l’acte, avec la Constitution de Pennsylvanie.

Il faut signaler, en outre, que l’État du Vermont adoptera peu après un Conseil des Censeurs de même nature.

Avec l’aide de Benjamin Franklin, le duc de La Rochefoucauld traduira en français le texte de la Constitution dès le début de 1777.

L’encyclopédie méthodique lui consacrera immédiatement un très long article.

Brissot rédigera de son côté un ouvrage quasi militant sur le code pennsylvanien. Ses réflexions sur le code de Pennsylvanie se trouvent dans "la bibliothèque philosophique du législateur, du politique et du jurisconsulte" qu’il fait publier à Berlin en 1783. Dans ce texte, qui a joué un rôle très important dans la prérévolution française, il approuve chaleureusement la constitution du Conseil des Censeurs.

Condorcet, Mably (qui consacrera un ouvrage consacré à l’Amérique), Mirabeau et Turgot prendront de leur côté également la plume pour en commenter et en discuter longuement la fonction.

La mise en œuvre du principe représentatif et la perspective d’une institutionnalisation de la surveillance sont alors bien également célébrés.

Moins de vingt ans plus tard, des projets d’institutionnalisation d’une telle fonction de surveillance des gouvernants seront formulés dans les débats constitutionnels français. On trouve ainsi dès 1791 plusieurs propositions de cette nature élaborées dans les milieux du Cercle social ou du Club des Cordeliers. Lavicomterie va ainsi consacrer un long chapitre de son ouvrage programmatique, "Du peuple et des rois", à exposer l’utilité de la création d’un groupe de Censeurs.

Dans "La Bouche de fer", Bonneville suggère de son côté de faire élire dans les départements 12 tribuns du peuple chargés de surveiller les pouvoirs publics. Il est également question, dans la même publication, d’un projet d’établissement d’un projet d’une "Censure nationale".

Rappelons d’ailleurs que le nom de cette publication influente, "La Bouche de fer", est directement emprunté à l’ancien exemple vénitien d’une bouche de pierre dans laquelle les citoyens pouvaient glisser un billet indiquant leurs dénonciations ou leurs récriminations à l’égard des pouvoirs.

Au printemps 1793, les idées de censorat, ou d’éphorat, reviennent en force dans la masse des projets constitutionnels qui sont discutés à la Convention. On y parle d’instaurer une surveillance du souverain harmoniquement organisée, c’est une proposition de Daunou ; une adresse des citoyens de la Section de L’Unité à Paris invite à créer un Tribunal d’Éphores ; on voit de son côté la demande faite par Poultier de mise en place d’un "Orateur du Peuple", qui serait chargé de "dénoncer les négligences, écrit-il, les omissions, les infidélités, les intrigues des gouvernants" ; Prunelle de Lierre appelle à ériger un Tribunal de cette conscience du peuple ; d’autres appellent de leurs vœux un Jury national qui ferait face à la représentation et qui aurait pour objet, c’est une formule de Hérault de Séchelle, de "venger le citoyen opprimé dans sa personne des vexations du Corps Législatif et du Conseil Exécutif."

En même temps, pour Hérault de Séchelle, que serait ainsi mis en place un pouvoir élu et représentatif, serait parallèlement mise en place une instance chargée de venger le citoyen du mal que pourrait commettre ce même pouvoir élu.

On parle encore de "troisième pouvoir régulateur", de Collège d’Éphores, de Tribunal des Censeurs.

Les volumes 63 à 67 des archives parlementaires, les cinq volumes des archives parlementaires qui sont consacrés à cette période du début de 1793 et des débats constitutionnels de cette période, sont remplis de brochures reproduisant des propositions de cette nature.

L’imagination de conventionnels, on le voit, est particulièrement fertile en la matière : sous des appellations aussi diverses, et selon des modalités fort variables, il y a une même préoccupation d’institutionnaliser une fonction de vigilance sociale et comprendre la souveraineté comme l’articulation dynamique et éventuellement conflictuelle d’un pouvoir représentatif et d’un pouvoir de surveillance, tous deux ayant une même origine populaire.

Fait significatif, des projets similaires seront à nouveau formulés en France, sous la plume de Daunou ou de Cabanis, je vais y revenir. Et à la même époque, au moment de la formation des fameuses "Républiques sœurs", on en trouvera encore nettement la place.

Dans la République parthénopéenne qui est, vous le savez, le nom que la République que les Français avaient mise en place à Naples et qui aura six mois d’existence, de janvier à juin 1799, cette question sera au centre du débat constitutionnel interrompu par les combats militaires. Et le grand juriste napolitain de l’époque, Mario Pagano, qui est un disciple de Filangieri, proposera lui aussi l’institution de cette surveillance dans la Constitution.

La France de l’an VIII, on le sait, en portera la marque, je vais y revenir tout de suite, avec l’institution du Tribunat. Mais cette institution du Tribunat fera long feu.

Quant aux Constitutions de Pennsylvanie et du Vermont, elles seront révisées et leur Conseil de Censeurs sera ultérieurement supprimé.

Si l’on se tourne du côté de la Grande Bretagne, le débat n’y a même pas été engagé dans ces termes.

Il faut donc à la fois comprendre ces échecs, en France, aux États-Unis, et cette absence en Grande Bretagne. Comprendre donc pourquoi l’institutionnalisation des pouvoirs de surveillance s’est révélée impossible après avoir été si ardemment désirée et même si précisément préparée.

Commençons par l’expérience Pennsylvanienne : mis en place en 1776, le Conseil des Censeurs de Pennsylvanie se réunit pour la première fois en 1783. Il était en effet prévu qu’il tienne tous les sept ans une très longue session. Mais il n’y aura pas ensuite d’autres réunions. Une nouvelle Constitution, adoptée peu de temps après, en 1790, le supprimant.

Comment comprendre cette suppression du Conseil des Censeurs en Pennsylvanie ?

Il y a certes des motifs que l’on pourrait qualifier de directement politiques à cet effacement : les sentiments révolutionnaires de la période de l’indépendance étaient en effet largement émoussés. Lors du processus de ratification de la Convention fédérale, à l’hiver 1787-1788, la Convention rassemblée dans l’État de Pennsylvanie avait d’ailleurs rallié le point de vue des fédéralistes modérés. Poursuivant ce mouvement, le monocamérisme avait, lui aussi, été supprimé en Pennsylvanie, suspecté, ce monocamérisme de n’opposer aucune digue à l’irruption d’éventuelles passions populaires.

L’abolition du Conseil des Censeurs va donc s’inscrire dans un contexte politique de réaction, qui va être dominé par l’expression d’un libéralisme prudentiel.

Mais on ne peut pas, me semble-t-il, en rester à ce constat : il y a également une raison d’ordre proprement institutionnel à ce retrait du projet du Conseil des Censeurs en Pennsylvanie. Le rôle imparti au Conseil, faire exister un contrepouvoir de type fonctionnel, avait en effet été paralysé par de nombreux conflits internes entre radicaux et modérés.

Or, le propre d’une instance de surveillance, telle qu’elle était prévue par la Constitution de Pennsylvanie, le propre de cette instance et son efficacité, présuppose une certaine unité de l’institution, présuppose que l’institution puisse justement exister comme pleine institution.

Mais dès lors que le Conseil des Censeurs s’était lui-même transformé en une arène politique, traversée par les mêmes conflits que ceux qui existaient dans la Chambre des Représentants, dès lors qu’il était traversé par les mêmes conflits, sa mission devenait illisible et, effectivement, impossible.

D’où le sentiment majoritaire en Pennsylvanie, au-delà même du contexte politique immédiat, qu’il était finalement plus simple, pour surveiller le pouvoir, de faire confiance au jeu direct des rapports opposition majorité, plutôt que d’assurer cette tâche de surveillance par des institutions spécialisées… Que c’est donc à l’intérieur même du jeu politique que se trouveraient les ressources, d’une part. Et d’autre part, que les ressources de surveillance pouvaient se trouver avec le fonctionnement d’une balance interne des pouvoirs, et pour cela, on va mettre en place dans la Pennsylvanie de cette période, un bicamérisme. C’est la raison pour laquelle aussi on va faire confiance davantage au rôle d’une Cour Constitutionnelle.

Mais, du même coup, une certaine dimension démocratique était évacuée et l’histoire de cet échec est pour cela exemplaire, me semble-t-il. Il montre, en effet, de façon extrêmement précise que l’idée de la surveillance ne peut pas se confondre avec l’idée d’opposition, que la surveillance est un mécanisme civique et civil, pourrait-on dire, mais qu’elle n’a pas simplement son moteur dans la division politique. Elle doit avoir un fondement directement fonctionnel.

                                                                                                        

L’examen d’un autre cas, celui du Tribunat français de 1800, permet de prolonger et de confirmer l’analyse. La Constitution de l’an VIII, on le sait, reposait sur une architecture extrêmement complexe, architecture qui tenait à la fois, pourrait-on dire, à l’imagination de Sieyès et aux impatiences de Bonaparte.

Pour Sieyès, elle était la façon de mettre enfin en ordre l’ensemble des réflexions qui avaient été les siennes depuis l’an II. Cette Constitution prévoyait trois assemblées : un Sénat, un Corps Législatif et un Tribunat.

Le Sénat avait pour fonction principale d’assurer le contrôle de la constitutionnalité de lois.

Le Corps Législatif, quant à lui, votait et les lois et le budget. Mais il ne délibérait pas et il n’avait pas le droit d’amendement. C’était, selon une formule célèbre de l’époque, "un simple corps de muets qui exerçait en fait un simple pouvoir de jugement".

Bonaparte avait, en effet, marqué sur ce point le texte de son empreinte en donnant au Gouvernement un pouvoir très large. L’initiative des projets de lois revenant, par exemple, entièrement au Gouvernement.

Le Tribunat, quant à lui, remplissait une fonction très particulière : il était d’abord chargé de discuter les projets de lois. Il y avait là la trace, pourrait-on dire, de la vieille idée de Condorcet qui avait aussi séduit Sieyès, de distinguer assemblée d’élection et assemblée de délibération ; que les deux fonctions, décision et délibération, ne soient pas simplement séparées dans le temps, mais soient fonctionnellement et institutionnellement distinguées.

Mais le Tribunat avait une autre fonction que de discuter les projets de loi : il avait le droit d’émettre des vœux sur les initiatives à prendre.

Il pouvait en outre se prononcer sur les abus à corriger et les améliorations à entreprendre dans toutes les parties de l’administration publique.

Il avait également à traiter des pétitions et il pouvait encore dénoncer les Ministres auprès du Corps Législatif, le Corps Législatif étant, dans ce cas, chargé de voter leur mise en accusation devant une Haute Cour.

Il avait enfin pour fonction, ce Tribunat, de discuter les cas où la Constitution pouvait être suspendue.

L’institution, on le voit, reprenait ainsi, même si c’est en les édulcorant et en s’en démarquant, un certain nombre d’idées émises en 1791 et 1793 sur l’organisation d’un pouvoir de surveillance.

On a d’ailleurs, dans les archives, dans les manuscrits de Sieyès, la trace très nette et très ferme de cette intention. Mais on a aussi, puisque j’ai fait référence à la seconde influence à la base de la rédaction de cette Constitution, celle de Bonaparte, tout un ensemble de lettres extrêmement intéressantes de cette période de préparation constitutionnelle, envoyées par Bonaparte ; notamment une lettre fondamentale que Bonaparte envoie à Talleyrand le 21 septembre 1797 et dans laquelle il parle de l’utilité d’une "magistrature de surveillance". On notera, dans cette lettre fondamentale, que Bonaparte notait juste avant de signer que Talleyrand devrait montrer cette lettre à Sieyès pour que Sieyès réfléchisse aux propositions qui y étaient faites.

Donc, même l’histoire méticuleuse et technique de la préparation de cette mise en place du Tribunat montre bien que l’esprit dans lequel il a été constitué était un esprit très largement hérité des dispositifs qui avaient été imaginés dans la période précédente.

La dénomination de "Tribunat" faisait d’ailleurs elle-même directement écho à ces projets antérieurs inspirés par le monde antique, et notamment à l’institution particulièrement distinguée par Rousseau dans "Le contrat social".

Elle avcait aussi, pour l’époque, une connotation démocratique en renvoyant à l’image de ces Tribuns du Peuple dont le rôle avait été si souvent exalté depuis 1789. "Le Tribun du Peuple", c’est d’ailleurs le titre qu’avaient pris successivement les journaux prestigieux et novateurs de Bonneville et de Babeuf.

Mais, là encore, l’expérience avorte. Pourquoi l’expérience du Tribunat français a-t-elle avorté ?

Il y a, là encore, des motifs politiques et historiques évidents. L’avènement du premier Empire et, dès l’an X, l’instauration du Consulat à vie, qui modifiait donc complètement la notion même de Constitution telle qu’elle avait été prévue.

Mais l’échec du Tribunat est déjà lisible bien avant l’an X : il est déjà, pourrait-on dire, consacré avant même de succomber aux appétits du Premier Consul. L’échec du tribunat s’explique en effet, d’abord, par la difficulté de l’institution à trouver son assise et son bon registre de fonctionnement. Les interrogations et les débats qui ont été suscités dès la tenue de la première session du Tribunat permettent de prendre la mesure de la question :

La Constitution était à peine votée, et on sait que Bonaparte avait tenu à ce qu’un plébiscite soit organisé, que le Général Consul avait résolu de museler l’assemblée : il avait tout de suite redouté qu’elle ne se transforme mécaniquement en une sorte de foyer d’opposition organisée.

Et le premier projet de loi qu’il fera porter devant le Tribunat propose ainsi, immédiatement après son installation, pourrait-on dire, une réforme de la formation de la loi qui revenait à encadrer de façon si contraignante les termes et les délais de la délibération qu’il mentionnait expressément que l’assemblée était censée avoir donné son consentement même si elle ne s’était pas exprimée car elle était censée le faire au jour indiqué par le Gouvernement. C’était la proposition de loi de Bonaparte : l’assemblée doit se prononcer au jour indiqué par le Gouvernement, c’est-à-dire généralement l’après-midi pour le lendemain matin.

C’était rendre, de fait, le Gouvernement maître de réduire le débat à une simple lecture, annulant matériellement tout véritable examen.

Mais ce coup de force initial, pourrait-on dire, de Bonaparte a été l’occasion d’une réflexion extrêmement intéressante sur la nature de l’institution : articles et discours se sont multipliés alors pour en discuter l’esprit et le fonctionnement.

La question décisive soulevée par Bonaparte était celle du rapport entre sa fonction de surveillance et l’idée d’opposition. Nous voyons que nous retrouvons la question qui était déjà celle du Conseil des Censeurs en Pennsylvanie. Bonaparte accusait l’institution, en effet, de tendre à être un foyer d’opposition beaucoup plus qu’une institution autonome de surveillance.

Roederer, l’ancien constituant, un de ceux qui avaient vivement approuvé le coup d’État du 18 brumaire, défendra l’assemblée dans un vigoureux article qu’il publie dans son "Journal de Paris" : "sait-on bien, écrit Roederer, ce qu’est le Tribunat ? Est-il vrai que c’est l’opposition organisée ? Est-il vrai qu’un tribun soit condamné toujours à s’opposer sans raison et sans mesure au Gouvernement ? Est-il vrai qu’un tribun soit condamné à s’attaquer à tout ce que fait et à tout ce que propose ce Gouvernement ? À déclamer contre lui quand il approuve le plus sa conduite et à le calomnier quand il n’a que du bien à en dire ?" Et Roederer poursuit : "Si c’était là ce qu’est le tribun, ce serait le plus vil et le plus odieux des métiers. Pour moi, j’en ai une plus noble et une plus haute idée : je regarde, dit-il, le Tribunat comme une assemblée d’hommes d’État chargés de contrôler, de réviser, d’épurer, de perfectionner l’ouvrage du Conseil d’État et de concourir avec lui au bonheur public. Un vrai Conseiller d’État, écrit Roederer, est un tribun placé près de l’autorité suprême. Le vrai tribun est un Conseiller d’État placé au milieu du peuple."

Pour Roederer, les choses étaient donc claires : l’exercice fonctionnel d’une activité de surveillance ne pouvait pas être assimilé à la manifestation de nature plus politique d’une opposition organisée au pouvoir. Les deux étaient franchement dissociés.

Et si Roederer pose la distinction, il ne la construit pas.

Benjamin Constant, qui est membre de cette première assemblée, de ce Tribunat, va aussi intervenir dans le débat : il va prononcer devant le Tribunat un important discours sur ce thème. Ces discours au Tribunat de Benjamin Constant viennent d’être édités dans "les œuvres complètes" qui sont publiées par Max Nimeyeur Werlag (?) en Allemagne. L’ensemble de ce recueil constitue un ensemble de textes qui étaient jusqu’à maintenant là peu connus, disponibles simplement par la lecture dans Le Moniteur Universel, et qui enrichissent considérablement la compréhension de l’œuvre de Benjamin Constant, que ce soit en termes constitutionnels ou même en termes économiques.

Il participe à de très nombreuses discussions d’économie politique au Tribunat et qu’il y a là une contribution de premier plan à la compréhension d’un Benjamin Constant, pourrait-on dire, doublement libéral : politiquement et économiquement.

Benjamin Constant, sans ce premier grand discours au Tribunat, se défend, lui aussi, de considérer le Tribunat comme un corps d’opposition permanente. Il reconnaît que si le Tribunat était un corps d’opposition, cela reviendrait à le priver de son crédit et de son influence.

Mais il est frappant de constater que le jeune publiciste, qui commence alors à se faire un nom à la mesure de l’hostilité que lui voue rapidement le Premier Consul, échoue, comme Roederer, à élaborer intellectuellement la différence entre opposition politique et contrôle constitutionnel qui est sous-jacente à la fonction même du Tribunat.

Benjamin Constant multiplie ainsi dans son intervention les dénégations, il multiplie les précautions : "l’opposition est sans force alors qu’elle est sans discernement" dit-il. "Le Tribunat, insiste-t-il par ailleurs, n’est point une assemblée de rhéteurs, il n’a pas pour occupation une occupation de tribune." Et Benjamin Constant repousse vivement l’idée d’une opposition perpétuelle et sans distinction d’objet.

Mais lui aussi peine à définir positivement les ressorts de cette fonction : il se contente d’en appeler, en des termes platement moraux, à la ténacité courageuse ou à sa nécessaire indépendance.

Le problème vient du fait que Constant est incapable d’inscrire la notion de pouvoir de contrôle dans une architecture démocratique.

Or, me semble-t-il, ce n’est que dans une perspective de cette nature qu’un tel pouvoir peut être pensé : en étant inscrit dans la visée d’une double souveraineté du peuple.

Il y donc là, chez Constant, un point aveugle : il ne distingue pas entre les potentialités démocratiques du Tribunat : accroître le pouvoir social en réduisant l’entropie représentative, et son usage libéral : préserver des errements du Gouvernement. Il n’est donc pas surprenant que le complice de madame de Staël ait ultérieurement abandonné la référence à cette institution qui était marquée par une indétermination de cette nature.

Benjamin Constant se fera ensuite, beaucoup plus restrictivement, le théoricien d’un pouvoir neutre à la fonction clairement et exclusivement libérale. Ce pouvoir neutre, encore qualifié par lui de troisième pouvoir entre le législatif et l’exécutif, ou qualifié de pouvoir préservateur, présentera, de fait, pour l’essentiel, les seuls attributs d’une Cour Constitutionnelle.

Cette incapacité de Constant à théoriser démocratiquement ce pouvoir aura pour pendant les attaques, elles théoriques, de Bonaparte. Bonaparte dira rapidement : "à quoi sert un corps de cent membres pour sonner le tocsin quand le Gouvernement a été élu ?" Il ira jusqu’à dire : "conçoit-on une opposition du Peuple souverain contre lui-même ? Conçoit-on des tribuns là où il n’y a pas de patriciens ? Donc, la fonction de surveillance, dit Bonaparte, n’est pas utile, dès lors que le régime est véritablement démocratique. La fonction de surveillance n’est pas utile dès lors qu’il y a une unité du Gouvernement fondé sur l’élection."

 

Si une page décisive est tournée en France avec l’échec du Tribunat à faire vivre un pouvoir de surveillance, l’idée est cependant loin d’être abandonnée : elle va être reprise avec insistance dans les milieux républicains radicaux des années 1830.

La Société des Droits de l’Homme et du Citoyen souligne ainsi, dans l’exposé de ses principes, que le plein exercice de la souveraineté du peuple requiert la mise en place d’un Conseil permanent d’enquête et d’amélioration qui aurait notamment pour fonction la révision des institutions publiques.

La Tribune des Départements, le journal montagnard de l’époque qui se réclame de l’héritage de Robespierre, fait une suggestion analogue.

Des figures importantes du socialisme naissant, comme Buchez ou comme Charles Teste, conçoivent aussi un organe de contrôle et de proposition distinct des assemblées représentatives.

Dans son programme démocratique de 1840, Charles François Chevais (?), un socialiste chrétien, disons, pour faire vite, va détailler longuement les tâches qui pourraient être dévolues sur cette base à un Comité de perfectionnement et d’enquête qui, lui aussi, aurait une fonction de surveillance permanente.

On trouvera encore, en 1848, la trace de projets d’une inspiration voisine. Le socialiste Pierre Leroux suggère par exemple, d’institutionnaliser un Jury National de 300 citoyens, tirés au sort dans les départements, qui auraient pour rôle de surveiller en permanence et de juger la représentation nationale, complétant sur un mode spécifique les fonctions dévolues à la presse pour la surveillance, et aux élections pour le jugement de l’action du pouvoir.

Un important publiciste républicain de l’époque, Billiard (?), propose de son côté l’organisation de ce qu’il appelle une Inspection, élue au suffrage universel, inspection qui aurait pour fonction d’avoir "les yeux ouverts sur tout ce qui se fait et de veiller à ce que tout se fasse".

Le but est, là encore, chez Billiard, de permettre l’exercice d’une surveillance continuelle, surveillance jugée indispensable au régime républicain.

Dans son ouvrage très important, "De l’organisation de la République", qui est publié en 1848, il va ainsi rapprocher cette idée d’inspection de celle de Ministère Public. Le Ministère Public, on le sait, c’est le corps des magistrats qui est chargé de représenter l’État et les intérêts généraux de la société. Et bien l’Inspection, cette Inspection générale, tirée au sort, serait, de la même façon, chargée de représenter les intérêts généraux de la société, face à la représentation élue.

Ces divers projets montrent que la réflexion sur l’institutionnalisation d’une forme de pouvoir de surveillance est toujours présente en France dans la première moitié du XIXème siècle, mais aucune ne sera vraiment sérieusement prise en compte au moment décisif de la rédaction et du vote de la Constitution de 1848.

Monisme jacobin et prudence libérale ou conservatrice se sont ainsi, de fait, alliés à partir de 1848 pour repousser les perspectives d’une surveillance activement démocratique. »

Vous pouvez réagir à ce texte ici : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/04/26/34-evolution-necessaire-de-notre-democratie-importance-cardinale-des-pouvoirs-de-surveillance

Je trouve cet historien passionnant. Je suis en train de lire « le sacre du citoyen » (Folio Histoire), mais il a aussi écrit un autre livre au titre alléchant, « la démocratie inachevée » (NRF, Gallimard), que je vais commander et dont je vous parlerai bientôt (voir ici un résumé).

Nota : j’ai retranscrit une partie d’un autre cours, "Les mises à l’épreuve d’un jugement", sur ma page ‘Liens et docs’ : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/05/08/39-mises-a-lepreuve-dun-jugement

 

Prisonniers du gouvernement (5 avril 2006) (Lien)

Le 29 mai 2005, nous avons pu dire non au TCE parce que notre "roi républicain" a bien voulu nous demander notre accord.

Or c’est très exceptionnel et non reproductible et, à mon avis, on ne reprendra pas de sitôt nos "représentants" à nous demander notre avis sur quoi que ce soit : le droit d’expression d’accord, les élections sans doute, mais seulement si nous consentons à suivre nos maîtres…

 Le CNE et le CPE sont, pour la France, à leur tour, des révélateurs d’une dérive tyrannique : nous sommes à l’évidence prisonniers de notre gouvernement qui, grâce à une scandaleuse Constitution et à une propagande bien rôdée, peut fort bien marcher sur la tête des parlementaires et de son propre peuple sans encourir la moindre sanction.

Si vous regrettez votre impuissance chronique, haïssez cette Constitution de 1958 qui nous prive du référendum d’initiative populaire (RIP), protection décisive contre les abus de pouvoir et déduction honnête du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Il ne tient qu’à nous de changer de régime et de bâtir nous-mêmes notre Constitution capable de protéger tous les citoyens, qu’ils soient de gauche comme de droite ou du centre, riches ou pauvres, propriétaires ou pas.

Mettons fin à notre servitude volontaire et passons enfin, ensemble, de la 5ème République à la 1ère Démocratie.

Commentaires là : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/04/05/33-prisonniers-du-gouvernement.

 

 

Bonnes nouvelles (1er avril 2006)

Bonjour. Bonnes nouvelles !

Un lien étonnant : www.european.research.utopia.dream.center.org.  En substance :

La Commission Européenne vient de publier une intéressante proposition de directive adoptant quelques correctifs de détail au TCE pour faire droit aux revendications émergentes des peuples européens, avant une nouvelle consultation populaire, directe cette fois, dans tous les pays concernés :

Parmi les nouveautés inscrites dans l'addendum au "traité constitutionnel", l'annexe 311 du protocole 57-D, page 2133, on note que c'est désormais très classiquement le Parlement qui a l'exclusivité à la fois de l'initiative, de la discussion et du vote des lois, que le Conseil et la commission redeviennent un exécutif qui se borne à exécuter et n'ont plus aucun pouvoir de création de normes autres que rigoureusement subordonnées aux lois véritables (issues, elles, du seul Parlement), que le Parlement européen est élu avec un scrutin majoritaire pour l'essentiel et à la proportionnelle pour le reste (pour que tous les partis soient représentés au PE), que le vote blanc est constitutionnellement reconnu en tant que vote protestataire capable de récuser d’un coup tous les candidats à un scrutin s’il est majoritaire, que le Président de l'Europe, élu lui aussi au suffrage universel direct, est obligatoirement tantôt un homme tantôt une femme, que l'on commencera par une femme, que le Président de l'Europe nomme un Premier ministre en fonction de la couleur politique du Parlement, que ce Premier ministre nomme les membres d'un Conseil des ministres, appelés ministres européens, et qu'il présente son programme au Parlement qui peut le désavouer, de la même manière qu'il peut censurer un Conseil des Ministres (gouvernement) à la majorité simple, que le Conseil Européen (le club des chefs d'État nationaux) est supprimé, que les ministres des États nationaux restent chez eux, les chefs d'État aussi, que le Parlement européen peut exiger à tout moment que les ministres européens lui rendent des comptes publiquement, qu'un ministre européen qui refuserait de rendre des comptes peut être révoqué par le Parlement, que toutes les délibérations des Conseils sont publiques, filmées et publiées en continu sur les sous-canaux de la chaîne TV gratuite de l'Europe, que les "ONG, acteurs de la société civile" (les lobbies) peuvent parfaitement formuler des "recommandations" aux parlementaires et aux commissaires à la stricte condition de publier tous ces "conseils" sur le net sous peine de dissolution des personnes morales contrevenantes, confiscation de leurs biens et de prison+amende pour leurs dirigeants, que le huis clos en matière de création de normes contraignantes est déclaré anticonstitutionnel, que les missions de la banque centrale sont fixées tous les ans par le Parlement, en accord avec le gouvernement, qu'un Conseil constitutionnel est mis en place, arbitre suprême mais lui-même révocable car aucun pouvoir n'est absolument protégé des contrôles, que le parapente devient enfin une discipline olympique, et les reportages sur les compétitions et sur les histoires d'aventures de vol libre doivent impérativement passer à la télé aux heures de grande écoute, à la place de "radio-fais-moi-peur" ou "fais-donc-pas-de-politique-regarde-plutôt-le-beau-ballon", qu’une tranche horaire nommée « politique citoyenne » est banalisée constitutionnellement entre 19 h 30 et 20 h sur toutes les chaînes radio et télé européennes sans exception pour permettre une authentique et libre expression citoyenne (droit de parole de 15 minutes par personne physique, 30 min. pour les débats, attribué par tirage au sort public sur des listes de volontaires), que les 830 dernières pages des traités sur l'UE (Nice, Amsterdam, etc.) sont abrogées au profit d'un feuillet de 5 pages, écrit gros pour respecter l'arrivée du papy boom, et  dont tous les mots savants ont été retirés pour que tous puissent le comprendre, qu'un référendum d'initiative populaire véritable est mis en place très simplement : 500 000 citoyens peuvent exiger (en passant par un site Internet sécurisé) qu'un référendum soit organisé par tous les États (qui ne peuvent s'y soustraire sous aucun prétexte : tous les référendums d’origine citoyenne sont regroupés sur un seul et même jour de l’année, déclaré "jour de fête des citoyens européens", férié et chômé), sans aucune limitation de thème ou de sujet, et si le référendum est accepté à la majorité des suffrages européens exprimés, le texte du référendum, issu directement de la volonté du peuple, s'impose à toute autre norme, nationale ou internationale, qu'un tel référendum peut destituer n'importe quelle instance du pouvoir, qu'aucune n'est à l'abri du contrôle des peuples, que la Constitution impose que les organes de calculs statistiques (INSEE et équivalents) et de sondages sont obligatoirement indépendants des pouvoirs politiques et économiques, comme tous les médias d’information, et que cette indépendance est contrôlée publiquement et collégialement, que le Président de l'Europe peut dissoudre le Parlement et que des élections ont lieu aussitôt pour que le peuple joue son rôle d'arbitre entre les pouvoirs, que finalement c’est la partie I qui était, de loin, la plus dangereuse en instituant une extravagante irresponsabilité de tous les acteurs politiques, que les grands principes rappelés dans la partie II, au lieu d'être conditionnés et subordonnés à tous les autres, sont déclarés supérieurs et impératifs, d'application immédiate dans tous les pays qui s'engagent donc à faire progresser leur droit systématiquement vers le haut c'est-à-dire vers plus de protection et de respect des individus, au détriment des personnes morales (dont la taille est rigoureusement limitée), que l'OMC, dont il est avéré qu'elle ne contraint que les États et jamais les entreprises, devra se passer de l'Europe pour déréguler la planète : toutes les négociations sur l'AGCS et l'ADPIC, ainsi que les suivantes, sont obligatoirement publiées au fur et à mesure dans toutes les langues de l'Union, ce qui les tue aussitôt puisqu'elles ne vivent que dans l'ombre, et enfin qu'un échelon de démocratie locale est préservé de façon constitutionnelle : ainsi, si une simple commune estime que les intérêts supérieurs de sa population sont en danger, et si elle le décide à la majorité des huit dixièmes, elle peut sortir de l'Union et protéger les humains qui la composent de la course folle à la "compétitivité-productivité-hamster-pour-quoi-faire", et que le droit de déserter la guerre économique est ainsi constitutionnellement reconnu au lieu d'être interdit…

Ainsi rassuré, le peuple redevient serein et peut enfin apprendre vraiment la pétanque.

Rasséréné, je peux aller voler dans les thermiques parfumés du gai printemps   :o)

Vos commentaires et infos complémentaires : cliquez ici.

 

 

Reformulation de l’essentiel : la prochaine évolution de notre démocratie (encore préhistorique) dépendra de notre aptitude à éloigner les hommes de pouvoir de l’écriture des règles censées limiter leur propre pouvoir (4 mars) (Lien)

Bonjour :o)                                                                     

Je viens de reformuler ma thèse sur l’importance pour les citoyens d’écrire eux-mêmes leur Constitution, en tenant à l’écart les hommes au pouvoir ainsi que les candidats au pouvoir.

Cette thèse importante est en débat là : http://etienne.chouard.free.fr/forum/viewtopic.php?id=16.

Je l’ai proposée sous forme d’article à AgoraVox : je souhaite en effet que des gens défavorables à notre conception de la politique réappropriée par tous jusqu’à l’écriture des règles fondatrices, nous expliquent pourquoi, à leur avis, l’idée est mauvaise. Et le public d’AgoraVox me semble à la fois varié et exigeant : nous devrions donc trouver là de nouveaux  interlocuteurs à la fois incisifs et respectueux, pour nous stimuler et nous inciter à progresser. Nous verrons si l’article est publié et quelles réactions il suscite.

Si vous le pouvez, faites venir ici, vous aussi, de nouveaux contradicteurs ou contributeurs, en sollicitant vos forums préférés, vos listes de diffusion, vos contacts, etc.  Vu le verrouillage des médias dès qu’on ose les critiquer, nous n’avons pas d’autre moyen de diffuser largement nos idées que l’Internet et le bouche à oreille. À vous de m’aider à donner vie à cette liberté :o)

C’est la mise en scène des conflits qui met le mieux en lumière les arguments en présence et permet le progrès de tous.

C’est cette mise en scène des conflits, cette contradiction équitable, qui manque tant à la télévision où certains "journalistes" privilégiés (sans légitimité ni comptes à rendre à la démocratie qu’ils prétendent servir) nous imposent tous les jours soit une pensée unique sans contradiction honnête, soit des émissions de divertissement, idéales pour dépolitiser les citoyens et stériliser les résistances.

La semaine prochaine, je serai à Paris pour corriger des copies d’examen. À cette occasion, je vais tâcher de rencontrer enfin quelques « compagnons cybernétiques » :o)

 

 

Actualité de ma réponse à Bastien François (3 mars) (Lien)

Pendant le débat référendaire, parce que j’ai tardé à répondre, Bastien François a donné l’impres­sion à de nombreux citoyens favorables au TCE que le débat était clos et leur cause entendue. Je trouve aujourd’hui sur de nombreux sites des débats qui s’arrêtent sur cette affirmation lapidaire : « pour la démonstration, allez voir le texte de Bastien François qui clôt le débat »…

Je démontre pourtant rigoureusement dans ma réplique que BF se trompe sur presque tout : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Reponse_Etienne_Chouard_a_Bastien_Francois.pdf. 

Je les invite donc aujourd’hui à lire enfin ma réponse qui trouve ces temps-ci un regain d’actualité avec la prétention extravagante des politiciens de faire comme si nous n’avions pas dit non : VGE qui demande une "seconde chance" au TCE, le Parlement européen où nos soi-disant "représentants" votent quasiment à l’unanimité la trahison ouverte de leurs propres électeurs (le passage en force du TCE), etc.

Voilà qui donne de l’importance et de la force aux arguments que j’ai opposés à Bastien François, arguments minutieux restés depuis sans même un début de réponse.

Le TCE et l’Europe traîtreuse qu’il révèle sont dangereux, juridiquement, politiquement, économiquement et socialement. On attend toujours la démonstration du contraire.

Encore aujourd’hui, cet échange d’arguments résume bien le déséquilibre des affirmations juridiques en présence : les partisans du TCE n’avaient et n’ont toujours d’autres arguments que d’autorité, ce qui n’inspire pas confiance.

Vous pouvez réagir : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/03/04/30-actualite-de-ma-reponse-a-bastien-francois

 


 

Il faut écouter les auditions des acquittés d’Outreau (10 février 2006) (Lien)


Il faut écouter les auditions des acquittés d’Outreau :
http://www.publicsenat.fr/dossiers/dossier.asp?dossier=32

Avec ces auditions intégrales, nous vivons sans doute une période historique :

Les juges sont détenteurs d’un immense pouvoir sur les citoyens et les contre pouvoirs des juges sont presque tous constitués ou maîtrisés par les juges eux-mêmes, ce qui est uns vice de même nature que ceux que nous dénonçons depuis des mois à propos des institutions politiques.

Or jamais les juges n’ont été mis en accusation aussi publiquement et précisément que ces jours-ci (malgré les nombreux scandales dénoncés par les plus grands avocats depuis des décennies).

Ce qui se passe est passionnant et porteur d’un grand espoir : de longues auditions parfaitement médiatisée où des parlementaires (le rapporteur est un excellent avocat) peuvent enfin prendre longuement les juges face à face, devant tout le monde, et régler précisément de fort vieux comptes particulièrement graves.

Tous les soirs, au lieu de perdre mon temps à regarder les jeux du cirque à la télé, j’écoute sur Internet le témoignage d’un acquitté, d’un avocat, d’un juge ou d’un procureur, je prends la mesure des gouffres d’injustices que nos institutions permettent depuis longtemps, et je prends conscience de ma part de responsabilité à être resté aussi longtemps indifférent, moi aussi.

 

Je vous invite donc à partager ça, on ne perd pas son temps : http://www.publicsenat.fr/dossiers/dossier.asp?dossier=32

 

C’est La Bruyère qui disait :
« La condamnation d’un innocent est l’affaire de tous les honnêtes gens ».

 

Ceux qui contestent l’aspect spectaculaire de la médiatisation n’ont pas compris (ou ne veulent pas accepter) qu’elle est une immense opportunité pour la démocratie par l’émancipation des citoyens d’un système encore trop oppressif.

Il est important que les citoyens comprennent les rouages de leur système judiciaire pour percevoir les enjeux et se forger une opinion éclairée : nous avons là une opportunité pédagogique inouïe.

Ces jours-ci, nos parlementaires jouent un rôle immense.

 

Je lisais « Éloge de la barbarie judiciaire », de Thierry Lévy (Odile Jacob, oct. 2004, 187 p.), avant que ne s’effondre le jeune juge, et je découvrais déjà  les vices majeurs de nos institutions judiciaires que ce grand avocat, avec d’autres, pointe depuis longtemps.   Résumé :

« Audience jouée d’avance, poids du dossier, garde à vue renforcée, enquête viciée par la garde à vue, experts et témoins sous influence, enquêteurs investis des pouvoirs du juge : le procès pénal n’est pas équitable. On fabrique l’erreur sous les yeux d’une défense entravée.

Aujourd’hui, l’institution judiciaire s’est trouvée un nouveau maître, plus aveugle, plus menaçant encore que l’État autoritaire. Le plaignant aux mille récriminations, idolâtré, transfiguré en sainte victime.

Le duel des âges barbares, arbitré entre égaux par un juge indépendant et selon des règles acceptées, respectait bien davantage les acteurs du procès.

Ce n’est pas l’esprit d’humanité qui l’a banni de nos lois. C’est l’arrogante prétention du prince à imposer à ses sujets la vérité qu’il croyait détenir. Et nous n’en sommes pas sortis. »

 


 

Plan du livre  « Éloge de la barbarie judiciaire » :

Chapitre 1 - Les jeux sont faits

Faux débat

L’audience réelle n’est pas l’audience idéale

Le dossier l’écrase de tout son poids

Illusion de l’expertise

La comédie du procès

Et les témoins ?

Un théâtre de la cruauté

Garde à vue

Pas de droits pour les méchants

À quoi sert la défense ?


Chapitre 2 - Qui sont les barbares ?

Place à la vengeance

Justice et vérité

Vers la justice d’État

Les quatre piliers de l’enquête

L’exclusion progressive de la défense

La fausse indépendance de la justice

Comment on fabrique l’erreur

Une vérité autorisée

Que faire ?


Chapitre 3 - Sacrées victimes

Naissance de la victimologie

Le culte de la victime

Dérive

Quand la victime remplace le souverain

Dans l’ombre du psychiatre

Plaignez-vous !

 

Nous sommes tous concernés, ça n’arrive pas qu’aux autres, vraiment : il faut prendre le temps d’écouter intégralement les témoignages de l’affaire d’Outreau, c’est édifiant.

Il faudra sans doute intégrer un certain nombre de ces réflexions dans notre Constitution citoyenne.

Vous pouvez réagir là :          
http://etienne.chouard.free.fr/Europe/forum/index.php?2006/02/10/21-il-faut-ecouter-les-auditions-des-acquittes-doutreau

 


 

Nouvel outil, un forum, pour de meilleures fonctionnalités d'échange (5 février 2006) (Lien)

Bonjour mes amis :o)

Je vous présente le nouvel outil d'échange que je vous avais annoncé et que je prépare depuis des semaines : il est sensiblement plus puissant pour présenter et structurer nos idées.

C'est un vrai forum (http://etienne.chouard.free.fr/forum/index.php), au sens informatique, ce qui signifie que :

·          Vous pouvez modifier vous-même vos messages (pour corriger une faute ou nuancer une pensée). Le commentaire envoyé n'est donc plus irréversible.

·          La saisie est plus agréable : les sauts à la ligne apparaissent comme à la saisie, sans avoir besoin de saisir des sauts de ligne manuels avec un outil.                                                                            
On a aussi plus de place à l’écran pour voir le texte tapé.

·          La mise en forme est beaucoup plus puissante : possibilité de surligner, de barrer, de changer la couleur, la taille, de tirer un trait, de dessiner facilement des smileys, etc.

·          Les filtres sont plus nombreux : possibilité de voir les réponses à vos messages, voir les messages sans réponse, voir les derniers messages, etc.

·          Vous avez la possibilité de régler votre profil : votre signature, un avatar (une sorte de logo :o), l'apparence du site que vous préférez, etc.

·          Vous pouvez vous abonner à une discussion, pour recevoir un mail dès qu'une nouvelle réponse est postée.

·          Vous pouvez sauter d'un sujet à l'autre sans passer par le sommaire (liste déroulante en bas).

·          On peut voir tous les messages d'un auteur.

·          L’affichage des textes utilise toute la largeur de l'écran et du papier.

·          Sur les forums ouverts, vous pouvez commencer vous-même une nouvelle discussion... Ça, ça devrait vous plaire ;o)

Ne me mettez pas en difficulté, s'il vous plaît, sur ces ouvertures : ne sortez pas de l'optique institutionnelle, et respectez les autres, de droite comme de gauche : l'objectif est de nous rapprocher, pas de nous empailler.

Il me semble que les citoyens "de gauche" et ceux "de droite" (je crois que les différences sont moins réelles chez les électeurs qu’au sein des partis, il y a beaucoup de malentendus) sont affaiblis par leur division au moment d’envisager la réflexion institutionnelle où précisément leurs intérêts majeurs convergent et où il faudrait qu’ils soient nombreux.

:o)

Attention : sur un forum, on peut lire librement, mais il faut s'inscrire pour avoir le droit de participer aux échanges. Souvent, les participants s'attribuent un pseudo et donnent une adresse email créée pour l'occasion.

Je peux régler ce point et permettre à quiconque, même non inscrit, d'écrire des commentaires, mais il me semble préférable de nous inscrire, c'est ça qui vous permet de corriger vos messages après-coup et de recevoir par mail des avertissements de réponse (l'inscription est courante sur presque tous les forums). Je peux me tromper : dites-moi ce que vous en pensez. Je voudrais éviter que de timides génies soient éloignés par l’appréhension de s'inscrire :o)

Passage du blog au forum : nous venons d'avoir des dizaines d'échanges, souvent très intéressants, sur un autre espace, de type 'blog'. Comment récupérer les messages du blog, pour que tout ce qui a été dit d'important soit, finalement, au même endroit ?

Le plus malin, si vous en êtes d’accord, est que vous choisissiez et transfériez vous-même, par Copier/Coller, les messages que vous estimez importants : inscrivez-vous, puis ouvrez le blog dans une fenêtre, ouvrez le forum dans une autre, sélectionnez avec la souris dans une main, et copiez-collez (CTRL+C et CTRL+V) avec l'autre main... Ça devrait aller assez vite si chacun prend en charge ses propres messages. Si vous n'y arrivez pas, je vous aiderai.

Et surtout, ça vous permet de réorganiser et reformuler un peu votre pensée, avec le recul des premiers échanges.

Dites-moi ce que vous en pensez dans les commentaires de cet article.

De toutes façons, je ferme les commentaires du blog sur les grands principes (ils resteront lisibles quelque temps), et on ne discute plus sur les grands principes qu'avec le forum.

On garde la partie 'blog' pour les billets du journal et bientôt des liens.

Ça va comme ça ?

Quel boulot de mettre tout ça en place, je perds un temps considérable en manips informatiques et, depuis le premier janvier, je n'ai plus de temps pour lire mes précieux livres... C'est affreux. Vivement que le forum tourne un peu tout seul ;o)

Au plaisir de vous lire :o)

 

Mise en pratique de nos réflexions de simples citoyens (16 janvier 2006) (Lien)

« Quel sera le devenir de ces débats ? Quelle ambition avons-nous (avez-vous Étienne) pour les résultats du travail d'Étienne et de nos débats ? » demande Nanouche sur le blog (commentaire n° 11).  Je lui réponds ici, dans mon journal, parce que ça devrait intéresser aussi ceux qui n’ont pas le temps de suivre toutes les conversations du blog.

Chère Nanouche :o)

La question de la mise en pratique de nos idées est effectivement essentielle et difficile, mais elle n’est pas insoluble.

La difficulté vient évidemment de ce que toutes les commandes sont aux mains des professionnels de la politique et qu’ils ne vont pas se laisser faire : c’est précisément à la fois le problème et l’obstacle à la solution du problème.

Heureusement, nos parents ont déjà franchi deux premières "marches" vers la démocratie : la liberté d’expression et le suffrage universel. Ces premières étapes permettent d’avancer ensuite vers une meilleure démocratie, mais seulement si les citoyens se servent de leurs outils.

On peut noter que ces "premières marches" sont toutes les deux mises à mal en ce moment par ceux qu’elles gênent (aidés en cela par notre propre négligence) :

·       La liberté d’expression est très limitée sur les thèmes dont je parle : combien de débats contradictoires à la télévision sur le contrôle des pouvoirs et sur la responsabilité des élus, aux heures de grande écoute, depuis 20 ans ?

     Est-ce qu’on nous présente souvent les enjeux du vote blanc, du mandat impératif et du référendum d’initiative citoyenne ?   

Et surtout à qui donne-t-on la parole si on évoque ces questions ? Aux hommes politiques de métier, ou à leurs amis proches des médias, qui évitent, bien entendu, d’évoquer honnêtement, face à de solides contradicteurs et avec le temps nécessaire, les principes que je défends ici.

·       Le suffrage universel, de son côté, est lui aussi truqué, de façon à ce que nous ne puissions élire que des "notables" sélectionnés par les appareils partisans, sans aucun moyen de s’en débarrasser : si on les désavoue en élisant leurs adversaires, on les voit réapparaître dès le scrutin suivant.

    C’est un peu comme si la pire sanction qu’on puisse leur infliger était le mi-temps : une législature pour ceux de "la droite", puis une législature pour ceux de "la gauche" (avec des guillemets), etc.  Nous n’avons aucun moyen de dire "ça suffit, partez tous, et renouvelons la classe politique" (vote blanc), ni aucun moyen de chasser un éventuel affreux (RIC révocatoire).

Mais nous avons quand même l’Internet et les "petits" candidats à la présidentielle. C’est une fragile opportunité. Si on devient nombreux, on peut transformer cette fragile opportunité en mutation démocratique, en progrès.

Si nous sommes mille aujourd’hui et que chacun d’entre nous arrive à convaincre cinq personnes, d’abord du rôle central de la Constitution dans notre vie quotidienne, du lien direct entre les politiques réprouvées, la précarité qui se généralise, et l’interdiction de résister directement écrite dans nos propres institutions, si nous sommes capables aussi d’expliquer à ces 5 personnes l’importance d’expli­quer à leur tour les principes protecteurs cachés et refusés, on sera vite cinq mille. Et si on continue tous, sans se décourager, on peut devenir assez forts.

Concrètement, donc : pour que ce plan ait une chance de fonctionner, il faut que nos idées soient simples et puissantes.

Il s’agit prioritairement de dépasser le factice clivage "droite"-"gauche" et de montrer que l’enjeu est de protéger les citoyens, les vrais humains plutôt que les personnes morales, concrètement et honnêtement.

Or, quand on se penche sur la situation institutionnelle française et européenne pour comprendre et montrer où se perd le pouvoir, ce n’est pas simple d’emblée :o)

D’où l’importance de notre débat actuel pour affûter nos arguments et nous frotter à une vraie contradiction, de façon à progresser et rendre nos idées, si possible, claires et irréfutables.

Sur les 50 principes que j’ai décrits dans "Les grands principes" et que j’ai résumés dans la feuille http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Evaluation_projet_constitution.xls, il faudrait que nous en choisissions 10 ou 15 seulement, universellement acceptables et convaincants.

C’est dans cet esprit que nous devrions débattre :

1 -  Quels principes garde-t-on et quels principes laisse-t-on à l’écart des discussions à venir, pour être consensuels et décisifs auprès du plus grand nombre ?

2 -  Et d’autre part, sur ces principes auxquels tout le monde devrait tenir comme à la prunelle de ses yeux, quelles sont les attaques qui seront probablement formulées et comment peut-on répliquer aux objections, simplement mais fortement ?

Si tout se passe bien, dans quelques mois, on aura défini une dizaine de principes incontestables constituant une exigence citoyenne solennelle, un groupe de revendications fondamentales.

Et si on s’est bien réveillés entre nous, si on réussit à en réveiller beaucoup d’autres, et mieux : à faire de ces réveillés des réveilleurs… mieux encore : des réveilleurs de réveilleurs… on peut devenir très nombreux (il faudrait que nous soyons des millions :o)

Tous ces citoyens enfin debout finiraient par signer une pétition constituante géante qui pourrait former un cadre de travail pour une Assemblée Constituante élue (par exemple).

Je suis sûr que nous avons des hommes politiques honnêtes et dévoués au service public, capables d’accepter ces exigences citoyennes de contrôle permanent des pouvoirs (même si c’est trop difficile pour eux d’imaginer ces contrôles et de les proposer eux-mêmes), et de relayer ces exigences en déclenchant eux-mêmes ce programme constituant qui devrait se dérouler ensuite sans eux.

On a besoin d’eux, mais pas au moment de fixer les limites de leur pouvoir.

Bien sûr, je connais la fable de « Perrette, sur sa tête ayant un pot au lait… » et je sais bien qu’il est facile de bâtir des "châteaux en Espagne", mais bon, je décris ici une issue que je crois possible, tout en sachant bien que, pour l’instant, tout le monde dort et que les berceuse télévisuelles, sportives et publicitaires tournent à fond.

Ce qui est sûr, c’est que la résignation ne change jamais rien : c’est notre volonté qui est capable de changer la vie, rien d’autre.

Donc, on peut essayer, chacun à sa mesure et avec ses forces à lui, de pousser tous dans cette direction-là, et on verra bien si on est assez forts pour éloigner les voleurs de pouvoir :o)

 


Bonne année 2006 :o)   -   Premiers pas interactifs pour ce site (2-4 janvier 2006)

Bonjour à tous et bonne année :o)

Ce site est en train de changer : il s’agit d'abord d’améliorer votre confort d’utilisation par la fin de la division de la fenêtre en cadres, ce qui devrait faciliter l’impression.

Un clic sur un lien de l’en-tête (Sommaire) va désormais ouvrir une page à la place du Sommaire (et non plus dans le cadre placé en dessous du sommaire).   (Astuce : utilisez la touche BackSpace (Correction Arrière, au dessus de la touche Entrée) avec une main, pour revenir à la page précédente  (Sommaire), tout en gardant la souris dans l'autre main.)

Il s’agit surtout de créer une partie blog, qui donnera au site plus d’interactivité, et qui vous permettra enfin de réagir ici publiquement point par point.

Je vous demande pardon pour les quelques causes de dérangement qui surviendront sans doute, d’autant que j’ai très peu de temps pour la technique, étant débordé par le travail de fond.

La présentation du blog sera sûrement miteuse les premiers temps, mais vous me direz ce que vous souhaitez, et peut-être aussi m'aiderez-vous :o)

Pendant quelques jours, ne rédigez pas de longues réponses, car nous aurons peut-être à changer ensemble notre fusil d’épaule et recommencer à zéro pour que notre débat soit performant. Il va falloir choisir entre des outils informatiques (DotClear, SPIP, PunBB…) aux qualités différentes.

Pendant une semaine, testez surtout l’agrément du bébé blog :o)
Je vous présenterai ensuite un bébé forum :o)

 

Mise à jour importante du document « Grands principes … » (29 décembre 2005)

Je viens de finir un chantier important sur le document « Grands principes d’une bonne Constitution… » : il y avait des répétitions, quelques incohérences de plan et des lacunes : j’ai intégré de bonnes idées venant de vous :o)

C’est mieux maintenant, je crois, et j’ai hâte de connaître vos réactions.

Je m’attelle aujourd’hui à la partie BLOG du site qui va vous permettre de réagir publiquement point par point :o)

 

J’ai découvert un grand livre : « La démocratie athénienne à l’époque de Démosthène », de Mogens Herman Hansen, danois, professeur à Cambridge, (Les Belles Lettres, 2003, 490 p.).

Pour découvrir Athènes, c’est la référence, vingt-cinq ans de travail, résumé de six volumes. C’est une source importante pour la partie athénienne du livre de Bernard Manin. L’auteur souligne que s’il est vrai que la démocratie directe n’existe plus, ce constat n’apporte pas du tout la démonstration qu’elle ne pourra plus jamais exister. Au contraire, il estime que la démocratie directe est rendue tout à fait possible par les techniques modernes.  

C’est un livre rigoureux et limpide où la vie quotidienne et les débats de société, décrits de façon très vivante, évoquent furieusement nos luttes politiques et sociales modernes. C’est captivant.  

On y découvre que la philosophie est probablement née pour analyser la démocratie, qui préexistait.

La démocratie athénienne apparaît comme une courte période, presque unique dans l’histoire, où des hommes simples ont pu astucieusement "voler" un siècle de contrôle des pouvoirs à la barbarie universelle, juste le temps que les puissants inventent les stratagèmes solides pour voler à nouveau le pouvoir au plus grand nombre, et pour longtemps cette fois.

C’est un livre important.

 


Le scandale de la vraie dette extérieure, celle de l’Europe :
l’irrationalité démentielle des principes du capitalisme
(27 décembre 2005) (Lien)

Voici un des documents repérés par Pierre. C’est fort, et ça résonne profondément avec l’arrogance du FMI et de la Banque Mondiale, et avec les bouleversements actuels en Amérique latine.

Exposé du Chef Guaicaipuro Cuatemoc (Amérique Latine) devant la réunion des Chefs d’État  de la Communauté Européenne, en Espagne, à Valence, en avril 2002.

Avec un langage simple, retransmis en traduction simultanée à plus d’une centaine de Chefs d’États et de dignitaires de la communauté Européenne, le Chef Guaicaipuro Cuatemoc finit par inquiéter son auditoire lorsqu’il déclare :


« Ainsi moi, Guaicaipuro Cuatemoc, je suis venu rencontrer ceux qui célèbrent la rencontre. Ainsi moi, descendant de ceux qui peuplaient l’Amérique il y a quarante mille ans, je suis venu rencontrer ceux qui l’ont rencontrée il y a seulement cinq cents ans.

Ainsi donc, nous nous rencontrons tous. Nous savons qui nous sommes, et cela suffit.

Le frère douanier européen me demande un papier écrit avec un visa pour que je puisse découvrir ceux qui m’ont découvert.

Le frère usurier européen me demande de payer une dette contractée par Judas à qui je n’avais jamais permis de me vendre quoi que ce soit.

Le frère avocaillon européen m’explique que toute dette se paie avec intérêt, même si c’est en vendant des êtres humains et des pays entiers sans leur demander leur consentement.

Et je les découvre peu à peu.

Moi aussi, je peux réclamer des paiements, moi aussi je peux réclamer des intérêts.

Les Archives des Indes attestent, papier après papier, reçu après reçu et signature après signature, que seulement entre 1503 et 1660, sont arrivés à Sanlucar de Barrameda 185 tonnes d’or et 16.000 tonnes d’argent en provenance d’Amérique.

Pillage ? Je ne le croirais pas ! Ce serait penser que les frères chrétiens ont manqué à leur Septième Commandement.

Spoliation ? Que Tanatzin me garde d’imaginer que les Européens, comme Cain, tuent et nient le sang de leur frère !

Génocide ? Ce serait accorder crédit aux calomniateurs tels Bartolomé de las Casas, qui qualifient la rencontre de “destruction des Indes” ou d’autres comme Arturo Uslar Pietre qui affirment que le démarrage du capitalisme et de la civilisation européenne actuelle se sont produits grâce à cette avalanche de métaux précieux ! Non !

Ces 185 tonnes d’or et ces 16.000 tonnes d’argent doivent être considérés comme le premier de beaucoup d’autres prêts amicaux de l’Amérique, affectés au développement de l’Europe.

Le contraire serait présumer de l’existence de crimes de guerre, ce qui ouvrirait droit non seulement à exiger leur remboursement immédiat, mais également à des dommages et intérêts.

Moi, Guaicaipuro Cuatemoc, je préfère retenir la moins belliqueuse de ces hypothèses. Cette fabuleuse exportation de capitaux ne fut que le début d’un plan “MARSHALLTEZUMA”, destiné à assurer la reconstruction de la barbare Europe, ruinée par ses guerres déplorables contre des musulmans cultivés, inventeurs de l’algèbre, du bain quotidien et de bien d’autres progrès importants de la civilisation.

Donc, en célébrant le Cinquième Centenaire du Prêt, nous pourrions nous demander : les frères européens ont-ils fait un usage rationnel, responsable ou du moins productif des fonds si généreusement avancés par le Fonds International Indo-américain ?

Nous regrettons de devoir dire non.

En matière de stratégie, ils l’ont dilapidé lors des batailles de Lépante, dans  les invincibles armadas, dans des troisièmes reichs et dans bien d’autres formes d’extermination mutuelle, sans autre fin que de se retrouver occupés par les troupes gringas de l’OTAN, comme à Panama, le canal en moins.

En matière financière, après un moratoire de 500 ans, ils ont été incapables, non seulement de liquider le capital et ses intérêts mais également de se rendre indépendants vis-à-vis des revenus en liquide, des matières premières et de l’énergie bon marché que leur exporte et leur fournit tout le Tiers Monde.

Ce tableau déplorable confirme l’affirmation de Milton Friedman qui dit qu’une économie subventionnée ne peut jamais fonctionner, ce qui nous oblige, dans votre intérêt, à vous réclamer le paiement du capital et des intérêts dont nous avons si généreusement différé le paiement ces derniers siècles.

Ceci étant, nous devons préciser que nous ne nous abaisserons pas à faire payer à nos frères européens les taux d’intérêt vils et sanguinaires de 20 et même 30 % qu’à l’occasion certains frères européens font payer aux peuples du Tiers Monde.

Nous nous limiterons à exiger le remboursement des métaux précieux avancés, plus un intérêt modique fixe de 10 % l’an, cumulé seulement sur les 300 dernières années, soit 200 ans d’exonération.

Sur cette base, et si nous appliquons la formule européenne des intérêts composés, nous informons nos découvreurs qu’ils nous doivent, en premier paiement de leur dette, un poids de 484 147 034 294 866 tonnes d’or et de 41 872 milliards de tonnes d’argent.

À savoir, des volumes équivalant aujourd’hui à 193 658 813 717 fois la production d’or annuelle mondiale (2 500 tonnes en 2003) et 2 733 170 753 199 fois celle d’argent (15 320 tonnes en 1996).

Ce total équivaut également à 70 % de toute l’écorce terrestre, soit 0,7 % de l’ensemble de la planète.

Elles pèsent lourd ces masses d’or et d’argent. Et combien pèseraient-elles si on les comptait en sang ?

Ajouter que l’Europe, en un demi millénaire, n’a pas pu générer suffisamment de richesses pour régler ce modique intérêt, serait admettre son échec financier absolu et/ou l’irrationalité démentielle des principes du capitalisme.

Bien entendu, les indiens d’Amérique ne se posent pas de telles questions métaphysiques.

Par contre nous exigeons la signature d’une Lettre d’Intention engageant les peuples débiteurs du Vieux Continent, les obligeant à respecter leur engagement par une rapide privatisation ou reconversion de l’Europe, leur permettant de nous la remettre tout entière, à titre de premier versement de “la dette historique”. »


Quand le Chef Guaicaipuro Cuatemoc a donné sa conférence devant la réunion des Chefs d’État de la Communauté Européenne, il ne savait pas qu’il était en train d’exposer une thèse de Droit International destinée à déterminer la VÉRITABLE DETTE EXTÉRIEURE.

Il ne reste plus qu’à trouver un gouvernement latino-américain suffisamment courageux pour porter l’affaire devant les Tribunaux Internationaux.

 

Ce texte a tourné sur Internet et il s’est enjolivé, mais pas transformé fondamentalement. Il est paru en fait en 1992 (http://www.newint.org/issue312/plan.htm), semble-t-il.

Sur le fond, il donne des idées fortes pour réfléchir au-delà de la pensée unique néolibérale.

J’ai élaboré une petite feuille pour contrôler soi-même les calculs :
Dette_de_l_Europe_envers_l_Amerique_Latine.xls


Celui qui voit un problème et qui ne fait rien, fait partie du problème.  (Gandhi) (Merci Dieudeschats :o)

 


L’apport de Pierre : un grand livre, à publier,
« Manifeste pour la vraie démocratie » (23 décembre) 
(Lien)

Par les livres, par le temps que je vole à ma vie "moderne" pour les lire, je suis en train de naître politiquement, avec la désagréable impression d’être en retard, mais aussi le plaisir de grandir.

Je voudrais ici remercier Pierre, un des milliers d’internautes qui ont réagi à « Une mauvaise Constitution », car Pierre a déclenché chez moi un processus important et totalement imprévu, le questionnement de l’intouchable, la remise en cause de l’évidence, l’impossible reniement d’un principe quasi sacré pour tout le monde… Le dieu Suffrage Universel a pris un coup sévère depuis que Pierre m’a écrit (je vous dirai le nom de Pierre, plus tard).

Pierre lit et réfléchit sur la démocratie depuis trente ans et s’insurge depuis longtemps contre les impostures modernes. Il a écrit un vrai livre dans lequel il développe et articule toutes ses idées. Il l’intitule « Manifeste pour la vraie démocratie » et il ne l’a pas encore publié (c’est en cours).

Pierre m’a carrément envoyé par mail ce document de plus de 200 pages… :o) Je souris parce que j’ai ainsi reçu plus de cent documents considérables dont le volume a rapidement pris des proportions inhumaines : je ne suis pas encore venu à bout de cette montagne de réflexions citoyennes (hauteur de cette pile-là, sur mon bureau : un mètre).

Relancé plusieurs fois cet été par Pierre-le-patient-et-tenace, j’ai vraiment commencé la lecture de son livre au mois de septembre… et je l’ai finalement dévoré comme un roman, plantant là tous mes autres bouquins en cours…

Ce livre est vraiment intelligent et décapant, une mine à idées enthousiasmantes et… réalisables. Pierre est en colère, il ne mâche pas vraiment ses mots et ça donne un style très vivant, tonifiant.

J’ai hâte qu’il soit publié pour que vous puissiez le lire à votre tour. Pour l’instant, Pierre m’autorise à publier son plan détaillé (dès que j’ai lu ce plan, je me suis dit "il faut que je lise ce livre") :

 

AVANT-PROPOS :

La démocratie trahie par les politiciens. La politique au coeur de tous les problèmes. Proposer un nouveau modèle politique. Changer les règles du jeu. Restaurer une véritable démocratie.

PREMIÈRE PARTIE : La folie des hommes

Jusqu’où va la folie des hommes. Toute forme de pouvoir est dangereuse et engendre inégalités et violences. Les politiciens et la lutte pour le pouvoir. La manipulation des masses.

CHAPITRE 1 : Questions dérangeantes ? Pour qui ?

La folie de Sharon. L’impérialisme américain. Une “démocratie” qui fabrique des dictatures. Bush élu par moins d’un quart des Américains avec un demi million de voix de moins que son concurrent démocrate. Questions sur le 11 septembre 2001. Mensonges à la pelle. Manipulations tous azimuts. Silence forcé sur un crime d’État absolu. Qui sont les vrais terroristes ?

CHAPITRE II : Les racines du mal. Le pouvoir et les hommes

Le pouvoir est une arme. Pouvoir de l’argent. Le pouvoir crée de l’inégalité. Amplification de l’inégalité par les élections au suffrage universel. Les effets pervers du pouvoir. Le pouvoir oligarchique. Le principe de Peter. L’expérience de Stanley Milgram. Le pire des pouvoirs.

CHAPITRE III : La politique et les politiciens

La politique et le politique. La classe politique. Ses origines. Le comportement des politiciens. La dérive perverse. La fausse communication.

CHAPITRE IV : Le suivisme

Les moutons de Panurge. Les dominés contribuent à leur propre domination. La violence symbolique. Violence d’État. La manipulation par la communication et par la mise en scène. Fanatisation des masses. La peur du loup. Comportement du leader. Paternalisme et infantilisation. Amplification du suivisme. Le fanatisme, stade ultime du suivisme. Les six phases du fanatisme. Fanatisme et sectarisme.          

DEUXIÈME PARTIE : La démocratie trahie

Les institutions actuelles ne respectent pas les principes les plus élémentaires de la démocratie. La pratique démocratique actuelle ne respecte même pas ses propres règles.

CHAPITRE I : Le déficit démocratique

Les institutions renforcent le pouvoir politique d’une oligarchie au détriment du citoyen. La séduction politique. Les leaders populistes. Dimension spirituelle ou organique de la politique ? La perte des valeurs de la politique. Un minimum de démocratie, un maximum de pouvoir aux mains des politiciens professionnels. L’escroquerie à la démocratie.

CHAPITRE II : L’escroquerie des élections

L’idéal de la justice électorale est impossible à atteindre. Multitude de systèmes électoraux. Injustice de la représentation : 550 % d’inégalité ! Illégalité des élections législatives de 2002. Le “gerrymander”. Améliorations possibles. L’énigme Jospin.

CHAPITRE III : La mythologie du suffrage universel

Suffrage censitaire et suffrage universel. Historique. Référendums et plébiscites. Électeurs et élus. L’illusion du vote. Le citoyen manipulé. Nature coercitive et oligarchique du pouvoir. L’impossibilité des réformes structurelles. La montée de l’abstention.

TROISIÈME PARTIE : le retour aux sources

Il faut revenir aux origines de la démocratie pour la redéfinir et clarifier ses principes fondamentaux. Faire table rase, et proposer un modèle de fonctionnement d’une vraie démocratie respectueuse de ses propres principes et des attentes des citoyens. Cela débouche obligatoirement sur une stratégie de reconquête du pouvoir politique.

CHAPITRE I : Les origines de la démocratie

La démocratie à Athènes au V° siècle avant Jésus-Christ. L’histoire de la démocratie truquée et tronquée. L’escroquerie intellectuelle. Démocratie directe et indirecte. Le refus du modèle démocratique athénien. Égalité et suffrage censitaire. La procédure grecque. Citoyens, métèques, esclaves, ostracisme. Hitler porté au pouvoir par la démocratie. Responsabilité des femmes.

CHAPITRE II : Les principes de la démocratie

Histoire grecque. Solon et Clisthène. Ecclésia, agora, boulè, héliée, paideia. Le principe premier : l’égalité politique. Le tour de passe-passe : un homme, une voix. Le principe second : la liberté politique. Troisième et quatrième principes : deux procédures qui respectent le principe du partage égalitaire du pouvoir. Les quatre piliers de la démocratie.

CHAPITRE III : L’égalité politique, fondement des libertés

Priorité à la liberté politique depuis 1789. La liberté économique conduit à l’exploitation économique. L’analyse marxiste est insuffisante. La démocratie libérale fabrique des dictatures. La démocratie est trahie par le suffrage universel.

CHAPITRE IV : Le tirage au sort

1) Une nouvelle procédure... vieille de 2500 ans.

Premier principe. Deuxième principe. Conséquences.

2) La réduction décimale.

Exemple simplifié. Un nouveau système pour désigner les représentants. Précédents historiques. Rejet des moyens électroniques. Justification de la réduction décimale.

3) La nouvelle procédure.

4) La durée du mandat.

5) Fonctionnement des groupes-citoyens.

6) Le problème des circonscriptions.

CHAPITRE V : Les enjeux du tirage au sort

1) L’égalité politique;

2) La fin de la violence d’État.

3) La reconnaissance de l’autorité.

4) La représentation miroir.

5) La fin d’un système politique schizophrène.

6) L’élimination des pervers dangereux.

7) La fin de la corruption et du règne de l’argent.

8) La fin du centralisme et de l’irresponsabilité.

9) Moins de gâchis des énergies.

10) La transparence.

11) Sortir du conflit psychologique et de l’aliénation.

12) La reconquête démocratique.

13) L’initiative citoyenne.

CHAPITRE VI : Oppositions et critiques

L’opposition de l’oligarchie. Une utopie politique ? Qui est le plus capable de gouverner ? La dictature de l’économie. La bêtise absolue des “experts”. Ex. du FMI. L’accusation de démagogie. Un nouveau poujadisme ?

CHAPITRE VII : La stratégie

Un projet politique. Un nouveau parti politique : le MCVD. La deuxième voie : la mise en place des groupes-citoyens.

CHAPITRE VIII : Avant de conclure

Une économie mécaniste. Droit de propriété et pouvoir. Colonialisme, impérialisme, mondialisation, mêmes combats. Conditionnement et langage. L’illusion démocratique. L’essence de la démocratie. La dictature de la compétition. Universalité des valeurs de la vraie démocratie. L’initiative citoyenne.

CONCLUSION

La pensée démocratique méconnue et trahie. La démocratie agonisante. Le Meilleur des mondes. Changer les règles du jeu politique. La folie de la compétition. La tromperie des politiciens. Sortir de l’infantilisme politique. Égalité, liberté et fraternité. Paix, justice et dignité.

 

L’idée du tirage au sort est d’abord bizarre, choquante même, bien sûr, et semble ne pas résister au simple bon sens. Mais si on donne une chance à l’idée et si on écoute, pour voir, l’argumentaire avantages/inconvénients des deux modes "sort <--> élections", l’appréhension se transforme vite en forte envie d’essayer, car l’idée est très forte, très séduisante, et en fait pas du tout nouvelle : testée et améliorée depuis des millénaires, mais dissimulée, va savoir pourquoi, depuis 200 ans.

Le livre de Pierre contient aussi une bibliographie fourmillante et des annexes tout à fait étonnantes.

À mon avis, ce livre est considérable et il aurait sa place chez Fayard, éditeur important pour les citoyens debout :o)

Depuis ce livre, j’en ai découvert bien d’autres, lumineux, sur le mode de désignation et la responsabilité des représentants politiques, sur les avantages déterminants du tirage au sort, thème majeur pour nous tous, mais thème "oublié" pour on ne sait quelle raison.

Je vous ai déjà parlé du livre vivifiant au possible de Bernard Manin, « Principes du gouvernement représentatif » (Champs Flammarion) et aussi de celui, bouleversant, de Pierre Clastres : « La société contre l’État » (Éditions de Minuit).

Mais il faut aussi lire l’excellent livre de Philippe Braud (professeur de sciences politiques à l’Université de Rennes), « Le suffrage universel contre la démocratie », (PUF). Je vous en reparlerai, c’est sûr : tout citoyen devrait avoir étudié ces livres (étudier, c’est plus que lire :o)

J’ai aussi en cours, très actifs car ils sont absolument passionnants, deux petits livres : « La haine de la démocratie » de Jacques Rancière (éd. La Fabrique) et « La démocratie, textes choisis » de Bruno Bernardi (Corpus Flammarion).

J’en ai bien d’autres sous le coude, essentiels, mais je vous en parlerai quand je serai vraiment au cœur de leur lecture :o)

 

Viol politique sous couverture "démocratique", plus voyant que jamais depuis 2002,
faute de vote blanc et de RIC (16 décembre 2005) 
(Lien)

Plus je lis, plus je me radicalise, je le sens bien, mais est-ce un mal ? C’est quand même choquant, ce que font nos "représentants" pendant que les simples citoyens travaillent, confiants et distraits.

Pour l’élection du roi républicain, puissant irresponsable imposé par la Vème, j’ai dû voter Chirac sans vouloir Chirac parce que des règles électorales injustes m’ont forcé en 2002 à choisir entre la peste et le choléra : la combinaison du scrutin majoritaire à 2 tours, de l’impossibilité de voter blanc, c’est-à-dire d’affirmer mauvais tous les candidats, et de l’impossibilité de dire en cours de mandat « ça suffit ! » par référendum d’initiative citoyenne, cette combinaison de règles iniques conduit à l’incroyable violence politique que le plus grand nombre doit supporter aujourd’hui, tous les jours dans un tunnel d’obéissance de cinq ans, sans rien pouvoir y faire.

Cet homme élu par force devrait se comporter en Président "de tous les français" et, au lieu de ça, sans scrupule, il ne sert que les  plus riches : il abandonne la sécu, il vend carrément nos entreprises publiques à ses amis, avides de marchés et de profits géants, en allégeant de surcroît leurs impôts, il prépare la forfaiture de l’AGCS, il accepte un extravagant taux de chômage minimum (NAIRU) imposé discrètement et cyniquement par des économistes hors contrôle, il légifère par ordonnances traîtreusement pendant les vacances, marchant ainsi sur la tête à la fois des parlementaires et des citoyens, pour généraliser la précarité la plus absolue (CNE), il met en place progressivement un État policier, il fait reculer les libertés publiques et il décrète même l’état d’urgence sous des prétextes fallacieux, sans que nous ayons le moindre droit de résister entre deux élections (élections d’ailleurs largement truquées par une opposition droite/gauche factice)…

Cet abus de pouvoir quotidien est un viol politique sous couverture "démocratique", violence mise en pleine lumière en 2002, mais habituelle et bien réelle depuis longtemps.

Tous ces malheurs viennent du refus, depuis toujours, des politiciens professionnels de reconnaître le vote blanc et le RIC, vote blanc qui nous aurait permis en 2002 de récuser en bloc les deux candidats, et RIC qui nous permettrait de résister aux abus de pouvoir.

Ce sont les professionnels de la politique, qui ont peur qu’on puisse dire qu’on les trouve tous nuls et qui redoutent qu’on puisse les écarter en bloc en exigeant un renouvellement de la classe politique, ce sont ces politiciens de métier qui refusent aux citoyens le décompte et l’impact des votes blancs.

Mais à l’évidence, ce n’est pas à eux de décider de ça.

C’est à nous, simples citoyens, de gauche comme de droite car nos intérêts sont ici supérieurement communs, représentés en Assemblée Constituante sans aucun membre ou candidat des pouvoirs institués (qui seraient ‘juges et parties’ dans cette assemblée), d’écrire et d’imposer les véritables outils démocratiques,  connus depuis toujours  mais refusés au peuple par une caste qui a pris goût au pouvoir en y restant trop longtemps : référendum d’initiative citoyenne, vote blanc pleinement reconnu, stricte indépendance financière des médias et tirage au sort d’une partie au moins de nos représentants parmi les citoyens volontaires, pour des mandats courts et non renouvelables.

Les Athéniens l’avaient compris : la politique ne doit surtout pas devenir un métier : rotation du pouvoir avant tout.  Montesquieu insistait sur l’essentiel : "pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir".

Proposition : si on pouvait formuler un vote complet, comprenant deux bulletins : une adhésion et un rejet, un nom choisi et un nom honni, cela permettrait de ne jamais élire quelqu’un qui suscite plus de rejets que d’adhésions. Ne serait-ce pas plus avantageux pour tous les électeurs, de gauche comme de droite, ne serait-ce pas plus démocratique ?

Ce serait une adaptation de l’ostracisme antique qui permettait à Athènes de mettre à l’écart un citoyen jugé trop influent et donc potentiellement tyrannique.  Voyez http://agora.qc.ca/mot.nsf/Dossiers/Ostracisme.

 

Cet article a été relayé sur Bellaciao, ce qui nous permet d’en débattre :
http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=21716

 

 

Nécessaire démocratisation du journalisme : tirage au sort des journalistes d’information et interdiction de la publicité sur les médias d’information (11 décembre) (Lien)

Incontestablement, le rôle des médias est central dans la formation de l’opinion publique et donc dans la réalité du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Comme en toute matière, la liberté totale conduit à la négation de la liberté pour tous au profit de la seule liberté des plus forts.

Il est inquiétant de constater comme les médias, lieux de pouvoir bientôt plus importants que les scènes politiques, font l’objet de convoitise, d’appropriation et finalement de confiscation, comme ont été confisqués les pouvoirs politiques, par une caste de ‘professionnels’ faisant d’un service public leur métier à vie, arguant d’une prétendue technicité et d’une nécessaire spécialisation.

Ce ‘métier’ autoproclamé par certains citoyens interdit durablement à tous les autres citoyens de jouer leur propre rôle. 

Quel est le contrôle citoyen de l’attribution de la parole dans le débat public ?

Il est des fonctions de la Cité qui ne devraient jamais être des métiers à vie, c’est ce qu’on découvre en lisant les réflexions politiques athéniennes (2 500 ans d’âge).

À cet égard, le journalisme, comme la représentation politique, devrait sans doute, pour le bien de la Cité, à cause du pouvoir que confère cette fonction, être soumis à une forte rotation, la même que celle que les Athéniens avaient mise au centre névralgique de la protection des individus.

Comme en politique, la professionnalisation du journalisme est (pas toujours mais) souvent à la fois inutile et dangereuse.

Il me semble que le rôle des journalistes devrait être, souvent, de donner la parole aux citoyens, à tous les citoyens, pour que puisse vivre un vrai débat démocratique, riche de ses contradictions, plutôt que d’utiliser la tribune que leur ‘métier’ leur offre (injustement) pour diffuser unilatéralement et quotidiennement leur opinion personnelle comme une propagande - pensée unique (voir les éditoriaux assénés tous les jours sans contradicteur sur les radios, journaux ou télés).

Ce rôle de ‘donneur de parole’ n’est pas si technique que ça : tous les citoyens pourraient jouer ce rôle, sans qu’ils aient besoin d’accaparer toute leur vie cette position.

Bien sûr, certains journalistes font un vrai métier qui ne prive personne, bien au contraire : les grands reporters, par exemple, ou bien les journalistes d’investi­gation, ne nuisent pas aux autres en jouant toute leur vie le rôle qui est le leur.

Bien sûr aussi, les citoyens actifs et engagés que sont les éditorialistes doivent pouvoir rester actifs et intervenir souvent dans le débat public. Il serait dommage d’ignorer leur analyse.


Mais il est des fonctions essentielles pour le débat de la Cité, programmation /animation des débats, et présentation des journaux notamment, (liste à compléter), pour lesquelles on devrait imposer un tirage au sort, au moins sur les médias de service public, parmi les citoyens volontaires, pour des mandats courts : une semaine, six mois ou un an (?), payés par l’État.

On peut attendre de ce tirage au sort, en lieu et place du népotisme actuel, les mêmes vertus ‘impartialisantes’ qu’en matière politique : plus besoin de quotas, plus besoin de discrimination positive : on va ainsi retrouver, naturellement, à tous ces postes stratégiques de ‘donneurs de parole’, tantôt des hommes, tantôt des femmes, tantôt des riches, tantôt des pauvres, tantôt des beaux parleurs, tantôt des timides, des blancs, des noirs, des juifs, des chrétiens, des musulmans, des athées, des ouvriers, des employés, des cadres, des patrons, des jeunes, des vieux, des beaux, des moches, des artisans, des paysans, des étudiants, des savants, des chirurgiens, des écrivains, des chômeurs (horreur !)...

Cet inventaire à la Prévert laisse imaginer la richesse des nouveaux débats rendus possibles par le tirage au sort, le seul mode démocratique de désignation des responsables de la Cité.

La démocratie a besoin de médias libres (c’est-à-dire pas confiscables par les plus riches) pour véhiculer toutes les pensées citoyennes, sans exclusive.

Il me semble que seul un journalisme déprofessionnalisé, au moins partiellement, le permet vraiment.

 

Cette entrée dans les médias de citoyens volontaires tirés au sort serait complétée par la nécessaire prise en charge par la Nation des frais actuellement financés par la publicité, gangrène idéologique, mortifère à tous points de vue, dont les citoyens devraient se désintoxiquer par une interdiction pure et simple.

Les citoyens, pour se protéger des méfaits de la publicité sur les médias et l’information, donc sur nos valeurs, sur les pouvoirs et finalement sur la démocratie elle-même, devraient l’interdire simplement en assumant ce que ça coûte : « Nous autres citoyens, à travers notre État, nous décidons de prendre en charge pour tous les médias la différence entre les recettes des ventes et le coût de fabrication pour que survive leur précieuse indépendance. Et la publicité est simplement interdite dans tous les médias (de toute façon, on produit, on consomme et on travaille trop, et la publicité pousse encore à la roue en créant des besoins inventés alors que l’humanité doit les réduire pour simplement survivre) ».   

Voilà de l’argent qui ne serait pas gaspillé.   Un beau sujet de référendum :o)

Quelle valeur donnez-vous à une opinion publique éclairée de façon complète et impartiale, protégée des manipulations ?   À partir de combien est-ce que "c’est trop cher" ?

Auriez-vous des idées, des modalités, des objections ?     :o)

 

Cet article a été relayé par le site Bellaciao et fait l’objet d’un débat… chaud :o)
C’est là : http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=21460

 


Une idée enthousiasmante pour la survie de l’espèce humaine : DemExp (19 novembre) (Lien)

Sur AgoraVox, je suis tombé sur le message d’un citoyen, Alexandre Santos, qui décrit très bien une idée enthousiasmante dont je vous ai déjà un peu parlé et qui pourrait bien être une grande opportunité pour les hommes de reprendre en main leur destin, progressivement, en douceur.

Depuis un an, je lis des milliers de pages sur l’idée de démocratie, les contraintes et les coups tordus qu’elle subit depuis la nuit des temps. Je crois que l’idée de DemExp peut nous donner un avantage décisif sur ceux, peu nombreux mais influents, qui méprisent la démocratie (la vraie) et qui nous conduisent, une fois de plus, à la guerre (quand on nous dit qu’il nous faut une Europe forte pour résister aux USA et à la Chine, ça ne suggère pas d’emblée un projet pacificateur : on est plutôt encore dans une logique nationaliste de compétition entre prédateurs).

Pour que ce projet DemExp fonctionne, il faut que nous soyons vraiment très nombreux à y croire, (je lis La Boétie en ce moment, et son invitation à mettre fin à notre servitude volontaire est vivifiante), nombreux à essayer le logiciel de façon un peu opiniâtre, et nombreux à faire progresser rapidement cette expérience qui était techniquement impossible il y a seulement quelques années.

Ce qui, hier encore, était une utopie ne l’est peut-être plus aujourd’hui :o)

Mais lisez plutôt cet argumentaire lumineux :

 

DemExp : vie démocratique à l’âge de l’information.

L’apparition d’Internet et des nouvelles technologies de l’information ont encouragé l’expérimentation de nouvelles pratiques démocratiques. La semaine dernière, l’Estonie est devenue le premier pays à permettre le vote électronique lors d’élections nationales. Ces premiers essais ne sont qu’un avant-goût de ce que pourrait être la démocratie à l’âge de l’information.

Les Grecs anciens considéraient que la démocratie n’était viable que pour une cité état ou territoire restreint, car les citoyens devaient habiter près de l’assemblée, afin de pouvoir participer aux débats. De plus, il aurait été inconcevable de réunir en un seul endroit les populations d’un territoire trop vaste, de sorte que les démocraties anciennes (cités grecques, cantons suisses, althing islandais) ne concernaient que des territoires réduits, et un nombre de citoyens limité.

La fondation des EUA, et l’adoption par les grands États européens de régimes démocratiques, ont exigé l’adaptation des pratiques démocratiques pour tenir compte des contraintes géographiques et démographiques. Au lieu de réunir tous les citoyens en un même lieu, il a été décidé de désigner des délégués, qui auraient la charge de représenter les positions d’un certain nombre de citoyens. Ces représentants se sont graduellement organisés en partis, et sont devenus les hommes et femmes politiques qui prennent des décisions au nom de leurs électeurs. Les compromis nécessaires pour permettre le fonctionnement d’une démocratie dans un grand État ont néanmoins eu des effets pervers. Ils ont conduit à l’apparition d’un nombre croissant d’intermédiaires, qui éloignent le citoyen de la prise de décisions.

Par ailleurs, l’organisation de la classe politique en partis, et leur professionnalisation, ont contribué à établir l’idée que la vie politique est trop complexe et technique pour la plupart des citoyens. Ceux-ci ne comprennent souvent plus comment les décisions sont prises. Ils se sentent déconnectés de la vie politique, et estiment leurs avis ignorés lors de la prise de décisions. Pourtant, l’avènement de l’informatique et d’Internet a brutalement éliminé les obstacles géographiques et démographiques dans la communication entre les citoyens.

Les distances géographiques n’empêchent plus les citoyens de communiquer en temps réel, et les moyens informatiques actuels permettent à chacun de participer au débat, quel que soit le nombre de participants. Il serait donc théoriquement possible de revenir au système de démocratie ancien, où les décisions ne sont plus prises par des intermédiaires, mais par chaque citoyen. La question devient alors : comment construire un système informatique qui permette le fonctionnement d’une assemblée incluant tous les citoyens ? C’est le but du projet DemExp (http://www.demexp.org/, expérience démocratique), dirigé par Frédéric Lehobey et Félix Henry, et programmé par David Mentré.

Pour comprendre le système DemExp, on peut le voir comme un forum en ligne, dans lequel seraient posées les questions qui doivent être adressées par l’assemblée.

Prenons, par exemple, la question de l’avortement. « Est-ce que l’avortement doit être interdit ou permis, et suivant quelles modalités ? » Chaque citoyen aurait la possibilité de proposer une réponse à cette question, ou de voter pour une réponse qui représente correctement son opinion.

On pourrait alors imaginer que trois réponses principales se dégagent :

A - L’avortement doit être interdit.  B - L’avortement devrait être permis pendant les trois premiers mois de la grossesse.  C - L’avortement devrait être permis.

Imaginons que la réponse B recueille le plus de votes. Elle sera donc considérée comme représentative de l’ensemble des citoyens, et devient la position officielle de l’assemblée. Elle sera la référence suivant laquelle les décisions doivent être prises.

Deux remarques :

1 - La décision gagnante n’est pas simplement la majoritaire, mais la plus consensuelle parmi les citoyens. Pourquoi ? Parce que le système de vote n’est pas à majorité simple, mais suit la méthode de vote de Condorcet.

Dans ce système de vote, l’électeur ne vote pas pour une seule réponse, mais peut voter pour un ensemble de réponses qui le satisfont, en les ordonnant, par ordre de préférence. L’avantage de cette méthode est d’éviter le vote stratégique (voter non pas pour l’option qu’on désire, mais contre celle qu’on veut éviter), et permet de dégager l’option la plus consensuelle au sein d’un groupe.

Ainsi, par exemple, lors des élections du 21 avril, les deux candidats retenus étaient Chirac et Le Pen, alors que leur nombre de votes additionnés n’atteignait pas 50 %. Il est très possible que ces deux candidats aient donc été loin de la préférence de la majorité des électeurs. Le problème du vote stratégique est que, à force de voter contre quelque chose, on peut ne jamais avoir l’occasion de voter pour les idées que l’on désire. Ainsi, par exemple, on pourrait imaginer que dans un système avec deux partis majoritaires, tous les électeurs de gauche se sentent obligés de voter PS, pour ne pas laisser gagner la droite, alors que le PS ne défend pas vraiment leurs idées, et qu’ils préfèreraient des partis comme les verts, PC, etc. Avec le système de Condorcet, chacun peut voter pour l’idée qui lui tient à coeur, tout en appuyant celles qu’il estime acceptables, si sa préférée n’est pas retenue. Il n’y a donc plus de pénalité à voter pour les options qui nous sont proches, mais qui restent minoritaires.

Dans notre exemple, une majorité des électeurs de la réponse A donnerait comme préférence secondaire la réponse B, de même que les défenseurs de la réponse C. La réponse B serait confortablement désignée comme la plus consensuelle, alors que par la méthode à majorité simple, et pour peu que l’électorat soit partagé, les réponses A ou C pourraient gagner de quelques votes, bien que la majorité de l’électorat y soit opposée.

 

2 - Le vote n’est pas ponctuel mais continu. Contrairement aux systèmes démocratiques actuels, le vote n’a pas lieu pendant une période donnée, mais se fait de façon continue. Il n’y a donc pas d’élections dans le système DemExp. Chacun est libre de changer à tout moment ses préférences, et la position la plus consensuelle est continuellement recalculée. Cette particularité offre plusieurs avantages :

- Il n’est pas possible de faire pression sur un électeur, comme ce pourrait être le cas pendant les élections classiques, car l’électeur peut changer à tout moment son vote. Pour forcer une proposition, le groupe de pression devrait pouvoir contrôler continuellement un nombre suffisant d’électeurs, ce qui est en pratique peu probable.

- La tenue d’élections n’est plus un facteur d’instabilité pour la société. Il n’y a plus de paralysie des institutions en attente d’un éventuel changement de majorité, les décisions ne sont plus soumises au diktat des échéances électorales.

- L’électorat est moins facilement manipulé par les médias ou la classe politique.

Les décisions prises par des élections et référendums sont souvent conditionnées par les circonstances politiques présentes au moment des élections, alors que le long terme est négligé. Les résultats peuvent être affectés par un événement médiatique récent, tandis que les scandales ou événements plus anciens sont négligés par l’électorat. Certains pourraient penser que le vote en continu pourrait être source d’instabilité, si la position la plus consensuelle change au gré de l’actualité médiatique.

Mais en réalité, combien de fois changeons-nous d’opinion par jour ? Un jeune électeur pourrait varier ses opinions pendant une certaine période, mais ses décisions deviendraient plus constantes avec l’expérience.

Quelle serait la portée de ce système de prise de décisions ? Le système DemExp est très flexible, et a vocation à être utilisé à tous les niveaux, depuis l’association locale, en passant par la ville, la région, l’État ou même le monde. Quel type de décisions pourraient être prises ? DemExp aurait pour objectif de remplacer toutes les prises de décision actuellement effectuées par les politiciens.

J’imagine que les questions se bousculent dans l’esprit du lecteur : comment aurais-je la compétence pour décider du système de transport de ma ville, ou de la politique de santé ou budgétaire de l’État ? De toute façon, je travaille, et je n’ai ni le temps, ni l’envie de suivre toutes les décisions concernant le système local d’égouts ou la réglementation du transport fluvial ! Ces doutes sont compréhensibles, mais il faut se rappeler qu’ils sont tout aussi valables pour les politiciens. Les politiciens ne sont pas plus compétents que d’autres pour connaître tous les domaines techniques, économiques, scientifiques qui jouent dans une prise de décision.

En réalité, la seule compétence dont ait fait preuve un politicien est sa capacité à recueillir un grand nombre de votes pour lui ! De plus, un politicien ministre ou premier ministre n’a absolument pas le temps ni les moyens de comprendre complètement les rouages des ministères, des institutions sous ses ordres, et le détail des questions auxquelles il est confronté. En réalité, il n’existe personne sur Terre qui ait une compréhension complète de tous les rouages d’une société moderne, et certainement aucun premier ministre ou président. Les politiciens prennent régulièrement des décisions sur l’agriculture, le système de santé sans avoir suivi aucune formation d’agronomie ou médicale. Ils dirigent les ministères des finances ou sont aux commandes de l’armée sans avoir suivi de formation économique ou militaire. Les doutes sur la compétence des citoyens à prendre des décisions sur le fonctionnement de la société renvoient aux doutes originels sur le bon sens de la démocratie.

Est ce que le peuple a la capacité de prendre des décisions raisonnables, ou doit-il être mené par une élite ? L’histoire a maintes fois montré que le peuple s’en sort très bien, et que, au contraire c’était un excès de pouvoir sans contrôle, accumulé par un petit groupe, qui pouvait conduire aux pires catastrophes.

La vérité est que le citoyen doit être capable de survivre dans la société. Il doit être capable de gagner sa vie, gérer ses finances, éduquer ses enfants, suivre les lois, payer les impôts. Aucun citoyen ne peut clamer son ignorance de la loi en sa défense dans un tribunal. Il est donc absurde de prétendre que le citoyen ne serait pas à même de prendre des décisions sur les lois qu’il devra suivre.

En ce qui concerne le problème du temps disponible pour participer à tous les débats possibles, la solution est simple, il peut déléguer son vote à quelqu’un en qui il a confiance pour gérer la question. On pourrait penser que c’est une forme détournée de recréation des politiciens, mais la situation est très différente : on ne délègue son vote que pour des domaines bien précis. Un citoyen peut déléguer son vote sur les questions de santé à une personnalité (disons un médecin réputé) en qui il a confiance, sauf en ce qui concerne la question de l’avortement, pour laquelle leurs avis divergent. - Cette délégation est temporaire et immédiatement révocable. Dès que le citoyen ne se retrouve plus dans les positions de cette personnalité, elle peut immédiatement lui retirer son appui. On évite ainsi l’impression de blanc-seing donnée aux politiciens pendant quatre ans suivant chaque élection.

Comment mettre en œuvre le système DemExp ? L’idée des initiateurs de DemExp serait de tout simplement utiliser les structures actuelles pour lancer les réformes nécessaires : chaque citoyen convaincu de l’intérêt du système DemExp voterait pour des représentants DemExp. Ceux-ci deviendraient donc des politiciens, mais prendraient l’engagement d’appuyer les décisions prises par le système DemExp, quelle que soit leur opinion personnelle sur la question. Ils seraient ainsi les représentants et exécutants des positions consensuelles prises au sein des citoyens soutenant le système DemExp. Au fur et à mesure que le nombre de politiciens DemExp augmente, ils pourront commencer à réformer les institutions de la ville, de la région, de l’État, pour mettre en place le système DemExp. Il serait ainsi possible de réformer les institutions de façon totalement démocratique, et en douceur.

En conclusion, le système DemExp devrait placer chaque citoyen fermement aux commandes du processus de décision de l’État, tout en lui permettant de véritablement soutenir les idées qui lui tiennent à coeur.

Objections : j’imagine que beaucoup d’interrogations viendront à l’esprit du lecteur. En ce qui me concerne, je pense qu’il est essentiel de garantir la sécurité du système, non pas à cause de la manipulation du nombre de votes, mais pour une question de confidentialité. En effet, le système doit maintenir en continu un registre de l’identité de l’électeur et le profil complet de ses votes, et donc de ses opinions. Ce serait une source d’informations formidable sur chacun, et qui pourrait devenir dangereuse pour un citoyen persécuté. Il faudra donc trouver des méthodes de sécurité crédibles, qui empêchent ce genre de profilage. Est-ce que cela fonctionne ? Le logiciel permettant de mettre en place un système DemExp existe déjà, mais est encore trop imparfait pour être utilisé par la société. En revanche, il serait possible à une organisation (association) de le mettre en place comme système de décision.

C’est sur AgoraVox, un bon blog, où vous devriez aller lire l’intéressant débat qui suit ce texte :    
http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=4003.

Voyez aussi : http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=3870.

 

Cette idée inédite n’a de chance de nous aider à prendre notre sort en main que si nous sommes très nombreux. Il faut donc briser une certaine habitude de spectateur en retrait et agir :

Téléchargez le logiciel DemExp, puis installez-le, puis consultez le mode opératoire (tutoriel), puis testez et critiquez :o)  

Il faut qu’on additionne nos forces, et qu’on réveille ensuite les autres, à gauche comme à droite.

 

On pressent quelques problèmes stratégiques qui seront déterminants dans le succès ou l’échec :

·       La sécurité qui doit être totale et vérifiable par tous à tous moment. Ce ne sera pas simple, mais les hommes sont ingénieux.

·       La surabondance prolifique des informations à consulter : des questions, des réponses et des interventions… Tout va se jouer sur la hiérarchisation des infos qui, elle aussi, devrait rester démocratique et évolutive.

·       La motivation des citoyens, à la fois accaparés par les soucis quotidiens et contre éduqués par des siècles de passivité politique entre deux élections,de surcroît largement factices, ce qui renforce encore le découragement.

L’expérience ne fait que commencer, mais je la trouve porteuse d’espoirs immenses.

 


 

La violence surgit quand la politique est absente (12 novembre 2005) (Lien)

Laurent Mucchielli (http://laurent.mucchielli.free.fr/) est un sociologue bien intéressant à qui nos journalistes ont souvent donné la parole ces derniers jours, à propos des violences en banlieue :
Daniel Mermet à Là-bas si j’y suis :
http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=779,
Laurence Luret à Parenthèses :

http://www.radiofrance.fr/chaines/france-inter01/information/chroniques/chronique/index.php?chronique_id=15,
et dans Libération : 
http://www.liberation.fr/page.php?Article=337030.

Il développe un bon plaidoyer pour qu’on lise la violence comme le résultat d’une exclusion extrême.

Je relie sa réflexion à celle sur nos institutions qui, elles aussi, excluent les citoyens du fait politique entre deux élections : pas de référendum d’initiative citoyenne et pouvoir exécutif hors contrôle, aussi bien en France qu’en Europe.

Cette exclusion quotidienne des affaires politiques est finalisée, verrouillée, par des élections qui, même elles ! ne sont qu’une parodie, gravement truquées, profondément perverties, à la fois par le scrutin majoritaire strict (des millions d’électeurs sans aucun représentant à l’assemblée), par le refus du vote blanc (scandaleusement assimilé au vote nul), par le cumul des mandats, et surtout par le fait que les politiciens professionnels "de gauche" et de droite conduisent la même politique (le néolibéralisme, qui comble la petite caste des plus forts et nous asservit tous progressivement).

Les citoyens qui refusent absolument le libéralisme déchaîné, mortifère, ne sont donc plus défendus par personne au pouvoir.

Il est très dangereux de laisser ces millions de personnes en colère sans voix (ni voie) politique.

Cette équivalence des politiques gauche droite est bien le comble du mensonge et finalement du mépris du choix électoral, mais ce n’est pas si surprenant : c’est cohérent avec la malhonnêteté des institutions écrites par les hommes au pouvoir eux-mêmes, évidemment juges et parties, et c’est bien là le nœud de l’affaire :

C’est à nous, citoyens, et pas aux "pros" de la politique, d’écrire nos propres institutions, pour nous protéger, au plus haut niveau du droit, contre ceux qui veulent le pouvoir.

Depuis au moins 2 500 ans, on sait que ces hommes-là, candidats au pouvoir, sont, si on ne les contrôle pas parfaitement, le plus grand danger pour la vraie démocratie qui, rappelons-le, est le pouvoir partagé par tous.

L’exclusion des humains de l’action politique réelle conduit tôt ou tard à la violence, et ce serait de bonne gestion de la Cité de rendre parole et force aux citoyens, avant que ça barde.

 

 


Désobéissance civile en attendant le RIP,  référendum d’initiative populaire (3 novembre) (Lien)

Le 30 octobre, je relayais une protestation de médecins contre la complicité évidente de nos "représentants" politiques face à la production massive d’OGM, en secret et contre le gré des populations. Je vais encore vous parler de quelques documents liés entre eux par la même idée force.

On lira d’abord avec intérêt Gilbert LAVAL dans ce court article : « Isabelle Sommier, chercheuse, et les faucheurs d’OGM : "La désobéissance vise à provoquer le débat public" » :         
http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=19028

« Après les procès devant la cour d’appel de Toulouse de neuf élus et syndicalistes, dont le député Noël Mamère (Verts) et José Bové, "faucheurs volontaires d’OGM", Isabelle Sommier, maître de conférences en sciences politiques et directrice du Centre de recherches politiques de la Sorbonne (CNRS), analyse le phénomène dit de désobéissance civile. Elle effectue ses recherches sur la violence en politique et sur les mouvements sociaux, dont les luttes animées par les altermondialistes. » La suite…


Dans les cas graves, quand on n’a pas de RIP, on n’a que la désobéissance civile.

Quand nous aurons enfin conquis le RIP, contre la volonté de nos propres "représentants" (il faut se rendre compte que ceux qui bloquent le RIP libérateur sont ceux-là mêmes qui sont élus et payés pour nous représenter et nous protéger), la désobéissance civile disparaîtra d’elle-même.

 

À ce propos, on lira avec intérêt le bon livre de José Bové : « Pour la désobéissance civique » (voir bibliographie), ainsi que la très intéressante Charte des faucheurs volontaires :         
http://www.monde-solidaire.org/spip/article.php3?id_article=1342

 

On restera dans le même esprit quand on lira cet article qui nous rappelle que le RIP est loin d’être une dangereuse utopie, évidemment : le peuple suisse, moins infantilisé que les Français,  débat lui-même de ce qui lui semble important. « Vers un double "oui" le 27 novembre? » http://www.swissinfo.org/sfr/swissinfo.html?siteSect=106&sid=6181165&cKey=1129910465000. On lira les arguments de part et d’autre pour se convaincre que le débat est réel et permanent chez nos amis Suisses.

 

Pour revenir aux OGM, on ne compte plus les articles inquiétants issus de médecins et de chercheurs indépendants, l’opposition populaire aux OGM est massive depuis longtemps dans tous les sondages, et pourtant… nos "représentants", ceux qui sont élus et payés pour veiller sur nos intérêts, laissent (impunément) cultiver en secret mais en plein champ des semences interdites : « Le gouvernement a caché l'existence des cultures commerciales d'OGM » (Le Monde, 9/9/2005)  
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3228,36-686454@51-683851,0.html.

 

Pour se convaincre de la probité et du sens de l’intérêt général des géants mondiaux de la semence, on lira « Irak : les géants américains des semences transgéniques ruinent l’agriculture et rançonnent les paysans », par F. William Engdahl :    
http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=19995.

 

Pour rester en veille citoyenne :  http://www.infogm.org/ et http://www.greenpeace.fr/detectivesOGM/index.php3...

 


Démocratie pourrie par de richissimes empoisonneurs et leurs complices politiques professionnels et…  notre incroyable servitude volontaire (30 octobre 2005) (Lien)

Décidément, quand on cherche l’info au lieu de se laisser mener en bateau par le PPA et la PQM, on découvre des océans de turpitude et on donne toute sa mesure à notre servitude volontaire.

J’ai reçu ce texte effarant (merci Jacques), et j’en ai retrouvé la trace sur le net :

« OGM : Les aliments génétiquement modifiés ne conviennent ni aux humains ni aux animaux » : http://www.indsp.org/ManorBeastFR.php

 


« Le Docteur Mae-Wan HO et le Professeur Joe CUMMINS passent en revue quelques preuves scientifiques à propos d'une série de scandales récents qui concernent les aliments génétiquement modifiés destinés à l'alimentation des êtres humains et des animaux.


Ils exposent ici une carence majeure dans les procédures réglementaires [du contrôle des semences et des aliments qui en dérivent] et ils soulignent comment l'Europe risque d'autoriser des variétés de plantes génétiquement modifiées [OGM] qui sont génétiquement instables, et donc illégales [au plan de la réglementation de la mise en marché comme semences] et dangereuses [pour la santé publique et l'environnement].


Ils demandent une investigation approfondie sur les abus scientifiques qui ont permis que les plantes OGM, qui ne conviennent ni aux humains ni aux animaux, puissent entrer dans notre chaîne alimentaire. (…)


PLAN de l’article, très technique :

- Des incidents récents qui jettent le trouble sur la sécurité des OGM

- Les toxines Bt sont connues pour être dangereuses

- L'imposture concernant la réglementation des plantes Bt

- Il existe une preuve que les toxines naturelles ne sont pas les mêmes, ou pas "équivalentes en substance" aux toxines du matériel végétal d'OGM

- Tous les gènes génétiquement modifiés diffèrent des gènes naturels

Les procédés de transformation génétique ne sont ni fiables ni contrôlables

Les lignées transgéniques sont fondamentalement instables

- Dans chacun de ces cas [étudiés], les inserts transgéniques ont été réarrangés, et non seulement à partir de la construction utilisée, mais depuis leur caractérisation par la société [en question]

- L'instabilité des transgènes est la question majeure en matière de sécurité

- Il est par ailleurs illégitime de tirer des conclusions sur du matériel hybride à partir des données enregistrées sur les lignées parentales génétiquement modifiées.

- Il y a des incertitudes importantes quant à la sécurité de la transgénèse

- Il est grand temps que nous interdisions toute dissémination de plantes génétiquement modifiées dans l'environnement, afin d'ouvrir la voie à une véritable agriculture durable (32).

Le plus grand obstacle à un futur durable et avec une sécurité [alimentaire correcte], réside dans la corruption et la science corrompue qui s'exercent sur ce que l'on peut définir comme un "principe d'anti-précaution".

Il doit maintenant y avoir une enquête approfondie portant :

* sur la sécurité des aliments destinés aux êtres humains et aux animaux et provenant de plantes génétiquement modifiés et

* sur les abus systématiques de la science qui ont permis que de tels aliments issus d'OGM soient autorisés, alors que nous avions tous les indices [nous indiquant] qu'ils pouvaient ne pas offrir toutes les garanties en matière de sécurité alimentaire.

 

Voir aussi : « OGM : Documents disponibles en français et accessibles par Internet » :       

http://www.monde-solidaire.org/spip/article.php3?id_article=2251  

 

Ce refus des contrôles des produits chimiques ressemble fort à une affaire « sang contaminé » puissance 10…   :o(

 


Voir sur ma page ‘Liens’ des extraits de « La haine de la démocratie », de Jacques Rancière, et quelques puissantes raisons d’exiger le tirage au sort pour désigner nos représentants.   

 


Au poker mondial, si on laisse faire les très riches, à tous les coups l’on perd (26 octobre) (Lien)

J’ai encore reçu un document passionnant. Cette fois, c’est Claude qui explique de façon limpide la cynique mécanique de la dette mondiale dans un contexte de laisser-faire, à l’aide d’une théorie des jeux très intéressante. Il suggère aussi des solutions de bon sens.

CHRONIQUE D’UN DÉSASTRE ANNONCÉ

L’accroissement des inégalités expliqué à ceux qui ne comprennent rien à l’économie.

Lorsqu’une société est régie par les seules lois du marché, les riches s’enrichissent et les pauvres s’appau­vris­sent. La raison en est simple. Pour bien la comprendre, nul besoin d’ouvrir de gros traités, d’assimiler des théorèmes compliqués : laissons un instant de côté Marx, Keynes et autres Friedman. Beaucoup croient que c’est dû simplement à ce que les riches sont plus rapaces que les pauvres, mais la convoitise n’est qu’un facteur aggravant. La raison dépasse les « appétits » des uns ou la « résignation » des autres. Elle ne dépend pas non plus du niveau d’instruction, même si les diplômés ont plus de chances d’entrer dans le sérail et accéder au maniement des finances.

Pour comprendre cette raison simple, le plus simple est plutôt d’aller dans quelque tripot et de s’asseoir à une table de jeu.

À un jeu équitable, c’est le plus riche qui gagne.

Prenons un jeu simple : pile ou face. Vous choisissez pile ? Eh bien je choisis face ! Sortons une pièce : vous allez évidemment demander à voir si la pièce n’est pas truquée, si le côté pile existe bien. Car les jeux ne manquent pas, où cette vérification est impossible, comme par exemple les jeux de grattage, où il n’est pas possible de vérifier le nombre de tickets gagnants sur le nombre total de tickets. Ce sont là des jeux de dupes, ce qui explique peut-être leur succès énorme.

Les deux joueurs – vous et moi – misent chacun un euro. Celui qui gagne remporte les mises. Le jeu de pile ou face est un jeu de hasard : aucun des joueurs n’est capable de prédire le côté sur lequel la pièce va tomber. Chaque joueur a une chance sur deux de gagner deux fois sa mise : on dit que l’espérance est de 0,5 x 2 = 1. Lorsque l’espérance vaut 1, le jeu est dit équitable.

Les jeux de casino sont plus ou moins équitables : la roulette, où l’on a une chance sur 36 de gagner 35 fois sa mise, est le moins inéquitable, avec une espérance de 35 / 36 = 0,97. Les 3% restant permettent au casino de vivre.

Il existe un moyen simple, décrit il y a plus de deux siècles par d’Alembert, de gagner à coup sûr à un jeu équitable : quand le joueur perd, il double sa mise. S’il perd, il va miser 2, puis 4, puis 8, 16, 32. S’il gagne à ce coup-là, il ramasse 64. Comme il a misé 1 + 2 + 4 + 8 + 16 + 32 = 63, il empoche UN. À chaque coup gagnant, il gagne une mise de base.

La difficulté vient de ce que pour doubler ainsi sa mise, il faut avoir beaucoup d’argent : sinon, si le joueur n’a plus de quoi doubler sa mise sur un coup perdant, il perd TOUT. La méthode de d’Alembert est, dans ce cas-là, le moyen le plus rapide de se ruiner. À un jeu équitable, c’est le plus riche qui gagne.

On comprend pourquoi les casinos plafonnent les mises : ce n’est évidemment pas par quelque scrupule moral, pour éviter aux malheureux clients de se ruiner, mais bien au contraire pour éviter qu’en appliquant cette montante géométrique un joueur (l’ensemble des clients) soit plus riche que l’autre (le casino) et puisse faire systématiquement « sauter la banque ». Si les mises n’étaient pas plafonnées, n’importe quel prince saoudien pourrait couler tous les casinos de la Côte d’Azur dans la semaine.


Du casino aux champs.

Ronald Reagan lâcha un jour : « Si nous étions capables de faire baisser la température de 4°C au-dessus de l’URSS, nous en aurions fini dans un an avec le communisme ». Heureusement, la pluie et le beau temps sont encore dus à des facteurs non maîtrisables. Mais l’agriculteur, soumis à ces facteurs, ne peut faire face à l’adversité que s’il possède –selon l’adage paysan- une récolte sur pied, une seconde dans sa grange et la troisième à la banque. Le petit paysan endetté disparaît et le gros paysan riche s’enrichit : la loi du jeu –dictée par l’OMC et appliquée à une activité vitale pour tous- a encore frappé.


Des champs à la Bourse.

La spéculation boursière a tous les aspects d’un jeu de hasard. Dans leurs prévisions économiques, les « experts » se trompent en moyenne une fois sur deux, ce qui démontre non leur incompétence, mais la nature aléatoire de la chose. Les politiques, eux, se trompent à chaque fois, ce qui là non plus ne démontre pas leur incompétence, mais leur mauvaise foi, ce qui les oblige à faire voter des budgets rectificatifs et naviguer à la godille, ce dont évidemment ils se défendent en parlant de nécessité et de pragmatisme.

Nul ne peut prédire ce que sera le cours d’une action dans un an : la spéculation boursière est un jeu de hasard, et en négligeant les cas de  « délit d’initié », on peut penser que ce jeu de hasard a toutes les apparences d’un jeu équitable, le petit porteur engrangeant le même dividende ou subissant la même perte que l’institution financière la plus cossue.

Il n’en est rien. Là où le petit porteur va s’affoler d’une baisse et vendre à perte, l’investisseur institutionnel va être en mesure de laisser passer l’orage pour récupérer sa mise ultérieurement.

Le jeu de poker passe pour un jeu de voyous. C’est cependant un jeu passionnant s’il est équitable. Or il n’est équitable qu’entre joueurs de même niveau ayant convenu en début de partie de mettre chacun la même somme sur la table.

Au jeu de la spéculation, la retraitée qui vend une action n’influe en rien sur son cours. En revanche, la baisse provoquée par le gros joueur qui vend un million d’actions est immédiate. Tout se passe alors comme si la règle du jeu avait subitement changé en cours de partie : on ne peut plus parler d’un jeu équitable, ni même d’espérance, au sens mathématique du terme défini plus haut : la spéculation boursière est un jeu inéquitable.

Là encore, le gros joueur gagne et – statistiquement – c’est le petit qui perd. Lorsque la partie s’anime et qu’un gros coup a fait basculer le jeu, la panique s’empare des joueurs, les cours s’effondrent et les journalistes y vont de leur manchette habituelle : « Des milliards de dollars partis en fumée ».

Objection, Votre Honneur : ils ont simplement changé de poche. En effet, la Bourse, où les deux seuls joueurs sont les actionnaires et les entreprises (y compris leurs créditeurs et leurs débiteurs), est un jeu à somme nulle. On appelle « jeu à somme nulle » un jeu où le nombre de joueurs est fini et où le montant des sommes en jeu est fini, comme la partie de pile ou face ou la partie de poker entre amis et les quelques billets mis sur la table. Dans un tel jeu, si un joueur perd, il est évident qu’au moins un autre joueur gagne. On n’a jamais vu des dollars brûler.



De la Bourse à la politique.

Restons encore un moment à notre table de poker. Un ami cher vient de tout perdre, et comme on voudrait profiter encore de sa compagnie (et si possible encore un peu de son argent…), on va lui prêter de quoi « se refaire ». On le sait honnête : il rembourse toujours ses dettes de jeux. On va donc lui prêter suffisamment pour continuer à jouer, mais pas suffisamment pour qu’il se permette les meilleures enchères. Il a donc moins de chances de gagner que ses adversaires : il va s’endetter un peu plus.

À la table de poker qui nous intéresse, il n’y a aujourd’hui que deux joueurs : les nations, représentées par leurs gouvernements, et les institutions financières, qu’on appelait autrefois les capitalistes, mais qui préfèrent maintenant qu’on les appelle « le marché ».

Le premier joueur n’a plus la main, il est trop endetté. Pour continuer à jouer, les gouvernements sont contraints de voter chaque année un budget en déficit : pas de problème, le « marché » prête, et il prête volontiers. La spirale infernale est engagée, et la ruine inéluctable. Pour justifier ce budget en déficit, les ministres déclarent doctement que la croissance va tout régler. Or la croissance, ce sont d’autres enchères qui vont s’entasser sur la table de jeu, et l’on a vu que c’est le plus riche qui les ramasse. Le résultat le plus immédiat est que l’endettement des nations s’accroît. L’impôt sur le revenu des Français n’est aujourd’hui même plus suffisant pour régler ne serait-ce que les intérêts de la dette publique, ce qui n’empêche pas le ministre, jamais à court d’inepties, de vouloir le réduire encore.

Chaque année, le Parlement, censé représenter les citoyens, vote un budget en déficit de 4 à 5% (avoués). L’a-t-on mandaté pour cela ? Accepterait-on d’élire un député qui déclarerait à ses électeurs : « Chaque année je vais voter un budget qui hypothéquera environ 5% de vos biens et ceux de vos enfants » ? De l’aveu même d’un ministre, notre pays s’est ainsi endetté à hauteur de mille milliards d’euros, et chaque citoyen qui naît doit donc déjà 17.000 euros à l’État. Bien sûr, le chiffre est inférieur à la réalité, dans ce domaine la vérité est politiquement incorrecte. De plus, ce n’est pas auprès de l’État que les citoyens sont endettés, mais auprès du « marché ». On continue cependant d’élire des politiciens – de droite ou de gauche, peu importe – qui martèlent que la hausse du CAC40 va tout arranger, alors qu’elle ne fait qu’accroître lentement mais sûrement la ruine des citoyens.

L’autre joueur, c’est bien sûr « le marché », institutions financières et multinationales chaque jour plus énormes, et qui de surcroît se livrent entre elles à un jeu de massacre titanesque et permanent. Ces rachats des entreprises les unes par les autres obéit encore ici à cette même logique qui fait que le plus riche a le plus de chances de gagner : ces rachats et ventes en cascade ne constituent pas un jeu pervers auquel s’amuseraient les financiers, c’est une « nécessité vitale » à l’intérieur de cette spirale.

À la table de jeu (on utilise plutôt l’expression « réunion au sommet »), ce sont maintenant elles qui dictent les règles à l’autre joueur : les Banques Centrales et les Institutions financières internationales (FMI, etc.) ont commencé par exiger d’être indépendantes des pouvoirs publics et n’obéissent plus maintenant qu’à elles-mêmes. Ainsi à la table de jeu, les deux joueurs sont clairement indépendants, l’un édictant les règles que l’autre est sommé d’appliquer.

Il n’est évidemment pas question de plumer l’adversaire : la partie s’arrêterait et la possibilité de gain aussi. Pour que la partie continue, il faut comme au poker prêter à l’autre joueur, et l’on utilise la technique brillamment mise au point chez nous il y a quelques décennies par le Crédit Agricole : prêter au paysan à un taux lui évitant la faillite (la banque y perdrait de l’argent), mais suffisamment élevé pour qu’il ne puisse rembourser son prêt qu’à l’aide d’autres prêts renouvelés aussi longtemps qu’il est possible (car s’il arrive à rembourser son prêt, la banque perd un client).

Les gouvernants n’ont aujourd’hui plus d’autre choix que d’obéir aux règles fixées par le marché : privatiser, c’est à dire brader le patrimoine public au-dessous de sa valeur, au prix fixé par l’autre joueur. Accepter, sous menace de délocalisation, que telle grosse entreprise ne paie ni l’URSSAF ni l’électricité. Se résigner à voir les employés jetés à la rue par paquets de 10.000, au nom de la compétitivité. Supprimer tel ou tel service public sous prétexte de non rentabilité, tout en étant incapable de définir ce qu’est la rentabilité d’un service public, ou au contraire, dans la plus cynique incohérence, vendre telle entreprise de transport aérien, cette fois précisément parce qu’elle est rentable. Mettre en place par une simple ordonnance un nouveau « contrat de travail » qui n’en est que la négation et rend nul et non avenu tout ce qui avait été péniblement élaboré jusqu’ici. Combler, à marche forcée, et aux dépens des plus faibles, le « trou de la Sécu », ce trou grâce auquel depuis soixante ans des dizaines de millions de citoyens ont pu naître, se soigner et mourir dans la dignité, afin que, débarrassée de son « trou », la Sécu, dont le budget fait saliver plus d’un rapace, soit enfin vendable.

Les gouvernants, affirment, péremptoires et avec force effets de menton, qu’ils entendent que ce soit ainsi. Ils ne sont que marionnettes grotesques. Il y a quinze ans, en URSS, les choses avaient été plus discrètes et plus rapides : il avait suffi d’une seule nuit pour que tout le pays, fruit de soixante-dix années de larmes et de sang, fût bradé aux prédateurs de la planète.

Les « experts » affirment qu’en dessous d’un seuil de croissance donné, l’économie s’effondre. C’est oublier une autre loi simple et évidente : c’est précisément lorsqu’une économie ne survit qu’en s’accroissant qu’elle est mathématiquement instable et vouée à s’effondrer. On ne peut pas survivre en bétonnant chaque année 3% de terres en plus, en brûlant chaque année 3% de pétrole de plus (et dans le même temps déclarer qu’on va limiter les rejets dans l’atmosphère !). Ce ne sont pas les citoyens qui réclament plus de croissance, plus de productivité : celle-ci est exigée par les mécanismes de rémunération du « marché », mais elle conduit inéluctablement au désastre. C’est en examinant comment une nation vit en équilibre avec les autres nations, ou comment une civilisation vit en équilibre avec son environnement qu’on peut prédire ses chances de survie.

On juge surtout une civilisation à la manière dont elle traite les plus faibles : les femmes, les handicapés, les vieux, les enfants, les arbres, les animaux, et non pas les traders et autres golden boys.  On a compris que sans limitation des mises, le prince saoudien ne se contenterait plus de jouer à la roulette : en une soirée il coulerait le casino, devenu moins riche que lui. Sans délimitation du terrain de jeu, sans règles strictes non pas édictées par quelque compassion envers les plus fragiles, mais découlant du simple bon sens, le système actuel n’est pas viable. L’accroissement des inégalités entre les nations, et à l’intérieur des nations entre les citoyens, n’est pas une fatalité que l’homme devrait subir sans pouvoir y remédier, mais résulte du fait d'avoir transformé le marché en un vaste tripot. La loi des jeux de hasard ne devrait pas régir l'économie.

Les gouvernements sont mandatés pour édicter ces lois simples et les faire respecter.

Comme il n’est pas possible de limiter le montant des transactions, il est indispensable de freiner l’accrois­se­ment des inégalités par la redistribution : taxation des transactions financières (proposition du Dr Tobin) et imposition progressive des plus-values. Mais force est de constater qu’ils font exactement le contraire, qu’ils soient de gauche, de droite, du centre ou d’ailleurs.

Chacun sait que la TVA, impôt (sur les dépenses) qui a l’avantage d’être « indolore » et représente 45% des recettes de l’État, est un impôt inéquitable, puisqu’il est à taux fixe (19,6%) et frappe donc plus durement ceux qui ont le moins de ressources. Symétriquement, et pour la même raison, un taux fixe d’imposition (sur les revenus) est inéquitable. C’est déjà le cas dans certains pays. On ne plus prétendre freiner les inégalités : mathématiquement on les accélère. 

Les gouvernements portent de ce fait une très lourde responsabilité face à l’avenir, car ils vont contraindre les citoyens à prendre eux-mêmes leur destin en main. La politique actuellement affichée de « L’État pour personne et les Restos du Cœur pour tous » (aux États-Unis : l’Armée du Salut et autres charities) peut faire illusion et maintenir pour un temps la paix sociale, mais elle n’est que la négation de la Politique, au sens grec du terme. L’histoire enseigne qu’au delà de certaines limites, impossibles à estimer, les citoyens ne se laissent plus gruger sans réagir. Elle enseigne aussi que les conflits sont imprévisibles, et une fois déclenchés, impossibles à maîtriser.

Claude Plathey, informaticien retraité.


Note  (Agence Reuter)
, lundi 10 octobre 2005 :

Le prix Nobel d'économie 2005 a été attribué à l'Américain Thomas Schelling et à l'Israélo-américain Robert Aumann pour leur théorie de "décision interactive" ou "théorie des jeux".

Leurs études ont trouvé des applications dans des domaines aussi divers que la sécurité, la formation des prix sur les marchés, les négociations politiques et économiques.

La théorie des jeux a été amorcée dans des textes datant de la fin des années 1940. Thomas Schelling, aujourd'hui âgé de 84 ans, l'a utilisée pendant la Guerre froide pour expliquer des phénomènes tels que la sécurité mondiale ou la course aux armements. Travaillant sur ses idées, Robert Aumann, 75 ans, s'est servi de l'analyse mathématique pour souligner les différentes options dont disposait un pays contre un ennemi pendant les périodes de conflit.

Remarque : La théorie des jeux ne date pas des années 1940, mais de la fin du XVIII° siècle.


Bourse, publicité et financement privé des partis :  y a-t-il une vie respectable
après avoir vendu son âme au diable ?
(25 octobre 2005)
(Lien)

L’expression « vendre son âme au diable » écorche forcément la bouche d’un athée, mais l’image philosophique est si forte qu’elle s’impose pourtant :

Accepter la publicité dans son journal, sa radio, sa télé, n’est-ce pas vendre son âme au diable, programmer la perte de son indépendance, un bâillon sur sa liberté d‘informer, sur sa liberté de ton et, finalement, au plus profond de soi, l’abandon de son esprit critique ?

N’est-ce pas accepter de devenir un pantin ? Au mépris des plus importantes valeurs humaines.

Accepter de la bourse le financement de son entreprise, n’est-ce pas vendre son âme au diable, programmer la perte de son indépendance, un bâillon sur sa liberté de choix d’investissement et, finalement, l’abandon du respect des hommes avec qui l’on doit pourtant collaborer pour réussir ?

N’est-ce pas accepter de devenir un pantin ? Au mépris des plus importantes valeurs humaines.

Aller chercher pour son parti un financement politique par des entreprises, n’est-ce pas vendre son âme au diable, programmer la perte de son indépendance, de sa liberté de contraindre les plus forts pour protéger les plus faibles et, finalement, de sa capacité à représenter les individus ?

N’est-ce pas accepter de devenir un pantin ? Au mépris des plus importantes valeurs humaines.

Quel est le bilan coûts avantages de la bourse, de la publicité et du financement privé des partis ?

Comment se débarrasser de la bourse, de la publicité et du financement privé des partis ?

Est-ce que la gangrène n’est pas déjà trop avancée pour se soigner ?

L’aliénation consentie à l’argent est sans doute un rouage essentiel de la servitude volontaire.

Si on continue à s’en foutre, on va bientôt voir revenir la police politique et la torture dans les prisons où personne ne vous entend crier.

Ne souriez pas, on y est déjà aux États-Unis, (« grande nation démocratique, pays de la Liberté, notre sauveur » si on en croit nos éditorialistes, complices de fait) alors que même la prison y est aujourd’hui privatisée, que la torture y est délocalisée (les USA envoient torturer leurs terroristes présumés en Égypte ou dans des contrées où il y a moins de gêneurs droitdel’hommistes) et la protection des individus y est en chute libre avec un « Patriot Act » proprement terrifiant à qui nos brillants éditorialistes n’accordent leur précieuse attention que le temps d’un éditorial : mais après l’éditorial, les terroristes présumés de Guantanamo, parmi lesquels, évidemment, il y a des innocents, emprisonnés sans jugement et sans défense dans le plus grand secret, après l’éditorial complice de fait, donc, ces innocents continuent à crier sans que personne ne les entende.

Il faut entendre les nombreux américains qui protestent avec la dernière énergie sur ce que le culte du pognon fait de leur démocratie. Ne pas confondre les américains avec l’administration américaine corrompue et son système de propagande médiatique de mieux en mieux rodé pour institutionnaliser la servitude volontaire.

Il y très peu de pays (et d’époques) où les humains se sont mis à l’abri de la violence arbitraire. Nous avons cette chance, mais c’est très fragile et nous sommes en train de reculer rapidement vers une société sécuritaire qui risque fort d’écrabouiller les individus un tant soit peu hors norme.

Quand j’entends le Ministre de l’intérieur durcir le ton et prôner la sécurité à tout crin, et les "médias de la peur" qui lui servent de rabatteurs pour que nous acceptions, terrorisés, de perdre nos libertés individuelles, je sens bien que l’exemple américain est emblématique d’une dérive dont nos institutions ne nous protègent pas.  Nos institutions devraient, autant que possible, interdire à l’argent et au pouvoir de corrompre nos représentants.

Pour écrire des institutions qui assurent un contrôle réel des représentants, il est vital qu’elles ne soient précisément pas écrites par ces représentants eux-mêmes. La seule façon d’écrire des institutions vraiment protectrices des individus est de les écrire nous-mêmes, en mettant de côté pour quelque temps les professionnels de la politique, le temps de fixer les règles fondamentales.

 


Faut-il ou pas limiter le droit de propriété (aujourd’hui « inviolable et sacré »),  pour respecter la valeur du travail des salariés dans les entreprises ? (20 octobre) (Lien)

Une nouvelle version du document « Principes protecteurs d’une bonne Constitution… » est disponible. Je viens surtout de rédiger un petit texte à propos du droit de propriété dans nos institutions.  Voici le texte ajouté (pages 18 et 19).   Qu’en pensez-vous ?   Je déraille ?    :o)

Une sorte de pensée unique nous apprend dès l’enfance, comme on inculque un catéchisme, que le droit de propriété est fondateur, intouchable.  À tel point que la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 le pose en droit "naturel et imprescriptible" (article 2), puis "inviolable et sacré" (article 17).

C’est pourtant peut-être une erreur grave dans la hiérarchie des valeurs.

Bien sûr, le droit de propriété est important, mais en le plaçant avant même le bonheur des hommes, de tous les hommes, avant même le respect des autres, le respect de la non douleur des autres, alors oui, on admet, on organise, on programme le malheur des hommes, le malheur du plus grand nombre, y compris d’ailleurs celui de la plupart des propriétaires eux-mêmes qui, souvent, sont aussi des travailleurs.

Pour donner une très précieuse liberté à tous, on a su la tempérer : on n’est pas libre de faire n’importe quoi, on n’est pas libre de tuer, pas libre de voler, on n’est pas libre de tricher, violenter, etc.  Ce sont ces limites qui garantissent au plus grand nombre une certaine liberté, une liberté raisonnable.

Il faudrait tempérer le droit de propriété, comme on a su tempérer la liberté, pour assurer à tous un droit de propriété raisonnable, au lieu d’un droit de propriété de barbare, complètement immoral, laissant le champ libre à tous les égoïsmes les plus primaires.

Je ne suis pourtant ni collectiviste, ni révolutionnaire :o)

Le Conseil d’État lui-même admet dans sa jurisprudence des « limitations légitimes » au droit de propriété, droit important certes, mais qui ne mérite sûrement pas une prééminence absolue sur toutes nos valeurs, sauf évidemment pour ceux qui possèdent déjà beaucoup et qui ne veulent rien perdre.

Comme tout le monde, je tiens au droit de propriété, à la fois comme un excellent moteur de motivation qui incite à l’effort, et surtout comme une garantie de tranquillité pour l’avenir : quand un individu est propriétaire, il peut envisager l’avenir, le sien et celui de sa famille, de façon sereine, à l’abri de l’éviction. Il a l’esprit plus libre pour philosopher et s’élever :o)

Mais je tiens plus encore au bonheur des hommes, celui pour lequel le droit de propriété n’est qu’une condition, pas un droit supérieur.

On va me répondre que "l’enfer est pavé de bonnes intentions" et que les pires dictatures se sont appuyées idéologiquement sur le projet fou du bonheur pour tous, on me dira qu’il est dangereux de vouloir le bonheur des gens à leur place, que l’idée du bonheur est personnelle…

Mais ce rappel des échecs passés ne fait pas la démonstration qu’il faut cesser de chercher les conditions du bonheur du plus grand nombre.

À l’évidence, ce n’est pas parce qu’on a échoué jusqu’à présent qu’on échouera toujours.

Dans ma réflexion sur des institutions vraiment protectrices des individus, je cherche donc le principe cardinal, celui que tout le monde s’accorderait à placer au-dessus du droit de propriété et qui dominerait ce dernier quand il le faut.

Ce principe idéal n’est pas le droit à la vie car la vie peut être une vie de souffrances, comme on le voit partout, pour le plus grand profit des propriétaires jouissant d’un pouvoir exorbitant. À quoi bon la vie si c’est une vie en larmes ? On voit bien que ce droit à la vie, déjà souvent reconnu et protégé dans les institutions "démocratiques", ne fait pas le poids devant un droit de propriété déchaîné.

Non, ce qui compte absolument, le vrai principe "solaire" qui devrait surmonter tous les autres, celui dont la force affirmée et contrôlée règlerait tous les problèmes essentiels de la planète, cette règle de vie à mettre en première place parce qu’elle entraîne avec elle toutes les vertus, c’est le respect.

Respect de l’autre comme une règle absolue et universelle, intemporelle et sans exception, car ce respect rendrait possible la précieuse ataraxie (absence de souffrances, objectif de l’épicurisme si bien expliqué et défendu par Michel Onfray :o)

Concrètement et par exemple, la propriété placée en valeur première, supérieure et incontestable, donne aux propriétaires des entreprises une force aussi totale qu’injuste.

Les propriétaires des entreprises ont tous les pouvoirs et disposent donc librement de l’outil de travail des autres. Et les malheureux salariés ne peuvent rien dire parce que l’importance cardinale de leur travail n’est proclamée ni défendue sérieusement nulle part.

La production de richesse exige du capital, certes, mais aussi beaucoup de travail !
Pourquoi seule la propriété du capital donne-t-elle du pouvoir dans l’entreprise ?

Probablement parce que ce sont des propriétaires qui écrivent le droit depuis longtemps.

Pour l’instant, on donne 100% du pouvoir aux personnes qui ne détiennent que 50% des moyens indispensables à la création de richesse (facteurs de production).

Je trouve profondément injuste, et je ne suis pas le seul, que des entreprises soient vendues au plus offrant sans que les salariés (à qui l’entreprise doit pourtant beaucoup de sa valeur) n’aient rien à dire, traités vraiment comme des pions, comme des objets.

Le pouvoir dans les entreprises (celui de vendre, notamment) devrait être partagé (50-50 ? 60-40 ?) entre les propriétaires (facteur capital) et les salariés (facteur travail).

Ce droit de propriété, rendu expressément prépondérant dans nos institutions et écrasant dans les rapports humains, a ouvert la boîte de Pandore d’où s’est échappé la concentration du capital qui produit les monstres que sont les multinationales, "personnes" morales psychopathes qui nous alièneront ou tueront tous (même les plus riches !) si nous les laissons faire.

De la boîte de Pandore ouverte par la priorité du droit de propriété sur nos principales valeurs, sont également sortis l’héritage et la confiscation progressive, génération après génération, des richesses par quelques familles de privilégiés, parmi des peuples eux aussi privilégiés, qui accumulent sans mérite ni limite, au mépris de la plus élémentaire justice sur la Terre.

On va dire que je suis un communiste, un collectiviste, et que ce sont là de vieilles rengaines, mais ce n’est pas du tout ça : je tiens au droit de propriété et je redoute un État tout puissant comme on craint la peste, ma quête de contre-pouvoirs systématiques en est la trace.

Mais qu’est-ce qui nous oblige à choisir entre deux extrêmes mortifères ?           
Est-ce qu’on est condamnés à choisir entre la négation du droit de propriété et la religion du droit de propriété, aussi malheurogènes (sources de malheur :o) l’une que l’autre ?        
Ne pourrait-on pas chercher une voie médiane, intelligente, respectueuse ?

L’obligation de respect comme règle de vie supérieure à toute autre semble donc capable d’en­traîner bien d’autres vertus derrière elle.  Mais en plus, on peut la placer en tête parce qu’elle semble ne faire courir aucun risque d’excès, ce qu’on ne peut pas dire de la propriété, de la liberté ou de l’égalité.

Avec le respect comme valeur cardinale, pas de dérive oppressive possible.

 

On réalise donc ici l’importance de l’ordre dans lequel on place nos valeurs, nos principes : de la même façon que l’égalité entraîne la liberté (et pas l’inverse !), le droit de propriété, comme la liberté, devrait céder le pas devant le respect.

Je propose de remplacer « Liberté, Égalité, Fraternité » par « Fraternité, Égalité, Liberté ».
Ça change tout, non ?

 

Pour formaliser cette nécessaire pondération du droit de propriété, on pourrait peut-être utiliser le droit au travail, (celui dont le TCE voulait nous priver en le remplaçant par le droit de chercher du travail), droit au travail qu’il faut peut-être porter au pinacle, aux côtés du droit de propriété, à égalité d’im­portance pour permettre d’imposer dans l’entreprise un partage des pouvoirs entre tous ceux qui participent à la création de richesse, propriétaires et salariés (notez que je n’ai donc pas du tout envisagé l’imbuvable dictature du prolétariat qui serait évidemment un excès inverse à celui dénoncé).

Indépendamment de ce qui serait décidé au niveau institutionnel, le pouvoir exécutif de l’entreprise, comme aujourd’hui, pourrait continuer à être délégué à des managers, mais ceux-ci, au lieu de diriger l’entreprise sous le seul contrôle des propriétaires, devraient être naturellement sous le contrôle des propriétaires et des salariés, un peu comme dans les SCOOP.

Si, pour la première fois, on pose enfin cette vieille question directement aux citoyens modernes, on peut voir apparaître une autre norme supérieure que celle qu’on connaît depuis la nuit des temps où seuls des propriétaires ont écrit les lois :o)    C’est sans doute dangereux… mais pour qui ? :o) 

J’ai laissé cette proposition de limitation institutionnelle du droit de propriété dans la dernière partie, celle des principes qu’on ne peut pas proposer à tous les peuples sans déclencher une polémique.

Dans ce document, je cherche en effet les principes qui mettront vraiment tout le monde d’accord (sans polémique) pour nous protéger avec des institutions vraiment faites pour tous et pas pour une caste à part.

 


Le pire ennemi du profit, c’est le plein emploi (19-20 octobre 2005) (Lien)

Extraits d’une émission de radio très intéressante : « Là-bas si j’y suis » du 15 septembre 2005,
« Les chiffres du chômage »,
http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=737 :

François Chevalier (stratégiste chez VP Finances) :           
« Il faut savoir que le pire ennemi des profits, c’est le plein emploi, or on est loin du plein emploi. »

Thomas Coutrot (économiste) : « C’est une vieille histoire, le chômage a toujours été employé, dans les économies capitalistes, par les entreprises, par les employeurs, pour calmer les revendications des salariés qui sont en place en leur montrant la file d’attente à la porte de l’entreprise et en leur disant "si vous n’êtes pas content, il y en a d’autres qui prendront volontiers votre place", ça c’est aussi vieux que l’histoire du capitalisme. Ça a trouvé des nouveaux noms : aujourd’hui les économistes aiment bien parler de "chômage d’équilibre"… Selon les économistes libéraux, c’est le taux de chômage qui est nécessaire pour calmer les revendications et empêcher les hausses de salaires et donc empêcher l’inflation…

Un certain nombre d’experts de l’OCDE estiment que le chômage d’équilibre est autour de 8 à 9 %, autrement dit il n’est pas souhaitable, dans l’état actuel des choses en France, que le chômage baisse en dessous de ces niveaux, 8-9 %, parce que cela risquerait de réveiller les revendications et donc de réveiller le démon de l’inflation, qui est quelque chose dont les investisseurs financiers ont horreur.

Sauf si on arrive, comme ça a été le cas aux États-Unis dans les années 80, à casser suffisamment les organisations syndicales et les conventions collectives pour que, même à 4% de chômage, les salariés ne soient pas en mesure de revendiquer des hausses de salaires. En France, on n’y est pas encore… »

Laurence Parisot (présidente du MEDEF) : « Je pense que le chômage est une véritable honte, parce que ça fait 25 ans que notre pays bat des records de taux de chômage, il faut en France libérer, libéraliser, le marché du travail. Notre conception en matière d’offre et de demande de travail est beaucoup trop rigide, on n’est pas adaptés à l’économie d’aujourd’hui qui est une économie à laquelle il faut réagir rapidement, et il faut que l’emploi s’adapte à l’activité et non pas l’inverse. »

Quand l’hypocrisie le dispute à l’indécence…

Nos vieux "représentants" professionnels jurent qu’ils luttent pour l’emploi, ils clament que le chômage est leur cible principale. On découvre sur cette affaire centrale du chômage que ce sont tous des menteurs et que nous n’avons plus de prise sur eux car c’est toute la caste, de gauche à droite, corrompue par le pouvoir trop longtemps exercé, qui se protège contre les initiatives citoyennes : c’est à peine croyable, en douce, ils respectent tous strictement un objectif minimum de chômage que leur suggèrent les plus grandes entreprises privées pour maintenir un bon taux de profit, et la lutte que nos soi-disant "représentants" mènent "pour l’emploi" est en fait une lutte "pour la précarité de l’emploi", pour remplacer, via le chômage, un maximum d’emplois stables par des emplois précaires de substitution.

En douce et en vitesse : la précarisation absolue du CNE a été imposée par ordonnances, c’est-à-dire qu’un exécutif tyrannique écrit et exécute le droit tout seul, sans contrôle parlementaire, et en août, pendant que tout le monde est en vacances. Ces gens sont des bandits !

Avec la complicité d’un groupe stratégique de journalistes, éditorialistes néo-libéraux, qui ont investi les rédactions et qui martèlent tous les jours, sans contradicteur, que « c’est inéluctable ».

Cette précarité touche aujourd’hui directement près de la moitié des salariés en France et elle ne cesse de se généraliser.  Mais quand va-t-on enfin se mettre en travers ?

Sommes-nous capables de résister ? Pour l’instant non, car notre "démocratie" n’est encore qu’une supercherie sur bien des aspects. Pas tous les aspects, bien sûr, car la liberté de s’exprimer et les élections ne sont pas rien. Mais elles ne sont qu’une étape vers une authentique démocratie.

Espérons que les responsables ne sont pas "tous pourris" et que certains élus et certains journalistes auront le courage de nous aider à résister à la régression politique voulue par les forces économiques.  Il est important que les institutions donnent aux citoyens le pouvoir de se défendre quand la situation est grave.

 


Turpitudes politiciennes travesties au PS (18 octobre 2005) (Lien)

Après avoir lu l’article « Comment les amis de Hollande truquent le congrès », dans Marianne du 17 septembre 2005, on est écoeuré et on comprend qu’il est temps de renvoyer tous ces vieux politiciens, pervertis par leur professionnalisme de trop longue date, à une vie active normale et de les remplacer tous par des jeunes gens : http://non.au.liberalisme.tripod.com/.

Je reçois vos mails dépités, et je dois bien reconnaître que cette malhonnêteté des éléphants du PS est à pleurer… Mais comment faire ? Si on continue à les élire, on a exactement ce qu’on mérite.

C’est pourtant simple : il faut refuser d’élire un des ceux qui voulaient nous forcer à dire oui au TCE, c’est tout. Ils ne nous défendront jamais contre les prédateurs néo-libéraux, ils ne veulent pas d’une démocratie réelle qui menacerait leur pouvoir par des contre-pouvoirs, maintenant on le sait.

Ils peuvent truander autant qu’ils veulent leurs primaires internes bidon, pour ma part, je considère maintenant les apparatchiks ouistes du PS comme des néo-libéraux travestis, et des adversaires d’une démocratie authentique.  Au moins, ce débat aura montré au grand jour toutes ces turpitudes.

 

Bombes à retardement, choisies et fixées par nos propres "représentants" (16 octobre)

Les nouvelles qui circulent sur le net à propos de la sécu sont très inquiétantes. Voici quelques liens qui montrent que nos soi-disant "représentants", qu’ils soient de gauche ou de droite, ceux que nous avons élus pour nous protéger, ceux qui devraient défendre nos intérêts, se préoccupent tous plutôt de brader nos services publics à leurs copains du secteur privé.

C’est à se demander par qui ils sont payés.

« Un article paru dans Le Parisien du 15 novembre 2004 : '"Sécu : Douste et le monopole. Philippe Douste-Blazy serait parfaitement informé de la fin programmée du monopole de la Sécu.  Interrogé par le docteur Esquirol sur la reconnaissance, par le ministère de la Santé, de l'abrogation des monopoles en matière de protection sociale, afin de se conformer à l'Europe, un de ses conseillers a eu le 29 octobre, une réponse limpide : "Le ministère est parfaitement au courant, mais, pour le moment, le ministre nous a dit que ce serait un suicide politique d'annoncer une chose pareille.  Si le ministre annonçait la fin du monopole de la Sécurité Sociale, cela soulèverait, dans l'opinion, une trop grosse vague de protestations." »

La suite, très intéressante, est à lire là : http://lille.indymedia.org/imprime_article.php3?id_article=1535.

Vous avez besoin d’une confirmation ?
Lisez « La fin du monopole de la Sécu ? »
(France Info, 29 avril 2005 - La chronique de François de Witt) :  

http://www.conscience-politique.org/cgi-bin/gestionnews/news2.cgi?id=dewittsecu : hypocrisie d’un appel au débat quand tout est déjà décidé…

L’abandon de la sécu, sans débat, au profit des grandes compagnies privées d’assurance est une véritable trahison de l’idéal républicain. Qui avait annoncé honnêtement cette félonie dans son programme politique ? Qui ose même avouer que la trahison a déjà eu lieu ? Personne. Le néolibéralisme avance masqué, et nous, bonnes poires, on fait confiance à nos soi-disant "représentants".

Tous ces professionnels du pouvoir, aussi bien les "socialistes" (les guillemets servent de pincettes) que les UMP, sont constamment au contact des hommes d’affaires, qui savent évidemment bien choisir leurs "amis", et on constate partout que c’est plus l’intérêt des puissants qui guide les décisions politiques que l’intérêt général.

Il est urgent que nos institutions déprofessionnalisent les responsables politiques : il faut limiter (interdire ?) le renouvellement des mandats.


À propos de la Sécu, Jean-Jacques Chavigné vient d’écrire un article excellent :   
« Sauver notre protection sociale en urgence ! »…    Extrait :

La loi Douste Blazy du 13 août 2004  est une bombe à retardement contre notre assurance maladie.

Cette bombe à retardement comporte un premier élément : une profonde modification des structures de direction et de gestion de l’assurance maladie.

Les Conseils d’Administration (où les représentants des salariés sont minoritaires) sont dépossédés des pouvoirs que leur avait laissés le paritarisme imposé par la droite. Ces pouvoirs sont maintenant concentrés entre les mains du directeur général de l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie (UNCAM). Ce directeur général a notamment le pouvoir de fixer le " périmètre des soins remboursés ". Il pourra donc, ainsi, en fonction des rapports de forces sociaux et politiques diminuer les soins à la charge de l’assurance maladie et augmenter la part des assurances complémentaires. C’est le modèle américain que la droite veut nous imposer. Qu’importe si le dernier classement (en 2000) de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) faisait figurer au premier rang le système de santé français et au 37ème rang celui des USA. Ce qui est déterminant pour la droite, c’est la volonté du MEDEF qui ne veut pas entendre parler d’augmentation des "charges" patronales mais veut, au contraire, ouvrir largement le champ de l’assurance maladie aux assurances privées.

Le deuxième élément, c’est le maintien du déficit qui, au moment où la droite le jugera opportun, fournira l’alibi nécessaire à la diminution du "périmètre des soins" remboursés par l’assurance-maladie. Les mesures prises par Douste Blazy en 2004 ne permettraient, en effet, de revenir à un équilibre des comptes de l’assu­rance maladie en 2007 que si "la responsabilisation des patients" et les "bonnes pratiques médicales" permettaient une économie de 7 milliards d’euros annuels.

Mais, la "responsabilisation des patients" ne repose sur aucune expérience concrète. Au contraire, la réalité sociale nous fournit deux exemples tangibles qui prouvent exactement le contraire.

Les USA tout d’abord où les dépenses de santé laissées à la charge des ménages représentent 22 % des dépenses de santé et celles liées au paiement de primes aux assurances privées à 33 % de ces mêmes dépenses contre respectivement 13 % et 11 % en France. Si l’on en croit les théoriciens de la "responsabilisation des patients" les Américains, doublement "responsabilisés" par les sommes restant à leur charge et par l’augmen­tation des primes d’assurance, devraient donc dépenser beaucoup moins pour leur santé que les Français. C’est exactement l’inverse qui se produit : plus de 14 % du PIB des États-Unis sont consacrés aux dépenses de Santé contre 9,6 % en France.

Le deuxième exemple est celui des pays scandinaves où les dépenses de santé sont de l’ordre de 8 % de leurs PIB alors que la plus grande partie des soins est gratuite. Il est vrai que dans ces pays, la prévention a une toute autre dimension que dans notre pays.

(…) La bombe à retardement est donc en place. Elle attend pour exploser que le rapport de forces politique et social donne le champ libre à la droite. Après les trois raclées électorales subies par cette dernière et la proximité de la présidentielle, l’actuel directeur général de l’UNCAM (ancien directeur de cabinet de Douste-Blazy) fait profil bas. Il attend, à l’évidence, une victoire de la droite en 2007 pour accélérer la diminution du " périmètre des soins " remboursé par l’assurance maladie et faire la part encore plus belle aux assurances complémentaires.

Lire ici la suite de ce très bon article : http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2772

Ce qui se passe sur le front de l’AGCS, cet exemple académique de trahison des populations par leurs représentants politiques, est édifiant : lire tous les jours http://www.hors-agcs.org/agcs/.

Lisez aussi « Mon parti politique est-il en conformité avec les règles de l’AGCS ? »,                 
par René BALME et Laurence Kalafatides.   Extrait :

(…) « Plus proche de chez nous, privatisation de l’ANPE, de la Poste, de la SNCF, d’EDF-GDF, d’Air France, de France Télécom... et tout récemment de la SNCM que Monsieur De Villepin a décidé de brader au privé à 10 % de sa valeur réelle. Tout cela est inscrit en filigrane dans l’AGCS. Les ministres ne faisant que suivre ou anticiper, selon le cas, les résultats des négociations. Faut-il rappeler que rien, aujourd’hui - hormis les règles de l’OMC et celles, à venir, de l’AGCS - ne justifie quelque privatisation que ce soit ou quelque ouverture du capital d’une entreprise publique.

L’OMC, on le voit, ne porte pas seule la responsabilité de cette politique de la terre brûlée. Nos gouvernements sont largement complices, et chaque nouvelle négociation nous dépouille un peu plus de notre héritage, que sont les services publics et les acquis sociaux. L’AGCS est un vol à main armée de stylo.

L’AGCS ou le principe d’irréversibilité

En 1997, le Sénateur Maurice Lombard faisait remarquer que « la signature de l’AGCS entraîne une nécessaire déréglementation des monopoles publics ». Monsieur Lombard a simplement oublié de préciser qu’avec l’AGCS, ces « nécessaires déréglementations » sont irréversibles. Autrement dit un futur gouvernement qui voudrait remettre ces services sous forme de monopole public n’en aurait pas le droit, sauf a dédommager chacun des 149 autres pays membre de l’OMC qui en ferait la demande. Le budget de la nation n’y suffirait pas !

Les très nombreux candidats qui d’ores et déjà se bousculent au portillon de l’Élysée devraient s’épargner du sang et de la sueur. Si les négociations en cours à l’OMC aboutissent fin 2006 comme le souhaite Pascal Lamy, alors pour les prochaines élections, nous auront droit à un programme unique. Quelque soit la couleur politique du candidat, son programme électoral tiendra en une phrase : « Les règles de l’OMC, TOUTES les règles de l’OMC, RIEN QUE les règles de l’OMC ».

Les fétichistes de la globalisation rétorqueront que l’OMC ne s’occupe que de commerce et que les gouvernements sont libres de mener les politiques qu’ils souhaitent. Ceux là seraient bien inspirés de se souvenir des propos de Mr Supachai, ex directeur général de l’OMC, « Nous ne devons pas oublier que l’OMC a pour rôle d’influencer les politiques - et l’administration des politiques- autant des grands que des petits pays ».

L’AGCS et la privatisation de la politique ?

Encore aujourd’hui, nos candidats, présents, déclarés et à venir (présidence, assemblée nationale, région, département, mairie...) ignorent jusqu’à quel point l’OMC « influence » les politiques.   Il faut lire en détail la nomenclature de l’AGCS, c’est à dire la liste des services soumis à l’accord, pour mesurer l’ampleur des dégâts.    (…)          Lire la suite là : http://www.oulala.net/Portail/article.php3?id_article=1946...

On se demande si ce déclin programmé de la démocratie va nous laisser inertes jusqu’au bout ou bien si on va enfin réussir à s’arracher à notre confiante et paresseuse mollesse.

Au passage, tout ça ne date pas d’hier. Je vous conseille aussi cet article du Monde diplomatique d’août 2005 : « Karl Kraus, contre l’empire de la bêtise », un appel à résister signé Alain Acardo  (on ne mâchait pas ses mots, à l’époque :o)    Extraits :

Les médias disposent des moyens d’entretenir l’illusion d’une équivalence entre liberté et liberté de la presse, alors que cette dernière signifie surtout liberté des industriels qui possèdent la presse.

Sous l’apparence du « débat public », les journalistes dominants ont réussi à imposer leurs normes à des militants et à des intellectuels.

Le satiriste Karl Kraus fustigeait déjà ces formes de « bêtise » dans les années 1930.

(…) Se prostituer à l’ordre établi

Parmi les différentes catégories intellectuelles qui, de plus ou moins bonne foi, se complaisaient à prendre la nuit pour le jour, et travaillaient à croire et à faire croire que l’ordre nouveau nazi était, sinon toujours absolument irréprochable, du moins contrôlable, amendable, et donc acceptable, il y en avait deux en particulier qui fournissaient une cible de choix à Kraus : les partisans de la social-démocratie et les journalistes, chez qui cécité et surdité au réel composent une forme de bêtise proche de l’autisme.

L’aptitude des sociaux-démocrates à emboîter le pas aux nationalistes et bellicistes lors de la première guerre mondiale avait édifié Kraus sur leur inaptitude politique et morale à faire front. Où trouveraient-ils la force de résister, demandait-il, « alors que chaque fibre de leur être incline à pactiser » avec le monde comme il va ? Aussi ne les croyait-il pas en mesure de s’opposer à la barbarie montante. Pour Kraus, l’essence même de la « bêtise » social-démocrate, c’était le réformisme de principe, l’illusion de croire qu’on peut dîner avec le Diable, le refus systématique de l’affrontement, la volonté forcenée d’intégration, le désir éperdu d’être bienséant, de « mener une vie bien tranquille dans une jolie petite opposition sécurisante », et l’irrémédiable naïveté de penser que les bandits d’en face allaient respecter ces beaux sentiments et être assez raisonnables pour entendre raison.

Si on peut dire aujourd’hui que les partis sociaux-démocrates et ceux qu’ils influencent n’ont pas su tirer de l’expérience d’un siècle d’histoire d’autre enseignement que celui d’un acquiescement encore plus délibéré à la dictature du « réel » (ennoblie de nos jours en « logique de marché »), que dire alors de l’activité de la presse et de ses journalistes, de cette « journaille libérale » pour laquelle Kraus éprouvait une exécration à la mesure du rôle essentiel qu’elle jouait dans l’entreprise d’abrutissement généralisé des populations ?

Une grande partie du travail de Kraus, pendant des lustres, a consisté à lire attentivement la presse de son époque et à en démonter savamment, méticuleusement, le discours, pour en montrer toute l’imposture, à partir « de l’usage qu’elle fait du langage, de la déformation du sens et de la valeur, de la façon dont sont vidés et déshonorés tout concept et tout contenu ». À ses yeux, le penchant naturel de la presse était de se prostituer à l’ordre établi. Il prenait soin d’ailleurs de préciser : « Je mets la fille publique, du point de vue éthique, au-dessus de l’éditorialiste libéral et je tiens l’entremetteuse pour moins punissable que l’éditeur de journal. »

Sa critique s’adressait alors essentiellement à la presse écrite. Il n’aurait rien à rabattre de sa sévérité aujourd’hui, bien au contraire. Tout au plus, compte tenu de l’évolution sociologique de ce secteur, de sa croissance explosive, de la concentration des titres, stations et chaînes entre les mains d’un petit nombre de groupes capitalistes, admettrait-il peut-être de faire une distinction entre la caste dirigeante et éditorialisante du monde journalistique, quasi tout entière acquise à l’économie libérale et au maintien de l’ordre idéologique, et l’armée des simples exécutants, dont beaucoup connaissent les affres de la précarité et dont quelques-uns se battent courageusement, seuls ou avec leurs syndicats, contre l’arbitraire patronal privé ou public et contre la tendance, plus prononcée que jamais, à la prostitution de la presse au pouvoir économico-politique de l’argent. (…)

La suite : http://www.monde-diplomatique.fr/2005/08/ACCARDO/12409

Le style de l’époque était, disons… direct.  Mais au moins, on appelait un chat un chat.

Les gens qui nous conduisent à l’AGCS comme on conduit les veaux à l’abattoir, via l’OMC, ne méritent pas d’être réélus : ils trahissent leurs électeurs.  Que des millionnaires votent pour ces politiques (UMP+PS=UMPS) est cohérent, mais que des gens normaux, salariés, employés et cadres, votent ainsi et cautionnent cette politique de caste richissime, c’est incroyable. J’y vois une totale absence de contrôle : on fait complètement confiance à nos représentants, on ne prend pas la peine de lire les plus radicales critiques des politiques menées, j’en sais quelque chose, j’étais encore comme ça il y a moins d’un an, conditionné par le martèlement quotidien de la pensée unique…

Maintenant que je me méfie des "grands" journaux, du "7-9" de France-Inter et de la télé, je me réveille.

 

Le NAIRU, ça réveille !  Notre peur est programmée par nos "représentants" (14 octobre)

Tous les citoyens qui vivent de leur travail, et pas d’une rente, tous ceux qui se moquent pas mal d’une inflation modérée parce qu’ils ne possèdent rien, ou si peu, mais qui se préoccupent prioritairement du chômage parce que, simplement, leur bonheur de vivre et celui de leur famille sont directement menacés par la peur qui grandit avec l’insécurité sociale et la précarité, tous ces citoyens laborieux feraient bien d’aller lire, imprimer et relire ce nouveau blog passionnant :

« NAIRU, le Nom de la Ruse.  La face cachée du chômage. », http://lenairu.blogspot.com/

On y trouve une analyse plus fouillée et plus documentée chaque jour, une prose claire et pétillante, des liens importants…  Il va falloir consulter ce blog important tous les jours :o)    Extrait :

« Le chômage de masse depuis désormais 30 ans ne serait pas un Fléau Naturel, résultat de l'ire d'une quelconque divinité toute puissante. Il se pourrait même qu'il en soit venu à être intégré comme un élément utile, indispensable et même planifié par certaines instances humaines, pour faire pression sur les "fidèles" (encore appelés salariés) et leur faire peur. Ce "Diable" moderne servirait en outre une cause appelée lutte contre "l'inflation". Car l'inflation, elle, serait le "Démon" pour une autre catégorie de personnes : les investisseurs financiers et les détenteurs de patrimoine. »

Un outil important à faire connaître…     Il semble urgent de réveiller les autres et… de résister.

Grands principes d’une bonne constitution, vraiment protectrice (9 octobre)

Ça y est. Je me lance enfin :o)

Vous trouverez sur la page d’accueil un lien vers un nouveau texte, constructif :


« Les grands principes d’une bonne Constitution qui prouverait la guérison de notre démocratie »

J’ai hâte de connaître vos réactions :o)

Est-ce que nous autres, citoyens de base, de tous bords, allons avoir l’énergie d’entretenir ce débat entre nous, non professionnels, sans l’enjeu du référendum imminent, c’est encore pour moi un mystère.

Cette nuit, je suis fatigué, je doute :o( 

On verra...

Je mettrai en place des forums en fonction de votre intérêt pour la question ;o)

La servitude légale et volontaire ne date pas d’hier (8 octobre)

 

« S’il se formait une classe exclusivement au fait des principes de l’art social, des lois et de l’admini­stration, elle trouverait bientôt dans la supériorité de son esprit, et surtout dans l’ignorance de ses compatriotes, le secret de créer des distinctions et des privilèges ; exagérant l’importance de ses services, elle parviendrait à se faire regarder comme la protectrice nécessaire de la patrie ; et, colorant ses audacieuses entreprises du prétexte du bien public, elle parlerait encore de liberté et d’égalité à ses peu clairvoyants concitoyens, déjà soumis à une servitude d’autant plus dure, qu’elle paraîtrait légale et volontaire. »

Philippe Buonarroti, dans « La conspiration pour l’égalité, dite de Babeuf », 1828 (Éditions sociales, 1957, p. 171), cité p. 199 dans le livre de Paul Alliès « Une constitution contre la démocratie ? Portrait d’une Europe dépolitisée. » (Climats, 2005).

À qui pensez-vous, vous, dans notre France de 2005, quand Buonarroti vous annonce déjà, depuis le début de son 19e siècle, cette classe parasite si prévisible ? :o)

 


 

Citoyens debout contre l’AGCS et la directive sur les services (Bolkestein) (4 octobre)

Je relaie ici un appel de Pascale Fourier, animatrice du site « Des sous… et des hommes » :

Message de Pascale Fourier, animatrice de Des Sous… et des Hommes, émission d'initiation à l'économie d'AligreFM, 93.1 en région parisienne, et sur le Net : www.des-sous-et-des-hommes.org. 

Bonsoir,

Ma vie professionnelle réelle m'oblige cette année à beaucoup anticiper mes émissions. Ordinairement, par honnêteté vis-à-vis d'Aligre FM, la radio associative de la bande FM parisienne qui me permet de faire les émissions qui sont diffusées le mardi de 9h30 à 10h sur le 93.1, je ne mets pas les émissions en ligne avant qu'elles ne soient diffusées, sauf quand il y a une urgence, ce qui était le cas pour les émissions sur le Traité constitutionnel... Or il y a là urgence....

Aussi vous trouverez sur le site, les deux émissions faites avec Frédéric Viale, coordinateur de la Commission OMC/AGCS du mouvement Attac. La deuxième en particulier est très inquiétante...

http://dsedh.free.fr/119_11_10_05_Frederic_Viale_1_sur_2.mp3

http://dsedh.free.fr/120_18_10_05_Frederic_Viale_2_sur_2.mp3

et la transcription de l'émission la plus inquiétante: http://dsedh.free.fr/transcriptions/viale120.htm

Du 13 au 18 décembre se réunira à Hong-Kong la 6° Conférence ministérielle de l'OMC, qui sera précédée par des réunions préparatoires du 17 au 21 octobre. Cette réunion de Hong-Kong devrait marquer une volonté d'accélération du mouvement de libéralisation, en particulier dans le domaine des services, et l'Union Européenne s'apprêterait à faire des concessions importantes. Or rien de ce qui va se décider en notre nom n'arrive à nos oreilles, pas plus par l'intermédiaire des médias que des partis politiques ou des syndicats (ou alors, ils font peu de bruit...).

Le problème, comme pour le Traité Constitutionnel, est bien un problème de spoliation de la démocratie : nous, français, majoritairement, avons montré le 29 mai dernier notre désaveu des politiques libérales. Le moins que l'on puisse demander, c'est que nos élus, les médias s'emparent de ce sujet et le traitent en amont, avant que les choses ne soient décidées, qu'ils favorisent ainsi le débat démocratique, et partant la décision démocratique. Les décisions qui seront prises à Hong-Kong engageront l'Europe, donc notre pays. Je vous invite donc à vous informer d'une part, et d'autre part à demander aux médias de vous informer ; je vous invite à interpeller vos élus : point n'est besoin pour cela de connaître à fond le dossier, complexe, plein de paroles rassurantes émises par l'OMC très probablement... ; il suffit de demander à vos parlementaires européens et nationaux, aux partis politiques et syndicats de s'informer et d'informer la population... C'est le minimum que l'on puisse demander en démocratie.

Par ailleurs, il semblerait que la directive Bolkestein sera très bientôt discutée (au niveau de l'Europe), contrairement à ce que d'aucun nous avait dit lors de la campagne référendaire. Il faut suivre là aussi l'affaire, interpeller nos élus, les médias, les partis politiques et les syndicats. Vous pouvez trouver des renseignements notamment sur le site http://www.urfig.org/francais.htm  (http://www.urfig.org/Bolkestein-moment-d-agir.doc) où vous trouverez aussi des informations sur la Conférence de Hong-kong.

Dans la même série, il conviendrait de s'inquiéter de la "privatisation d'EDF" prévue (le Monde dixit) : l'affaire a été repoussée pour cause de mouvement social du 4 octobre...

On pourra peut-être me reprocher de sortir de mon rôle de "journaliste" en appelant ainsi à l'action. Je rappellerai juste alors qu'on a longtemps appelé les médias le 4ème pouvoir... mais que pour que 4ème pouvoir il y ait, il convient d'anticiper, d'informer en temps et en heure les citoyens de ce qui devrait être décidé en leur nom de façon à ce que la démocratie ne soit pas qu'un vain mot. Je demande juste d'être informée, que mes élus soient informés, et que la décision soit démocratique. Je ne fais que tenir, bien modestement, mon rôle de "journaliste" et mon rôle de citoyenne.

Pascale Fourier, animatrice de Des Sous... et des Hommes, AligreFM.

 


Coup de main à Yvan Bachaud pour imposer le référendum d’initiative citoyenne (2 octobre)

Je relaie un appel d’Yvan Bachaud, bagarreur infatigable pour qu’une Constituante vraiment citoyenne voie le jour, sans politiciens professionnels, par tirage au sort. 

(Visitez son site http://www.mic-fr.org/indexf.html, ses interpellations des "responsables" politiques de tous bords (sans exception) sont intéressantes (voir mon message du 9 août) : quand il s’agit du pouvoir d’intervention directe des citoyens dans la vie politique (RIP), les membres de ce qu’il faut bien appeler une caste politique professionnelle mentent sans arrêt.)

Yvan Bachaud a besoin d’aide, voici son appel :

Le 28.09.2005

Comment nous rendre un petit service…                               À diffuser largement… Merci

Le Mouvement pour l’Initiative Citoyenne est en train de mettre en place en France une « Assemblée constituante citoyenne française » composée de 300 personnes tirées au sort sur les annuaires de tous les départements français au prorata du nombre d’inscrits.

Leur mission : préparer un nouveau projet citoyen de Constitution européenne.

D’abord, nous cherchons de l’aide pour nous tirer au sort seulement 15 numéros (sans la commune, sans les noms et adresses) dans les 12 départements suivants. Il faut environ 7 minutes… J

Ardennes, Belfort, Cantal, Corrèze, Creuse, Indre, Jura, Marne, Pyrénées Hautes, Tarn, Tarn et Garonne.

Ensuite, nous cherchons de l’aide pour nous tirer au sort 30 numéros dans les 28 départements suivants. Il faut environ 15 minutes… J

PROVINCE :

Aisne, Charente, Cher, Côtes du Nord, Eure, Eure et Loire, Landes, Loire Atlantique, Maine et Loire, Manche, Marne, Oise, Orne, Pas de calais, Pyrénées Atlantiques, Sarthe, Seine Maritime, Sèvres (Deux), Somme, Vendée, Vienne, Vienne (Haute).

RÉGION PARISIENNE :

Essonne, Seine Saint-Denis, Val de marne, Yvelines.

COMMENT PROCÉDER.

1°Vous divisez le nombre de pages blanches par 15 ou 30 selon le département.
Cela vous donne un nombre « X ».

2° Puis vous relevez le N° à la page 29, 3ème colonne, 3ème ligne. Un  N° de SIMPLE CITOYEN  (pas une société ni même un médecin coiffeur etc.) vous prenez donc le nom suivant si c’est le cas à la 3ème ligne. J

3° Vous ajoutez « X » à 29 et vous relevez le N° 3ème colonne , 3ème ligne

… jusqu’à avoir 15 ou 30 N° selon le cas du département.

Puis, soit vous m’envoyez les infos par mail, soit vous m’appelez et je vous rappelle pour que vous me les dictiez. Il n’y a que 6 chiffres, c’est très rapide.

Si vous voulez vous charger d’un département, contactez-moi, je vous dirai si le département est toujours "libre" : y.bachaud@mic-fr.org, tél. : 08.73.80.65.02 (tarif local) ou 04.72.24.65.02 si c’est occupé…

Post scriptum :

Le Mouvement pour l’Initiative Citoyenne est une association totalement apolitique dont l’unique objet social est d’obtenir l’instauration du référendum d’initiative citoyenne à tous les niveaux territoriaux de la commune à l’Union européenne.      

 

Rendez-vous des Z’engagés à La Ciotat (2 octobre)

Les 13, 14 et 15 octobre 2005, le festival des Z’engagés, à La Ciotat, nous offre un lieu de débat, une agora, un point de rencontres.

Vendredi 14, après les cours (18 h), je vous y rejoindrai avec plaisir :o)

Le site : http://les.zengages.free.fr/
et le programme : http://les.zengages.free.fr/programmeLESZENGAGES.pdf.

Au passage, si vous le pouvez, vendredi 14 octobre, à 10 h, je vous recommande le film essentiel « Argentine, mémoire d’un saccage » de Fernando Solanas : l’Argentine y apparaît crûment comme un laboratoire du néolibéralisme, c’est clairement ce qui nous attend si on ne résiste pas.

On sort de ce film consterné, bouleversé, révolté… réveillé.

 


Entretien avec une journaliste espagnole (1er octobre)

Juste après le référendum, une journaliste espagnole, Ana Zarzuela, du magazine Cambio16, m’a posé quelques questions pour comprendre notre Non qui paraissait étonnant, vu de l’étranger.

Ses questions étaient intéressantes. Elle m’a autorisé à vous rapporter notre entretien.

(30 mai 2005) Estimé M. Chouard,

Je suis Ana Zarzuela, du magazine espagnol Cambio16. Peut-être vous le connaissez, c’est un media spécialisé en politique nationale et internationale, le plus vétéran magazine d’actualité en Espagne. Nous sommes en train d’analyser le Non  français à la Constitution Européenne et les conséquences pour la politique française et pour l’avenir de l’Union Européenne. (…) Nous souhaitons avoir votre opinion sur ce sujet, nous aimerions bien compter sur votre avis (…). Je vous envoie quelques questions en espérant que vous pourrez y répondre. Je suppose que vous êtes occupé, mais je suis sûr que votre opinion sera très intéressante pour les lecteurs de Cambio16 en Espagne.

Merci bien pour votre aide.

1. Pourquoi le Non a-t-il gagné en France, mère de l’Union Européenne et moteur du processus constitutionnel ?

Le Non des français peut très bien s'analyser, si on est de bonne foi, comme un renouveau de l'idée européenne (et pas comme une fin), une appropriation du projet européen par les citoyens eux-mêmes.

Nous sommes nombreux à vivre cet événement comme une naissance, et pas comme une mort.  Il faut savoir entendre cela.

Quand ils lisent le texte avec un œil critique, les citoyens (de toutes nationalités) se rendent enfin compte que, malgré les progrès indéniables d'un traité à l'autre, la démocratie n'est plus qu'apparente dans les institutions européennes, depuis longtemps, et que tous les pouvoirs sont hors du contrôle citoyen.

Le référendum montre heureusement qu'on n'est pas obligé de valider cette évolution qui s'est faite discrètement et, bien sûr, sans le consentement des citoyens concernés.

Pour une fois que le peuple peut dire ce qu'il pense de cette "post démocratie", il serait fou de s'en priver.

Dire Oui au TCE, pour le peuple, ce serait confirmer lui-même un recul des droits politiques des citoyens, recul organisé depuis quarante ans à coup de traités (donc sans lui) : ce serait se faire politiquement hara-kiri.

Par exemple, il est inadmissible de laisser les États, à coups de traités, "monter" au niveau international les choix de politique économique, car cela a pour effet de priver les peuples de toute possibilité de retour en arrière (puisqu'on ne décide plus au niveau national, et que le Parlement européen n'a aucun pouvoir d'initiative) : on nous prive ainsi du "droit des peuples à disposer d'eux-mêmes" (principe important affirmé en 1789).

Mais pour que cet acte de résistance soit possible, il faut qu'un vrai débat ait lieu et que l'on demande leur avis directement aux peuples, et pas seulement à leurs représentants.

Si j'ai bien compris, ce débat n'a pas eu lieu en Espagne (il paraît que les Espagnols n'ont pas reçu le TCE chez eux).  Ce débat occulté a bien failli nous arriver aussi (début septembre 2004, le débat n'avait pas lieu en France, le Oui était naturellement à 60%, on vivait sur un rêve).

1.1. Qu’attendez- vous après la victoire du NON ?

Je ne me fais pas trop d'illusions : on n'obtiendra pas rapidement de spectaculaires résultats (un nouvelle constitution, courte et claire, authentiquement démocratique et qui n'impose pas une politique économique).

Il faut imaginer la difficulté pour de simples citoyens révoltés, même nombreux, de s'opposer au chemin pris par tous les corps constitués.  Ce changement de cap, cette décision de construire une vraie Europe politique démocratique de la même façon que se construisent toutes les démocraties du monde (en demandant au peuple ce qu'il veut et en lui laissant le contrôle des institutions), ce changement de cap, donc, ne pourra se faire que si des hommes politiques se font rapidement le relais, fort et déterminé, de la pression populaire.

On verra bientôt si ces hommes politiques existent.

1.2. Vous avez été protagoniste d´un surprenant mouvement social et politique à gauche. Une sorte de réveil citoyen, de réflexion citoyenne collective, de participation et représentation directe, un nouveau front de la gauche avec les mouvements sociales, le mouvement antiglobalisation... Qu’est-ce qu’il a changé ? Qu’est ce qu’il restera de tout ça ?

Les arguments que j'ai développés ne sont ni de gauche ni de droite, ils peuvent être compris par tout le monde : des institutions 'démocratiques' permettent aux citoyens d'être tantôt de gauche, tantôt de droite, tantôt libéraux, tantôt sociaux, au gré des élections.

Le problème des institutions est au-dessus de la politique. Ce qu'on va décider ici va rendre possible la politique. Si on se trompe (si on crée un parlement ligoté, par exemple), il ne sert plus à rien d'avoir une réflexion politique (de gauche ou de droite).

Le TCE prive les peuples de ce contrôle politique en imposant le néo-libéralisme. Il n'est pas étonnant qu'on s'y oppose.

Ce qui est surprenant, c'est qu'on ait mis tant de temps à se "réveiller". C'est sûrement à cause de l'ambiance médiatique qui valide cette organisation tous les jours, à travers les "informations" (journaux, radios, télés).  Dans cette ambiance, on n'imagine même pas contredire la pensée unique : si on en croit les journaux, le libéralisme est une évidence, il est devenu "inévitable", et il n'y a que des rétrogrades pour penser le contraire.

Mais on trouve désormais des opposants au néo-libéralisme aussi bien à gauche qu'à droite.

Difficile de dire ce qui restera de ce Non  historique, mais ce que je sens dans ma boîte aux lettres, c'est une forte contagion : tous les gens normaux comprennent vite où est leur intérêt, et ça dépasse les frontières, bien sûr :o)

2. Il semble que les arguments des partisans du Oui sont plus simples et homogènes, mais les arguments du Non sont plus variables et complexes. Pouvez-vous les résumer ? Si nous écartons les votes de l’extrême droite, de Le Pen et les xénophobes, quel pourcentage des Non est le Non de la gauche? Quel pourcentage de ce Non correspond au désir de punir à Chirac et Raffarin, et quel pourcentage est la réponse aux problèmes européens ?

Moi, je trouve le vote Non très homogène : on voudrait faire croire que nous n'avons pas lu le texte alors que c'est exactement le contraire : les gens qui votent Oui, le plus souvent n'ont précisément pas lu le texte et votent en confiance, en pensant faire avancer l'Europe, alors que les gens qui votent Non ont lu, analysé, décortiqué le texte, et plus on lit le texte, plus on comprend ce qu'il organise (sans l'avouer clairement), et plus on a peur, et plus on vote Non.

L'homogénéité du Non, c'est le refus du texte proposé, clair et net, et c'est exactement ce qu'on nous demandait.

Il y a des catégories de Non, évidemment, mais il y a aussi de nombreuses catégories de Oui : combien de gens qui votent Oui votent en se pinçant le nez (à contrecœur) ? (contradiction) Combien votent Oui en pensant donner des armes pour le combat social, alors que d'autres votent Oui en sachant pertinemment qu'ils neutralisent durablement le combat social ? (contradiction)  Combien votent Oui avec un sentiment d'avancer vers le fédéralisme, alors que d'autres votent Oui pour renforcer le poids de la France (ce qui est un argument souverainiste, finalement) ? Que de contradictions !

En fait, avec un texte aussi long, compliqué et trompeur, il n'y a rien d'étonnant à ce que la réponse simple, Oui ou Non, soit difficile à interpréter, mais il est injuste de faire ce procès d'ambiguïté au seul Non.

Et le vote "punition contre Chirac" n'est pas du tout hors sujet  par rapport au TCE puisque la politique de Chirac et la politique imposée par le TCE ont toutes les deux le même ADN : un néo-libéralisme doctrinaire qui impose de tout déréguler, c'est-à-dire de dépouiller les États de leurs droits d'intervention et d'interdiction.  Il est donc artificiel et peu crédible de prétendre dissocier les deux questions (même si, pour ma part, je n'ai pas du tout développé ces arguments de politique intérieure).

3. Croyez-vous que le déficit de connaissance, la défiance des citoyens et le sentiment qu’il s’agit d’un Traité de politiciens et de bureaucrates, ont pu pousser le Non ? Pensez-vous que l’Union sera capable de changer et solutionner ce déficit démocratique ? De quelle façon ?

C'est précisément le contraire : c'est le déficit de connaissance du Traité et des institutions européennes qui conduit à voter Oui  en faisant largement confiance à ceux qui nous gouvernent, et c'est en revanche la connaissance méticuleuse du texte proposé qui conduit à s'en méfier comme de la peste.

Il est facile d'instaurer une réelle démocratie dès qu'on en a la volonté politique.  On connaît bien les rouages qui protègent les hommes (élections, contre-pouvoirs, indépendance des juges, etc.) : en effet, ce sont les mêmes partout dans le monde, on n'a pas besoin d'années pour trouver un compromis.  Ce dont a besoin un Polonais pour vivre en démocratie ressemble beaucoup à ce dont a besoin un Espagnol, un Italien ou un Français.

Non, ici, c'est la volonté politique qui manque, assurément, pour faire disparaître le "déficit démocratique" (euphémisme délicat qui dissimule un vrai scandale).

4. En Espagne quelques analystes font l'interprétation suivante : c'est la peur qui a poussé le Oui et le Non. Les partisans du Oui ont eu peur de l’isolement de la France, de la rupture du l’axe France-Allemagne, du Traité du Nice... Et, de l’autre côté, les partisans du Non ont peur du libéralisme économique en France et dans l’Union, les travailleurs ont peur de perdre le travail, de la réduction des salaires, de la concurrence sauvage, de la perte du pouvoir citoyen à Bruxelles... Chirac a peur du châtiment des électeurs, Hollande a peur de la gauche au PS, et Raffarin a peur de l’adieu. Qu’est-ce que vous pensez de cette interprétation ?

Il y a effectivement des peurs (légitimes) dans les deux camps.

Le débat, superbe, qui a eu lieu en France, nous a permis de découvrir nos peurs, de les comprendre, de les comparer, et finalement de trancher.

Nous avons eu l'impression de vivre un grand moment de démocratie, un progrès de civilisation : avez-vous déjà vu des millions de personnes simples se passionner pour leur Constitution ? C'est un progrès pour l'Humanité, une politisation, au sens noble du terme, des citoyens, qui deviennent ainsi des acteurs de leur propre vie.

C'est beau.  C'est joyeux.  C'est constructif.  Pas de quoi pleurer.

Ne croyez pas les tristes sires qui voient là un recul ou un repli parce qu'ils ne croient plus eux-mêmes en rien qui vienne du peuple.

5. Le Non  français est une gifle pour l’Europe, pour l'actuelle carte de route du voyage européen, ou seulement pour le texte du Traité ?

C'est peut-être une gifle à ceux qui pensaient pouvoir imposer ce texte aux peuples sans même qu'ils le lisent, mais ce n'est pas du tout une gifle pour l'Europe, c'est exactement le contraire : enfin, l'Europe a trouvé des citoyens qui la veulent, mais qui savent très bien ce qu'ils veulent et qui ne veulent pas de cette Europe-là.

C'est une supercherie, une mystification, une manipulation, de faire croire que le Non français est anti-européen.  C'est n'avoir rien compris à ce qui se passe ici (ou plutôt faire semblant de n'avoir rien compris, parce que c'est commode de caricaturer et de déformer pour ne pas reconnaître qu'on a peut-être tort).

L'actuelle 'carte de route' est compromise, mais ce que disent précisément les citoyens, c'est que la route était mauvaise.

L'Europe citoyenne, démocratique, va peut-être naître de ce refus.  Ne voyez-vous pas l'immense potentiel pour les Européens ?

Seul un Non  permettait d'ouvrir cette porte.

6. On ne peut pas arriver à la Constitution Européenne sans la France et les Français, mais le référendum a dit que l’actuel texte n’a pas l'accord de la France et Bruxelles assure qu’on ne peut pas changer le texte. Alors, tous les 25 pays de l’Union, nous sommes dans une impasse. Maintenant quelle est la solution ? Bruxelles ne veut pas penser à un plan B.

Un plan B qui serait conçu par les mêmes qui ont conçu le plan A aurait toutes les chances de présenter les mêmes défauts.

Il nous faut un plan 2, inédit, original, et c'est à ça que de nombreux citoyens français réfléchissent en ce moment.

Ce n'est pas leur métier, il leur faut un peu de temps pour fixer leurs exigences démocratiques et formuler une proposition crédible.  Heureusement que nous avons l'Internet car la plupart des medias nous gênent au lieu de nous aider, en ressassant un ressentiment stérile et mauvais perdant, des reproches et des menaces. 

Pourtant, nous irions beaucoup plus vite vers une Europe qui satisferait tout le monde si nous étions capables de nous réconcilier à l'issue de ce débat.

Pendant les discussions, les Ouiistes et les Nonistes ont en effet souvent constaté qu'ils sont très proches, ayant exactement les mêmes objectifs (une Europe unie, forte et fraternelle).

7. Monsieur Giscard d’Estaing a une proposition: un nouveau référendum en France en 2006. Croyez vous que ça sera possible ? Pensez-vous que ça peut être une insulte pour le peuple français ?

Absolument. Une véritable insulte.

On retrouve, là encore, un vrai mépris pour le suffrage universel.

C'est bien le même ADN que celui du TCE.

Ce texte est mauvais pour les peuples qui ont pourtant besoin d'un texte.

Il faut donc en faire un autre, plus respectueux des peuples.

8. Les partisans du Non considèrent que la Constitution Européenne veut constitutionnaliser le libéralisme économique en Europe, mais croyez-vous que le Non de la France va arrêter ce processus ?  L’article 1-3 dit que l´Europe doit être une économie sociale, quelle est la valeur que vous donnez à ça ? Quelle est l’alternative que vous proposez ?

À l'étude, l'expression 'économie sociale de marché' s'avère être un gros mensonge de la Constitution. Si on lit simplement le texte, on a l'impression que le mot sociale tempère, adoucit, le mot marché. Mais si on cherche l'origine exacte de cette expression, on trouve une doctrine économique (allemande) plus ultra libérale, plus extrême que toutes les autres, et qui n'a donc rigoureusement rien de sociale. Comme exemple de supercherie, on ne peut pas mieux trouver.  Le Traité est farci de ces pièges qui ne se voient qu'après une lecture approfondie et recoupée d'analyses complémentaires.

Ce Non  n'est qu'une étape : on nous a mis (sans nous consulter) dans la prison de Nice (après le couloir d'Amsterdam, etc.), et on nous demandait de fermer nous-même la porte à clef, en jetant la clef.

En votant Non,  on a refusé de fermer la porte de Nice.

Mais il reste maintenant à sortir de Nice.

Il est donc vrai que voter Non  ne suffit pas, mais c'était la seule façon de commencer à sortir du piège néo-libéral.

Le reste est à faire, mais la prise de conscience citoyenne, contagieuse à travers les frontières, nous aidera sûrement à progresser : une conscience citoyenne nouvelle devrait permettre de faire émerger rapidement des courants politiques nouveaux, avec de nouveaux projets.

9. On dit, en général qu’une crise peut être une opportunité pour la croissance et l’amélioration. Cette situation va-t-elle emporter une évolution de l’idée de l’Europe et sa réalisation ? Les français seront-ils  capables de faire réfléchir ?

On dit parfois que seul le désordre permet de véritables évolutions. Espérons que ce désordre (très modéré) nous permettra de faire évoluer nos institutions, aussi bien en France qu'en Europe, vers plus de contrôle citoyen des pouvoirs institués.

10. Quel prix va payer Monsieur Chirac pour sa défaite ?

Rien du tout : en France comme en Europe, les acteurs politiques ne sont guère responsables de leurs actes et rien ne permet, en droit, de forcer le Président à se démettre avant les élections.

11. Quel est l’avenir que vous voyez pour la gauche française ? Maintenant elle est dans un processus de division qui semble profond. M. Hollande va se rendre devant M. Fabius ? Le mouvement pour le Non va prendre corps comme une alternative politique ou social-citoyenne ?

Spectaculairement désavoué par son électorat, Hollande devrait démissionner et laisser la direction du PS à ceux qui représentent le Non, mais là aussi, les responsables ne sont pas si responsables que ça, et il faudra malheureusement une bagarre fratricide pour dénouer cette situation déplorable.

Si les socialistes n'avaient pas renoncé, comme les autres PS en Europe, à protéger les gens contre le néo-libéralisme, on n'en serait pas là.  Ce reniement historique est vécu comme une faute, une 'trahison', par de nombreux sympathisants du PS qui n'ont plus personne pour les défendre au centre de l'échiquier politique du pays.  Ce choix politique délibéré des PS de ne plus se battre contre l'ultralibéralisme ouvre un boulevard aux extrémistes.

12. L’espace politique français et les partis politiques traditionnels sont cassés par cette crise ?

Oh, ils ont la peau dure :o)    

 


L’intégration forcée continue, à l’insu des européens (30 septembre)

Un article assez technique, mais vraiment très intéressant sur le site www.libertepolitique.com :   
« La Cour de justice contourne les traités européens : dormez braves gens… »,
par François de Lacoste Lareymondie :         
http://www.libertepolitique.com/public/decryptage/article.php?id=1355.

Dormez en paix braves gens… l’intégration européenne se poursuit sans vous. Et contre les décisions de vos gouvernements. Ce n'est pas parce que le projet de traité constitutionnel est mort et enterré, avec J.-M. Barroso, président de la Commission, comme dernier inscrit sur la liste des fossoyeurs, que la machine s'arrête.

Le 13 septembre dernier, sur demande de la Commission, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a annulé une décision-cadre du Conseil relative à la protection de l'environnement par le droit pénal (1). L'arrêt n'est pas passé totalement inaperçu, mais sans qu'on prête assez d'importance au mécanisme qu'il illustre : celui de l'intégration forcée qui fonctionne à l'insu des Européens. Il faut y revenir pour souligner qu'au-delà de la question immédiate de la répartition des pouvoirs, ce qui est réellement en jeu c'est la confiance que l'on peut accorder aux traités et aux organes chargés de veiller à leur application. Enjeu suffisamment grave pour qu'on crie " casse-cou " !

De quoi s'agit-il ?

Le 27 janvier 2003, le Conseil a adopté à l'unanimité de ses quinze membres (2) une décision-cadre par laquelle il obligeait les États à adopter de façon concertée des sanctions pénales à l'encontre des auteurs d'atteintes à l'environnement, tout en leur laissant le choix des incriminations et des peines conformément à leur ordre juridique interne. La décision énumère les agissements qui doivent être réprimés ; elle les classe sur des échelles de gravité pour encadrer le niveau des peines susceptibles d'être infligées ; elle règle enfin une série de questions de compétence et de procédure juridictionnelles de sorte que les dispositifs nationaux soient coordonnés. Pour fonder sa décision, le Conseil s'est placé sous l'empire du troisième pilier du traité de Maastricht de 1992 relatif à la coopération policière et judiciaire en matière pénale ; c'est-à-dire dans un cadre intergouvernemental, requérant l'unanimité, en une matière qui n'est pas communautarisée puisque le droit pénal relève encore de la souveraineté des États.

C'est précisément ce fondement que la Commission a contesté. La protection de l'environnement constitue un des objectifs de l'Union et fait l'objet d'une politique établie (3) ; elle entre donc dans le cadre du premier pilier du traité, celui qui est communautarisé, avec ses mécanismes propres de décision (initiative de la Commission et vote par le Conseil à la majorité qualifiée en co-décision avec le Parlement). Aussi la Commission en tirait-elle argument pour faire entrer également dans ce même cadre l'adoption de sanctions pénales au motif qu'elles en constituent un complément indissociable.

Le raisonnement de la CJCE

On ne surprendra personne en disant que la Cour a suivi la Commission et annulé la décision du Conseil. Mais il faut s'arrêter un instant sur son raisonnement.

La Cour reconnaît certes qu'en principe, la législation pénale et les règles de procédure pénale ne relèvent pas de la compétence de la Communauté. Elle reconnaît également qu'il n'y a pas de précédent à l'intrusion du communautaire dans le champ pénal, et que le contenu de la décision attaquée est exclusivement de cette nature. Mais peu importe : elle écarte ces objections en considérant que la Commission, lorsqu'elle estime que la mise en œuvre d'une politique commune (en l'espèce la protection de l'environnement) appelle l'instauration de sanctions pénales complémentaires, a le droit de passer outre et de se placer dans le champ du premier pilier, donc d'obliger le législateur communautaire à " prendre des mesures en relations avec le droit pénal des États membres et qu'il estime nécessaires pour garantir la pleine effectivité des normes qu'il édicte ", moyennant l'application des procédures correspondantes.

L'affaire est grave

L'affaire est grave, et à plusieurs titres. L'enjeu était considérable. Dans le premier cas, la souveraineté des États maintenue dans une matière donnée prévalait ; ceux-ci demeuraient maîtres des mesures de coopération à prendre dans le cadre de la coopération intergouvernementale. Dans l'autre, la logique communautaire justifiait par elle-même l'empiètement sur ce domaine réservé nonobstant les textes contraires.

Emboîtant le pas à la Commission, la Cour n'a donc pas hésité à contourner les souverainetés nationales, préservées sur une matière précise dans un traité ratifié par les États membres, en faisant prévaloir son propre raisonnement, fût-il un peu spécieux, sur un texte pourtant clair. De plus, elle l'a fait en dépit de l'opposition expresse de tous les États membres qui avaient adopté unanimement la décision contestée en connaissance de cause et dont la plupart étaient venus la défendre devant la Cour.

En d'autres termes, la Commission et la Cour se sont accordées pour substituer leur appréciation à celle des États sur ce que ceux-ci entendent mettre en commun et sur la façon dont ils entendent coopérer ; elles l'ont fait en recourant à un principe qui, pour elles, domine tous les autres, celui de la primauté de l'intégration communautaire qui doit commander tout le reste, de gré ou de force ; elles l'ont fait en toute impunité puisqu'en vertu du droit qu'elles ont elles-mêmes forgé, elles sont à l'abri de tout recours sauf pour un État à ouvrir une crise politique majeure et risquée…

Une méthode hélas caractéristique et habituelle

N'imaginons pas cependant que cet épisode soit exceptionnel. Le point de départ se situe en 1964 lorsque, dans un arrêt " Costa contre E.N.E.L. " (4) — que certains ont qualifié de " coup d'État juridique " — la Cour a conféré aux normes communautaires une primauté absolue sur les droits souverains des États membres, y compris en matière constitutionnelle, en leur attribuant un effet direct dans leur droit interne. Depuis lors, nombreux sont les exemples de cette prévalence à laquelle les États ont dû se soumettre.

Pour la Commission, l'intérêt de communautariser une matière est évident : dans ce cadre en effet, elle tient le Conseil à sa merci puisqu'elle a le monopole de l'initiative et qu'elle est maîtresse de la procédure, y compris devant le Parlement européen lorsqu'il y a matière à co-décision. Les États membres réunis en Conseil n'ont alors plus le choix que d'approuver le projet tel qu'il leur est soumis, ou de le rejeter en bloc. Alternative impossible, évidemment. À toutes fins utiles, je renvoie les sceptiques à un autre arrêt récent de la Cour (5) qui a annulé les conclusions adoptées le 25 novembre 2003 par le Conseil, aux termes desquelles celui-ci avait suspendu les procédures de déficit excessif engagées à l'encontre de l'Allemagne et de la France et modifié les recommandations qu'il leur avait antérieurement adressées : l'annulation s'est fondée sur le fait que, après avoir adopté des recommandations, le Conseil ne pouvait pas les modifier ensuite sans une nouvelle impulsion de la Commission qui, seule, dispose d'un droit d'initiative.

Quant au mécanisme d'extension de ses compétences " par voie de proximité ", la Commission en use continuellement. Les exemples abondent et je me contenterai d'en citer un qui est d'actualité. La santé publique n'est pas une matière communautaire. Qu'à cela ne tienne ! L'unification du marché intérieur permet de toucher à tout, pourvu qu'on aborde la question par le bon bout. En l'espèce, il s'agit d'un projet de réglementation des publicités figurant sur les emballages alimentaires : la Commission a décidé d'y soumettre les " allégations nutritionnelles " et surtout les " allégations santé "(6), et d'interdire de tels messages lorsque les aliments dépassent certains seuils (d'alcool, de matières grasses, de sucre, de sel, etc.) dans le but explicite et politiquement porteur de lutter contre l'obésité. Pour faire bonne mesure, la Commission prévoit même de s'adjoindre les services d'une " autorité scientifique ". Le tour est joué : les associations de consommateurs poussent à la roue tandis que les industriels se battent sur le contenu des normes ; le Parlement a sauté sur l'occasion pour entrer dans le jeu et se livrer à un débat de fond ; quant aux États réunis en Conseil, ils sont piégés entre le rejet pur et simple avec le risque politique correspondant, et l'approbation qui les dépossède un peu plus (7).

Un problème de principe qui touche aux mécanismes communautaires eux-mêmes

Entendons-nous bien. La question n'est pas ici de savoir si telle norme alimentaire est bonne ou mauvaise, ou si l'instauration de sanctions pénales à l'encontre des pollueurs est souhaitable ou non ; ni de savoir s'il est ou non légitime de communautariser ces matières. La question posée est celle de la confiance que l'on peut accorder aux traités signés et aux instances chargées de les mettre en œuvre. Lors de la récente campagne référendaire, les défenseurs du projet de traité constitutionnel accusaient de procès d'intention ceux qui mettaient en doute les soi-disant garanties données aux États par telle ou telle stipulation. L'expérience quotidienne montre que ce sont ces derniers qui avaient raison.

L'Union Européenne ne fonctionne pas comme cela est écrit dans les traités.

En réalité, elle fonctionne selon un mécanisme d'intégration juridique à sens unique dont les traités servent de prétexte ou d'occasion : comme tout se tient plus ou moins, la domination sans recours que se sont arrogées la Commission et la Cour de justice, et le raisonnement par attraction qu'elles ont développé aboutissent de proche en proche à tout faire tomber dans le champ communautaire. C'est ainsi que, subrepticement, les États et les gouvernements, pourtant seuls dotés de la légitimité démocratique, sont dépossédés de leurs compétences au profit de ces deux organes dont le moins que l'on puisse dire est qu'ils sont d'essence oligarchique et technocratique.

Tant que cette captation n'aura pas cessé, c'est-à-dire tant qu'on n'aura pas posé clairement le problème des pouvoirs de la Commission et encadré davantage le rôle de la Cour de Justice, l'engrenage tournera. Mais ayons conscience qu'il aboutira inévitablement, tôt ou tard, qu'on s'en réjouisse ou qu'on le déplore, à une rébellion des peuples : la schizophrénie actuelle n'est pas durable, surtout après les élargissements récents. D'ailleurs, n'a-t-elle pas déjà commencé ? Le risque grandit de jeter le bébé avec l'eau du bain, et de donner raison aux Cassandre qui craignent de voir l'Europe se défaire. L'enterrement du projet de traité constitutionnel n'y change rien, bien au contraire : il remet au premier plan l'enjeu concret d'une réforme nécessaire que les grands discours mystico-politiques avaient escamotée.

C'est pourquoi nous persistons à penser que, pour conforter la construction européenne dans un contexte qui a fondamentalement changé depuis cinquante ans, il faut remettre à plat son fonctionnement, mais en partant du réel et non de schémas théoriques, et qu'il faut le faire d'urgence.

Pour les notes voir le site d’origine de cet article : http://www.libertepolitique.com/public/decryptage/article.php?id=1355

 

 


L’exemple suisse pour ressourcer la démocratie européenne (29 septembre)

Un article court mais intéressant dans le journal canadien Le Matin :
« La Suisse, un modèle pour l'Europe ? » 
http://www.matin.qc.ca/monde.php?article=20050802112845

« Et si le modèle européen, c'était la Suisse ? L'Union européenne en proie au doute n'a peut-être pas besoin d'aller chercher très loin des réponses à ses questions. Au lieu de regarder outre-Atlantique, certains universitaires lui conseillent de se pencher sur la Confédération helvétique. En rejetant la Constitution européenne au printemps, les électeurs français et néerlandais n'ont pas seulement enterré, ou presque, le traité. Leur "non" a exprimé les doutes profonds de nombre d'Européens, qui craignent de voir les technocrates décider de tout sans consulter les peuples, s'inquiètent de devoir abandonner leur souveraineté ou redoutent de perdre leur identité nationale noyée dans l'union renforcée.

Pour certains universitaires, la Suisse recèle peut-être des solutions. Il y a sans doute, disent-ils, des leçons à tirer de ce petit pays du vieux continent, nation alpine farouchement indépendante qui rassemble un mélange complexe de groupes ethniques et linguistiques dans un intérêt commun de paix et prospérité. "L'échec de la Constitution signifie que l'Europe va devoir tout repenser", estime Jonathan Steinberg, professeur d'histoire à l'université de Pennsylvanie, spécialiste de l'histoire et de la culture helvétique. "Les États de l'Europe seraient en fait mieux servis par une forme suisse de fédéralisme". À l'opposé de la tendance décriée de l'UE à prendre les décisions importantes dans le secret des bureaux de Bruxelles, la Suisse entretient une tradition de démocratie directe. Chaque année, au moins trois référendums nationaux sont organisés sur les grands sujets. Et les "votations" locales sont encore plus nombreuses.

La Suisse, qui compte 7,4 millions d'habitants, a choisi le système confédéral. Les petites communes qui gèrent les affaires locales sont regroupées au sein de cantons, qui sont autant de micro-États semi-indépendants unis de façon souple. Le gouvernement fédéral dans la petite Berne n'a ainsi que peu de pouvoir comparé aux capitales des États plus centralisés comme la France ou la Grande-Bretagne. "Ce qui rend ce système si original c'est qu'il préserve l'identité fondamentale de la communauté", souligne Jonathan Steinberg, auteur de "Why Switzerland?" ("Pourquoi la Suisse?").

Certains ont désigné les États-Unis comme un possible modèle pour l'Europe. Mais Daniel Kelermen, un expert du fédéralisme de l'université d'Oxford en Grande-Bretagne estime qu'un système moins centralisé à l'helvète est sans doute plus compatible. "Si on cherche des modèles, ce n'est pas forcément nécessaire de regarder de l'autre côté de l'Atlantique", remarque-t-il. "On peut aussi regarder au centre de l'Europe". Le modèle idéal ressemblerait ainsi "plus à la Suisse qu'aux États-Unis à bien des égards". Pour lui, l'Europe ferait bien de donner suite à certaines idées suisses, comme la dévolution du pouvoir et le système collégial de gouvernement, qui évite une trop grande personnalisation à la tête de l'État ou du gouvernement central.

La Suisse compte quatre langues nationales, l'allemand, le français, l'italien et le romanche, divisées pour certaines en une quantité de dialectes parfois incompréhensibles d'une vallée à l'autre. Sa démocratie directe et fortement locale a beau promouvoir des identités régionales fortes, les diverses communautés du pays sont restées unies malgré les turbulences de l'histoire européenne et la montée des nationalismes. "On devrait arrêter de prétendre qu'il n'y a qu'un peuple européen lorsqu'on écrit une Constitution", argue Kalypso Nicolaidis, maître de conférences en relations internationales à Oxford. "Le problème c'est qu'on a encore trop tendance en Europe à vouloir toujours centraliser davantage". (…) »

 

Les traces de la fête de l’Humanité (29 septembre)

Il faut que je vous parle un peu de l’ambiance chaleureuse de la fête de l’Huma (10 et 11 sept.) : d’abord, j’ai découvert José Bové que je ne connaissais pas et qui est attachant : souriant, généreux, cohérent, courageux… Un humain bien sympathique dont la lutte, parfois héroïque, semble exemplaire pour nous autres, trop timides citoyens :o)   Je vais lire ses livres et je vous en parlerai.

J’ai aussi découvert des militants humanistes et une réflexion politique généreuse et lucide, loin des caricatures qu’on lit dans les journaux à propos des communistes et autres résistants de gauche.

J’ai aussi rencontré Michel Onfray, qui semblait avoir naturellement sa place dans ce rassemblement de résistants à toute forme d’oppression. Son travail de longue date pour démystifier les religions complète et renforce notre réflexion pour des institutions authentiquement démocratiques.

Je remercie donc les organisateurs de cette fête populaire d’avoir permis à la fois ces précieuses rencontres et les passionnantes conversations qui se déroulent depuis.

J’ai de la chance :o)

 

Premières pages du livre de Montebourg (28 septembre)

Arnaud Montebourg (député) et Bastien François (professeur de droit public) viennent de publier un livre important et intéressant : « La Constitution de la 6ème République, Réconcilier les français avec la démocratie » (chez Odile Jacob).

Le premier livre de Montebourg, « La Machine à trahir, rapport sur le délabrement de nos institutions » (publié en 2000) était enthousiasmant : la perversité de nos institutions y est clairement démontrée et fortement dénoncée. Je voulais vous résumer ce livre pour vous aider à sentir son importance, mais je n’ai décidément pas le temps (vous trouverez un bon résumé, écrit par Giorgio Bocci à http://c6r33.free.fr/article.php3?id_article=22). Tous les français devraient lire "La machine à trahir" qui aide à comprendre que nous sommes tous concernés, quotidiennement, par ce problème institutionnel qu’il ne faut surtout pas laisser aux « experts ».

Le nouveau livre de Montebourg propose cette fois une Constitution. Chaque article est commenté. Je suis en train de le lire, et je retrouve avec plaisir à la fois l’énergie de Montebourg pour sauver la démocratie et de nombreuses propositions intelligentes de la C6R.

Mais il faut quand même lire ce dernier livre d’un œil vigilant car, sans l’avoir encore fini, j’ai déjà trouvé une disposition dangereuse.  Page 52, je lis l’article 2 de ce projet de Constitution :

Article 2 :

La France participe aux Communautés européennes et à l’Union européenne constituées d’États qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instituées, d’exercer en commun certaines de leurs compétences.

Dans ce cadre, elle consent aux transferts de souveraineté nécessaires à la mise en œuvre de ces traités.

Cette dernière disposition est un vrai chèque en blanc (c’est même une procuration permanente) qui permet tous les abandons, à l’insu de la population et même, éventuellement, contre sa volonté.

Il faut évidemment prévoir que le référendum est une condition de validité incontournable pour tout transfert de souveraineté.

Je rappelle que nos représentants ne sont pas propriétaires de la souveraineté populaire, ils ne peuvent pas en disposer. Nous serions bien fous de leur laisser cette possibilité (souvenons-nous que nos députés nous auraient livrés, avec 90% de Oui, aux institutions antidémocratiques de l’Union technocratique et lobbypnotisée).

Puis, dans les commentaires qui accompagnent cette proposition d’article 2, je lis (page 53) :

« La 6ème République (…) pose le principe général d’un transfert de compétences au profit de l’Union européenne sans référence à un traité précis et daté (ce transfert étant bien sûr organisé soit sous la forme de traités ratifiés par la France, soit sous la forme d’une Constitution européenne), et sans référence à une contrainte de réciprocité. La 6ème République est donc résolument européenne. »

Je ne reconnais pas là le style de Montebourg et je crois reconnaître plutôt une certaine "eurolâtrie" de Bastien François (qui nous exhortait à approuver le TCE : voir ma page ‘Échanges’ et nos arguments respectifs) dans ces commentaires qui abandonnent à nouveau, sans contrôle populaire, des règles protectrices essentielles sur l’autel du dieu Europe.

Je crois qu’il faut être beaucoup plus prudent et garder le contrôle de notre souveraineté qui peut, certes, devenir européenne, mais qui doit rester populaire.

Je trouve décidément inique que des changements institutionnels soient réglés à coup de traités, sans le consentement explicite des peuples eux-mêmes, alors que de si graves évolutions devraient évidemment être décidées par référendum. Quand les représentants d’un peuple transfèrent sa souveraineté sans l’accord exprès du peuple concerné, ces représentants trahissent leur peuple.

Je continue ma (lente) lecture et je vous tiens au courant :o)

Débordé (26 septembre)

Plus de dix jours sans vous écrire… :o)

Et pourtant je lis tous les jours des documents de plus en plus passionnants, vous êtes une ressource formidable. Qu’est-ce qu’elle est belle et importante, cette réflexion sur la démocratie !

Mais mes étudiants ont besoin de moi et ils sont prioritaires, bien sûr. Je suis plus lent à digérer vos idées et surtout à rédiger des synthèses ou émettre des signaux.  À l’évidence, j’ai pris l’habitude de vous écrire.  C’est fou comme cette histoire a changé ma vie… C’est fou.

J’ai une pile d’infos à vous signaler, je m’en occupe cette semaine, promis ;o)

 

Chroniques économiques (15 septembre)

J’ai enfin trouvé une bonne chronique économique : la chronique Économie d’Olivier Pastré, professeur à l’Université de Paris VIII et membre du Cercle des économistes, sur France Culture du lundi au vendredi à 7 h 15, est vraiment instructive :       
http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/matins/

Les archives des Matins de France Culture (et des chroniques d’Olivier Pastré, donc) sont d’ailleurs une mine inépuisable, avec des invités souvent passionnants : http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/matins/archives.php.

Quand on a subi tous les matins sur France Inter, pendant des années, l’écoeurante propagande néolibérale et les dogmes boursicoteurs de Jean-Marc Sylvestre, pensée unique imposée tous les jours sans contradicteur (à part le pauvre Bernard Maris qui n’a obtenu récemment que 5 minutes par semaine de temps de parole, le vendredi), on apprécie l’intelligence et la finesse d’Olivier Pastré, libéral modéré, humain, comme une bouffée d’oxygène.

Ses chroniques des mercredi 14 et jeudi 15 septembre poussent un cri d’appel au secours pour sauver les agriculteurs. « Les agriculteurs sont dans une misère noire » rappelle-t-il.

Olivier Pastré nous signale un rapport important (120 pages) de l’Institut Montaigne (www.institutmontaigne.org), « Ambition pour l’agriculture, libertés pour les agriculteurs» qu’on peut télécharger à http://www.institutmontaigne.org/site/page.php?page_id=114.

 

Une autre émission très intéressante, cet été, s’intitulait Économie pratique, économie savante, où Daniel Cohen,  professeur d'économie à l'Université Paris-I et à l'École normale supérieure,  libéral lui aussi, mais pas néolibéral, s’est entretenu tous les jours avec un invité dans le cadre de l’émission Quartiers d’été, le matin sur France Culture :     
http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/ete2005/quartiers_ete/archives.php.

 

Pléonasme exemplaire : insensibilité néolibérale (14 septembre)

La revue de presse de Jean-Louis Ezine, dans Les Matins de France-Culture du 12 septembre, a bien fait d’évoquer la colère du chroniqueur illustre du New-York Times, Bob Herbert :

« Bush s’est rendu dans le sud le 2 septembre et a prouvé, si c’était encore nécessaire, qu’il n’avait toujours rien compris. Au lieu de se préoccuper des habitants sinistrés, affamés, malades, mourants, il a parlé de choses et d’autres, racontant ses souvenirs de l’époque où il faisait la fête à la Nouvelle Orléans et observant que Trent Lott, sénateur républicain du Mississippi, avait perdu une de ses maisons, mais qu’il ne tarderait pas à la remplacer par une splendide demeure, allant jusqu’à ajouter "J’attends avec impatience le jour où je pourrai m’asseoir sous sa véranda…".

« Ce comportement, écrit Bob Hebert, restera parmi les pires réactions d’un Président à une crise nationale aussi grave. Ce que nous avons vu, c’est la dangereuse incompétence et la stupéfiante indifférence du Président et de son gouvernement à la souffrance humaine ».

Fin de citation, c’est dans le New-York Times.
Revue de presse à écouter à :
http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/matins/fiche.php?diffusion_id=34480



 

 

 

J’ai reçu le photo montage ci-contre. C’est bien vu.






Le chômage menace aussi les cadres : s’ils se révoltent à leur tour, cessant de collaborer docilement aux plans de licenciements profitogènes, on peut, enfin réunis, éradiquer cette régression humaine qu’est l’insécurité sociale (13 septembre)

C’est la rentrée, et le plus important c’est que Daniel Mermet et son équipe reprennent l’antenne (France Inter, du lundi au vendredi de 17 h à 18 h, indispensable émission Là-bas si j’y suis).

Ces jours-ci, c’est le chômage, et particulièrement celui des cadres, plutôt à l’abri jusqu’à présent, qui est décrit en situation réelle. Les émissions (il y en a plusieurs) sont intéressantes et aussi, bien sûr, le précieux répondeur, tribune ouverte aux auditeurs de France Inter, passionnant répondeur, amusant répondeur, formidable répondeur de Là-bas si j’y suis.

Idée forte : un cadre ayant conduit lui-même des plans sociaux du temps où il travaillait, sachant pertinemment qu’il abîmait des vies, réalise aujourd’hui dans sa chair la détresse du chômage qui dure (déjà six ans). La question n’est pas, pour les auditeurs, de lui pardonner ou de le condamner, distraits par le montant élevé de ses indemnités de chômage,  il s’agit surtout de faire prendre conscience du danger aux autres cadres, ceux-là qui sont les dociles complices des décisions de dégraissage pour un meilleur profit des actionnaires, pour qu’ils refusent enfin, eux aussi, de collaborer avec la machine financière néolibérale qui nous menace TOUS en nous opposant les uns aux autres.

Question : allons-nous accepter d’être finalement tous "en trop", ou allons-nous réagir avant ?

Écoutez les émissions du 12 et du 13 septembre : les archives sont à http://www.la-bas.org/
et le site officiel est à http://www.radiofrance.fr/chaines/france-inter01/emissions/labas/.

Par ailleurs, Daniel nous invite à nous retrouver, auditeurs de Là-bas si j’y suis, en créant des lieux de rencontre et de débat, café bar ou autre, repaires (repères) de Là-bas si j’y suis. Si vous avez envie d’en créer un, dites-le au répondeur de LBSJS : 01 56 40 37 37.

 

La sociocratie : force de l’auto-organisation (9 septembre)

Mieux que l’autocratie où un chef décide tout seul, mieux que la démocratie où la majorité impose sa loi à la minorité, la sociocratie (mot créé par Auguste Comte) essaie de permettre aux individus de s’auto-organiser, d’éliminer la relation sous-jacente du maître et de l’esclave.

Une intéressante recherche pour prendre des décisions comme le ferait un organisme vivant : en s’auto-organisant, c’est-à-dire en permettant à toutes les composantes de l’organisation d’exercer un pouvoir souverain sur la gestion de l’ensemble.

Des expériences concrètes existent, ça semble donner de bons résultats, c’est intéressant.

Gilles Charest, canadien, y voit une solution à de nombreux problèmes de vie en société : http://www.sociogest.ca/cms/index.php?id=34,0,0,1,0,0  (voir la page Articles).

 

Rendez-vous à la Fête de l’Humanité (5 septembre)

Invité à la fête de l’Humanité, samedi prochain 10 septembre à 14h00, j’aurai plaisir à rencontrer José Bové.

J’espère que nous aurons du temps pour réfléchir ensemble, avec vous, à ce que nous pouvons faire concrètement pour sauver la démocratie.

Le rendez-vous est sur le stand de la Société des Amis de l’Humanité :
http://www.humanite.fr/fete-rubrique.php3?id_rubrique=12183 .

 


 

Expérience démocratique (31 août)  (Lien)

Je viens de découvrir un projet formidable. Un site Web nommé « l’expérience démocratique » propose un projet de démocratie directe à grande échelle.

C’est enthousiasmant.


Description

Introduction

Actuellement, on considère qu’il est impossible de consulter tous les citoyen(ne)s sur chaque question qui se présente. En conséquence, pour mettre en oeuvre la démocratie, les citoyen(ne)s choisissent des « élu(e)s ». Ces élu(e)s ont pour mandat :

  de les représenter (auprès d’entités externes, par exemple à l’ONU pour un président de la république)

  d’effectuer les choix à leur place (en interne, par exemple le niveau des impôts locaux pour un maire)


La démocratie représentative représente un progrès incontestable par rapport aux situations antérieures. Il n’y a pas de système existant dans lequel les citoyen(ne)s aient autant la possibilité de s’exprimer et de peser sur les choix de société. Toutefois, la démocratie représentative comporte un grand nombre de problèmes. Parmi eux, certains sont dus à sa structure même :

  Désaffection du vote (due à la sensation légitime qu’ont les citoyens de ne pas peser sur les décisions qui les concernent)

  Corporatisme/clientélisme (encouragés par la stratégie du processus d’accession au pouvoir)

  Corruption (due au manque de contrôle sur les plus hauts niveaux de la pyramide)

 

Notre Projet

Intitulé « L’Expérience Démocratique », notre projet consiste à fournir les outils permettant de mettre en oeuvre une forme de démocratie directe à grande échelle. En effet, nous faisons l’hypothèse que les conditions sont peut-être enfin réunies pour permettre la consultation des citoyen(ne)s sur l’ensemble des sujets qui les concernent. L’Expérience Démocratique est basée sur trois grands principes :

  Permettre l’expression de tous les citoyen(ne)s, grâce à des outils Internet permettant a chacun de soumettre un vote, de proposer des réponses, et de voter

  Transformer cette expression en décision, grâce à une méthode de vote permettant de «révéler» au mieux la position d’un groupe

  Appliquer cette décision

 

Éléments concrets

Architecture

Le projet de l’Expérience Démocratique est basé sur une architecture client-serveur sur internet. Le client est un logiciel que possède chacun des membres de l’Expérience Démocratique, et qui permet de soumettre une question (sous forme de vote), de proposer des réponses, et de voter. Le serveur est un ordinateur qui centralise les votes, dépouille les scrutins, et conserve les résultats dans une base de données.

Type de scrutin

Le type de scrutin utilisé est la méthode de Condorcet, inventée par le mathématicien philosophe du 18ème siècle. Dans ce type de scrutin, les électeur(trice)s classent les réponses candidates par ordre de préférence. Une méthode mathématique simple pour le dépouillement permet de désigner le candidat vainqueur.

Exemple (…)

La suite sur www.demexp.org...

Un document simplifié donne envie d’en savoir plus :
http://www.demexp.org/non-spip/20040419ed-libreast.pdf.

L’idée, à terme, d’élire des députés "expérience démocratique" qui auraient comme mandat impératif de défendre honnêtement la position, actualisée en permanence, des membres actifs est vraiment séduisante et mérite que nous en parlions.

 


 

Arapèdes cratocrates (29 août)

J’ai souvent l’impression que notre démocratie est en fait une aristocratie.  C’est une erreur.

Aristocratie fait référence au pouvoir donné aux meilleurs et nous sommes loin du compte : ce ne sont pas toujours les meilleurs qui nous gouvernent. Il est donc dommage de déconsidérer ce mot "aristocratie" qui pourrait peut-être encore servir : pour rendre un sens positif à ce vieux mot, il faudra d’abord oublier l’imposture de l’Ancien Régime qui avait consacré une aristocratie héréditaire, au lieu d’imposer des contrôles et des remplacements fréquents qui auraient pu donner vie à une méritocratie confiant le pouvoir à ceux qui ont vraiment le plus de mérite, vraiment les meilleurs.

Je cherche donc un mot pour désigner notre système qui permet à une caste d’hommes au pouvoir (dirigeants politiques, dirigeants médiatiques, dirigeants économiques…) de ne rester au pouvoir que parce qu’ils sont parvenus au pouvoir sans réel contre pouvoir.  Le pouvoir par le pouvoir.

J’avais pensé à castocratie, mais j’ai continué à chercher.

Le mot monocratie existe, quand c’est un chef unique qui décide, mais ce n’est pas exactement ce que je veux pointer parce que c’est plutôt un groupe qui bloque les renouvellements. Parmi les mots qui se rapprochent de notre situation actuelle, mais sans correspondre tout à fait, nous avons aussi phallocratie où le pouvoir est réservé aux seuls mâles, ploutocratie qui donne le pouvoir aux plus riches, gérontocratie où les plus vieux sont au pouvoir et technocratie qui confie les manettes aux seuls techniciens. Je n’insiste pas sur l’eurocratie qui, sous couvert de beaux discours fraternels européens, déplace subrepticement tous les centres de pouvoir hors de tout contrôle citoyen.

Le mot existant qui irait le mieux est autocratie qui est le pouvoir exercé sans aucun contrôle. On y est presque, mais ce n’est pas tout à fait notre cas puisque les élections et certaines procédures de révocation existent et permettent théoriquement un contrôle, manifestement insuffisant, mais un contrôle quand même.

Il me fallait un autre mot, un nouveau mot : ils gardent le pouvoir parce qu’ils ont le pouvoir, ils se protègent entre eux. C’est un pouvoir légitimé par le seul fait d’avoir eu une première fois le pouvoir  malheureusement sans contre-pouvoir. Après, on n’arrive plus à s’en débarrasser. Par le jeu des amis et des partis, seuls habilités à présenter des candidats crédibles, par le cumul des mandats, par le jeu d’institutions pas assez démocratiques, les accès au pouvoir sont bien verrouillés et le pouvoir du peuple n’est encore qu’une vue de l’esprit.

Je propose cratocrate (du grec kratos "force, puissance" et du grec kratos "force, puissance" :o).

Nous vivons en cratocratie, où les arapèdes (berniques) au pouvoir se servent de leur pouvoir pour garder leur pouvoir, sans contre-pouvoir.    :o)

 

À ce sujet, on lira avec intérêt la chronique de Claude Allègre, « Renouveau démocratique », dans l’Express de cette semaine : http://www.lexpress.fr/idees/tribunes/dossier/allegre/dossier.asp?ida=434455.

 

(…) Ce manque de respect et de confiance pour les électeurs est un cancer de la démocratie ! Peut-on essayer de réagir, au lieu d'attendre une explosion qui, même si elle était salutaire, ne serait pas forcément salvatrice?

Il faut rapprocher la politique du citoyen. Un premier moyen qui, certes, ne sera pas suffisant mais qui me paraît nécessaire est de limiter totalement le cumul des mandats et leur pérennisation. Le gouvernement Jospin a fait un petit pas vers la limitation de ce cumul. Un seul mandat, de quelque nature que ce soit, national, local, exécutif. Un mandat qui devrait aussi être limité dans le temps. Deux mandatures pour toutes les fonctions électives. Ces dispositions devraient être générales et s'appliquer également aux fonctions syndicales nationales et locales.

Mises en œuvre immédiatement, ces mesures renouvelleraient quasi totalement la classe politique française. Enfin du sang neuf ! Elles interdiraient de fait la fonction d'élu sans métier, donc sans connaissance de la vie réelle, du travail. Elles obligeraient les élus à travailler, car, comme le proclame justement Nicolas Sarkozy, 80% des élus vont de réunion en réunion, mais ne travaillent pas, prétextant une surcharge de tâches à accomplir. Bien sûr, cela ne leur donnerait pas forcément du courage et de l'imagination, qui manquent à beaucoup, cela ne leur ferait pas passer le goût de la politique politicienne. Mais, leur situation n'étant plus pérenne, les élus se rapprocheraient de la France d'en bas, sachant qu'un jour ou l'autre ils seraient forcés d'y retourner.

Voilà un bon sujet de référendum ! Avec un résultat assuré.

 


 

Contre la servitude volontaire, l’apport philosophique de Michel Onfray (20 août)

Je vous avais parlé fin mai de cet excellent document de Michel Onfray, prof de philo enthousiasmant, qui s’intitulait ‘Contre la servitude volontaire’.  Le texte original, complet, est publié à : http://perso.wanadoo.fr/michel.onfray/CONTRE_LA_SERVITUDE_VOLONTAIREav05.pdf. 
Il faut relire de temps en temps ce texte important.

Depuis quelques jours, j’écoute les cours de philo de Michel Onfray sur France Culture, de 19 à 20 h, mais je l’écoute aussi depuis des semaines en voiture grâce à ses précieux disques, chaque fois que je le peux.

Je découvre donc la philo vraiment très tard, c’est savoureux et important, complètement lié à notre réveil politique à tous : la résistance à l’oppression (politique, sociale, religieuse ou autre) et la recherche de l’autonomie, d’une liberté respectueuse des autres, sont souvent au centre des objectifs des philosophes et Michel Onfray est un guide aussi savant qu’attachant.

Un lecteur (merci Yves) vient de m’apprendre que Michel Onfray a un site et j’y ai trouvé des documents intéressants comme « L’Europe des crétins », « La vie des cloportes » ou « L’insolente génération des traîtres » : http://perso.wanadoo.fr/michel.onfray/accueilonfray.htm.

N’est-ce pas cet enseignement-là qui manque aux citoyens pour que grandisse enfin une authentique démocratie ? N’est-il pas urgent de sortir l’enseignement philosophique de la prison de l’année de Terminale et lui donner sa chance d’épanouir à grande échelle la vie des hommes ?

Autre chose (c’est lié) : je lis en ce moment le tout petit livre d’Amartya Sen, « La démocratie des autres » (Manuels Payot, 2005). Cet indien, "prix Nobel" d’économie 1998, explique que la démocratie n’est pas du tout une invention de l’occident, et surtout que la démocratie n’est pas réductible aux simples élections, que la recherche du débat public avant de décider ensemble se retrouve partout sur terre et à toutes les époques.

Il me semble que ce débat public éclairé qui devrait précéder tout vote prend tout son sens avec l’éducation des citoyens, et à mon avis, particulièrement l’enseignement philosophique.

 

 

On a ce qu’on mérite (9 août)

Si on veut la démocratie, la vraie, c’est à nous de l’imposer, vraiment, au lieu de voter automatiquement pour des représentants qui ne jouent pas leur rôle et qui représentent plus leur parti ou eux-mêmes que les citoyens qui les ont élus.

Si la démocratie n’est pas une supercherie, les citoyens mécontents devraient pouvoir changer ce qui leur déplaît : ils ont grand besoin du RIC (référendum d’initiative citoyenne), RIC national et RIC local.

Si la démocratie est authentique, quand un élu ou un grand commis a trahi ou gravement démérité, les citoyens devraient pouvoir s’en débarrasser avant la fin de son mandat : c’est le rôle du  RIC révocatoire, national et local.

Si la démocratie a un sens, le peuple doit pouvoir se défendre directement contre une loi qu’il juge injuste : il doit pouvoir déclencher un RIC abrogatoire, national ou local.

Le signe tangible que la démocratie n’est pas qu’un mot creux qui aurait servi à flouer les peuples au profit d’une nouvelle aristocratie, c’est le RIC, outil puissant au service des citoyens pour décider eux-mêmes de leur propre sort.

Le RIC met une dose significative de démocratie participative dans la démocratie représentative.

Alors,  si on continue à voter pour des gens qui nous refusent obstinément ce droit élémentaire, tous les Jospin, Chirac, Strauss Kahn, Lang, Sarkozy et autres qui roulent en fait pour eux et pas pour nous, si on continue à voter pour eux, c’est bien fait pour nous, on a ce qu’on mérite.

Pour faire le point des promesses trahies par tous les partis sur ce sujet central pour nous tous, je vous recommande l’intéressant document, dressé par le tonique Yvan Bachaud, vice président du MIC, Mouvement pour l’Initiative Citoyenne (www.mic-fr.org), « Honte aux partis » : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Honte_aux_partis_Yvan_Bachaud.pdf

 

 

Extraits : « En 1988, dans sa lettre à tous les Français, François Mitterrand avait écrit que le référendum d’initiative populaire (RIP) était “ une aspiration profonde des Français ” et qu’il allait “saisir le légiste”.

Mais c’est seulement le 10 mars 1993, après cinq ans ! que F. Mitterrand (à la surprise générale selon Le Monde du 12 mars p. 8) a fait adopter par le dernier Conseil des Ministres de M. Bérégovoy un projet de Loi sur le référendum d’initiative populaire qui a été déposé sur le Bureau du Sénat où il est encore ! »

(…) « En 1993, avant les législatives, dans un fascicule électoral intitulé, “ La réforme maintenant ! », le RPR, présidé  par J. CHIRAC, avait écrit en quatrième de 20 promesses : “Création d’un droit d’initiative populaire permettant à un groupe important de citoyens de provoquer l’organisation d’un référendum sur un sujet donné. Dès 1993 le gouvernement proposera un projet de révision constitutionnelle.”

En 1993, après l’élection, la révision a bien eu lieu, mi-juillet, PAS pour le RIP, mais pour instaurer en hâte la Cour de justice de la République pour que les Ministres socialistes soient jugés par leurs copains parlementaires, dans l’affaire du sang contaminé ! » 

(…) « Sur l’Europe, c’est toujours, le même double langage de l’UMP :

MM JUPPÉ, GAYMARD, TOUBON ont rendu public le 21 juin 2000 un PROJET de Constitution européenne dans lequel est inscrit le référendum d’initiative populaire européen. MAIS une fois au pouvoir, il n’a pourtant pas été présenté et défendu devant la convention de VGE.

Moins de 40% de "participants" aux Européennes ! Félicitations aux Français qui ne sont pas dupes.

En effet, d’abord, alors que dans 10 pays sur 15 membres en 2003, les électeurs bénéficient du "vote préférentiel" qui leur permet de modifier les n° d’ordre sur la liste et donc de placer en position éligible les candidats de leur choix, en France tous les élus avaient été d’avance désignés par les états majors des partis !

Ce sont leurs représentants, pas ceux du peuple.

Ensuite et surtout, les "abstentionnistes" savent bien qu’après l’élection, ils ne pourront pas contrôler les directives que voteront les représentants des partis, puisqu’ils ne disposent pas du référendum d’initiative populaire européen pour abroger tout ou partie d’une directive ou en proposer une nouvelle. (…)

Même si on n’est pas d’accord avec toutes les interprétations d’Yvan Chabaud, et ce n’est pas si grave, son courage opiniâtre à soutenir cette cause (qui nous concerne tous) force le respect.

J’ai du mal à croire que tous les vieux partis nous trompent systématiquement sciemment, mais sur l’essentiel c’est-à-dire l’authenticité de la démocratie, ils nous refusent effectivement un rouage fondamental, et c’est donc à nous de créer non pas un parti (forcément englué par une discipline carcan et pollué par des luttes de pouvoir interne) mais un mouvement, un groupe de pression, pour imposer précisément cette évolution urgente de la démocratie, un groupe dont la disparition serait absolument programmée une fois son objectif atteint.

Une « démocratie » sans RIC est une escroquerie qui justifie des guillemets accusateurs.

Mais la démocratie se gagne : on ne nous la donnera pas.  Et même ce qu’on a déjà aujourd’hui, il faudra se battre pour le garder !  Oui vraiment, souvent, on a ce qu’on mérite : on pourrait commencer par cesser d’élire des gens qui nous maltraitent depuis longtemps.

 

Des institutions contre la sauvagerie (sélection naturelle) (4 août)

Encore une série d'articles poignants sur les atroces souffrances de civils innocents, martyr voulu par des "scientifiques" et "politiques" avides de "progrès" et fiers de leur effet de "dissuasion" : http://bellaciao.org/fr/article.php3?id_article=17628.

Lire notamment "Récits des jours d’Hiroshima" du docteur Shuntaro Hida : http://www.dissident-media.org/infonucleaire/temoig_hida.html.

Des années d'horreur indicible, aujourd'hui encore, et notre indifférence lamentable, distanciée, blasée, suicidaire, à la généralisation de ces armes folles.

Comment ne pas accabler les institutions qui ont permis à des dirigeants de commettre des crimes aussi épouvantables ?

Comme je suis d'accord avec Albert Camus qui criait, le 8 août 1945 :           

(…) la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l'utilisation intelligente des conquêtes scientifiques.

(…) Devant les perspectives terrifiantes qui s'ouvrent à l'humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d'être mené. Ce n'est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l'ordre de choisir définitivement entre l'enfer et la raison.

Ne faut-il pas imposer aux dirigeants de consulter directement leur peuple avant de l'envoyer mourir à la guerre ou avant de partir assassiner des humains lointains ?

Sauf urgence à se défendre, pas d'intervention militaire sans référendum.

Et ne serait-ce pas une prévention élémentaire, évidente, de tenir éloignés les "marchands de canons", (ceux qui s'enrichissent directement quand les tueries ont vraiment lieu), de toute fonction proche du pouvoir : éloignés du pouvoir politique, mais également éloignés du pouvoir médiatique ?

Je vais peut-être paraître provocateur, mais je ne le suis pas tant que ça : les peuples ainsi exterminés et torturés par les guerres ont été victimes de la sélection naturelle, comme nous le serons nous-mêmes probablement, bientôt, à notre tour : citoyens incapables d'imposer des institutions protectrices, ils sont morts dans d'atroces souffrances du fait de la barbarie débridée des dirigeants qu'ils ont laissé faire.

Cela n'arrive pas qu'aux autres : les habitants d'Hiroshima vivaient paisiblement, comme nous en ce moment, aussi indifférents aux malheurs des autres et aussi négligents de leurs propres institutions. 

Nous devrions tous contrôler étroitement nos représentants politiques.

 

Comédie de suffrage universel (27 juillet)

Michel Balinski professeur à l'École polytechnique et directeur de recherche au CNRS, vient d’écrire un bon papier dans Libération : « Le suffrage n'est plus universel ».     Extraits :

« La démocratie, explique le Robert, est "[la] doctrine politique d'après laquelle la souveraineté doit appartenir à l'ensemble des citoyens... ; [l']organisation politique dans laquelle les citoyens exercent cette souveraineté".

Les décisions récentes, des gouvernements de gauche et de droite, d'éviter toute refonte de la carte électorale prouvent le contraire : la démocratie française est devenue la doctrine d'après laquelle la souveraineté appartient aux élus... ; l'organisation dans laquelle les élus exercent cette souveraineté.  Les élus, ces compétiteurs exceptionnels qui sont à la fois les concurrents et les arbitres de la lutte électorale, conçoivent les règles du jeu pour préserver autant que possible le statu quo : que chaque circonscription reste ce qu'elle était pour maximiser les chances de son député actuel de remporter la prochaine élection. Ainsi le système électoral est redevenu une «comédie du suffrage universel», selon l'expression de Victor Hugo pour qualifier le système instauré par Louis Napoléon en 1852. »

Michel Balinski nous donne ensuite les grandes lignes du mode d’emploi du charcutage électoral ordinaire sous nos institutions, d’où il ressort, par exemple, que « une voix d'un habitant de la Lozère vaut plus que trois voix d'électeurs dans les Bouches-du-Rhône ».

La répartition actuelle des députés entre départements crée donc, à elle seule, des inégalités criantes, mais le découpage des circonscriptions, à l’intérieur des départements, renforce encore ces inégalités :

« En 1999 la deuxième circonscription de la Lozère ­ la moins peuplée de France ­ recensait 34 374 habitants, la deuxième du Val-d'Oise ­ la plus peuplée de France ­, 188 200 habitants : l'inégalité était de 447,5 %, deux habitants de la première de ces circonscriptions pesaient autant que onze habitants de la seconde. (…)

Répertorier les tailles étonnamment différentes des circonscriptions en 1999 à travers la France ­ et elles ne peuvent qu'être encore plus disparates aujourd'hui ­ suffit à démontrer le caractère fondamentalement anticonstitutionnel du découpage actuel. Les inégalités entre les circonscriptions d'un département ne dépassent pas 10 % dans seulement douze des cent départements. Or, il est facile de dessiner des cartes électorales par ordinateur en limitant les inégalités à l'intérieur d'un même département à moins de 10 %, tout en respectant les critères qui avaient été exigés en 1986 : quelques mois d'efforts suffiraient à redécouper équitablement la France entière ! (…)

Le suffrage n'est pas universel.  Le temps est venu d'établir un organisme entièrement indépendant des hommes politiques avec le pouvoir de formuler et faire respecter les règles de la compétition électorale. Aucune "modification à la marge" ne suffira : seule une refonte profonde pourra garantir un suffrage universel. Mais sans un suffrage universel réel il n'y a point de démocratie. »

Lire l’article intégral, très intéressant, sur http://www.liberation.fr/page.php?Article=313673.

 

Il faudra que nous pensions à cet aspect des choses dans la Constitution d’initiative citoyenne (CIC) que nous formulerons et il faudra y être attentif autant pour la France que pour l’Europe.

Rappelons en effet que, dans les institutions européennes, l’égalité des suffrages des citoyens européens est violentée pour protéger les États: ainsi, un citoyen maltais pèse politiquement treize fois plus qu'un citoyen allemand : les 82,5 millions d'Allemands ont droit à un député européen pour 860 000 habitants, tandis que les 394 000 Maltais un député pour 66 000 habitants.  Voyez l’intéressante synthèse du TCE de Robert Joumard :   
http://institut.fsu.fr/chantiers/europe/traite_constit/joumard.pdf, page 15).

 

Trotskysme ou trotskisme…  Et si on parlait de choses sérieuses ? (26 juillet)

Je ne voulais pas en parler, tant ça me paraissait futile, mais vous êtes nombreux à m’écrire pour prendre ma défense contre cet homme public qui riait de mon hésitation au moment d’écrire le mot trotskiste, mot plus que rare sous ma plume : « i ou y ? », m’étais-je demandé et l’avais-je avoué simplement au sympathique Jean Lebrun avant qu’un vaniteux ne s’esclaffe à côté de moi : « Quel enfantillage, enfin ! Peut-on parler publiquement de politique quand on est aussi ignorant ? Pourrait-on rester entre gens sérieux ? »  s’était exclamé en substance mon voisin (j’ai oublié son nom).

Pour mettre un terme à cette diversion, qui prête à sourire tant elle nous conduit au degré zéro de l’argumentation, je rappelle la définition du Petit Robert qui admet simplement toutes les orthographes : Trotski et Trotsky, trotskisme et totskysme, trotskiste et trotskyste… Qu’on se le dise :o)

trotskiste ou trotskyste [trэtskist] n. 
• 1926; de Trotski (parfois écrit Trotsky), pseudonyme de Lev Bronstein  
¨ Partisan de Trotski et de ses doctrines (le trotskisme ou trotskysme), notamment la théorie de la révolution permanente. Les trotskistes se sont réunis en 1938 dans la IVe Internationale. — Adj. Groupe trotskiste.

Quand on demande trotskysme à Google, il rend 9 700 pages Web qui utilisent cette orthographe. Et quand on demande trotskisme, Google renvoie 15 800 pages ainsi rédigées.

On fait donc comme on veut, et on peut recommencer à parler entre adultes de choses sérieuses ;o)

 

Je suis lent à vous résumer le précieux livre de Montebourg, et aussi à vous proposer une liste de principes essentiels qu’une authentique démocratie devrait respecter dans sa Constitution, liste à discuter puis à voter, entre citoyens, point par point : c’est parce que vous m’envoyez, et aussi que je déniche sur les portails, tous les jours, trop de références et de textes passionnants à lire et à digérer pour synthèse… Je n’ai pas le temps d’écrire comme je le voudrais :o)

Pour être honnête, j’ai aussi la chance de faire à nouveau des vols immenses, qui me prennent pas mal de temps : le 14 juillet, par exemple, j’ai décollé de Signes (près de Toulon) à 12 h 30, et je me suis posé à Allos (près de Barcelonnette) à 20 h 30, après huit heures de bonheur pur, d’aventures (des points bas affreux, peur de poser si tôt, des sorties de nuages étincelants, un vol serré avec un aigle…), sans autre moteur que l’air chauffé par le soleil qui monte jusqu’aux nuages, 125 km à vol d’oiseau, 5 h de retour en stop, et plein d’images féeriques à vous montrer pour partager, dès que j’aurai pris le temps de les mettre en page.   Tout ça aère bien les neurones :o)



À mi parcours, le lac de Sainte-Croix et, sur l’autre rive,
le plateau de Valensole et Moustier Sainte-Marie…
(Cliquez sur la photo pour l’agrandir)


Mais on a quitté, deux minutes, le sujet des institutions, pardon :o)

 

Dans les médias aussi, la liberté totale conduit à l’oppression du plus fort.
L’enjeu et les bonnes idées d’une loi sur les médias au Venuezela (24 juillet)

Je viens de dévorer un très bon article de Renaud Lambert sur le Venezuela qui, encore une fois, sert de prisme étonnant pour analyser notre société française :     
« Le prisme médiatique vénézuélien » :
http://www.acrimed.org/article2077.html

« Concentration de la propriété des médias, qualité déplorable des programmes, presse partisane en lien direct avec les forces politiques, réglementation obsolète, le Venezuela est un prisme qui nous éclaire aussi sur les situations française et plus généralement, européenne. Retour sur une loi et son contexte. (…)

R. Lambert décrit d’abord la violence des attaques que subit une loi prétendue scélérate sur les médias au Venezuela. Tout ça est édifiant, vraiment intéressant (un petit air de famille avec la diabolisation du Non chez nous).

Puis, il décrit la situation réelle (à son avis) et là, on découvre un niveau de concentration inquiétant et une opacité sur le sujet évidemment entretenue. On trouve surtout dans la récente loi des idées importantes pour organiser, chez nous aussi, l’indépendance et la pluralité des médias.

« Dans un tel contexte et avec neuf des dix quotidiens nationaux et six des sept grandes chaînes de télévision détenus par des intérêts capitalistes, le leurre du « libre marché des idées » ne tient pas. Selon cette logique, qui revient à associer liberté individuelle et liberté du marché, « le meilleur test de la validité d’une idée, c’est sa capacité à se faire accepter au milieu de la compétition du marché. » Mais, la liberté des entreprises - de presse ou non - a toujours valu plus que celle des citoyens au Venezuela. Déjà en 1953, un homme d’affaires américain écrivait : « Ici, on a la liberté de faire ce qui nous plaît avec notre argent : pour moi, cette liberté vaut plus que toutes les libertés politiques et civiles réunies ». N’en déplaise aux tenants d’une vision libérale du monde, la liberté de la presse est une médaille à deux faces indissociables, comme l’explique Henri Maler dans un essai à paraître : « la liberté d’expression doit s’entendre comme d’une part le droit pour les journalistes d’exercer leur métier à l’abri des pressions gouvernementales et financières, mais aussi, le droit pour les citoyens d’avoir accès à une information libre, de qualité et pluraliste. » Or ce droit des citoyens n’est pas respecté par les médias privés au Venezuela. Leur attitude, au moment du coup d’état, fut d’interrompre la couverture « en direct » de l’actualité afin de ne pas montrer les « manifestations monstres » de soutien à Chávez qui se mettaient en place partout dans le pays.

La liberté de la presse n’est garantie que dans la mesure où le droit d’informer n’est ni soumis à la tutelle du pouvoir politique ni assujetti aux objectifs commerciaux des groupes financiers. C’est donc une imposture de confondre la liberté de la presse et la liberté des entreprises de presse de faire et de produire n’importe quoi, n’importe comment. »

 

Puis R. Lambert décrit la loi en question.  Je retiendrai ici une idée que je trouve enthousiasmante :

« Le droit des citoyens à informer, eux aussi, est renforcé par l’affectation d’une portion du spectre radioélectrique qui est affectée aux médias communautaires. Par ailleurs, les opérateurs du câble et du satellite sont contraints à transporter gratuitement, jusqu’à un maximum de 15% de leur offre, les signaux des organes communautaires : c’est le principe du « must-carry », l’une des revendications fondamentales des médias alternatifs et communautaires en France. En effet, dans ces médias à but non lucratif, où l’on travaille souvent bénévolement, le principal problème est celui de la diffusion et de son coût, bien souvent inabordable. Lorsque la diffusion est assurée par le biais de mesures telles que le must-carry, des médias coupés de leurs publics trouvent enfin le moyen de se faire entendre.

Dans la logique de "participation" propre au Venezuela bolivarien, la nouvelle loi met en place des structures qui permettent aux représentants de la « communauté » de défendre leurs « droits relatifs à la communication ». Les opérateurs sont dans l’obligation d’apporter des explications ou des réponses dans les quinze jours à ces remarques de fond ou de forme qui peuvent porter sur l’accès aux archives, la participation à des consultations, la défense des droits des usagers de la radio et de la télévision, la mise en place de programmes d’éducation critique aux médias, la promotion du dialogue entre les médias, l’État et les usagers, etc. Cette participation des "usagers" aux médias se rapporte directement au projet bolivarien de « participation citoyenne », selon lequel « Toute personne a le devoir de remplir ses responsabilités sociales et de participer de façon solidaire à la vie politique, civile et communautaire du pays, en promouvant et en défendant les droits de l’homme comme fondement de la cohabitation démocratique et de la paix sociale. »

Nous sommes bien évidemment loin du modèle libéral de démocratie où les citoyens ne sont sollicités que pour le vote de représentants sans qu’il ne leur soit permis de participer activement à la vie politique du pays. De la même façon, les intérêts corporatistes des « professionnels » qui, dans la presse comme ailleurs, n’aiment guère que le public ne se mêle de leur travail, passent après le droit fondamental des citoyens à participer. La loi affirme donc l’apparition d’un nouvel acteur dans le paysage médiatique vénézuélien, le citoyen, à bien distinguer du simple "consommateur" de médias. Ceci passe par la création d’un Directorat et d’un Conseil de Responsabilité Sociale, décrits au chapitre V, article 20 de la loi, qui ont pour responsabilité de discuter et d’approuver les régulations techniques rendues nécessaires par la loi ainsi que d’établir certaines sanctions. Ils sont donc les garants de la lettre de la loi, mais surtout de son esprit. (…)

Petit à petit, il devient évident en Amérique latine que la réforme politique d’un continent dévasté par la dictature, les pouvoirs autoritaires et militaires, passe aussi par la réforme de situation de concentration et pouvoir médiatique hautement dangereux pour la démocratie.

Il est curieux qu’au même moment, les « vieilles démocraties » d’Europe et d’Occident laissent se refermer sur leurs médias l’étau des pouvoirs financiers concentrés et acceptent ainsi de voir la démocratie mise en danger sur leur sol. »

Tout ça est simplement passionnant. Il faut vraiment lire cet article sur le site d’Acrimed.

Je découvre vraiment le Venezuela contemporain comme un modèle de réflexion pour une meilleure démocratie.


Quand je pense au torrent de graves accusations que déversent régulièrement Alexandre Adler et d’autres chroniqueurs renommés sur l’expérience du Venezuela, je reste songeur.  Qui a raison ?

 

L’idée de la clérocratie, en lieu et place de la démocratie ? (23 juillet)

J’ai reçu de François Amanrich ce message plein d’esprit :

La démocratie est-elle soluble dans le peuple ?

Lorsque, en 1789, une partie de la bourgeoisie française se servit du peuple, essentiellement parisien, pour renverser la monarchie, elle n'eut jamais l'intention de partager le pouvoir avec quiconque. Et surtout pas avec le peuple. Elle avait instigué cette révolution pour ravir le pouvoir à la noblesse et ce n'était sûrement pas pour le donner à un peuple qui, plus est, ne demandait rien. Le peuple était l'outil de la conquête et, la victoire assurée, l'outil pouvait retourner dans sa caisse. D'autres révolutions se servirent du même outil... avec le même résultat. C'est le paysan qui profite du lait, pas la vache.

De république en république, la caste politique, finit, après bien des réticences, par appliquer un semblant de démocratie. En 1848 l'instauration du suffrage universel fut saluée comme une grande avancée démocratique. Bizarrement, bien que du genre féminin, la démocratie fut réservée aux hommes. En 1945, avec le droit de vote accordé aux femmes, le peuple eut le droit de choisir ses dirigeants. Enfin... eut le droit de choisir parmi les dirigeants proposés par la caste politique. Ce n'est pas parce que le mouton choisit son gardien qu'il devient berger.

Puisqu'il en avait la possibilité, le peuple essaya d'élire des dirigeants qui répartiraient équitablement, sur toutes les épaules, le poids de l'État. Il tenta un coup à droite puis un coup à gauche. Comme ça ne marchait pas, encore à droite, puis encore à gauche. Mais, chose étrange, plus les dirigeants changeaient, plus c'étaient les mêmes. Seuls, restaient les problèmes. Le fardeau pesait toujours aussi lourd sur les épaules du peuple. Les moutons portent souvent de la laine mais jamais de pull.

Alors le peuple en eut assez. Il finit par refuser le droit qu'on lui avait octroyé et préféra la pêche à la ligne aux urnes démocratiques. La caste politique s'en inquiéta, puis s'en accommoda, pensant avec sagesse : « Qu'importe la participation populaire pourvu qu'on garde le pouvoir ». De temps en temps, parce que ça coïncide avec ses intérêts, elle rappelle à grands renforts de menaces, les dangers de l'abstention. Parle de devoirs, elle qui ne connaît que ses privilèges. Promet de graves périls, elle qui est toujours là. Crie au loup. Mais quand le troupeau sait que son berger mange de la viande pourquoi aurait-il peur du loup ?

Alors, la démocratie est-elle soluble dans le peuple ? Pas celle que nous connaissons aujourd'hui. En fait, quand on regarde bien, le plus grand handicap de la démocratie actuelle, c'est le peuple !

Dans le système clérocratique...

François Amanrich (Porte-parole du Mouvement Clérocratique)   http://www.clerocratie.com

Les citoyens pétillent d’idées, dans un joyeux désordre tant ils sont nombreux. Il est passionnant d’essayer de catalyser tout ça en de substantielles améliorations de notre Cité.

C’est le charme de la période que nous vivons en ce moment :o)

 

 

Révélateur européen  et  réflexion sur nos institutions nationales (22 juillet)

Le débat référendaire, au moins en France, a servi de révélateur de l’état de nos institutions qui se dégradent depuis longtemps, et pas seulement dans le cadre européen.

Nos institutions, européennes mais aussi nationales, nous échappent progressivement jusqu’à atteindre un point où les citoyens n’ont plus de moyen institutionnel de résister. Les élections sont finalement le dernier vestige, largement illusoire, d’un pouvoir des citoyens qui est déjà devenu très théorique.

Nos mass médias nous échappent également, vendus et achetés comme des marchandises, soumis à la concurrence et à la concentration et donc à des contraintes de productivité et d’audimat souvent en contradiction avec leur mission d’information. S’impose ainsi une "pensée unique", dogmatique, de plus en plus clairement éloignée de l’intérêt général. Il n’y a pourtant que ces médias de masse qui peuvent permettre la naissance et l’évolution d’une conscience politique citoyenne, maintenant que nous sommes des millions à vivre ensemble. Leur indépendance et leur pluralité sont essentielles à la survie de la démocratie.

Notre liberté et la maîtrise de notre destin sont dans nos institutions qui n’appartiennent qu’à nous, nous tous, et dans nos moyens de communication qui font notre force.

Le sujet des institutions concerne donc tout le monde, il est accessible et il est essentiel.

À mon avis, si nous devions n’avoir qu’une préoccupation politique, dans notre vie quotidienne, elle devrait concerner notre Constitution, ce pacte de gouvernement entre nous et nos représentants qui établit tous les pouvoirs et surtout leur contrôle.

 

Je viens de lire deux bons livres dont je voudrais vous parler un peu.

Le premier est un petit livre de Paul Alliès, « Pourquoi et comment une VIe République » (Climats, 2002, 59 pages).  Paul Alliès est professeur de sciences politiques à l’Université de Montpellier I  et il est membre fondateur de la Convention pour la VIe République (www.c6r-fr.org).

La Ve République (la Constitution de 1958) porte en elle l’impuissance des représentants du peuple (les parlementaires) et l’irresponsabilité des décideurs qui n’ont finalement de comptes à rendre à personne. Ce simulacre de démocratie entraîne la désaffection des électeurs qui finissent par se rendre compte que, dans ce système, leur vote ne sert à rien.

 

Il ne suffit pas, bien sûr, d’affirmer tout ça : il faut le démontrer, c’est l’objet de ce petit livre.     
Voici son plan (mais il faut bien sûr lire le livre pour bien comprendre ce qui n’est qu’un résumé) :

I - Ce qui ne peut plus durer :

Un présidentialisme pervers
Le Président de la République a des pouvoirs immenses, encore renforcés depuis qu’il est élu au suffrage universel, sans aucun contre pouvoir. Comme un roi. C’est une dérive bien peu républicaine, bien peu démocratique.

Un exécutif divisé
La cohabitation, rendue possible par la double tête de l’exécutif, est incohérente et affaiblit l’exécutif. Mais surtout, la séparation entre Président et Gouvernement (seul à rendre des comptes) renforce l’irresponsabilité du Président.

Un parlement impuissant
Notre Parlement n’a pas le pouvoir de faire la loi, ni celui de consentir à l’impôt, ni celui de contrôler le gouvernement.

II - Ce qu’il faut changer :

Un régime primo ministériel
Le Gouvernement devrait émaner du Parlement, et lui rendre des comptes, effectivement. L’élection du Président au suffrage universel (qui fait de lui, matériellement et psychologiquement, un vrai roi) doit disparaître.

Un Parlement actif
Il faut d’abord absolument interdire le cumul des mandats, spécialité française aberrante et unique au monde. Il faut aussi donner du poids et un vrai pouvoir de contrôle à l’opposition pour qu’elle serve à quelque chose (lui donner un rôle dans la rédaction de l’ordre du jour de l’assemblée, par exemple). Il faut aussi remplacer le Sénat (qui bloque toute révision constitutionnelle sans mandat populaire et sans contrôle) par une chambre représentant les régions.

Des contre-pouvoirs légitimes
Le Conseil Constitutionnel, hors de contrôle, sans débats publics et sans mandat populaire, s’est progressivement arrogé un pouvoir constituant exorbitant (exactement comme la CJE l’a fait en Europe). Rien ne justifie que les représentants directs du peuple au Parlement soient ainsi ligotés par une institution aussi peu démocratique. Il faut mettre en place un vraie Cour suprême, émanation du Parlement et débattant publiquement sous contrôle citoyen. L’indépendance et la pluralité des médias devraient être garanties au niveau constitutionnel.

Un pouvoir local démocratique
Le Conseil constitutionnel, depuis 1982, limite de façon drastique, et arbitraire (le CC est nommé, il est hors contrôle et il ne débat pas publiquement), l’évolution de notre droit des libertés locales par une interprétation restrictive des articles qui prévoient pourtant que les collectivités locales « s’administrent librement ». Il faut inventer un vrai pouvoir local démocratique, en simplifiant les niveaux d’administration (suppression du département), en libérant la créativité des pouvoirs locaux, en décentralisant la vie politique (c’est possible grâce à l’interdiction du cumul des mandats et à un statut de l’élu qui protège bien), en permettant aux citoyens d’intervenir directement dans la vie locale (RIP, référendums d’initiative populaire).

III - Comment changer :

L’auteur résume enfin les modalités de révision de notre Constitution et rappelle que de nombreux obstacles peuvent se mettre en travers d’une initiative parlementaire : notamment, l’accord du Sénat qui est obligatoire, ce qui lui donne un vrai droit de veto qui permet à cette assemblée d’empêcher les citoyens de s’exprimer sur la révision par référendum. Il faudra donc franchir cet obstacle juridique (révoltant) pour faire évoluer notre Constitution.

Il faudra, à ce propos, dans notre prochaine Constitution, bien penser à éviter de tels verrous antidémocratiques.

 

Ce petit livre se lit très vite et il donne envie de lire le suivant :o)

 

On ne peut s’empêcher de rapprocher cette conception très antiparlementaire de nos institutions nationales de la façon dont s’est construite l’Europe depuis cinquante ans : construction par et pour les gouvernements, la plupart du temps sans consulter les peuples, sans débat honnête, et sans jamais donner un pouvoir prééminent  aux assemblées élues par les peuples, ni un pouvoir direct aux peuples eux-mêmes.

La Ve République, en affaiblissant les représentants des citoyens, infantilise les citoyens eux-mêmes et les éloigne du fait politique. La Constitution de 1958 n’est pas démocratique.

Cette situation n’est pas inéluctable, il ne faut pas traiter la Constitution de 1958 comme une vache sacrée : toutes les Constitutions évoluent et peuvent progresser, mais la révision qui s’impose aujourd’hui ne pourra avoir lieu que sous la pression populaire et à travers une assemblée constituante car, comme on l’a vu à l’occasion des institutions européennes, les pouvoirs en place, à la fois juges et parties, ne sont pas du tout impartiaux et, si on les laisse faire seuls, ils rédigent des institutions à leur avantage, c’est-à-dire où les contrôles sont factices et la démocratie simulée.

 

 

Je vous parlerai du deuxième livre, essentiel, un peu plus tard :o)

 


Il est en train de se passer quelque chose en Allemagne (20 juillet)

Emmanuelle, française expatriée, m’a envoyé cet intéressant message :

Bonjour,

Il est en train de se passer quelque chose en Allemagne. Les allemands n'ont pas eu droit à un référendum sur la constitution européenne. En revanche, ils vont vraisemblablement aller aux urnes avec un an d'avance. Et un nouveau parti dans le paysage politique !

Parce que le temps jusqu'aux élections du 18 septembre est très court, le (lui aussi nouveau) parti WASG - Wahlalternative für Arbeit und Sozial-Gerechtigkeit (en français "alternative électorale pour le travail et la justice sociale") et le rejeton de l'ancien parti communiste de l'Allemagne de l'Est encore bien implanté dans l'ex-RDA, le PDS, se mettent ensemble pour réunir les forces de gauche représentant une alternative au néo-libéralisme.

Les deux partis se sont regroupés le week-end dernier dans une alliance portant le nom de Parti de Gauche. Ses leaders sont côté WASG Oskar Lafontaine et côté PDS Gregor Gysi.

Leur programme est un programme sortant de la pensée unique: retraite minimum pour tous de 800 EUR, salaire minimum pour tous de 1500 EUR (il n'existe pas de salaire minimum en Allemagne), relance de l'économie par la création d'emplois par l'état, allocations familiales minimum de 250 EUR par enfant, assurance citoyenne dans laquelle les revenus des actions seraient aussi mis à contribution, mise en place d'un impôt sur les grandes fortunes, etc.

Ce parti est crédité pour l'instant de 11 % des intentions de vote, ce qui en ferait le 3e parti allemand. Dans les Länder de l'ex-RDA, il est même au-delà de 30 %, soit au-dessus du CDU (démocrate chrétien). Il monte dans les sondages, il ramènerait même des abstentionnistes aux urnes et de plus en plus de gens s'imaginent pouvoir voter pour lui. Pour l'instant, ce parti fait peur aux partis traditionnels et il est victime côté médias et élites politiques de la même chose que le NON en France : on ne parle pas beaucoup du fond, juste de la forme. Il y a de cela quelques semaines, les journaux se préoccupaient du nom qu'allait prendre cette nouvelle alliance et des difficultés qu'il allait y avoir à la réaliser des deux côtés.

Le problème est maintenant résolu : les délégués des deux partis (WASG et PDS) ont voté à plus de 75 % pour partir ensemble en campagne électorale. Oskar Lafontaine est critiqué, taxé de "populiste" et montré du doigt comme chassant des voix du côté de l'extrême droite par la classe politique traditionnelle parce qu'il a dit qu'il ne trouvait pas normal que les salariés allemands perdent leurs emplois du fait de la délocalisation ou de l'arrivée sur le marché du travail d'étrangers sous-payés (vous savez: le plombier polonais).

 

Pas grand-chose pour l'instant dans les médias sur le programme du Parti de Gauche, si ce n'est pour le fustiger en disant qu'il s'agit d'un retour en arrière et de propositions démagogiques. Et pour cause ! Relance de l'économie par la création d'emplois financés par l'état, imposition de tous les revenus, y compris ceux du capital, création d'une "sécurité sociale citoyenne" où chacun participerait en pourcentage de ses revenus, id. pour le système des retraites, représentent une politique en rupture avec le néo-libéralisme ambiant, avec la possibilité d'avoir un vrai débat sur les choix de société, ce dont les partis traditionnels ne semblent pas vouloir.

En France, on ne parle pas ou très peu du Parti de Gauche. Je viens de trouver un article en anglais disant que d'après des journalistes allemands (bien-pensants, cela va de soi), ce parti était un parti dangereux, populiste et démago. Étant donné que ce qui est ou va être véhiculé dans les médias français sera ce que les médias allemands diront de leur campagne, il existe un gros risque qu'en France, on n'en sache pas plus sur ce nouveau parti que l'on a véritablement lu en Allemagne les raisons pour lesquelles les français ont voté NON.

Comme ce sont cependant les mêmes raisons qui ont mis le NON à 55 % en France et qui font du Parti de Gauche le parti qui monte, je voulais attirer l'attention là-dessus : il y a un truc qui est en train de se passer de l'autre côté du Rhin, une remise en cause du néo-libéralisme au niveau politique qui pourrait faire de grosses vagues. Et M. Lafontaine n'est pas plus populiste que MM. Mélenchon ou Emmanuelli. Mais évidemment, dans la pensée dogmatique ambiante des faiseurs d'opinion, ils ont profondément tort. À suivre.

Emmanuelle

 

 

Liens en français:

Un article du Monde du 18/07/2005 sur le sujet :

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3214,36-673366@51-642773,0.html 

et  http://www2.dw-world.de/french/presse/1.145165.1.html

 

Sites en allemand : http://www.linkspartei.info/

et  http://www.w-asg.de/

 

Articles en allemand :

http://www.spiegel.de/politik/deutschland/0,1518,365832,00.html

http://focus.msn.de/hps/fol/newsausgabe/newsausgabe.htm?id=16893

http://www.zeit.de/2005/29/linksalternative

 

L'article en anglais dont je parle (traduit d'un article allemand paru dans Die Zeit) : http://www.signandsight.com/features/241.html



Question française : nos vieux partis sont-ils capables de défendre ardemment une réforme institutionnelle profonde ou faudra-t-il, chez nous aussi, faire émerger de nouvelles forces politiques ?

Autrement dit : le néolibéralisme (accepté aujourd’hui par les vieux partis du centre, à gauche comme à droite) est-il compatible avec une authentique démocratie ?

Est-il nécessaire, avant de réformer les institutions, de disposer d’un parti qui résiste vraiment à cette doctrine économique ? Ou bien faut-il d’abord rétablir des institutions démocratiques pour permettre un changement de cap économique, éventuellement d’initiative populaire ?

Les deux problèmes, économique et politique, sont sans doute liés, mais je ne sais pas si l’un doit trouver sa solution avant l’autre.

 

Scandaleux affaiblissement du programme REACH contre les risques chimiques (18 juillet) (Lien)

La lecture du "journal alternatif d’information militante" www.legrandsoir.info est éclairante. 

Qu’est-ce qui doit être prioritaire ? La logique économique du profit maximum et de la compétitivité, ou bien la logique politique de la protection des hommes et de notre environnement ? Voyez le cas emblématique du projet européen REACH sur le contrôle des produits chimiques et découvrez sa mort récente et scandaleuse pour raison de "guerre économique", guerre déclarée, comme d’habitude, par ceux qui ne souffrent pas au combat.

Lire l’article de Daniel Tanuro : « Europe : inaccessible politique des produits chimiques » :

Juillet 2005.

«  Nous sommes disposés à revoir notre position. Le résultat des études pourrait déboucher sur des modifications profondes. La Commission n’a pas adopté de position dogmatique  ».

C’est en ces termes que le nouveau Commissaire européen à l’Industrie, Günter Verheugen, s’exprimait en janvier dernier devant le Parlement Européen au sujet du projet européen REACH d’enregistrement, d’évaluation et d’autorisation des produits chimiques [1]. Cette déclaration confirme un tournant important.

Conçu initialement comme une « nouvelle politique » en matière de lutte contre la pollution chimique, REACH - Registration, Evaluation and Authorisation of Chemicals - a soulevé chez certains l’espoir que l’Union Européenne ferait passer la santé des populations avant le profit des multinationales. Mais l’espoir est parti en fumée. L’industrie chimique a mobilisé toutes ses forces pour torpiller le projet, les gouvernements l’ont appuyée et les partisans de REACH dans les institutions ont été bridés. La petite phrase de Verheugen ne laisse aucun doute sur les intentions de l’équipe Barroso. Une législation vraiment conséquente, avec le principe de précaution, est décidément inaccessible - unreachable - dans le cadre néolibéral.

Pour comprendre la bataille autour de REACH, il faut remonter plus de vingt-cinq ans en arrière. En 1976 exactement. A l’époque, (…)

La suite, importante, est à lire à : http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2490.

Ma question : comment rendre nos institutions fortes par rapport aux puissances économiques ? Quels textes juridiques fondamentaux pourraient remettre le politique au dessus de l’économique ? Comment protéger durablement les multitudes humaines contre la cupidité de quelques uns, aussi puissants soient-ils ? Comment éloigner les lobbies économiques des décideurs politiques ?

 

Encore une idée pour l’emploi : le TCSM, taux de contribution sociale maximum (7 juillet)

L’idée de TVA sociale fait son chemin dans les esprits.

Dans la même veine, voici une autre piste très intéressante pour préserver les emplois fragiles : elle consiste à ne pas toujours exiger, sans discernement, les mêmes charges sociales : je reproduis ci-dessous le texte de présentation rapide qu’en fait son auteur, Dominique Estérez
(lu sur un forum, http://communautes.hexali.fr/reforme_des_prelevents_obligatoires-t15314.html) :

TCSM :  Proposition de réforme des prélèvements obligatoires
Dynamiser l’activité et lutter contre le chômage

Bonjours,

Il y a quelque temps, j’ai débattu sur le forum France économie, d’une réforme que je proposais pour aménager nos prélèvements obligatoires afin de dynamiser l’activité et lutter contre l’exclusion et le sous-emploi.

Beaucoup de participants m’ont signifié leur sympathie pour la démarche et leur intérêt pour cette piste qui consiste à ajuster les prélèvements des actifs les plus fragilisés par un plafonnement à un Taux de Contribution Sociale Maximum par rapport à leurs valeurs ajoutées : le TCSM.

J’ai présenté cette réforme, un peu technique, mais dont les conséquences pourraient être humainement considérables, dans une note qui a été expédiée au Premier Ministre, début juin.

Je viens de créer un site Internet qui publie cette note avec le courrier envoyé à Monsieur de Villepin.

http://www.tcsm.fr/

Si vous souhaitez soutenir cette idée, allez-y et manifestez-vous : sondage en ligne, commentaires et diffusion de l’adresse du site comme de l’information, etc.

Dans la tourmente que nous vivons, c’est le moment ou jamais… de changer pour la bonne direction !

Merci de votre soutien.             D. Estérez

(Je précise, s’il en était besoin, que je n’ai ici aucun intérêt mercantile personnel)

Si vous êtes pressé, lisez au moins le principe et les illustrations, c’est vraiment astucieux :o)      
Le texte s’imprime mal (il est coupé sur sa droite) : j’ai créé un pdf qui s’imprime correctement.

À la recherche de l’essentiel (6 juillet)

Voici dix jours que je n’écris plus dans ce journal et pourtant je lis sans arrêt et je griffonne partout des notes pour résumer et formuler l’essentiel. Je dévore le livre étonnant, important, fondateur, de Montebourg, je m’alimente du livre révolté de Ziegler, de l’essai synthétique de Généreux, des thèses lumineuses de Lordon, des monuments de Polanyi, Chomsky et Attali… J’en ai trouvé encore quatre ou cinq autres qui ont l’air tout aussi passionnants. Je n’ai donc pas le temps, pas la tête à publier tout de suite.

Je vais m’éloigner un peu, digérer, et vous en parler à nouveau un peu plus tard :o)

Je suis à la recherche des principes fondamentaux que nous, citoyens, devrions exiger, je dis bien exiger, de nos institutions, aussi bien nationales qu’européennes. Des principes qui ne sont ni de gauche, ni de droite, des principes qui ne sont pas français mais universels, des principes consensuels qui ne demanderont pas des années de discussions pour tomber sur un compromis, des principes essentiels qui, précisément, ne supportent pas de compromis.

Pour tomber vite d’accord, partout à travers les peuples européens, il faut s’en tenir à l’essentiel.

Il faudrait que nous arrivions à proposer nous-mêmes, nous : citoyens, un texte fondamental, un pacte de gouvernement entre nous, hommes libres, et nos représentants.

Je vais écrire un nouveau texte qui s’appellera « Une bonne Constitution qui montrerait… »  ;o)

Je vais essayer aussi, si je peux, de rendre ce site plus interactif, pour nous rapprocher encore.

J’ai deux mois (les vacances) pour ça. Je sens que ça va passer vite :o)

Si vous avez des idées, n’hésitez pas à m’en faire part : je puise mon énergie dans la vôtre.

 

 

Mouvement pour l’initiative citoyenne, le MIC (25 juin)

De toutes les réformes institutionnelles dont l’urgence fut révélée par notre débat sur le TCE, la plus importante, à côté de la responsabilité réelle des acteurs politiques et de la prééminence du Parlement, me paraît être l’initiative citoyenne, c’est-à-dire la possibilité pour un grand nombre de citoyens de soumettre au vote de tout le pays une décision, quelle qu’elle soit.

C’est la réforme la plus importante et ce sera sans doute la plus difficile à arracher car elle permet, sur les sujets importants qui nous tiennent massivement à cœur, de court-circuiter nos représentants et de faire valoir directement notre volonté d’hommes libres. On peut deviner que nos représentants auront du mal à prendre concrètement ce risque politique, aussi démocratique soit-il. Il faudra donc sûrement leur imposer, si nous sommes d’accord sur ce projet.

En attendant, les initiatives citoyennes pour rédiger nous-mêmes des propositions d’institutions commencent à émerger.  Je vous transmets aujourd’hui un message reçu d’Yvan Bachaud :

Citoyens, aidez nous…

Assemblée constituante citoyenne française, c’est bien parti…

Pour  avoir rapidement une Constitution européenne démocratique au service des citoyens, le Mouvement pour l’Initiative Citoyenne (MIC) est en train de mettre en place une Assemblée Constituante Citoyenne Européenne (ACCE) issue de 27 Assemblées Constituantes citoyennes nationales.  Un appel est lancé aux  associations susceptibles de piloter une opération nationale.

UN seul impératif dans pour cette opération : les membres doivent être tirés au sort.

Le MIC pilote la mise en place de l’Assemblée Constituante Citoyenne Française.

Il a été décidé au départ de tirer au sort 300 personnes sur les listes électorales réparties sur tous les départements au prorata du nombre d’électeurs.

Nous avons commencé par un test sur le Rhône où il fallait 7 membres.

Nous avons eu la très bonne surprise de constater que nous avons obtenu nos 7 accords avec seulement 33 appels téléphoniques des personnes tirées au sort.

Nous avons peaufiné une méthode de tirage unique, partant de l’annuaire (donc vérifiable par tout le monde) puis se reportant sur les listes électorales également à disposition de tout citoyen.

Toutes les listes électorales sont à disposition de tout électeur à la Préfecture.

Il faut moins d’une heure pour établir la liste d’appel d’un petit département. La seule astreinte est qu’il faut se rendre une fois à la préfecture.

Le MIC lance un appel à tout citoyen voulant prendre en charge rapidement un département.

Nous contacter au plus vite… C’est bien parti…

À DIFFUSER LARGEMENT… Merci

Yvan Bachaud, Vice-président du Mouvement pour l’Initiative Citoyenne
Bayettant 69360 Communay  Tel. 04.72.24.65.02
E-mail : y.bachaud@mic-fr.org   site : www.mic-fr.org

Post scriptum :

Le Mouvement pour l’Initiative Citoyenne est une association totalement "apolitique" dont l’unique objet social est d’obtenir l’instauration du référendum d’initiative citoyenne à tous les niveaux territoriaux, de la commune à l’Union européenne.

UNE QUESTION DE BASE : êtes-vous favorable au RÉFÉRENDUM D’INITIATIVE CITOYENNE, en toutes matières bien sûr, et à tous les niveaux territoriaux ?

Merci de me répondre il faut 3 secondes.

Yvan Bachaud
Vice-président du Mouvement pour l'Initiative Citoyenne (MIC)
y.bachaud@mic-fr.org   Site: www.mic-fr.org   Tél. : 04.72.24.65.02  Bayettant 69360 Communay # LYON

 

Urgence des politiques keynésiennes pour réduire le chômage (24 juin)

Encore un entretien intéressant sur ‘Les matins’ de France Culture. C’était le 20 juin, l’invité était l’excellent Jean-Paul Fitoussi (voir adresse sur la page ‘Liens et docs’)

L’échec du Conseil Européen sur le budget est d’abord dramatisé par les éditorialistes de France Culture, selon lesquels cet échec serait une conséquence de la crise ouverte par le Non des peuples.

Mais l’échec est ensuite fort bien dédramatisé par Jean-Paul Fitoussi, selon lequel cet échec date en fait des années 1980 (!) et aurait eu lieu, bien sûr, quel que soit le résultat du référendum.  JP Fitoussi rappelle, en outre, que le budget de l’agriculture, ce n’est que 0,4 % du PIB (40 % de 1 %)… Si on en récupérait la moitié (pour mener une politique de recherche et d’innovation, par exemple), on n’aurait libéré que 0,2 % du PIB !

Le vrai problème de l’Europe, c’est l’insignifiance de son budget qui, entre autres causes, réduit l’Europe à l’impuissance devant le chômage, par l’aveuglement d’une « doctrine ».

Alexandre Adler donne ensuite une explication intéressante de l’incroyable disgrâce actuelle des politiques keynésiennes (relance de la demande par des grands travaux) : d’après lui, c’est la guerre du Viêt-nam, financée sans hausse des impôts, qui a déclenché une hyper inflation, exportée par le dollar, puis une stagflation, mal interprétées, qui ont permis le ‘retour à la mode’ des politiques libérales, hostiles à toute intervention étatique. Il observe pourtant que la croissance actuelle aux USA tient à une forte intervention de l’État qui dépense beaucoup (fort déficit budgétaire).

D’après JP Fitoussi, l’Europe est un très grand pays (par le revenu national), mais se comporte comme un petit pays, de façon orthodoxe, timide, alors qu’un grand pays est tout à fait capable, surtout avec une monnaie unique, d’avoir une politique autonome, keynésienne s’il le veut.

La croissance européenne dépend à 99% de la demande interne européenne, et pas de la compétitivité. Or, on ne se donne pas les moyens d’avoir une vraie politique européenne. Et on paie cette impuissance (volontaire) par le prix le plus grave de tous : le chômage de masse, qui est une plaie fondamentale pour nos sociétés.

Pour expliquer cet incroyable sabordage, JP Fitoussi défend une hypothèse : au Conseil Européen, chaque pays est jugé selon sa ‘réputation’, or il se trouve que depuis la révolution conservatrice (79-80), les ‘critères de la réputation’ sont devenus l’inflation basse, l’équilibre budgétaire et la concurrence, et nous les avons pris au sérieux.

Alors que nulle part au monde, ils ne sont pris au sérieux !

Par exemple, savez-vous que la zone Euro est la région du monde qui a le déficit budgétaire le plus faible (2,5 %) et pourtant, à entendre les journaux, on a l’impression que l’Europe et ses États sont en faillite, qu’ils n’ont plus les moyens de leur gestion, mais ce n’est pas vrai ! Le Japon a 7,5 % de déficit, les USA ont 6,5 % de déficit, la Grande Bretagne a 3,5 % de déficit et la Zone Euro a… 2,7 % de déficit ! Il y a quelque chose qui ne colle pas. Donc, nous nous sommes pris dans ce ‘jeu de réputation’ où chaque gouvernement au Conseil Européen croit qu’il doit montrer patte blanche (un certain niveau de souffrance de ses populations) pour que sa voix soit écoutée.

Pour JP Fitoussi, une solution crédible est un fédéralisme restreint, à 5 ou 6 pays, pour décider ensemble de façon volontaire (et en laissant les autres décider ce qu’ils veulent).

Encore une émission de radio bien intéressante, tout à fait liée à notre réflexion institutionnelle.

Nota : merci pour vos précieux messages, riches et affectueux, qui me donnent tant de force :o)

Le libre échange débridé est-il la cause de gaspillages et de nuisances graves ? (21 juin)

« Là-bas si j’y suis », l’émission modeste et géniale de Daniel Mermet, sur France Inter à 17 h, était encore bien intéressante les 20 et 21 juin (voir adresses sur la page ‘Liens et docs’) : on y a évoqué le transport routier très bon marché, la mise en esclavage des chauffeurs routiers, le nombre grandissant des poids lourds sur les routes, avec les nuisances, les gaspillages et les dangers associés, et le rapport entre cette incurie écologique et le libre échange dogmatique.

Par rapport à notre sujet constitutionnel, se pose la question des transports inutiles générés par le libre échange, motivé uniquement par le profit : on y apprend, et l’exemple est très parlant, que des crevettes danoises traversent l’Europe en camion pour aller se faire décortiquer au Maroc, puis reviennent au Danemark, toujours en camion, pour y être conditionnées, puis repartent en Europe, devinez par quel transport, pour finir dans nos rayons après avoir parcouru combien de milliers de km inutiles ?

Faut-il vraiment s’en remettre totalement aux choix du marché (myope, égoïste, cynique, courte vue, etc.) pour déterminer le degré d’échanges, et donc de transports, et donc de gaspillages et de destructions des ressources de la planète ?

L’État et la puissance publique n’ont-ils pas un rôle régulateur évident à jouer ?

On apprend au passage que le ministre des transports italien est personnellement propriétaire d’une entreprise d’autoroutes, ce qui doit bien le gêner un peu pour favoriser le ferroutage. Je lis cette aberration à ma manière, avec mes ‘lunettes’ actuelles : comment les institutions (une Constitution) peuvent-elles imposer le respect de l’intérêt général ?

Dans l’émission "Là-bas si j’y suis" du 21, un membre du conseil scientifique d’Attac défend l’idée de relocaliser l’économie pour diminuer les transports. Pour rendre le transport routier dissuasif, plus cohérent avec ce qu’il coûte vraiment, il faudrait introduire les coûts externes du transport (pollution, santé, accidents, infrastructures…) dans son prix, grâce à une taxation spécifique.

Les Suisses ont précisément, par référendums d’initiative populaire (RIP) :

·       interdit la circulation des camions à travers la Suisse (au profit du rail) : un article constitutionnel d’origine directement populaire entérine donc désormais cette priorité du rail sur la route,

·       interdit l’augmentation de la capacité des routes qui traversent la Suisse,

·       imposé une taxe sur les poids lourds, malgré les pressions de l’Union européenne (avec qui la Suisse a un accord bilatéral),

·       et imposé la construction de deux tunnels ferroviaires de basse altitude à travers les Alpes…

Je trouve décidément ces RIP bien séduisants, un vrai progrès de la démocratie, à conquérir.

La Suisse serait-elle aussi un « laboratoire du Non » ? :o)

Quant à l’Union européenne, pour protéger le sacro-saint libre échange, elle lutte contre ces initiatives écologiques : elle empêche que la taxe sur le transport routier augmente !     
On note aussi que l’UE a déjà imposé à l’Autriche de renoncer à une taxation de ce type.

Indispensable émission de radio :o)

Imposer la Partie I par voie parlementaire ? (18 juin)

Certains partisans du TCE déçus prétendent que la partie I n’a pas été contestée pendant le débat et qu’elle faisait consensus (« le téléphone sonne » du 17 juin, voir page « Liens et docs »).

Ils en déduisent qu’on devrait donc aujourd’hui l’imposer à part, sans référendum bien sûr, pour garder le meilleur du TCE, dans l’urgence de la crise.

Ces gens-là ne manquent pas d’air.

On constate, ici encore, le peu d’attention que les défenseurs du traité ont accordée aux arguments développés par les opposants au traité pendant des mois.

C’est la Partie I, en effet, qui décrit les rouages inacceptables de la post démocratie : confusion des pouvoirs au profit du pouvoir exécutif, faiblesse marquée du pouvoir législatif, lois sans parlement, absence de contrôle des pouvoirs, influence nulle des citoyens sur leurs représentants et sur les politiques menées, pouvoir judiciaire directement dépendant de l’exécutif, banque centrale hors de contrôle, équilibre budgétaire imposé, etc.

Alors prétendre qu’il est possible, malgré les référendums français et hollandais massivement négatifs, de mettre en vigueur cette Partie I par voie parlementaire, c’est montrer encore une fois le mépris du suffrage universel qui suinte partout chez ceux qui ont pris, depuis trop longtemps, l’habitude de tout décider sans jamais en référer aux citoyens.

Le désordre actuel est propice aux évolutions : on sent déjà des inflexions dans les préoccupations (apparentes) des responsables.

Il faut que nous, citoyens sans pouvoir, soyons capables de lister nos exigences fondamentales, mais de façon courte et simple : une liste lisible et compréhensible par tous, une liste capable de réunir un vrai consensus international, de gauche à droite. Si une exigence fait débat, litige, on la retire : il ne faut garder que le socle de ce à quoi on tient vraiment tous.

Il faudrait que cette liste soit une sorte de pétition point par point, que chacun pourrait signer et commenter point par point.

Ce n’est pas encore une Constitution, mais ce sont les principes que nos Constitutions, européenne mais aussi nationale, devront respecter.

Car la 5ème République mérite, elle aussi, les plus graves reproches : nous sommes, en France, déjà largement en post démocratie. Le sens de l’Histoire serait, à la faveur d’une politisation des citoyens comme celle que nous vivons en ce moment, d’améliorer nos institutions de façon significative : création de référendums d’initiative populaire, mandats uniques et non renouvelables, suppression des ordonnances (lois sans parlement), tirage aux sort des citoyens représentant les autres ?, etc.

Je suis en train de lire un bouquin décapant, passionnant : il s’appelle « La machine à trahir » et c’est Arnaud Montebourg, jeune parlementaire, qui l’a écrit en 2000 (Denoël).   À suivre… :o)

 

 

Médiatisation pour accélérer la contagion démocratique (17 juin)

Ça y est, la version anglaise du texte « Une mauvaise constitution… » est prête et publiée :o)

Elle permettra à d’autres citoyens du monde de comprendre que la crainte des Français n’est pas seulement économique, mais aussi et surtout juridique : les institutions proposées dans le TCE ne sont pas du tout démocratiques.

C’est une bonne raison d’y résister et de dire Non, Non à ce texte-là et pas du tout Non à l’Europe.

Ce matin, l’émission ‘Today’ de la radio BBC devrait parler de l’aventure de ce site, comme devrait le faire, si tout se passe comme prévu, le journal de Canal plus, dimanche 19 juin à 12 h 40… :o)
On peut voir ce journal à
http ://www.canalplus.fr/tpl108.htm&cid=13139&getTitle=1&nopub=1.

 

 

Flexibilité : le ‘mot de la fin’ d’Alain Rey (15 juin)

Stéphane m’a fait passer ce précieux message :

Alain Rey (dictionnaire « Le Robert ») a une petite rubrique de 5 minutes  chaque jour à la fin du 7/9 de France Inter. Un peu de fraîcheur (…)

Une chronique récente (07/06) était consacrée au mot « Flexibilité ». C’est un véritable chef-d’œuvre : http ://www.radiofrance.fr/chaines/france-inter01/information/chroniques/chronique/archives_rey.php?chronique_id=50

Pour écouter l'émission sur la "Flexibilité" cliquez sur... "Pervers"  (ça ne s'invente pas !!!)

Ça dure 5 minutes, mais on peut rester des heures à  écouter les autres...

Une proposition passionnante pour lutter contre le chômage (12 juin)

Les 12 000 messages (!) que j’ai reçus depuis deux mois sont une mine d’intelligence inouïe, une immense énergie positive :o) 

Je distille doucement cette réserve, puisque le courrier quotidien se calme après le vote.

Je vais ici encore assurer le relais et vous livrer tel quel un message passionnant, écrit par Carole qui se présente en détail mais qui souhaite rester anonyme ici.

Son message est double : elle décrit d’abord une idée séduisante sur le financement de la protection sociale par la TVA pour tirer la protection sociale de tous les pays vers le haut, c’est la TVA sociale, et elle lance ensuite un appel à concrétiser notre éveil politique par l’adhésion à un parti.

Dans mon esprit, cet appel citoyen est révélateur et vaut pour tous les partis, de gauche à droite : notre démocratie ne peut vivre et progresser que si les citoyens se politisent concrètement.

Bonjour,

Je lis votre journal tous les matins maintenant. Merci de continuer le combat !

NON, nous n'avons pas fait "une bêtise" : c'était la seule façon de pouvoir espérer changer les choses.

Mais ce n'est évidemment pas suffisant, d'autant que je regrette que les arguments démocratiques ne soient jamais vraiment venus au premier plan du débat grand public, alors qu'il me paraît essentiel de montrer qu'il y a un lien de cause à effet entre la carence démocratique des institutions et la conduite de politiques économiques contre le peuple. (Je suis d'accord avec beaucoup qui disent maintenant qu'il faut traiter séparément la question institutionnelle et la question économique, mais je frémis chaque fois que j'entends dire que la partie institutionnelle serait consensuelle.)

Pour la suite du combat, je suis inquiète comme vous quand je vois le PS se contracter : Hollande lundi, Strauss-Kahn aujourd'hui (oui, ça me coûte, mais j'écoute encore France Inter, où Paoli me semble se faire discret, alors que Guetta veut à tout prix montrer qu'il avait raison). Pour cette raison, j'ai une proposition à vous soumettre, qui est l'objet de mon mail, mais je dois faire un détour et me présenter (un peu) d'abord.

Je suis sympathisante PS. (Comme je comprends bien que vous appréciez de pouvoir situer vos interlocuteurs, je précise accessoirement que je suis (…).

Ma motivation était de répondre à l'appel pour le projet 2007, d'essayer d'apporter au moins une idée qui me tient à coeur : lutter contre le chômage en transférant le coût de la protection sociale des salaires vers la consommation, via la TVA.

[Parenthèse sur ce sujet qui ne coule pas de source (je sais que la TVA est taboue à gauche, et je ne vois d'ailleurs pas d'autre raison à l'absence de débat sur "la TVA sociale" - comme certains l'appellent) :

·     La TVA est un instrument que nous maîtrisons encore (à la hausse, seulement...), en dépit de l'OMC et de l'Union. (Cet argument est logiquement annexe, mais c'est essentiel du point de vue de la faisabilité de la démarche : elle n'exige pas de rupture majeure avec notre environnement international.)

·     Le transfert du financement de la sécurité sociale des salaires vers la consommation via la TVA permet de supprimer le biais énorme entre les produits nationaux et les produits venus des pays "esclaves" (Chine, Inde ...) où nos entreprises se délocalisent allègrement.

Voici le biais dont je veux parler : chaque fois qu'un bien est produit en France, contrairement aux pays à protection sociale faible ou inexistante, nous produisons en même temps de l'allocation familiale, de l'assurance chômage, de l'assurance vieillesse ... Très bizarrement, ce biais n'est jamais mentionné par les chantres de la concurrence libre et non faussée (évidemment parce qu'ils espèrent que le forçage de la concurrence le fera disparaître par disparition de la sécurité sociale, cette terrible externalité positive de l'économie que le modèle libéral néglige fort commodément).

Pour bien faire comprendre pourquoi la TVA permet d'agir sur ce biais, je rappelle que les échanges transfrontaliers (y compris au sein de l'Union) se font en prix hors taxe : la TVA est payée par le consommateur final selon le taux du pays du consommateur. Donc, en transférant le financement de la protection sociale sur la consommation via la TVA, c'est chaque fois qu'un bien est consommé en France, indépendamment du pays d'origine et de son niveau de protection sociale, que nous pouvons financer en même temps de l'allocation familiale, de l'assurance chômage, de l'assurance vieillesse ... (Remarquons au passage que dans cette configuration nous n'avons plus à avoir peur de la directive Bolkestein et que le plombier polonais qui viendrait faire de la plomberie en France premièrement ne pourrait plus guère être moins cher que le plombier français (qui se fait rare), deuxièmement contribuerait à la sécurité sociale en France comme le plombier français - à condition de savoir récupérer la TVA sur sa prestation.)

Le résultat de la suppression du biais induit actuellement par le financement de la protection sociale par la production, c'est de démotiver les délocalisations, et de manière générale de réduire très considérablement la pression sur la variable d'ajustement qu'est (assez logiquement) devenue la masse salariale.

En corollaire, le résultat de la suppression de ce biais, c'est aussi de rendre aux produits nationaux une compétitivité à l'exportation que toutes les politiques de compression de la masse salariale par les licenciements n'atteindront jamais. Il faut être conscients que le coût de la main d'oeuvre en France est pour l'employeur le double du salaire net touché par le salarié, la différence étant les charges patronales et salariales qui financent la sécurité sociale. Si l'on considère, à la louche et en moyenne, que le prix de revient d'un produit national comprend 50% de coût de main d'oeuvre, comme la moitié de ce coût correspond au financement de la protection sociale, c'est de 25% que l'on peut faire baisser le prix de revient des produits nationaux à l'exportation.

On voit donc aussi que, pour bien faire, il faudrait que la démarche englobe nos partenaires européens avec lesquels nous avons beaucoup d'échanges, l'Allemagne en premier lieu. (Je verrais là une très belle initiative franco-allemande pour reprendre la main sur l'économique - et enchaîner sur les institutions ensuite.)

Pour conclure l'argumentaire "positif" : le Danemark a accompli la réforme du financement de sa protection sociale (modèle) par la TVA depuis 1987 ; le Danemark a un taux de chômage voisin de 6%.

Il faut maintenant répondre rapidement aux objections qui se présentent.

·     Le transfert du financement de la sécurité sociale des salaires vers la consommation via la TVA n'est pas inflationniste pour les produits nationaux (ni pour les produits issus des pays européens à forte protection sociale qui suivraient la même démarche) : le prix hors taxe baisse d'autant que les taxes montent. (Ca, c'est en global, avec des différences d'un produit à l'autre selon la part de main d'oeuvre qui entre dans la composition du prix, sauf à moduler la TVA en fonction des produits pour ne pas bouleverser le système de prix - mais je laisse ce débat pour plus tard.)

·     Il est évident par contre que les produits chinois ... seraient plus chers. C'est aussi le cas si l'on utilise la dévaluation monétaire pour favoriser les exportations (la dévaluation de l'Euro n'étant cependant pas, en l'état des traités, un instrument à notre portée : cf. les critiques sur les statuts de la BCE).

·     L'instrument TVA n'est cependant pas protectionniste (les taxes à l'importation, qui sont des instruments protectionnistes, ne sont plus à notre portée cf. OMC ...) puisque l'instrument TVA ne fait que supprimer un biais concurrentiel : on dirait plus justement qu'il est "anti-antiprotectionniste". C'est même un instrument très moral car, au lieu de tirer les pays à forte protection sociale vers le bas, il tire leurs concurrents vers le haut. (Il faudra bien un jour dire que les Chinois sont au moins autant nos esclaves que les voleurs de nos emplois, puisqu'ils produisent des richesses dont ils ne voient jamais la couleur.)

·     Le transfert du financement de la sécurité sociale des salaires vers la consommation via la TVA n'est pas "injuste", en tout cas pas plus qu'aujourd'hui, puisqu'il se fait à prix constants à la consommation - sauf pour les produits des pays "esclaves". Comme aujourd'hui, cette injustice peut se corriger par l'impôt sur le revenu et la redistribution sociale : puisque, en accomplissant ce transfert vers la TVA, on fiscaliserait la protection sociale, on pourrait aussi imaginer que les bas revenus se verraient attribuer, sur la base de la déclaration des revenus, un revenu complémentaire de redistribution (sorte d' "impôt négatif"). Remarquons enfin que le financement de la protection sociale par les salaires, outre qu'elle ne fonctionne plus, n'est pas particulièrement juste non plus.

Je pourrais approfondir et je souhaite vraiment qu'un débat grand public puisse naître sur cette proposition anormalement absente de la scène médiatique, mais je referme provisoirement cette parenthèse déjà plus longue que prévue.

Une dernière remarque quand même : parmi les instruments non encore essayés pour lutter contre le chômage, outre ceux cités ci-dessus et dont on voit que seule la TVA est accessible aujourd'hui, il reste celui proposé par Sarkozy (et même certains à gauche si j'ai bien entendu Védrine mardi !) : la flexibilité ... !

Donc ce débat que j'appelle est vraiment vraiment urgent. (fin de la parenthèse)]

J'en viens maintenant à ma proposition d'action concrète, qui repose sur l'analyse suivante.

Le PS est le seul parti qui peut porter le changement au gouvernement, en tout cas de manière non violente.

Mais cela suppose qu'il représente ses électeurs, lesquels ont massivement voté non.

Or la direction continue à se réfugier derrière ses militants, qui avaient voté oui, pour refuser de se remettre en cause. (J'ai entendu un proche de Hollande parler du "bouclier des militants" qui le protège.)

Strauss-Kahn a encore dit ce matin que le rôle d'un parti est de proposer ce qu'il croit être bien, et qui est déterminé par le vote des militants, et de voir ensuite si les électeurs y adhèrent.

Par ailleurs, il faut être conscients que la moyenne d'âge des quelque 100 000 militants PS est de 60 ans (je dis bien la moyenne !). Je confirme qu'à 32 ans je suis, de très loin, la benjamine de la section que je fréquente.

Il faut être conscients que c'est parce que moins de 9 000 militants PS, faisant confiance à leurs chefs, ont choisi de voter oui (comme les plus de 60 ans en général) plutôt que non au référendum interne, que le PS a défendu le oui au lieu du non.

Donc : pour que le PS nous représente, nous ses électeurs, et pas seulement les militants actuels, il devient urgent d'adhérer au PS pour peser sur ses propositions !

C'est aussi ça, le problème de la démocratie, de toujours compter qu'il se trouvera bien quelqu'un pour nous représenter. Ce n'est plus le cas le aujourd'hui, si Strauss-Kahn et Hollande arrivent à marginaliser Fabius, Emmanuelli et les autres en s'appuyant sur des militants dont on attise l'esprit de revanche. (Il faut entendre dans les réunions PS l'agressivité et les cris de haine sur le thème "Fabius et les autres ont fait perdre le parti, alors qu'on était si bien partis pour 2007 après les élections de 2004".)

Donc, concrètement, ma proposition est d'utiliser l'outil Internet et notamment le pôle de référence que votre site est devenu dans la bataille du Non pour demander à un maximum de monde, s'ils partagent cette analyse, d'aller prendre vite une carte d'adhérent au projet du PS (10 euros, dont 6 récupérables sur les impôts), à l'inverse des militants socialistes du non qui déchirent leur carte de désespoir.

Je crois avoir dit pourquoi c'est nécessaire. Cela a en outre le mérite d'être vraiment faisable : quelques dizaines de milliers de personnes suffiraient. Vous avez montré que vous pouvez toucher ce nombre.

Êtes-vous d'accord pour essayer ?

Merci d'avance.

Merci de toute façon pour ce que vous avez fait jusque-là.

Carole

 

La post-démocratie en pratique : gouverner sans le Parlement (10 juin)

Je m’étonne que la décision de gouverner par ordonnances ne soulève pas une insurrection : cette possibilité qu’offre la 5ème République au gouvernement de légiférer sans le Parlement trahit la violence potentielle que notre Constitution porte contre le peuple qu’elle est censée protéger.

Je ne développe pas encore ce point essentiel car je suis en colère, et on ne fait rien de bon sous l’emprise de la colère.

Le néolibéralisme en pratique : retour au 19ème siècle (9 juin)

Déréguler, c’est interdire à l’État d’interdire.

Le Premier ministre, Dominique de Villepin, dans son discours de politique générale, vient de proposer la création d'un contrat de travail "nouvelle embauche" pour les très petites entreprises, avec une période d'essai allongée à deux ans, un dispositif moins contraignant pour l'employeur - ce qui a suscité de vives réactions sur les bancs de l'opposition de gauche.    (http://fr.news.yahoo.com/050608/290/4gcz3.html)

Je vous transmets ci-après un message important qui circule sur le net. Il vient de Gérard Filoche, inspecteur du travail et donc fin connaisseur du droit du travail et défenseur institutionnel des salariés :

« Une “période d'essai”, qu'est-ce que c'est en droit du travail ?

La possibilité d'être mis à la porte sans aucune procédure, par oral, sans lettre, sans motif, sans recours, seulement parce que l'employeur l'a décidé, et il pourra le décider dorénavant à deux ans moins un jour...

Toutes les discriminations deviennent possibles... 

Le “jeune” ou le “senior” pourra se défoncer pendant deux ans, être soumis, accepter les heures supp'  impayées, les tâches les plus ingrates, en dépit des risques en matière de sécurité ou de santé, il devra être flexible, malléable, corvéable, et au bout du bout, il sera renvoyé, chassé comme un valet, comme au 19ème siècle, voilà ce que viennent d'inventer MM Chirac et De Villepin, une attaque sans précédent contre le droit et le contrat de travail...

Gérard Filoche, membre du Bn du Ps, D&S, Nps, inspecteur du travail. »

Ce qui est particulièrement inquiétant, c’est cette impression de totale absence de contre-pouvoir en dehors des élections : nos institutions (Constitution de 1958, 5ème République) nous imposent, entre deux élections, un ‘tunnel d’obéissance’ de cinq ans sans aucun moyen réel de résistance, quels que soient les résultats des élections intermédiaires.

Un prochain progrès de la démocratie sera, mais seulement si nous sommes assez forts pour l’imposer, la création de droits d’initiative populaire, soit pour révoquer un élu, soit pour créer une loi, soit pour supprimer une loi, en démocratie directe, c’est-à-dire en court-circuitant nos représentants quand nous sommes très nombreux à le vouloir.

Car il n’est évidemment pas douteux que, lorsque les citoyens décident de reprendre la parole,
la voix directe des citoyens a plus de valeur que la voix des représentants des citoyens. 
Tout indique, en ce moment, qu’il est vraiment temps de rappeler cette évidence à nos dirigeants.

 

’Les matins’ de France-Culture (8 juin)

Décidément, « Les matins » de France-Culture (de 7 h à 9 h) sont parfois très intéressants : ce mercredi matin,  8 juin,  un journaliste vraiment impertinent, et pourtant très pertinent, houspille Jean-Luc Dehaene, ancien premier ministre belge ayant participé à la rédaction du TCE, et manifestement peu démocratique : JL Dehaene considère que l’exigence d’appel direct au peuple à propos des institutions n’est que du ‘populisme’ et oppose le Non des certains peuples avec les Oui des parlements comme s’ils étaient de même poids.    http://www.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/matins/fiche.php?diffusion_id=32120  (Boutons ‘écouter l’émission’, 1ère et 2ème parties, en haut de la page).

Le journaliste qui l’interroge, Nicolas Demorand, est vraiment critique et on a presque l’impression d’un débat contradictoire, ce qui ressemble enfin à un journalisme libre qui permet, par confrontation, un éclairage complet des points de vue.

La chronique d’Olivier Duhamel, par contre, est triste à mourir, défaitiste et facilement contestable sur presque tous les points. Quand est-ce que ce grand cerveau va nous rejoindre enfin, et basculer sur une pente intellectuelle positive, sur un projet inédit, historique, pour construire une autre Europe politique, voulue par les peuples et authentiquement démocratique, qui ne soit pas un prétexte pour institutionnaliser le néolibéralisme ?

Au lieu de nous servir une douche froide tous les jours, les ‘grands éditorialistes’ pourraient peut-être mettre leur ingéniosité, leur inventivité, leur savoir, leur énergie, au service de ce projet qui n’a rien de honteux et qui les aurait sûrement enthousiasmés s’ils l’avaient eux-mêmes mis en route et promu.

On commence à s’apercevoir que ceux qui utilisent le mot ‘populisme’ pour refuser aux peuples leurs droits les plus élémentaires sont souvent les mêmes qui ont renoncé à la démocratie, au nom du réalisme.

On a là un vrai débat, essentiel, loin d’être clos.

Merci pour tous vos mails passionnants (plus de cent par jour), de plus en plus en provenance de l’étranger où la contagion gagne, qui montrent bien que l’éveil continue et que l’élaboration d’un projet alternatif est en route.

Fondamentalement, il faut d’abord interroger les peuples eux-mêmes, c’est évident : je veux bien me marier avec l’Allemagne, évidemment, je le souhaite ardemment, mais si elle m’a dit elle-même qu’elle le voulait aussi, et pas seulement son papa (son parlement). Et c’est la même chose pour tous les peuples d’Europe : les parlements ne peuvent pas décider pour les peuples sur des sujets aussi graves.  La lumineuse parabole touche à l’essentiel, vraiment.

Nous sommes heureusement réveillés, ne nous rendormons pas :o)

 

Protestation : le Non  français n’est pas un repli xénophobe,
il est une exigence démocratique pour une Europe respectueuse des peuples
,
ainsi qu’un rejet du coup de force néolibéral imposé à la France à travers l’Europe (5 juin)

Les français (environ 16 millions de citoyens sur les 29 millions qui sont allés voter) viennent de s’opposer clairement au texte du TCE.

Les autres peuples du monde sont surpris de ce Non imprévu, et s’interrogent.

Les Européens qui consultent la presse française pour comprendre ce Non lisent partout que nous sommes devenus xénophobes et racistes, que nous abandonnons l’Europe et que nous nous replions sur nous-mêmes.

Ils sont évidemment dégoûtés de ces explications et commencent à nous en vouloir.

La plupart de nos propres journalistes français donnent de nous une image mensongère et détestable.  Ces commentateurs, soi-disant responsables, sont en train de monter les peuples les uns contre les autres.

Messieurs les éditorialistes et chroniqueurs, vous n’avez pas le droit de donner de nous cette image dégradante qui n’a rien à voir avec la réalité : par principe même, j’aime les Polonais, les Italiens, les Allemands, les Tchèques, les Estoniens, les Danois, les Turcs, et tous les autres, avec qui je ne rêve que de fraterniser durablement.

Mais le texte que j’ai lu très attentivement n’a précisément de fraternel que l’apparence, et je suis fier de l’avoir refusé malgré vos menaces.  Cette prise de conscience citoyenne est donc une opportunité pour l’Europe, et pas du tout un malheur.

Je m’étonne de vos interprétations infamantes qui sont elles-mêmes teintées de la haine ou du mépris de l’autre que vous condamnez si bruyamment.

Avez-vous donc complètement perdu l’habitude d’être contredits ?

Comme vous êtes intolérants, Messieurs les éditorialistes et chroniqueurs, incapables que vous êtes d’imaginer que, peut-être, c’est vous qui vous trompez.    Utilisant votre position de ‘faiseurs d’opinion’, vous jetez de l’huile sur le feu en opposant encore les protagonistes malgré l’arbitrage de la majorité, au lieu de favoriser la réconciliation indispensable qui, seule, évidemment, permettra maintenant de progresser.

Et surtout, vos analyses et commentaires soulèvent les autres peuples contre les français, c’est consternant.

Je parle maintenant aux autres, les 16 millions de citoyens qui ont résolument voté Non à ce texte, et aussi à ceux qui ont voté Oui en se pinçant le nez,  à tous ceux qui, en fait, rêvent d’une Europe vraiment fraternelle, vraiment démocratique, vraiment protectrice, vraiment voulue par nous, et qui la croient possible si un fort mouvement des peuples eux-mêmes l’exige.

Vous n’en avez pas assez de lire tous les jours ces torrents de médisance pessimiste ? Vous ne vous sentez pas insultés par ces calomnies, cette diffamation quotidienne, dans vos journaux habituels ?

Il y a un journal qui défend intelligemment une démocratie authentique et la résistance contre les excès du néolibéralisme : c’est Politis.  On peut l’aider en le lisant, lui plutôt que les autres :o)


Est-ce qu’on n’est pas assez déterminés pour rassembler les gens de gauche et de droite sur ces objectifs communs ? 

Est-ce que les modérés de tous les bords (de gauche à droite) sont aussi irréconciliables que ça ?

Qu’est-ce que veut dire gauche ? Qu’est-ce que veut dire droite ? J’ai du mal à le dire aujourd’hui.


Je cherche l’issue constructive que mon vote a permise et que les arapèdes interdisent.

"Cohérence" ou malhonnêteté des arapèdes (4 juin)

La direction du PS vient d’exclure du secrétariat les quelques dirigeants du parti qui défendaient le Non au référendum. Il n’y a donc plus à la direction du PS que des gens qui prônaient le Oui. Et le chef de parti qui prend cette décision prétend que c’est au nom de la "cohérence", tu parles…

On marche sur la tête, évidemment : la cohérence élémentaire, pour ceux qui donnent un sens au mot démocratie, aurait dû conduire la direction du PS à respecter l’évidence du vote en ouvrant le secrétariat à quelques personnalités qui défendaient le Non (Emmanuelli, Mélenchon, Filoche, Montebourg…) afin de représenter correctement sa base électorale actuelle.

Cette décision en dit long sur la malhonnêteté des arapèdes.

Peur d’avoir fait une bêtise ?  Regardez moins la télé :o)   (2 juin) (Lien)

Je reçois des mails inquiets. Je les comprends car je ressens (un peu) la même chose, au moins la peur de l’inconnu.  Il va falloir être forts.  Mais ensemble, nous sommes TRÈS forts :o)

Nous sommes des gens simples, normaux, qui avons eu le courage d’affronter les projets et les menaces des puissants, qui nous sommes levés malgré tout et qui avons résisté. Nous avons dit Non à un texte que nous jugions mauvais, dangereux, pas démocratique du tout.

Un texte qui révélait l’urgence de se réveiller et de vraiment contrôler les pouvoirs en place.

À mon avis, les citoyens réveillés qui ont peur regardent trop la télé  :o)

En effet, les journalistes qui nous ont imposé le Oui pendant des mois et qui ont aujourd’hui perdu veulent sauver la face en essayant de prouver qu’ils avaient raison.  Ils voudraient nous punir.

Alors, bien en place à leurs postes de faiseurs d’opinion, ils ressassent leurs anathèmes et leurs reproches, au lieu de construire l’avenir ensemble, puisqu’il est désormais possible de le changer.

Mon conseil :     regardez peu ou pas la télé,  choisissez bien vos journaux,
et surtout informez-vous sur Internet.

Et puis rassurez-vous : tout ne va pas reposer sur nos petites épaules de citoyens, quand même… Il faut faire confiance à nos hommes politiques, aux meilleurs d’entre eux en tout cas : ceux qui nous ont appelé à résister à ce texte inique sont moins suspects que les autres, et il y en a sur tout l’échiquier politique, de gauche à droite, nous avons donc l’embarras du choix :o)  Il faut laisser passer un peu de temps pour que nos idées remontent à eux et qu’ils les concrétisent.

Il faut surtout que nous soyons très exigeants sur le contrôle des pouvoirs, aussi bien en France qu’en Europe, sur la démocratie directe qui nous permettra de résister en cas de besoin, sans pour autant consacrer toute notre vie à la politique :o)

« Décalages » (2 juin 2005) (Lien)

Le décalage entre les citoyens et leurs responsables politiques devient parfois une opposition et montre bien que nos démocraties (nationales) manquent de moyens de contrôle. On dirait que, dans tous les pays d’Europe, les peuples correctement informés et ayant pris le temps de débattre auraient refusé le TCE, alors que tous leurs parlementaires vont valider ce texte, presque unanimement.

Le TCE est bien un révélateur d’un mal profond.

Le décalage entre les citoyens et leurs médias est également consternant : quand presque tous les journaux (papier, radio, télé) vilipendent la moitié de la population, on peut se demander qui ces journaux représentent.

Lisez les articles décapants de Mona Cholet et Frédéric Lordon cités dans ma page ‘Liens’.

Arapèdes et RIP (référendums d’initiative populaire) (2 juin) (Lien)

Les arapèdes (ou patelles, ou berniques) sont des petits coquillages en forme de cônes pointus qui s’accrochent fortement aux rochers pour résister aux vagues et aux prédateurs :o)

Tous les responsables s’accrochent à leur pouvoir comme des arapèdes, malgré les désaveux populaires les plus évidents.

Les RIP (référendums d’initiative populaire) semblent bien être une solution idéale pour garder le contrôle des chefs, à tous les niveaux de décision.

Dans les partis : les adhérents devraient pouvoir changer de chefs de leur propre initiative. Au PS, c’est urgent.

Dans les États : les citoyens devraient pouvoir révoquer leurs chefs (parlementaires, président, divers élus…) de leur propre initiative. En France, c’est urgent.

On peut sans doute étendre la réflexion à tous les lieux de pouvoir, de l’entreprise à l’Europe.

Lutte contre le chômage : bla bla hypocrite ou politique d’État volontaire ? (1er juin) (Lien)

On a rappelé les différentes démonstrations (voir Liens et Biblio) du lien direct entre la politique anti-inflationniste de la Banque Centrale Européenne (BCE) et le chômage élevé de la zone Euro.

Combien de temps va-t-on nous mener en bateau en prétendant lutter contre le chômage tout en laissant perdurer cette aberration économique de la BCE, chef d’œuvre de cynisme ?

Je suis sûr que c’est Keynes qui avait raison et qu’une politique ambitieuse de grands travaux relancerait toute notre machine, au lieu de cette sinistre politique de rentiers, protégeant leur tas d’or contre l’inflation…

Taille limite des entreprises et marchandisation des médias (1er juin) (Lien)

Est-il exagéré d’observer que les plus grosses entreprises, à partir d’une certaine taille, menacent la démocratie ?

Dans le même ordre d’idées, traiter les médias comme des marchandises, qu’on peut vendre au plus offrant, permet et favorise leur concentration, et facilite la manipulation des foules par le rabâchage d’une pensée unique.

Les entreprises géantes ne trouvent même plus d’États en face d’elles puisque nos dirigeants acceptent de se dépouiller eux-mêmes des moyens de résister (dérégulation méthodique observée à travers l’OMC, l’AGCS, le TCE, etc.).

Est-ce que notre prise de conscience citoyenne peut suffire à mettre au pouvoir des hommes (de gauche ou de droite, peut-être une coalition des deux ?) vraiment déterminés à lutter contre ce processus orwellien ?

Trop tôt pour dissoudre ou démissionner (31 mai 2005) (Lien)

L’idée qui s’impose en ce lendemain de NON, c’est la démission des responsables désavoués : Chirac et Hollande, qui sont d’authentiques démocrates, et après un désaveu populaire aussi criant, vont sans aucun doute démissionner ;o)

Mais le Président serait gentil quand même d’attendre un peu car une élection aujourd’hui serait une catastrophe : le PS est un champ de ruines avec des chefs totalement discrédités (voir l’impardonnable révélation de François Hollande de jeudi, je ne m’en remets pas) et personne ne voterait aujourd’hui pour ces hommes-là (ou si peu).

‘L’après non’  fait peur : on nous dit « avec qui allez-vous renégocier ? »

Qui parle de négocier ? Ce concept de négociation suppose qu’on continue à construire l’Europe par les États, donc sans les citoyens. C’est précisément ce qu’il faut éviter : on doit changer de chemin et construire l’Europe par les peuples et pour les peuples (comme partout dans le monde) : demandons aux peuples (et pas à leurs parlements) « qui veut faire l’Europe ? » et créons ensuite des institutions démocratiques pour ces nouveaux pays fondateurs d’une Europe politique. Les autres rejoindront les pionniers quand ils le voudront.

Pour moi, l’objectif urgent de cet ‘après Non’ est donc la réflexion citoyenne (avant que les hommes politiques professionnels ne s’en mêlent, plus tard) sur nos institutions : celles de l’Europe mais aussi celles de la France.

Il est peut-être temps d’imposer à nos acteurs politiques les institutions capables de mettre en jeu réellement leur responsabilité, bien au-delà des seules élections, nécessaires mais pas suffisantes pour contrôler les pouvoirs.

Le tunnel néolibéral de cinq ans que nous vivons en ce moment est la preuve de la faiblesse de nos institutions françaises en terme de contrôle citoyen des pouvoirs institués : aucun désaveu national (voir toutes les élections récentes), aussi cinglant soit-il, n’arrive à déstabiliser les pouvoirs en place. On comprend pourquoi la Constitution de 58 passe souvent pour une des plus archaïques d’Europe.

Il n’est pas normal qu’il soit possible de gouverner avec seulement 28 % d’opinions favorables : il faut mettre en place, en France comme en Europe, des contre-pouvoirs réellement efficaces.

En ce moment, je pense surtout aux référendums d’initiative populaire.

Certains vont sans doute parler de "populisme", comme d’habitude quand on donne de l’importance au peuple, c’est-à-dire vous et moi. Pourtant, chacun sent bien que ce mode-là d’exercice de la démocratie protège bien les hommes contre les dérives des pouvoirs.

Trois référendums d’initiative populaire, des vrais, paraissent très séduisants :

Le référendum révocatoire qui permet d’imposer la démission (suivie d’une élection) à tout élu (sans aucune exception), au terme de la moitié de son mandat et une seule fois par mandat (pour éviter toute instabilité politique).

Ce contrôle citoyen fonctionne bien au Venezuela (voir mon message du 16 mai) sans déclencher de troubles : le président (Chavez) a ainsi été mis en cause mais il a ensuite été protégé par une large majorité, ce qui a lui a donné une nouvelle légitimité. Je vois dans ces institutions un véritable exemple de respect des peuples qui donne tout son sens au mot démocratie.

Le référendum législatif qui permet d’imposer une loi, par-dessus toutes les autres institutions, et en vertu de l’évidente primauté du peuple sur les représentants du peuple.

Le référendum abrogatoire qui permet de supprimer une loi dont le peuple ne veut pas.

Certes, il faut réfléchir aux garde-fous nécessaires pour éviter quelques dérives prévisibles (par exemple, pas de référendum sur la peine de mort, ni sur les impôts, etc.), mais je ne vois pas du tout au nom de quoi on pourrait refuser aux peuples ces outils élémentaires d’une démocratie authentique.

Ces règles permettraient enfin d’assurer une réelle responsabilité des acteurs politiques.

Déjà de nombreuses voix s’élèvent pour réclamer une réflexion sur la 6ème République française, et c’est vrai que cette période d’intense réflexion citoyenne que nous venons de vivre sur les problèmes institutionnels de l’UE se prête bien à ce chantier français, complémentaire du chantier européen.

Encore un beau combat qui devrait réunir tous les citoyens, de gauche comme de droite.

C’est la Politique avec un grand P : les citoyens debout essaient d’organiser leur Cité :o)

Réconciliation indispensable (30 mai) (Lien)

Je sens que de nombreux citoyens prennent leur sort en main.

Je sens que les jeunes, enfin ! se politisent, et c’est sûrement un signe de maturité.

Je sens que c’est contagieux et que les peuples européens vont bientôt rejoindre ce mouvement.

C’est fort.

Ma joie est pourtant ternie par la peine des partisans du Oui que je respecte sincèrement et que je sais souvent très proches.  Je sens leur tristesse et leur peur du chaos et du gâchis,  je pense à Laurent (Wauquier). Je voudrais les rassurer.

Ce refus d’un texte (qui n’est pas un refus de l’Europe, évidemment) est porteur d’espoirs de changements positifs : nous pouvons maintenant participer à la construction d’une autre Europe qui sera meilleure pour eux aussi, ceux qui croyaient au TCE.

Ce que ce Non massif rend possible, c’est la création d’une entité européenne voulue et organisée par les peuples eux-mêmes, sans les tenir à l’écart.  C’est beau, et je suis sûr que ça peut séduire de nombreux partisans du Oui.

Il est important de ne pas laisser confisquer cette victoire par ceux-là mêmes qui viennent de proposer (et même souvent d’imposer) des institutions peu démocratiques. Un plan B a toutes les chances d’avoir les mêmes défauts que le plan A si ses auteurs sont les mêmes.

Il faut bâtir un nouveau plan de toutes pièces sur les bases de cette situation politique complètement nouvelle.

Il faut surtout abandonner, ou au moins amender profondément, tous les « traités institutionnels » qui ont été imposés sans consulter les peuples : par exemple, est absolument inacceptable cette montée au niveau international des choix de politique économique (libérale en l’occurrence) qui a pour principale conséquence de priver les peuples de tout moyen de contrôle et d’évolution réelle.

Les citoyens européens doivent récupérer le contrôle des politiques qui leur sont imposées.

Nous venons de refuser de fermer nous-mêmes la porte de la prison de Nice.
Il faut maintenant sortir de la prison de Nice.

Mais il est aussi important d’inviter fraternellement ceux qui croyaient au TCE comme la seule voie raisonnable à se joindre à ceux qui veulent proposer eux-mêmes une Constitution européenne citoyenne.

Je ne sais pas ce que ça deviendra, il y a quelque chose d’imprévisible dans le désordre, mais les évolutions majeures naissent plus souvent du désordre que de l’ordre, n’est-ce pas ?

Il faut surtout rester respectueux des hommes.

Quand aux médias, (je pense précisément à Radio France mais tous les journaux et télés sont aussi concernés), on rêve qu’ils se démocratisent aussi, en doublant leurs chroniqueurs pour présenter des confrontations, des débats, plutôt que des chroniques à sens unique ;o)

 

Jolis vols et chauds messages (29 mai, 22 h) (Lien)

J’ai enfin revolé cet après-midi. L’air sentait bon le romarin. J’étais confusément un peu inquiet de perdre cette bataille devenue si importante, mais en jouant à me reposer au décollage, puis à redécoller doucement sans reposer mon aile, en jouant à l’oiseau, j’ai oublié tout ça quelques heures :o)

En rentrant à la maison, il allait falloir attendre ces fichus résultats : je suis passé au bureau de vote de Trets (prononcer le t et le s, avé l’accent s’il vous plaît :o) et on était à 70 % de participation ! Yesss… Les Français se réveillent…

Et puis la maison et ma boîte à mails… Ah ! Que vous êtes gentils… C’est chaud de vous retrouver là, et c’est vrai que c’est triste de sentir que ça ressemble à une fin, et on voudrait bien que ça ne finisse pas.

Quelle tranche de vie, vraiment.

Et puis les résultats à la télé : 55-45… Hum… Moi, j’aurais préféré 70-30… Quel goinfre :o) Je suis sûr qu’avec un mois de plus pour expliquer, on y serait arrivé… Mais c’est bien comme ça.

Comment a-t-on fait pour gagner avec tous ces handicaps ? Comment a-t-on pu y croire jusqu’au bout alors que tant de gens respectables et influents nous annonçaient les pires conséquences et nous faisaient très peur ?

Il faut réaliser le travail de fourmi de ces milliers de Comités du Non, de gauche comme de droite, dans chaque petit village, tout ce temps personnel de ces gens qui ont accepté de griller tant de soirées pour expliquer aux autres, pour les réveiller un à un…

L’Internet nous a aidé à rester ensemble, à nous passer entre nous les précieuses infos, à une échelle nationale (et internationale) et à une vitesse nouvelle.

Cette démocratie vivante où les citoyens se lèvent et rappellent fortement qu’ils veulent garder le contrôle des politiques qui leur sont imposées, c’est fort, c’est historique.

Il faut organiser la suite de l’action citoyenne, mais pour le moment, il faut que j’écoute ce qu’ils disent à la télé, et puis je vais faire un tour sur la Cannebière, hé pardi…

À plus tard ;o)

Peur d’être à côté des nationaliste xénophobes (29 mai) (Lien)

J’ai eu hier une forte conversation avec un tout jeune homme, Luc, un ami de mon fils aîné, convaincu du danger du TCE depuis longtemps, mais complètement ébranlé dans sa certitude par le spectacle à la télévision d’un acteur politique trop violent, nationaliste, xénophobe, à qui il ne veut en aucun cas être identifié.

« Je ne suis pas nationaliste, je ne suis pas raciste, j’ai peur en votant non qu’on se trompe sur le sens de mon vote », me disait-il.

Je lui ai expliqué que le Non vient de toute la France, pas seulement des nationalistes. Je reçois par centaines, tous les jours, des messages enthousiastes de tous les bords de l’échiquier politique, de l’extrême gauche jusqu’à l’extrême droite, en passant par toutes les nuances du centre le plus modéré et humaniste.

De tous les bords. Pas un ne manque à l’appel.

Rien d’étonnant, donc, qu’on y retrouve aussi les nationalistes. Rien d’inquiétant non plus.

C’est même rassurant, que tout le monde se retrouve sur cette position, même ceux qu’on considère comme des affreux. Ça ressemble bien au signe que l’on est au-dessus ou au-delà des positions politiques habituelles. On est sur un vrai grand sujet.

Par exemple, si un leader nationaliste se met en lutte contre la peine de mort et la torture, je ne vais évidemment pas revoir ma position et mon opinion personnelle et me mettre à militer pour la peine de mort et la torture.

Il ne faut pas se laisser embobiner par des arguments moutonniers qui voudraient nous faire penser toujours comme tout le monde, ou toujours contre certains, plutôt que par nous-mêmes. Il faut préserver notre esprit critique. Je ne forge pas mon opinion en fonction d’un parti ou d’un autre. Je prends "le meilleur", à mon goût, de chaque parti, sans exclusive, et je crée moi-même ce qui me manque :o)

Il faut admettre qu’on a des points communs avec ceux qu’on considère comme des affreux.  Cela ne suffit pas à nous confondre.

Je voudrais revenir aussi sur l’expression « ceux qu’on considère comme des affreux ». Cette façon de diaboliser des personnes au lieu de diaboliser des idées tue le débat et interdit de progresser. Ça radicalise nos échanges.

Je ne peux pas croire, je ne veux pas croire, que les hommes politiques nationalistes soient complètement noirs. Personne n’est tout noir ou tout blanc. Ces nationalistes, parfois xénophobes, ont des positions évidemment critiquables, parfois même détestables, sur certains points, mais peuvent très bien avoir parfaitement raison sur d’autres et défendre vraiment les gens sur des sujets importants.

En diabolisant un parti tout entier ou un homme, on humilie tous ses sympathisants, qui peuvent être des millions, et on renonce au débat.

Or le débat est notre seule chance de progresser. Sans débat, les positions se cristallisent, chacune de son côté, et c’est une guerre qui se prépare en douce.

J’ai des amis chers, de vrais amis, qui votent ou ont voté pour des partis xénophobes (il y en a vers Marseille). J’en ai longuement parlé avec eux, et de cette discussion ont pu naître des progrès : nos points de vue peuvent se rapprocher, mais seulement en parlant, et seulement en respectant l’autre et ses peurs.

Ils m’expliquent pourquoi ils ont peur de « tous ces étrangers » et le sentiment que personne n’y fait rien.  J’essaie d’imaginer ce qu’on peut faire.

Je leur explique cette phrase essentielle : un étranger est un ami que je ne connais pas.

J’explique que cette idée formidable est une graine artificielle, qu’on décide délibérément d’entrete­nir dans sa tête, qui s’arrose tous les jours et qui grandit si on s’en occupe bien.

Je leur explique que la peur de l’étranger est comme un instinct, une pulsion naturelle. Je souligne que les seules fois où je suis fier, dans ma vie, ce sont les fois où j’ai dominé mes instincts, les fois où j’ai été plus fort que la nature. C’est chaque fois que j’ai dominé mon égoïsme, c’est quand j’ai eu le courage de surmonter ma peur, c’est quand j’ai patiemment construit ce que la facilité naturelle ne montrait pas, que j’ai été fier d’être un homme, avec un cerveau qui domine ses instincts.

Il n’y a pas d’exception : cette observation-là est fondamentale. Il faut arrêter de trouver des justifications à nos comportements dans l’état de nature. Rien n’est plus suspect que cet état de nature qui nous ravale au rang de bêtes.

Bref, j’en parle.  Et c’est en se parlant que les points de vue peuvent se rapprocher.

En diabolisant les partis d’extrême droite, on se met en danger au lieu de se protéger car les peurs originelles perdurent et le mal xénophobe grandit.

Moi, je ne diabolise personne. Je ne rejette que des idées.

Je pars voler. Je vous retrouve ce soir ;o)

Incroyable aveu (28 mai) (Lien)

François Hollande sur France Culture le 26 mai à midi : « si Chirac avait mis en jeu son mandat, le PS aurait naturellement appelé à voter NON, comme pour De Gaulle en 69 »...

Et quand le journaliste, médusé, demande de reformuler, le patron du PS en remet une couche.

On mesure là dans toute son indécence, la position politicienne du PS, intéressé exclusivement par le pouvoir, très loin du texte pour qui on peut finalement aussi bien appeler à voter Oui que Non en fonction de considérations tactiques.

C’est simplement consternant.  On est au degré zéro du respect des citoyens : le texte suprême, (dont je rappelle qu’il consacre à la fois des institutions non démocratiques, la privation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes sur le plan économique et l’instrumentalisation du chômage par une politique forcée de lutte contre l’inflation) on s’en fout : ce texte aujourd’hui ardemment défendu par le PS comme une urgente nécessité, ce texte aurait pu aussi bien être rejeté par le PS si le pouvoir s’était offert rapidement à ce prix. 

Pour le PS, on peut donc aussi bien dire Oui ou Non : ce qui compte, c’est faire tomber l’adversaire politique du moment et reprendre le pouvoir.  Moi, ça me laisse pantois.

Lire et écouter à : http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=2384

Et il faut faire confiance à ces gens-là ?    Non merci.

Allez aussi lire sur ma page ‘Liens et docs’ le florilège de la prose utilisée depuis des mois pour nous convaincre de voter Oui.  C’est une raison de plus, s’il en était besoin, pour être certain qu’il faut absolument dire Non.

Dernière ligne droite (28 mai)

Fatigué, je rentre ce matin de Paris et je trouve plus de 500 mails (en deux jours)… Désolé de ne plus faire face à tout. Je dois dormir un peu. Ce soir, encore quelques liens, peut-être.

Ne ratez pas la merveilleuse parabole que j’ai reçue, et publiée dans ma page ‘Liens et docs’ :o)

Voici deux citations intéressantes trouvées aujourd’hui dans ma boîte aux lettres, chers amis qui m’aidez tant à progresser :o)

« Un homme révolté est un homme qui dit non. Il refuse mais ne renonce pas... Apparemment négative, puisqu'elle ne crée rien, la révolte est profondément positive, puisqu'elle révèle ce qui, en l'homme, est toujours à défendre... La révolte est le fait de l'homme informé, qui possède la conscience de ses droits, ou plutôt la conscience de plus en plus élargie que l'espèce humaine prend d'elle même. »  Albert Camus - L'homme révolté.

« (...) par le moyen de méthodes toujours plus efficaces de manipulation mentale, les démocraties changeront de nature. Les vieilles formes pittoresques - élections, parlements, hautes cours de justice - demeureront mais la substance sous-jacente sera une nouvelle forme de totalitarisme non violent. Toutes les appellations traditionnelles, tous les slogans consacrés resteront exactement ce qu'ils étaient aux bon vieux temps, la démocratie et la liberté seront les thèmes de toutes les émissions radiodiffusées et de tous les éditoriaux mais (...) l'oligarchie au pouvoir et son élite hautement qualifiée de soldats, de policiers, de fabricants de pensée, de manipulateurs mentaux mènera tout et tout le monde comme bon lui semblera. » Aldoux Huxley - Retour au meilleur des mondes - 1959

Plan B ? (28 mai) (Lien)

Je ne crois pas à la perspective heureuse d’un plan B : pourquoi le plan B ou C ou D, conçus par les mêmes personnes, seraient-ils plus respectueux des peuples que ne l’était le plan A ?

Je pense qu’il faut que les peuples européens, décomplexés par un beau Non français, fort et pas timide, disent Non à leur tour et imposent un plan 2, nouveau, inédit : ce plan pourrait consister à commencer par demander aux peuples « Qui veut faire l’Europe » (respect de base : on demande aux gens s’ils sont d’accord pour ce choix de société).

Une fois que certains peuples (on ne peut pas encore savoir combien vont le vouloir) ont dit qu’ils voulaient une république européenne forte et unie (ça a quand même une autre allure quand ça vient des peuples eux-mêmes, non ?), on organise l’élection d’une assemblée constituante dans les x pays volontaires.

Puis, après un vrai débat contradictoire, où les conflits et les choix soient bien mis en scène et publiquement argumentés, les peuples voteraient le même jour sur un texte court et lisible et connu de tous depuis longtemps avant le vote.

On peut rêver ?

J’ai reçu un texte d’un haut fonctionnaire (désirant rester anonyme mais s’étant présenté à moi) qui s’intitule Dire oui au non.

"Chat" avec Laurent Wauquiez sur le site de L’internaute (25 mai) (Lien)

Jeudi 26, de 11 à 12, je devrais échanger quelques idées avec des internautes en compagnie d’un député (charmant) dont j’ai fait la connaissance ce soir (à Aix en Provence). Le respect mutuel qui nous anime tous les deux permet comme je l’ai maintes fois constaté dans mes échanges de courriels, malgré nos désaccords multiples, un échange réel, des progrès de la pensée de chacun, un rapprochement et une dédramatisation tout à fait bienfaisants.

Le site du "chat" est :       
http://www.linternaute.com/actualite/constitution-europeenne/chat-oui-non.shtml

(27 mai) Le texte du "chat" est à :
http://www.linternaute.com/actualite/constitution-europeenne/wauquiez-chouard.shtml

Remarque sans importance :  dans le texte du "chat », une phrase de Laurent m’a été attribuée à tort : " Le blog c'est la chance d'une démocratie plus participative, plus interactive, il va y en avoir besoin pour faire face au désenchantement."         
Cette phrase est donc de lui, mais je la partage tout à fait :o)

Dans ces conditions d’échange, je n’aurai aucun mal, au lendemain du vote, à fraterniser avec Laurent.

Tiens, à propos, j’ai rencontré Bastien François. Nous avons pris un pot place de la Sorbonne vendredi.  Ce fut vraiment une très intéressante conversation.

Quand un juriste rencontre un autre juriste, qu’est-ce qu’ils s’racontent ? Des histoires de juristes :o)

On se reverra sans doute à propos d’une Convention pour une 6ème République.

Plus ça va, plus je crois que le Non est fort, qu’il est un geste de citoyen debout, mature, volontaire, européen réfléchi, déterminé.  Il y a peu de peuples européens qui ont la chance que nous avons de réfléchir et de résister. Tout ça est historique : quelle que soit l’issue du vote du 29 mai, quelque chose change dans notre pays, et la contagion rapide dépasse déjà nos frontières.  C’est beau.

Stochocratie ? (20 mai) (Lien)

Steeve me fait remarquer que le système politique qui intègre le sort dans la nomination des hommes politiques porte un nom, la stochocratie, et que Montesquieu avait aussi planché là-dessus :

"Le suffrage par le sort est de la nature de la démocratie.
Le suffrage par le choix est de celle de l'aristocratie.
Le sort est une façon d'élire qui n'afflige personne;
il laisse à chaque citoyen une espérance raisonnable de servir sa patrie."
Montesquieu - Esprit des lois

Steeve me signale aussi un site : http://stochocratie.free.fr/

C’est vraiment très intéressant.

Force d’Internet et plaisir de réfléchir à plusieurs… Merci Steeve.

 

Une raison possible de l’incompréhensible "Oui de gauche",
si incohérent avec les
engagements naturels de la gauche (19 mai) (Lien)

Pour expliquer ce Oui de gauche apparemment complètement incohérent, j’avais trouvé comme explication qu’ayant construit eux-mêmes cette Europe-là (ils croyaient encore, à l’époque, à la possibilité d’infléchir, plus tard, la tournure libérale du texte vers plus de social), il était difficile pour eux de s’y opposer aujourd’hui sans se renier eux-mêmes.

Pour appeler à voter Non, il aurait fallu accepter d’avouer qu’ils s’étaient trompés, qu’ils avaient cru pouvoir changer le cours libéral des institutions de Maastricht sans y être parvenus. Les hommes de gauche qui appellent à voter Oui seraient, avec cette explication, ceux qui n’arrivent pas à admettre qu’ils nous ont conduits (involontairement) dans une impasse.

Thibaud m’a fait entrevoir, par une seule phrase, une autre explication que je n’avais pas du tout imaginée : la "stratégie" des ténors socialistes et verts qui soutiennent ce TCE (très concrètement néolibéral et très symboliquement social), pourrait être simplement la politique du pire : une fois ce piège néolibéral refermé, les hommes politiques de gauche pourraient enfin se présenter et paraître comme le seul recours, seul moyen, pragmatique, de revenir au pouvoir. 

Si c’était le cas, ce plan d’ensemble serait quand même assez cynique.

On est ici dans le procès d’intention car bien malin qui dira pour quelle raison intime tel ou tel acteur agit : aucune certitude, et encore moins aucune généralité, n’est donc possible, évidemment, mais je trouve ça plausible, et ça rendrait enfin compréhensible ce choix d’un Oui de gauche incompatible avec la dérégulation confirmée et renforcée par le TCE.

Pour mémoire, on peut rappeler les sept exigences pour une Constitution démocratique et sociale telles qu'elles avaient été adoptées lors du conseil national du PS du 10 octobre 2003 (http://www.parti-socialiste.fr/list_theme.php?theme=MTY0).

On y mesure point par point l’abandon intégral, le reniement profond qu’impose l’appel à voter Oui de ces gens-là.

Les socialistes exigeaient fermement (à l’époque) :

1.       Une base juridique claire pour la protection et le développement des services publics doit être posée ;

2.       Des mesures d'harmonisation de la fiscalité doivent pouvoir être adoptées à la majorité qualifiée. Ce doit être aussi le cas en matière sociale. Les critères de l'emploi et de la croissance seront introduits pour guider les interventions de la Commission et de la Banque centrale européenne. L'Europe doit être dotée d'un gouvernement économique, disposant d'un budget suffisant et d'un impôt, pouvant recourir à l'emprunt pour financer des grands travaux... ;

3.       La majorité qualifiée doit aussi devenir la règle pour la politique extérieure et de sécurité commune, l'unanimité étant l'exception ;

4.       La diversité culturelle doit être garantie. Nous souhaitons que la Constitution renforce les valeurs de la démocratie européenne et qu'elles permettent l'évolution des institutions ;

5.       Le caractère laïc de la construction européenne est un principe à nos yeux fondateur ;

6.       Les mécanismes de coopérations renforcées entre les États membres doivent être assouplis ;

7.       Les révisions futures de la Constitution doivent pouvoir être adoptées, si possible par référendum européen organisé le même jour dans toute l'Union, à la majorité qualifiée de la population et des États.

Les responsables politiques de gauche qui défendent le TCE ont donc abandonné absolument toutes ces belles convictions et soutiennent aujourd’hui, presque violemment, un texte qui contredit profondément tout ce qu’ils exigeaient fortement il y a un an.

Et c’est même un comble : ces lâcheurs accusent les autres leaders de gauche, ceux qui sont simplement restés fidèles à leurs engagements, d’avoir des arrière-pensées politiciennes, des vues sur le pouvoir…

Le moins qu’on puisse dire est qu’ils ne manquent pas d’air. 

Pas étonnant que les vieux militants parlent souvent de ‘trahison’ dans les mails que je reçois tous les jours.

 

Un texte admirable de Thibaud de La Hosseraye (17 mai) (Lien)

Ce jeune homme a écrit là un texte remarquable, un texte qui m’étonne.

Chaque mot compte, zéro pour cent de matière grasse, un style précis et une belle rigueur intellectuelle. Quelques incorrections de détail peut-être, (qui n’en commet pas ?), mais une analyse vraiment intéressante.

Impressionnante prise de conscience.

C’est publié là : http://www.ineditspourlenon.com/.

Exemple de vraie démocratie participative : le Venezuela (16 mai) (Lien)

Un lecteur vient de m’envoyer la Constitution du Venezuela.

J’y ai trouvé des exemples académiques (vivants) de démocratie authentique : ainsi l’article 72 qui permet à 20 % des électeurs inscrits de demander, et à 25 % de provoquer, la révocation de n’importe quel élu et le rappel aux urnes.

Il faut un certain courage politique et un réel souci démocratique, je trouve, pour exposer ainsi à tout moment son propre pouvoir à la censure citoyenne.

L’instabilité qu’on pourrait craindre est pourtant évitée car cette révocation d’initiative populaire n’est possible qu’après un demi mandat et une seule fois par mandat.

Cette procédure a déjà fonctionné plusieurs fois sans semer le trouble : le Président a ainsi été facilement  réélu.

D’autres référendums d’initiative populaire sont également prévus, au Venezuela, (articles 73 et 74), pour créer ou supprimer des lois.

Des limites (sujets interdits) sont prévues pour éviter les excès.

On est bien loin, en Europe, d’une telle responsabilité politique des acteurs institutionnels, aussi bien au niveau national qu’au niveau de l’Union. 

Oui, vraiment, l’article I-47.4 du TCE et son humiliant droit de pétition est bien affligeant.

En cherchant un peu autour du Venezuela, j’ai trouvé un article intéressant sur ce pays, signé Danielle Bleitrach : http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=1729

Je reçois aussi des messages proférant des accusations contre Chavez qu’on traite de tyran populiste… Mais je ne vois pas du tout sur quels faits, sur quels événements, ces accusations s’appuient. Il paraît difficile, en France, d’avoir avec certitude une information fiable sur ce pays apparemment emblématique de luttes politiques acharnées.

En tout état de cause, les articles de cette Constitution organisant la participation directe des citoyens aux processus normatifs me semblent tout à fait édifiants, et j’y trouve de quoi alimenter ma réflexion sur ma propre Constitution.

 

Et si on tirait au sort les députés, pour éviter la professionnalisation des hommes politiques (15 mai 2005) (Lien)

Une passionnante conversation avec un jeune journaliste (Raphaël) a semé une graine inattendue dans mon vieux cerveau :o)

On n’écoute plus nos hommes politiques parce qu’on les suspecte souvent de ne pas être honnêtes du simple fait qu’il gagnent leur vie à partir de leurs positions politiques.

Cette méfiance est un mal qui affaiblit notre démocratie.

Pour renouer la confiance, ne faudrait-il pas déprofessionnaliser (au moins un peu) les fonctions politiques ?

Et pour atteindre ce résultat, n’est-il pas intéressant de nommer les hommes politiques (en tout ou partie) par tirage au sort parmi les citoyens ? (à condition qu’ils acceptent, bien sûr)

Un dénommé Hervé Chaygneaud-Dupuy, « innovateur sociétal » (intéressante étiquette), a semble-t-il déjà écrit quelque chose sur une hypothèse de "députés tirés au sort". J’ai retrouvé trace de cet homme à http://www.ateliersdelacitoyennete.org/Aparticipant.php... À suivre ?

 

À propos de cette idée, j’ai reçu quelques messages mettant en cause le sérieux de cette idée… C’est une piste, rien qu’une piste : on réfléchit… J’imagine bien qu’on ne va pas tout régler au sort, bien sûr :o)  Mais l’idée d’intégrer de simples citoyens dans les rouages politiques, à tour de rôle, (comme on le fait pour les jurés d’assises malgré la technicité et le risque des débats), me semble intéressante pour renouer la confiance entre représentants et représentés.

 

« Économie sociale de marché » (14 mai) (Lien)

Frédéric Lordon est vraiment passionnant.

Dans son article « Le mensonge social de la Constitution » (voir ma page ‘Liens’), il rappelle fort opportunément la genèse de cette expression trompeuse.

L’expression « économie sociale de marché » désigne un libéralisme extrême, plus encore que celui d’Hayek lui-même, et où le mot social  n’a rigoureusement rien à voir avec ce que les français y devinent.

Il faut lire au moins ce passage du texte de Lordon (page 8 et suivantes).

Propagande d'État (11 mai)  (Lien)

Dépit amoureux :

Face au reproche de partialité, les chroniqueurs de Radio France revendiquent leur liberté de parole. "Un chroniqueur n'est pas impartial : par définition, il prend position, c'est son boulot".

OK, admettons.

Mais la chaîne, la radio de service public toute entière, n'est-elle pas évidemment partisane si elle ne présente que des chroniqueurs d'un bord et pas de l'autre ?

Plus de 70% des temps pour le Oui, moins de 30% pour le Non, et toutes ces questions bienveillantes quand on questionne un ouiste, toutes ces questions malveillantes quand on questionne un noniste… Consultez un dossier assez riche à http://www.acrimed.org/article1950.html.

Et même le chef de l'État, soi-disant fédérateur de la Nation, prétendument au-dessus de la mêlée politique, qui prend carrément part au jeu et qui se comporte comme un arbitre qui taperait dans le ballon pour marquer un but contre une des équipes…

Sur France Inter, tous les matins, j'ai droit à ma chronique ultralibérale, puis ma chronique eurolâtre, puis ma chronique centriste libérale (celle qui diabolise méthodiquement les "extrêmes" de l'échiquier politique français alors qu'aucun parti du centre ne se bat plus contre le néolibéralisme)…

Je pose cette question : pourquoi ne pas ajouter, tous les matins, (et pas seulement pendant la campagne référendaire), un chroniqueur altermondialiste et un autre eurocritique ? Pourquoi pas ?

Je réalise aujourd'hui, naïf que je suis, le bourrage de crâne qu'on m'impose depuis des années.

J'en ai assez de la propagande d'État.

Je vis bien des désillusions ces temps-ci.

Daniel Mermet, l'indispensable Daniel, et quelques autres humanistes authentiques, sont la bonne conscience de la chaîne France Inter, à une heure où tout le monde travaille et où l’écoute est faible. Je n'écouterai plus qu'eux, quand je pourrai.

Je quitte France Inter pour quelque temps.                                                        

Je cherche une équipe de journalistes radio honnêtes (sans publicité).

Quel dépit.

"Vérole" de la démocratie ? (10 mai)  (Lien)

Le Figaro, 11 avril 2005, Alain Minc parle : "Valéry Giscard d'Estaing n'a commis qu'une seule erreur : nommer le texte du traité «Constitution». C'est précisément cette dénomination qui a empêché une ratification par la voie parlementaire. Le référendum est pareil à une «vérole» antidémocratique que la France aurait propagée dans l'ensemble de l'Europe."

Cette phrase résonne dans ma tête depuis, elle prend son sens, comme un aveu.

Tout commence à prendre un sens nouveau. Ces gens-là qui me répètent à l'envi qu'ils veulent mon bien, qu'il faut leur faire confiance… Ces gens-là semblent bien mépriser le peuple, vous et moi, tout le monde.

Je vais continuer à lire le TCE  avec ce prisme-là, pour contrôler, pour essayer de comprendre, sur pièces, les intentions réelles de ses auteurs.

Contrôler le poids qu'on donne aux représentants du peuple dans ces institutions, contrôler la responsabilité des acteurs politiques pour leurs actions, contrôler les outils de résistance en cas de dérive, contrôler la réelle maîtrise des politiques menées en fonction des élections…

Comment faire confiance après de telles paroles ?

"Grossières erreurs juridiques" ?  (8 mai)  (Lien)

Dans les batailles de blogs et dans les éditoriaux, je vois passer l’expression « grossières erreurs juridiques » à mon sujet pour disqualifier en bloc tout mon texte. L’accusation est tellement fragile, en fait, que je n’ai pas réagi vite, mais je m’y mets aujourd’hui :o)

Nota : à la demande de plusieurs lecteurs, je précise le sens du signe placé à la fin du paragraphe précédent. On appelle ça un smiley. Ça représente une tête souriante vue de côté et c’est tout sauf une mode inutile : il n’y a aucun signe simple, en français, pour montrer qu’on sourit, et le fait de sourire n’est pas inutile du tout. Le sourire apaise un message qui pourrait être mal pris à tort, il dédramatise un thème qui pourrait être trop sensible… À tel point qu’aujourd’hui, j’aurais beaucoup de mal à me passer de ces petits signes de sympathie.  Avec un point-virgule, c’est un clin d’œil ;o)

Je viens de terminer et je publierai dimanche (sur une nouvelle page Échanges) une réponse au texte de Monsieur Bastien François qui m’accuse donc d’imposture et de diffusion de « grossières erreurs juridiques », (comme si tout le monde dans ce débat, jusqu’au Président, était irréprochable :o)  On verra dans ma réponse que les erreurs les plus graves ne sont pas celles qu’il dénonce : je me trompe parfois sur des détails, mais sur l’essentiel, je me sens au contraire de plus en plus fort :

 

Traité ou constitution ?

La première de mes erreurs impardonnables serait de ne même pas avoir compris que le TCE, comme ses prédécesseurs, est un Traité, et que l’Union, benêt que je suis, n’est pas un État.

Mais l’erreur juridique majeure n’est-elle pas précisément d’accepter sans esprit critique l’affirmation de celui qui a écrit le texte et qui s’autoproclame constituant ?

Quand un groupe de gouvernements, profitant d’une conjonction politique heureuse, vous repren­nent la démocratie qui a pourtant 200 ans en créant de nouvelles institutions plus dangereuses les unes que les autres faute de contre-pouvoirs et de contrôle réel des décisions politiques, sans vous l’avoir demandé, sans vous avoir intégrés au processus constituant, en demandant réellement leur accord à seulement cinq peuples sur vingt-cinq, sans vous permettre de changer vous-même ces règles plus tard, êtes-vous tenu par la qualification de « Traité » qu’ils donnent eux-mêmes à la Constitution qu’ils proclament sans vous ?

D’éminents professeurs de droit public à la Faculté soutiennent courageusement cette thèse de bon sens que la mise en place d’institutions à coups de traités est un abus de pouvoir.

À quoi sert le droit si ce n’est à protéger les hommes contre l’arbitraire ?

À quoi servent les professeurs de droit s’ils ne soulignent pas la dangerosité des nouvelles institutions ?

Et tout compte fait, qui commet une « grossière erreur juridique » ?

Conseil des ministres : deuxième chambre parlementaire  ou  pouvoir exécutif masqué ?

La plus grosse tartufferie des institutions européennes, c’est bien de présenter le Conseil des ministres comme un organe législatif, une « deuxième chambre », à l’instar du Sénat français.

Si on écoute mes détracteurs, ce serait encore une « grossière erreur juridique » du père Chouard de considérer le Conseil des Ministres comme un organe exécutif. Certains experts prétendent que les charlots comme nous n’y comprennent rien : le CM est un organe législatif on vous dit, laissez les experts réfléchir, circulez, y a rien à voir…

Là encore, faut-il se laisser berner par une qualification trompeuse ? Qui commet une erreur grossière ?

Qu’en est-il ? Le Parlement est un pouvoir, et comme tous les pouvoirs, il est dangereux. Un mécanisme courant pour limiter ses possibles excès consiste à le décomposer en deux chambres distinctes qui, par le simple jeu de la discussion parlementaire (navette) se tempèrent mutuellement.

Le Sénat français est bien sûr élu, et ne dispose évidemment d’aucun pouvoir exécutif. Son élection est indirecte : les sénateurs sont élus par les élus. En cas de litige avec l’Assemblée nationale, il n’a pas l’avantage, et en contrepartie, comme il n’a pas de grand pouvoir, il ne craint pas la dissolution.

On aurait pu, en Europe, prévoir une deuxième chambre élue qui aurait représenté les Parlements nationaux : chaque Parlement national aurait pu élire quelques « sénateurs ».

Une autre possibilité aurait été qu’elle représente les régions : chaque Région pourrait élire quelques « sénateurs ».

Ces idées sont séduisantes car porteuses de démocratie plus directe, plus proche des citoyens.

Mais alors, prévoir une deuxième chambre "parlementaire" qui représente les États et où siègent alternativement (jamais au grand complet) les membres des gouvernements ! De qui se moque-t-on ? À peine ces "ministres législateurs" ont-ils quitté la salle européenne, qu’ils rejoignent leur pays, ils y récupèrent leur costume de Ministre avec les attributs de l’exécutif (maîtrise de la force armée, de la police..) pour y faire appliquer les lois nationales qui sont la transposition mécanique (sans débat) du droit qu’ils ont écrit eux-mêmes « là-haut ».  On organise là, à l’évidence, une dangereuse confusion des pouvoirs.

La séparation des pouvoirs n’est pas un principe creux, académique, c’est une règle de bon sens qui sert à protéger les humains : on ne donne jamais au même organe à la fois le pouvoir d’écrire le droit et de l’exécuter (sinon on court un risque car il est trop puissant à lui seul).

Alors il est vrai que chaque Ministre n’est pas seul et que le fait de décider en Conseil, à plusieurs, limite beaucoup le risque de despotisme. Mais les intérêts des ministres sont quand même très convergents et, par exemple, leur tentation de s’affranchir du contrôle parlementaire est toute naturelle et bien réelle : on en voit les effets dans ces institutions qu’ils ont écrites eux-mêmes.

Ce Conseil des Ministres est en effet finalement irresponsable : il n’est prévu aucune procédure de révocation au niveau européen.

Pourtant, le Conseil des Ministres écrit le droit, il est même capable de l’écrire seul, sans contre-pouvoir, dans une série de domaines importants (et inavouables, semble-t-il).

Contrairement au Sénat dont le pouvoir est limité, le Conseil des Ministres devrait pouvoir être censuré, du fait de son grand pouvoir.

Mes détracteurs invoquent alors mon ignorance de la responsabilité des ministres au niveau national. Mais cette responsabilité est toute théorique : en morcelant la responsabilité et la mise en cause de la politique européenne du Conseil, on le met, de fait, à l’abri de la censure (suivant le vieux précepte "diviser pour régner"). 

Voyons en effet comment les citoyens peuvent agir contre un Conseil des Ministres qui leur semblerait démériter gravement :

Il faut d’abord que les citoyens arrivent à savoir que le CM a démérité car le CM délibère bien loin des peuples, encore à huis clos en dehors de son rôle strictement "législatif" : mes détracteurs oublient de préciser que la publicité des travaux du CM ne concerne que les actes législatifs. Les "actes non législatifs" (dénoncés comme antidémocratiques par les conventionnels qui ont refusé de signer le TCE) restant discutés et votés à huis clos, on se demande bien pourquoi.

Et puis cette publicité des débats législatifs du CM ne concerne probablement pas tout le travail de préparation qui se fait sans doute loin des caméras, en petit comité. Il ne faut donc pas surestimer l’avancée que constitue cette publicité (partielle).

Une fois informés, les citoyens en colère devront convaincre une majorité de leurs parlementaires nationaux de voter une censure de leur gouvernement national au grand complet (seule possibilité de contrôle politique en France), censure qui aura finalement comme effet de changer un seul ministre sur vingt-cinq au niveau européen… Un immense effort pour un résultat quasi nul. 

Moi qui cherche à peser mon pouvoir de citoyen, j’ai le sentiment que les peuples perdent, avec ces institutions, toute influence réelle sur la politique menée en leur nom.

Ce qui rend encore plus imbuvable l’aspect libéral de la politique imposée par la partie III, puisqu’on n’aura vraiment aucun moyen de résister, même en devenant majoritaires !

Libéralisme ou néolibéralisme ?

Le camp du Non lutte à mort contre le néolibéralisme.

Le camp du Oui lutte à mort pour la garantie du libéralisme.

L’opposition ne devrait donc pas exister puisqu’ils ne parlent pas de la même chose.

Alors que le libéralisme modéré, tempéré par une certaine solidarité, est sans doute bon pour tout le monde, le néolibéralisme est, lui, un excès mortifère, dogmatique, régressif.

Pour mieux nous comprendre, nous devrions respecter un vocabulaire qui évite les malentendus : souvent, quand on dit lutter contre le libéralisme, c’est pour aller vite, mais c’est le néolibéralisme qui est en cause, c’est l’excès, le dogmatisme, qui est dangereux.

Tout le monde pourrait sans doute se satisfaire d’un libéralisme intelligent, modéré, qui est le contraire du dirigisme, étroit, dogmatique lui aussi, liberticide.

Est-ce que tout le monde n’est pas libéral, au moins au sens modéré du terme ?

Et c’est vrai que les institutions européennes portent en elles depuis l’origine le libéralisme, mais lequel ? De fait, les États européens ont toujours fait comme ils voulaient, malgré la lettre des textes fondateurs, et ils sont copieusement intervenus dans la vie économique.

Ce n’est que récemment que la Commission européenne s’est mis en tête d’imposer, non pas le libéralisme, mais le néolibéralisme, c’est-à-dire une dérégulation systématique et profonde, une dépossession progressive de tous les pouvoirs économiques des États, pour ne leur laisser que les fonctions régaliennes (police, justice, armée…).

Cette entreprise de dérégulation aveugle, qui avance en appliquant mécaniquement une doctrine (comme dit Fitoussi), est à l’œuvre au niveau planétaire, via l’OMC, l’AGCS et l’ADPIC (voir ces mots dans ma bibliographie).

Et c’est cette mécanique économique (relativement discrète), qui ne sert pas l’intérêt général mais l’intérêt de quelques uns, qui trouve sa traduction institutionnelle dans le TCE. Et elle le fait en nous privant des rouages démocratiques qui permettent habituellement de résister aux despotes.

C’est ça qui est inacceptable.

Pour assurer la suprématie d’un système économique, (et pour garder le pouvoir ?), nos dirigeants sont en train de laisser perdre la démocratie.

Faut-il valider, au nom d’un rêve eurolâtre (en fait trahi), ce verrou juridique qui pérennise la dépossession des pouvoirs économiques des acteurs politiques ?

Ou faut-il, une fois conscient du danger historique que serait une caution populaire à cette dérive (qui se décide d’habitude loin des citoyens), résister, s’opposer, pour garder la possibilité de construire nous-même l’Europe que nous voulons, plus politique qu’économique, plus respectueuse des hommes que des États, plus responsabilisantes pour ses acteurs politiques ?

Moi, je me réveille, et poussé par l’adversité je progresse vite : je vois bien que, pour changer le cap du gros paquebot, il ne faut surtout pas valider le TCE qui est un mauvais texte, un texte dangereux et rigide qui n’avoue pas ce qu’il vise vraiment.

Le TCE est un piège juridique à vocation économique, il ne sert pas l’intérêt général.

Guerre militaire ou guerre économique ?

Les vieux de la vieille, nos chouchous, à qui on donnerait le bon dieu sans confession, ceux qui ne peuvent pas mentir (mais qui peuvent se tromper), Jacques Delors et Simone Veil, montent au créneau pour défendre, l’un cette Europe-là quels que soient ses dangereux rouages, et l’autre la paix pour éviter le retour aux camps nazis.

Mais je ne comprends pas pourquoi ces deux personnalités formidables ne donnent aucun poids à l’argument des méfaits prévisibles de l’institutionnalisation de la guerre économique, du recul de l’État providence et donc des solidarités.

La concurrence, c’est la compétition. En en faisant une « valeur », on institutionnalise la guerre économique, chacun pour soi et contre tous…

"La concurrence est un alcali : à dose modérée, c’est un excitant, mais à forte dose, c’est un poison" (A. Detoeuf, vers 1933).

Alors je trouve paradoxal qu’on nous vende le traité qui organise la guerre économique (la concurrence libre et non faussée) entre les États via leur fiscalité et leur droit social, la guerre économique qui monte les peuples les uns contre les autres (exemple de la directive des services avec cette règle du pays d’origine), qu’on nous vende la guerre économique érigée en système au nom de la lutte contre la guerre militaire…

Oui vraiment, c’est paradoxal.

Et après le non ?

Je trouve que les nonistes (je préfère nonistes à noniens) sont plus cohérents que les ouistes (j’utilise ces termes par commodité et sans aucune agressivité ou connotation péjorative, c’est un peu un jeu, un clin d’œil à ceux dont je sens que nous sommes finalement assez proches).

Le point commun des nonistes, c’est de rêver à un monde meilleur, et seul le Non laisse de la place à l’espoir d’une utopie.

Le Oui est souvent plus désabusé, plus réaliste, plus résigné, et ils sont nombreux, comme Jacques Delors on dirait, à voter Oui en se pinçant le nez.

Alors que le Non ouvre le champ,  avec une période de turbulence certes,  à une perspective de chantier géant, d’autant plus probable qu’il sera quasi obligatoire (on nous dit tant de mal de « Nice le calamiteux » :o)

Si on arrive à 80 %, (on l’a déjà fait), cette force politique majeure qui monte de la base ne pourrait plus être ignorée par nos hommes politiques qui seraient contraints de s’unir autrement ou de faire émerger de nouveaux chefs pour bâtir une Europe enfin crédible puisque vraiment voulue par les hommes.

Ce n’est pas utopique si on est effectivement très nombreux et au-delà de la France, partout en Europe.

 

Décisions en discussion (1er mai)

Un avocat m’a envoyé un message pour calmer mes élans à propos des décisions.

Il travaille tous les jours depuis des années sur ces décisions et me donne quelques exemples.

Encore un riche échange (en cours, peut-être allons-nous nous parler). J’ai tout de suite modifié les paragraphes qui évoquent ce point, pour mieux cibler mes questionnements.

Je n'arrive pas à accepter que la Commission, le Conseil des ministres et les autres organes prévus (art. I-35) puissent, en certaines matières (non listées), faire le droit et l’exécuter. À suivre…

Du nouveau (28 avril 2005)  (Lien)

Une nouvelle version, avec deux nouveautés et une correction :

La correction, c’est la portée de l’art. 111-2 qui ne « stérilise » pas la Charte (une erreur repérée par Rodrigo. Merci Rodrigo :o) : celle-ci peut avoir une valeur contraignante, si la CJE le décide ainsi (valeur conditionnelle donc), sur le droit communautaire, et sur lui seulement (c’est ça, le sens du 111-2).

Première nouveauté : j’ai progressé sur la Cour de Justice Européenne (CJE), c’est é-di-fiant : les juges sont nommés (discrètement) par les exécutifs (un par État) pour 6 ans renouvelables, ce qui rend les juges dépendants de ceux qui les nomment et déterminent leur carrière 
Alors qu’ils ont un pouvoir immense, sans recours, absolument sans contre-pouvoir.
Les délibérations se déroulent à huis clos…

Je trouve ça simplement effrayant, voilà.

Deuxième nouveauté : les « décisions européennes », à ne pas confondre avec les règlements, qui ressemblent à des « lois sans parlement », à usage des deux Conseils, de la Commission… et… de la BCE (je vous jure). On appelle ça des « actes non législatifs ».  Je trouve ça consternant.

Il faudrait qu’on explique ça aux citoyens, vraiment.

Appel au peuple :o)   Quelqu’un est-il capable de justifier l’existence des « décisions » ?

Demain c’est la rentrée (24 avril 2005)  (Lien)

Il faudrait vraiment que j’arrive à prendre un peu de distance après ces 20 jours « coup de grisou ».

J'ai reçu à la fois des félicitations de certains profs de fac et des insultes d'autres profs de fac.

Les profs de fac (les "vraies" références) ne sont pas d'accord entre eux sur l'essentiel.

Certains ont vu en moi un trotskiste affublé d’un faux-nez, d’autres ont vu le complice des pires réactionnaires, n’importe quoi en fait. Moi, c’est simple, je ne diabolise personne, et je suis prêt à écouter une bonne idée d’où qu’elle vienne. Mêmes les étiquetés "affreux" peuvent parfois avoir de bonnes idées. Je filtre toutes les idées dans ma cornue personnelle et je distille ça comme je peux…  :o)

Selon les enjeux des uns et des autres, peut-être, on me prête des intentions différentes qui modifient évidemment la perception du message. Mais qui peut jurer des intentions d’autrui ?

De mon côté, je ne peux pas faire mieux que vous dire "Voilà ce que je crois, et voilà pourquoi je le crois, je sais que je peux me tromper, si vous sentez que vous pouvez m'aider à progresser parlons-en, et de toute façon continuez comme moi à réfléchir sur cet immense sujet de conversation…"

La prochaine étape est la réflexion sur un projet crédible pour l’après non. On pourrait aider nos hommes politiques à se regrouper autrement et inventer ensemble un projet alternatif.

Les internautes qui travaillent sur la formidable encyclopédie Wikipédia, monument de travail collaboratif généreux, pourraient peut-être nous aider à mettre en place des outils informatiques de mise en commun et validation d’idées pour proposer un projet de Constitution d’initiative citoyenne. On pourrait se donner 5 pages maximum, prévoir d’institutionnaliser un vrai référendum d’initiative populaire, de donner toute sa place à une démocratie des régions (des communes ?) au sein de la démocratie européenne, mettre au premier plan les citoyens plutôt que les États…

Rien qu’y réfléchir vraiment ensemble serait déjà un progrès majeur de notre civilisation.

Continuez à m’écrire, la richesse de vos messages est un enchantement. Si vous y pensez, dites-moi quel est votre métier et quel est votre coin de planète.

Moins seul (23 avril 2005)  (Lien)

Vous vous souvenez de ma question, récurrente : « à quoi servent les profs de droit ? ».

J’ai reçu hier, enfin, un petit livre que j’attendais impatiemment (je savais que j’allais recevoir du renfort).

Les professeurs de droit montent au créneau pour défendre les fondements du droit, ceux qui protègent plus les hommes que les États ou les unions d’États.

Un petit livre, intitulé « La nouvelle Union européenne. Approches critiques de la Constitution européenne », (éd. XF de Guibert, avril 2005), sous la direction d’O. Gohin et A. Pécheul (professeurs à l’Université de Paris II et d’Angers), regroupe l’analyse de jeunes constitutionnalistes universitaires.

Je vous livre quelques passages de la préface :


« (…) Dans le nombre des inscrits sur les listes électorales, la proportion de juristes est infime ; or, même de bons juristes ont peine à se reconnaître dans un document qui, dans le journal officiel de l’Union européenne, occupe 201 pages. L’impression en petits caractères n’en améliorera pas la lisibilité.

Or, je n’hésite pas à l’écrire, aucun moyen n’est épargné, à Paris comme à Bruxelles, pour en dissimuler le véritable contenu. La propagande en faveur du oui était jusqu’alors inconnue dans ce type de consultation. Cette propagande est tout simplement catastrophique. On se garde bien d’expliquer de quelle manière et dans quelle mesure la Constitution proposée changera l’Europe en mieux. On leur représente le non comme une épouvante. Il entraînerait la chute de la construction européenne ! Il éliminerait une Europe porteuse de paix !

Tout cela n’est que baliverne et mensonge.

L’Union européenne existe, elle mérite d’être sérieusement réformée, mais autrement que par le projet de constitution proposé au référendum. Si le non l’emporte, l’union ne disparaîtra pas. Elle demeurera telle qu’elle est, tant qu’une réforme meilleure ne sera pas intervenue. Au printemps 1946, les français et les françaises ont rejeté un projet de constitution au référendum, la France n’en est point morte. Tout au contraire.

En 1851, le Prince-président faisait campagne sur le thème « L’empire, c’est la paix ». Les partisans du oui nous disent ou nous répètent, car le slogan a déjà servi, « L’Europe, c’est la paix » : que la communauté économique ait eu des effets économiques heureux tant qu’elle n’a pas cédé aux impératifs américains de mondialisation, cela est un fait incontestable, mais attribuer aux institutions européennes le mérite des cinquante années de paix que notre continent vient de connaître, est contraire à la vérité. Les institutions européennes n’y sont pour rien. (…)

La disposition la plus grave de la prétendue Constitution est l’article 1-6 selon lequel la Constitution (celle de l’Europe) et le droit adopté par les institutions de l’Union dans l’exercice des compétences attribuées à celles-ci priment le droit des États membres, c’est-à-dire jusqu’à la constitution de ces derniers.

Affirmation d’une gravité majeure. Dans sa République, Jean Bodin énonce les marques de vraie souveraineté. La première, qui comprend en quelque sorte toutes les autres, est le droit de faire les lois par lesquelles les sujets de droit doivent être régis et gouvernés. Si le traité était ratifié, la loi constitutionnelle de la France serait d’une force juridique inférieure à celle d’une simple directive de l’Union européenne. (…) À juste titre, Frédéric Rouvillois peut parler d’un séisme juridique. Ajoutons : et politique. »        

Et ça continue, fermement. Un livre court mais plein d’arguments importants, très techniques.

Au menu de ce petit bouquin qui me regonfle le moral :

Chapitre 1 :    le contrôle de constitutionnalité du traité : le double jeu du conseil constitutionnel, par Frédéric Rouvillois, professeur à l’Université de Paris V.  12 pages importantes pour comprendre les défauts du Traité que le Conseil Constitutionnel a "oublié" de détailler dans son arrêt du 19 novembre 2004.

Chapitre 2 :    La souveraineté comme principe d’imputation, par Michel Troper, professeur à l’Université de Paris X, membre de l’Institut Universitaire de France. Ce principe est ce qui permet de comprendre et d’accepter la nécessité de l’obéissance. Absolument passionnant, on est aux sources du droit. Tout le monde est concerné.  20 pages.

Chapitre 3 :    La primauté du droit communautaire sur la constitution française : l’abrogation implicite de la Constitution, par Armel Pécheul, professeur à l’Université d’Angers. 20 pages.

Chapitre 4 :    La nature de la nouvelle Union européenne, par Olivier Gohin, professeur à l’Université de Paris II. Le nouveau Traité est une véritable Constitution dès lors qu’elle correspond à la définition matérielle de toute constitution : organisation des pouvoirs publics et garantie des libertés fondamentales, avec identification d’un pouvoir constituant (…) la nouvelle Union européenne réunit, dès à présent, les éléments nécessaires de la définition de l’État (…). 20 pages.

Chapitre 5 :    La personnalité juridique de l’Union, par François-Guillhem Bertrand, professeur émérite à l’Université de Paris XI. La personnalité donnée à l’Europe efface celle des États membres lorsque l’Europe s’exprime.  6 pages.

Chapitre 6 :    la place des États membres au sein de l’Union et dans le concert des nations, par Michel Clapié, professeur à l’Université de Montpellier I. Le traité conduit naturellement à la dépossession des États membres de leurs compétences originelles et les soumet à l’implacable tutelle de l’Union sous le double effet d’une emprise technocratique  accrue et d’un véritable carcan idéologique. Il ne garderont de l’État que l’apparence et le nom.  31 pages.

Chapitre 7 :    Les valeurs et objectifs de l’Union, par Anne-Marie Le Pourhiet, professeur à l’Université Rennes I.   14 pages au vitriol.

Chapitre 8 :    Le déficit démocratique du traité établissant une Constitution pour l’Europe, par Alain Laquièze, professeur à l’Université d’Angers. Méfiance envers les peuples et démocratisation toute symbolique. 20 pages.

Chapitre 9 :    La charte des droits fondamentaux contre les droits de l’homme, par Jean-Philippe Feldman, professeur à l’Université de Vannes. Loin de promouvoir les droits de l’homme, la Charte risque de les affaiblir dangereusement.

Le petit prof de droit en BTS se sent moins seul.

On trouvera dans ce livre la plupart des réponses à ceux qui réfutent mes craintes en prétendant que le TCE est un traité (pas une Constitution) et que l’Union n’est pas un État.  
On a bel et bien, avec le TCE, un grave problème de respect de la démocratie.       
Manifestement, les avis sont partagés, même à l’Université.

Tout le monde, absolument tout le monde, peut se tromper.

Ce n’est pas grave : ce qui compte, c’est de l’admettre simplement et de progresser sereinement.

Encore merci pour le fleuve de gentillesse et d’enthousiasme qui inonde ma boîte aux lettres :o)

Mise au point importante (21 avril 2005) (Lien)

Je viens d’apprendre que des hommes politiques se font interpeller dans leurs meetings par des citoyens qui leur demandent : « Que répondez-vous à Étienne Chouard, prof de droit à Marseille qui dit (citation de Chouard) » 

Je viens aussi de recevoir un fichier pdf carrément intitulé « Fac de droit Marseille » avec, derrière ce titre inventé par je ne sais qui, la version du 25 mars, cette première version qui contenait encore de gênantes erreurs (sur la Turquie et la durée du traité de Nice, notamment).

Je comprends mieux les messages furieux de quelques profs de fac qui crient à l’imposture.

Si ça tourne comme ça, ils ont raison, il ne faut pas du tout me lire comme si j’étais un spécialiste de droit international, il ne faut pas me présenter comme ça, c’est un malentendu : je n’ai rigoureusement aucune autorité pour dire le droit communautaire, et je commets, comme tout le monde en ce moment (même en fac) parce que le texte n’est pas simple, des erreurs.

Depuis le début, je précise dès mon introduction qu’il y a encore six mois, « comme tout le monde », je m’occupais peu de l’Europe et je ne connaissais donc pas grand-chose au droit communautaire. Je dis partout que je peux me tromper et que je cherche précisément à progresser. Il est paradoxal, et c’est vrai, dangereux pour la qualité de l’information de tous, que je passe après seulement 15 jours pour « le prof de fac de droit public qui fait autorité ».

Ce malentendu m’est imputable par le style que j’employais au début, mais ce document, somme toute une synthèse personnelle temporaire d’un citoyen en train de progresser, n’était pas destiné à la terre entière. L’enchaînement rapide des faits a, lui aussi, créé ce malentendu.

Il est essentiel de rétablir la réalité de mon message qui est en train d’aller, sans que j’y puisse grand-chose, bien au-delà de ce que j’imaginais au départ : voyez, pour me comprendre, les explications que j’ai actualisée hier matin (19 avril).

Les interpellations publiques des hommes politiques devraient plutôt être ainsi formulées : « Que répondez-vous à Étienne Chouard, citoyen à Marseille qui dit (citation) ».


Je parle en citoyen. J’ai d’ailleurs retiré dans la prochaine version de mon texte (trop tard, je le reconnais, je n’avais pas vu le problème) cette litanie « N’est-ce pas la mission des profs… ? ». Je devrais publier ça ce soir.

La présente mise au point sera également incluse dans le document même.


J’insiste : il y a en ce moment un grand débat entre citoyens, pour mieux décrypter ce texte complexe qui sera peut-être notre Constitution. Je vois tous les jours, à travers des centaines de messages, des gens qui réalisent aujourd’hui l’importance d’une Constitution dans leur vie quotidienne et qui se plongent dans le TCE.

Je trouve remarquable que les citoyens de base s’investissent autant dans le texte qui dit pour eux le droit du droit.

Je regrette que le temps nous manque pour mieux échanger entre nous.

S’il vous plaît, faites disparaître les anciennes versions de mon texte et discutons de bonne foi sur l’état actuel de nos réflexions respectives.


Vous remarquerez dans le texte du 21 avril un changement notable, par rapport aux versions précédentes, dans mon jugement sur l’affaiblissement du pouvoir parlementaire qui est limité finalement à quelques domaines précis (et choquants).  Notre échange me fait vraiment évoluer, c’est une réalité. Pour les autres domaines, je crois avoir découvert, au contraire, un risque de force excessive du Parlement (à confirmer, il faut encore travailler ça).

Mais surtout, je prends conscience d'une irresponsabilité quasi générale dans cette "Europe-qui-a-besoin-d'une-Constitution-pour-être-plus-forte". Oui, nous avons évidemment besoin d'une Constitution. Mais celle-là protège-t-elle vraiment les peuples censés s'unir pour se renforcer ?

On a vraiment un problème de rapport démocratique entre les peuples et leurs élites.

Que ce texte est compliqué à évaluer, mais comme il paraît dangereux.

 

19 avril 2005. (Lien)

Ça devient fou, exagéré.

Après les journalistes au téléphone, à la maison, la télé qui veut me voir, je reçois maintenant des messages méprisants, sarcastiques, violents…

Ces gardiens du temple qui montent au créneau, spécialistes qui se moquent méchamment de mes erreurs de débutant (comme beaucoup d’autres, je ne connais pas grand-chose au droit communautaire).

Certains messages sont terrifiants, pleins de haine.

Que s’est-il passé ?

Je ne reviens pas sur mon réveil naïf de septembre 2004 et mes lectures boulimiques depuis. Après des heures de lecture et de discussion, j’avais la conscience, malgré d’évidentes lacunes, que des règles fondamentales, des règles de bon sens d’ailleurs, étaient maltraitées par le TCE.

Alors, comme personne n’en parlait, j’ai d’abord essayé d’en parler à mes collègues, profs de droit en lycée comme moi, sur une liste de diffusion professionnelle. J’ai résumé quelque 150 pages manuscrites en cinq ou six, en essayant d’asseoir chaque idée sur l’article correspondant, en me concentrant sur le plus grave à mes yeux. Mais certains profs de la liste, peut-être avaient-ils raison, m’ont reproché cette lettre : « Arrête Etienne, c’est de la propagande politique, pas de ça ici ».

J’ai insisté : « C’est vrai que cette réflexion a un aspect politique, au sens fort, mais les arguments que je mets en avant ne sont pas de gauche ou de droite, ils ne sont pas politiciens, et c’est quand même un vrai grand sujet de droit, et pour des profs de droit, le TCE est un vrai sujet de conversation, non ? ». C’est pour insister sur ce lien entre ma réflexion et notre métier que j’ai martelé à chaque partie « N’est-ce pas une mission des profs de droit… ? ». Ce n’est pas du tout de la prétention, en tout cas, je comprends aujourd’hui que ça peut être pris pour de la prétention, surtout quand je vois la force que les gens mettent dans l’expression « prof de droit », mais ça n’est pourtant pas de la prétention.

Rien à faire, « pas de ça sur cette liste » me répondit-on. Alors, je me suis tu, mais j’avais toujours ce besoin de confronter cette crainte toute récente et très aiguë avec un grand nombre de contradicteurs, j’avais besoin de débat.

Or, j’ai un "site perso" depuis longtemps, alors j’y ai simplement ajouté une page Europe, et j’y ai collé mon texte, tel quel. Rien, absolument rien ne pouvait permettre d’imaginer alors l’incroyable succès de ce document. Je voulais parler avec mes collègues d’éco-gestion de France par un autre moyen que notre liste de diffusion. J’ai malheureusement laissé dans le texte ces questions lancinantes sur la "mission des profs de droit", questions martelées avec ce qui peut évidemment être aujourd’hui analysé comme une emphase ridicule, à l’échelle qu’a pris le document.

Étant au départ dans la perspective de l’échange entre profs d’éco-gestion, il ne m’est pas venu à l’esprit de rappeler que je ne suis pas prof de fac, pas prof de droit public, etc.  Cela va de soi, entre nous, cette précision aurait été incongrue.

Et puis, ça s’est emballé, en quelques jours, il y avait des milliers de visites sur le site, et je recevais des dizaines de mails par jour. Très vite, dès le lendemain je crois, des lecteurs bienveillants m’ont signalé des erreurs. OK, très bien, c’est précisément ce que je cherchais, je corrigeais au fur et à mesure et publiais le texte corrigé pour avancer.

Mais le texte d’origine, celui du 25 mars, avec ses erreurs, notamment sur la Turquie et la durée de Nice, était déjà celui qui circulait le plus : comme un virus, il avait sa vie propre, sa force interne, malgré toutes ses erreurs, et je crois bien que c’est lui qui circule encore, malgré tous mes efforts pour le corriger honnêtement.

Aujourd’hui, même sous les coups de poing dans le ventre, souvent sous la ceinture, que je reçois en ce moment de la part des gardiens du temple, des grands spécialistes du droit communautaire outrés de tant d’outrecuidance de la part d’un petit prof de BTS aussi présomptueux qu’incompétent en droit communautaire, je continue à trouver la démarche intéressante : un citoyen qui réfléchit à sa Constitution projetée sans lui à l’échelle européenne, ce texte fondateur à qui il donne beaucoup d’importance comme rempart contre l’arbitraire, qui sait qu’il se trompe sans doute sur certains points, qui veut confronter ses idées, qui ne voit aucun débat digne de ce nom dans les médias, qui arrive grâce au net à échanger formidablement avec tous ceux qui jouent le jeu, et qui publie au fur et à mesure un texte amendé, tout le monde réfléchit, on comprend mieux ce texte inextricable.

Ça se défend, je trouve.

Alors pourquoi cette agressivité méprisante chez certains ?

Est-ce le meilleur rôle que peuvent jouer les experts dans ce débat citoyen : se moquer des erreurs commises par les non spécialistes qui tentent ensemble de comprendre ce texte difficile et ridiculiser chaque faux-pas ?

C’est sans doute de ma faute, largement. Qui suis-je donc, atome présomptueux,  pour remettre en cause tout le travail de tous ces gens valeureux qui se sont donné honnêtement du mal pour construire une Europe si importante pendant que je dormais ? Qui suis-je pour interpeller ainsi les plus grands de ce monde, les meilleurs spécialistes, les plus fins diplomates ?

Rien du tout, assurément.

Je respecte leur travail à tous et je les remercie sincèrement pour tout ce qu’ils ont bien fait pendant que moi, inconscient, négligent, je ne m’en occupais même pas.

Je regrette aussi cette suspicion blessante, trop générale, contre les acteurs politiques qui existe dans mon texte et je vais tâcher de la nuancer.

Mais comme citoyen, je tiens au contrôle des pouvoirs et à la légitimité des consti­tuants, et j’ai beaucoup de mal à me faire à l’idée d’une politique économique imposée sans plus tenir compte des élections. Les spécialistes sauront-ils entendre ces préoccupations d’un citoyen de base, je dis bien de base, même si ça va être dur aujourd’hui de faire oublier que je suis aussi un petit prof de BTS ?

Alors, je vais relire attentivement ces messages hargneux, ce n’est pas facile, pour y trouver leur part de vérité, l’indication de mes réelles erreurs, puis je vais intégrer ces corrections dans mon texte, même si j’ai plutôt envie en ce moment de me recroqueviller dans ma coquille. Je leur signale qu’en me parlant respectueusement, ils auraient obtenu le même résultat, sans me blesser.

Et puis je vais faire une dernière mise à jour, importante parce que j’ai repéré hier une erreur (c’est si difficile à analyser) que je veux corriger, dans l’analyse du pouvoir du Parlement qui est à la fois nul par endroits et trop fort ailleurs. Je la publierai ce soir ou demain, et puis je vais éteindre mon ordinateur parce que ça me ronge profondément maintenant, cette histoire. Il faut se rappeler que je suis seul, un ‘clampin Dupont’, pas du tout préparé à tout ça. Et puis je dois rendre des copies lundi.

S’il vous plaît, ceux qui m’aiment bien et qui commencent à protester pour me défendre sur les forums et autres blogs, je vous en prie : ne soyez pas violents comme eux, évitez l’escalade verbale, montrez que le vrai respect dans une conversation est le meilleur gage d’être entendu et qu’alors tous progressent.

Encore merci pour le soutien chaleureux de ces centaines de personnes qui m’écrivent tous les jours et à qui je ne peux pas répondre faute de temps.

Ne me faites pas tant confiance,  je ne suis pas une référence.

Continuez à analyser, lire et dialoguer, peser le pour et le contre.

Et vraiment, les experts devraient nous aider à éclaircir nos idées au lieu de vilipender nos erreurs.

15 avril 2005 (Lien)

Le texte "Une mauvaise constitution..."  a un succès inattendu et certains commencent à lui reprocher (injustement) de ne pas être ce qu'il ne sera jamais : une référence absolue, complète, impartiale, sans erreur, sans oubli, une sorte de "guide à penser" commode pour ceux qui sont pressés et qui n'ont pas le temps de lire le traité.

Il faut bien sûr lire, au moins un peu, ce traité, ainsi que les arguments des deux bords : l'enjeu est plus important que lors des autres élections européennes.

Si vous devez voter une fois pour l’Europe, c’est le moment de ne pas s’abstenir.

Quant à cette page, il faut la lire simplement comme une réflexion d'un citoyen de base qui invite ses congénères à discuter sur un sujet important, complètement écarté du débat par les médias, pour des raisons mystérieuses.

Dès le début, j'ai dit qu'il pouvait se trouver des erreurs dans mon raisonnement, je l'ai dit expressément en introduction, ce n'est pas une formule creuse, et j'ai dit aussi mon désir de progresser en confrontant mes idées à la critique. Nous y sommes : on me renvoie des remarques, des objections, je réfléchis, je progresse, je corrige, le texte progresse aussi, tout va bien.

On me reproche parfois de ne pas être impartial, de ne montrer que ce qui pose problème, en cachant ce qui donne satisfaction. Mais si je décrivais tout ce qu'il y a à dire sur le TCE, j'en écrirais 200 pages, et personne ne me lirait, on raterait l'essentiel. Alors que j'ai repéré un danger qui me semble immense, (peut-être à tort, on verra), je me concentre donc dessus sans prétendre à l'impartialité, mais en appelant honnêtement au débat.

Et puis que m’importent les avancées (réelles) du TCE si j’ai repéré ne serait-ce qu’un point dangereux  et inacceptable ? Je me concentre sur ce qui me paraît essentiel.

Parfois, dans mon texte, je simplifie la réalité, comme chaque fois qu'on veut résumer sa pensée, et là, ce n'est plus exactement la vérité, bien sûr. Par exemple, quand je dis "un Parlement privé de son pouvoir normatif et de son pouvoir de contrôle", ce n'est pas parfaitement exact (on sait donc tous qu'il n'a pas "aucun" pouvoir), mais chacun comprend que cette image, simplifiée pour être forte, insiste sur une tendance choquante.

Il faut me pardonner certaines maladresses de forme et rester concentrés sur le fond : à force de lire des milliers de pages très argumentées pour et contre le TCE, je suis parfois en colère, et je suis probablement pollué par la masse d'info à digérer et par la tendance souvent critique des textes que je lis. Je sens bien, par exemple, qu’à force de relire la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et la Constitution de 1793, je parle plus de peuple et de tyrans qu’à l’accoutumée. J’essaie de revenir aux sources. À chacun ensuite de faire la part des choses.

Essayons de nous parler entre citoyens avec la conviction sincère que l'autre est de bonne foi, qu'il n’est pas mu par de noirs desseins… 

Partisans du texte et opposants au texte rêvent tous (ou presque) d'une Europe unie, fraternelle, forte… mais nous n’avons pas les mêmes craintes. Nous nous ressemblons donc beaucoup, et pas grand-chose ne nous sépare.

Essayons de nous expliquer mutuellement nos craintes. Mon objectif réel et sincère dans cette publication est, avec votre aide, de contrôler qu’il n'y a pas de faille dans un raisonnement qui conduit à une critique majeure d'un traité que je lis comme le révélateur d'une grave maladie qui ronge la démocratie en Europe, une espèce de renoncement, d'abandon des élites, dont parlent bien Jennar, Fitoussi et d’autres auteurs importants, professeurs de droit public à l’Université ou autres.

En effet, de deux choses l'une : si cette thèse est erronée, il faut le démontrer et cesser de s'inquiéter sur ce point (il y aura sans doute d'autres points à débattre). Mais si elle est valide, il faut se mobiliser massivement pour résister, comme on résisterait à l'oppression. Relisez-moi donc soigneusement, s’il vous plaît, comme les dizaines de milliers d’autres qui vous ont déjà précédés :o)

Pour réveiller les journalistes de leur "ronron oui-oui", je leur ai écrit une lettre ouverte, comme on jette une bouteille à la mer, là aussi... Mais comme je pense que ce sont des gens débordés, absolument débordés, vraiment, ils ne liront pas plus cette lettre que les autres articles décrivant minutieusement les dangers du traité, et ils resteront probablement sur leur position de départ. Donc, pour une fois, c'est à nous de faire leur boulot d'information, ou au moins d’incitation à la réflexion, entre nous ;o)

Merci à tous ceux qui m'encouragent et m'aident à progresser à travers ces échanges d’une richesse indescriptible. Je reçois des dizaines de mails par heure et je n'arrive plus à faire face car j'essaie de répondre comme il faut à tout le monde...  :o)

Aujourd’hui, 15 avril, j’arrive à peine à les lire, je ne réponds qu’une fois sur dix, et je n’ai pas le droit de quitter la maison 24 h dans prendre d’un coup 350 mails de retard.

Voici donc les réponses faciles que je peux donner ici, une fois pour toutes, à ceux qui se demandent : "Qui parle ici ?" :

Je suis professeur en BTS dans un lycée de Marseille. 10 ans de droit fiscal en BTS compta, 8 ans d'éco, de droit constitutionnel, de droit civil et droit commercial en Terminale (je précise ça parce que j'ai vu passer des messages comme 'il n'est même pas prof de droit, il fait du parapente'...). Aujourd'hui, je suis devenu professeur d'informatique et je suis, en plus de mes cours, l'administrateur du réseau d'ordinateurs de mon lycée.

Le fait d’être prof de droit en Terminale m’a conduit pendant des années à un effort pédagogique pour rendre simples et pas trop arides des règles parfois compliquées.  Cette particularité explique mon goût de parler de la Constitution. Je me sens, je sais que c’est un peu bête,  une espèce de mission de parler de ce que crois à la fois important et pas facile à comprendre.  C’est une maladie de prof d’aimer expliquer. En tout cas, rien ne m’interdit (je crois) de décrire mes craintes et d’appeler au moins au débat avant de signer un texte aussi important.

J'ai 48 ans, quatre enfants, je n'appartiens à aucun parti, syndicat ou association, j'ai fait beaucoup plus de parapente que de politique où je suis un débutant absolu, un bizuth, et où je ne ferai pas de vieux os (le vol libre est une drogue dure qui me rappellera vite à elle). 

Je ne suis donc le "sous-marin" de personne, (affirmation marrante reçue plusieurs fois par mail. Par exemple : « Monsieur, vous êtes un sous-marin, je vous salue. » textuellement, je vous jure que c’est vrai).

J'ai une formation de juriste, une simple maîtrise de droit suivie de la préparation du concours du CAPET, qui m'a donné le goût de la chose publique, et la conscience de l'importance du droit pour protéger les faibles, mais il ne faut pas attacher d'importance à cette étiquette : un prof de droit vous expliquera parfois des sornettes ou vous cachera une partie essentielle, alors qu'une petite dame timide au coin de la rue est bien capable de formuler une bonne analyse d'un texte "trop compliqué pour être honnête"... :o)

Fiez-vous donc surtout aux idées et arguments sans vous laisser polluer par des considérations parasites (étiquettes, procès d'intention politiciens, rancunes partisanes, etc.).

Pour répondre à certains qui raillent facilement, je rappelle donc que je ne suis pas prof de fac, je ne suis pas prof de droit public, je ne suis pas prof de droit constitutionnel, je ne suis donc pas du tout un expert en la matière, et pourtant ça ne me disqualifie pas pour réfléchir à ma Constitution, pas plus que ma fonction de prof ne me donne une autorité particulière pour en parler. Je m'exprime en tant que citoyen de base, et la notoriété subite de ce texte via l'Internet ne doit pas changer cela.

Je prétends que la réflexion sur l'équilibre et le contrôle des pouvoirs n'appartient à aucun expert. Il me semble que l'exigence de simplicité et de neutralité des textes suprêmes est une condition sine qua non pour que ce débat puisse être universel comme il doit l'être, et je dis que présenter un texte aussi long et compliqué, c'est en écarter les citoyens de base, c'est en confier le contrôle à des experts, c'est gêner le débat fondamental, ce n'est pas démocratique.

Malgré cette gêne que constitue un texte difficile, ce débat appartient au commun des mortels, c'est la beauté de la démocratie, ne le laissez pas confisquer par les experts. Lisez et prenez la parole :o)

J'ai déjà reçu d'utiles et sympathiques critiques qui m'ont permis de faire évoluer mon texte, en changeant sa date à chaque fois. Par exemple, dans la première version, datée du 25 mars, j'avais commis deux erreurs, et très vite, grâce à des lecteur attentifs (et bienveillants), j'ai repéré et corrigé ces erreurs (une à propos de la Turquie, et une autre à propos de la durée du traité de Nice). Mais le texte était déjà parti et il m'échappait complètement, il vivait sa vie, autonome. Donc, si vous avez cette version datée du 25 mars, remplacez-la par la version la plus récente (à télécharger sur ce site).

Ne me reprochez pas les erreurs éventuelles comme si j'étais malhonnête : elles sont prévisibles et prévues, et pas du tout définitives si on recherche sincèrement à identifier les vrais enjeux de ce traité : admettez que la tâche est rude avec ce texte complexe et sibyllin, et qu'on est beaucoup plus forts à plusieurs pour affiner une critique qui deviendra (peut-être) finalement irréfutable.

Vous remarquerez que je n'appelle jamais à voter de telle ou telle façon. C'est parce que ma critique va au-delà de ce texte qui m'apparaît seulement comme le verrou final d’une évolution qui devrait être revue dans son ensemble.

Certains me disent que je n’ai rien à proposer et que je suis irresponsable, que je suis en train de casser un splendide édifice qui a demandé des énergies colossales, des trésors de patience, des prodiges de diplomatie...

Je suis sincèrement désolé de tous ces cataclysmes, mais on va avoir du mal à me montrer que c'est de ma faute. Moi, simplement, je tiens au contrôle parlementaire, je tiens à la force de mon parlement, qu'il soit national ou européen, parce que c'est mon principal rempart (avec les juges et les journalistes) contre l'arbitraire. Je tiens aussi à ce que les pouvoirs soient réellement responsables, révocables. Je tiens enfin à garder la possibilité de changer réellement de politique économique par mon vote.

Si tout ce que les responsables de l’Europe ont construit depuis 50 ans me prive de la démocratie, je revendique le droit de me mettre en travers.

C’est peut-être compliqué parce qu’ils veulent trop en mettre dans un cadre inadapté (la politique économique imposée à tous, notamment). S’ils se contentaient d’un texte de vingt pages qui règle uniquement l’essentiel, l’accord, même à 25 pays très différents, serait sans doute plus simple à trouver.

Bon, je suis en train de réécrire un papier de fond, ce qui n’est pas l'objet de cette page… :o)

Conseil : pour chaque page, vous pouvez télécharger un fichier pdf pour une impression soignée. Vous pouvez aussi l'envoyer à des amis, mais cela "fige" le texte, alors qu'il a besoin d'évoluer (au moins un peu). Vous me rendez service en n'envoyant qu'un lien vers ce site, car cela m'évite de prévenir la terre entière à chaque mise à jour... Pensez aussi à prévenir vos correspondants que le texte évolue et qu'il faut revenir de temps en temps sur cette page (donnez le lien avec le fichier) pour récupérer la dernière version.

Amicalement.

Étienne.
Trets. 15 avril 2005

Accueil

Je profite de l’occasion pour remercier ici les milliers de lecteurs, souvent enthousiastes, parfois critiques, qui m’envoient tant de messages passionnants. Je peux vous dire que c’est une expérience unique, d’une richesse inouïe. Tous ces gens si différents qui paraissent si heureux, c’est vraiment étonnant de vous voir tous arriver chez moi, on dirait presque pour faire la fête, toute la journée… On dirait un grand réveil.

Et cet effort d’analyse qu’on retrouve sous des formes infinies, je reçois souvent de très longs mails qui ont pu demander des heures de travail. Ces gens qui m’écrivent pour me donner des conseils ou pour me faire des reproches détaillés, circonstanciés, inquiets de ce qu’un Non puisse l’emporter, et ces échanges pleins de respect et d’effort pour comprendre les peurs de l’autre.

Alors ensuite, le soir, il faut que je débranche l’Internet pour relire ces messages si denses, si riches, et il faut que je les distille, que je m’en serve pour progresser, et je fais évoluer mon texte pour retirer les erreurs, reformuler ce qui est ambigu ou exagéré…

Je n’ai plus le temps de répondre à chacun, mais qu’ils sachent tous que leur texte résonne en moi malgré mon silence apparent.

Étonnante aventure…

13 avril :      Essai de clarification du débat sur le TCE
Amicales mises au point  (Lien)

Ce qui se passe autour de mes petites idées de petit citoyen de rien du tout a pour moi quelque chose d’irréel, chacun le comprendra s’il se met à ma place.

Tout d’abord, ce ne sont pas "mes" idées, je n’ai rien inventé : j’ai simplement lu les autres, ingénument, pratiquement de tous les côtés je crois, et puis j’ai distillé ça à ma manière, pour en extraire ce qui me paraît important. Cette démarche n’est pas extraordinaire.

Le fait qu’Internet soit une chambre d’écho potentiellement immense n’est aujourd’hui plus théorique pour moi et, en fait de débat, je suis servi.

Malgré cette subite et exagérée notoriété, je reste un humain de base, complètement seul, faillible et fragile, soyez gentil de vous en souvenir quand vous portez vos coups.

Je reçois des centaines de mails par jour, très denses, très forts, des vrais messages. Il faut se rendre compte. C’est au-delà de ce que peut traiter rapidement un humain seul, même prof ;o), même en vacances ;o).

Ce matin encore, j’ai reçu une vraie perle de message, de la part d’un contradicteur pas du tout d’accord avec moi, mais raffiné, tout en nuances, argumentant précisément point par point en restant chaque fois sur le sujet, et bien sûr sans aucune agressivité. Nous en sommes à trois messages ainsi échangés. C’est formidable, ce gars-là me tire à lui, j’ai envie de me rapprocher de lui.

Je sens bien, là, sur des messages comme celui-là, que les partisans du TCE sont très proches, à deux doigts seulement, des opposants au TCE. Nous avons exactement le même rêve, ça devrait nous rapprocher beaucoup. Moi, ça me donne beaucoup d’espoir.

Et puis hier soir, j’ai reçu dans un autre message une bordée d’injures : je suis un falsificateur parce que je n’ai pas dit que j’enseigne dans un lycée et que je savais que tout le monde allait croire que j’étais prof de fac, je suis un manipulateur et je me sers de mon statut privilégié pour induire en erreur les esprits faibles, je me trompe sur tout, je suis irresponsable, etc.

Heureusement, j’en reçois peu, mais j’ai cru comprendre que sur les forums et les blogs, ça canarde dans tous les coins sur le père Chouard.

Alors bien sûr ce sont deux extrêmes d’un spectre infini de comportements possibles, mais j’insiste sur le fait que ce débat important ne peut faire progresser tout le monde vers une meilleure perception de la réalité qu’avec un infini respect de l’autre. Il faut absolument se forger la certitude intime que l’autre est de bonne foi, qu’il croit ce qu’il dit, qu’il a peut-être raison, sinon c’est perdu, on va s’empailler et c’est la guerre. 

Pour moi, un étranger, c’est un ami que je ne connais pas.  C’est un a priori important qui aide à échanger.

Quand on parle à la cantonade, on peut prendre un ton d’interpellation comme je le fais, mais quand on est dans la relation interpersonnelle, s’il vous plaît, respectons-nous profondément.

Alors le document, que je commence ce matin parce que je dors de moins en moins, voudrait éclaircir certains malentendus évidents qui entraînent un dialogue de sourds. Je vais, cette fois, faire peu référence aux articles du TCE, prenant pour acquis que je parle ici à des gens qui ont maintenant une connaissance du texte qui le permet. Ça rendra mes phrases plus brèves, mes raisonnements plus clairs (j’espère).

Je vais essayer d’expliquer en quoi les réponses que je reçois ne me rassurent pas du tout, et donc comment devrait se transformer le discours de mes contradicteurs pour que nous puissions nous entendre, au sens fort du terme :

Quand je dis le TCE n’est pas lisible,
on me dit tous les traités et toutes les constitutions sont ainsi rédigés.

Outre que ce n’est pas une raison, un excès n’en justifiant pas un autre, j’insiste sur ce point essentiel : comment les plus fervents partisans de ce texte, (partisans que je respecte au plus haut point, même quand ils me tapent dessus : j’étais des leurs il y a six mois, et je les sens toujours très proches de moi, sur l’objectif, pas sur les moyens), comment ces partisans du texte donc expliquent-ils qu’il faille des jours de travail à scruter les centaines articles sans en oublier, et sans certitude d’avoir bien réussi, pour découvrir les domaines sur lesquels le Parlement européen n’a pas du tout le droit de légiférer, dans lesquels l’exécutif confond les pouvoirs et peut, tout seul, sans contrôle, à la fois faire les lois et les appliquer ?

Pourquoi n’y a-t-il pas une liste claire, et donc facilement critiquable, des domaines de chaque pouvoir ? Est-ce par hasard ? Parce qu’on a pas eu le temps de rédiger le texte comme il faut ?

Cette illisibilité du texte suprême sur un point fondamental vous paraît-elle acceptable ? Vous me dites que c’est comme ça partout. Vous êtes sûrs ?

Je n’ai pris qu’un exemple, mais je pourrais en trouver cent.

Je crois que, fondamentalement, ce n’est pas démocratique de proposer une Constitution aussi difficile à lire.  Beaucoup de gens vont accepter ce texte sans l’avoir lu parce que tout a été fait pour qu’ils n’aient pas envie de le lire et qu’on compte bien sur leur gentillesse, sur leur confiance, parce que, souvent, les gens sont comme ça, confiants et gentils. Je ne trouve pas ça démocratique.

Je ne crois pas du tout que ce soit inévitable. Une Constitution peut être lisible.

À mon avis, elle le doit.

Quand je dis que le texte n’est pas révisable
on me dit que c’est normal puisque c’est un traité

Est-ce qu’on peut garder l’objectif essentiel en tête ? Pour moi, mais je peux me tromper, je parle en petit citoyen lambda, ce qui compte le plus, c’est la protection des individus contre l’arbitraire, contre la loi du plus fort.

Je suis sûr que le pays tout entier, à travers tout le spectre des opinions politiques, peut tomber d’accord là-dessus.

Les grands principes dont je parle (lisibilité, "révisabilité", neutralité, séparation et contrôle des pouvoirs, et approbation directe par le peuple lui-même, directement)  s’appliquent à une constitution parce que c’est le droit du droit, parce que tous les autres droits vont dépendre de ce droit-là, et non pas parce que quelqu’un a appelé ou pas le texte "Constitution", "traité" ou autre chose.

Je veux dire que c’est la nature du texte qui fait son importance, son danger pour les peuples, et donc le besoin de garanties qui l’entoure.

Peu importe la qualification qu’auront imposée les auteurs du texte. Même si le TCE n’avait pas prononcé une seule fois le mot Constitution, nous autres citoyens de base aurions reconnu dans ce texte une constitution de fait : mise en place d’un pouvoir exécutif, d’un pouvoir législatif, d’un pouvoir judiciaire, force supérieure absolue du texte, etc.

Dans ces conditions, prétendre que la procédure du traité s’impose parce que les auteurs l’ont voulu ainsi, n’est-ce pas renoncer, par un rigorisme juridique un peu aveugle, à la protection des individus que garantissent les principes dont je parle ?

Je suis sûr que les partisans du TCE qui me tapent dessus sont profondément attachés à la protection des individus contre l’arbitraire, je ne leur ferais pas l’injure même d’imaginer le contraire. En revanche, je crois qu’ils sont trop confiants dans la nature des hommes au pouvoir, et qu’ils ne m’entendent même pas tant ils ont envie de l’Europe tout de suite, à tout prix, ce que je peux comprendre, mais pas admettre tant que je n’ai pas été rassuré.

Sans contre pouvoirs réels, nous courrons à l’abus de pouvoir.

Ce serait bien qu’ils m’entendent pour ensuite me rassurer, au lieu de me parler d’autres choses, absolument mirifiques, qui se trouvent effectivement dans le traité, mais qui ne me rassurent pas du tout puisqu’on a changé de sujet… Il faudrait arriver à rester sur un sujet précis avec rigueur et l’épuiser avant de passer au suivant.

D’autant que le mirifique est souvent illusoire : je pense à cette partie II stérilisée par l’art 111-2 et dont on nous rebat pourtant les oreilles tous les jours comme si nous abordions enfin une nouvelle ère démocratique.

Mais rassurez-moi : expliquez-moi ce qui va concrètement changer la vie dans cette rutilante mais totalement creuse Charte des droits fondamentaux.

Je pense aussi à ce triste droit de pétition, maquillé avec je ne sais quels intitulés ronflants et trompeurs.

Il y a bien des trompe-l’œil, je trouve, dans ce texte qui va régir ma vie et celle de mes enfants pendant des décennies. Ça ne m’inspire pas confiance, désolé.

Quand je dis que le TCE organise la confusion des pouvoirs au profit de l’exécutif et la mise en tutelle du Parlement, aussi bien sur son pouvoir normatif que sur le contrôle qu’il exerce sur les autres pouvoirs,
on me répond que c’est partout pareil

Encore une fois, un excès n’en justifie pas un autre : prendre la 5ème République comme référence pour bâtir le droit du droit européen, c’est mettre bien bas la barre d’exigence démocratique.

Qu’on se rappelle les critiques gravissimes qui ont été portées contre la Constitution de 58 à l’époque de son adoption. Le fait que Mitterrand ait pris le costume de Président sans faire la moue après l’avoir tant vilipendé ne rend pas les institutions plus démocratiques.

Je pense qu’en France, la taille du pays, le comportement responsable des exécutifs qui n’ont pas trop abusé de leur immense pouvoir et la tradition de contestation de rue, ont permis de tempérer la dérive absolutiste que portaient en elles les institutions. Je ne suis pas sûr du tout que ces mécanismes régulateurs bien français soient imaginables au niveau d’un géant comme l’Europe.

À ce niveau de taille, je trouve que nous devrions être particulièrement vigilants sur la définition des pouvoirs et leur contrôle, parce que c’est sans doute la dernière fois qu’on nous demande notre avis.

Attention : souvent, on me répond en présentant l’élection comme un contrôle des pouvoirs. Par exemple, on me dit « mais tous ces présidents sont élus, tous ces ministres aussi » (c’est moins évident avec les ministres qui sont plutôt nommés), « ils sont donc responsables, mais au niveau national ».

Je crois que c’est mal comprendre le besoin pour le peuple d’un contrôle quotidien de chaque pouvoir. Quand on dit « pas de pouvoir sans contre pouvoir, » cela signifie que chaque pouvoir, dans toutes ses actions de tous les jours, peut être remis en cause par un autre pouvoir. Et c’est parce qu’il sait qu’il court un risque qu’il n’abuse pas de son pouvoir.

Si on s’en remet aux seules élections, il est évident qu’on ne contrôle quasiment plus rien. Ça c’est clair : l'électeur est libre une fois tous les cinq ans, dans l’isoloir, et enchaîné en permanence le plus clair du temps.

Les élections sont donc nécessaires mais pas du tout suffisantes quand on parle de contrôle des pouvoirs.

Ainsi la possibilité de censure du gouvernement par le parlement ne s’applique-t-elle quasiment jamais (en France), mais elle joue évidemment son rôle de régulation quotidienne par sa seule existence, un peu comme la dissuasion nucléaire : on ne s’en sert jamais, mais ça garantit la paix quand même.

Comment justifier qu’il faille une majorité des 2/3 pour censurer la Commission ?

Je trouve, moi citoyen de base, récemment réveillé mais bien réveillé, que la définition des contre pouvoirs dans les institutions européennes est tout à fait inquiétante.

Est-ce qu’on peut parler de ça de façon apaisée, mais consciente que c’est la protection de nos enfants contre les despotes, éclairés ou pas, qui se joue là pour des décennies ?

Il me semble que tout le monde a le droit de parler de ça, même ceux qui ne sont pas "prof de fac spécialisé dans le droit constitutionnel".

N’importe quel citoyen peut comprendre ces enjeux simples mais essentiels, et prendre la parole au même titre que n’importe qui.

Quand je dis qu’une véritable assemblée constituante s’impose pour établir une nouvelle constitution, on me répond qu’il y en a eu une

Un des fondements de la démocratie, c’est que les peuples acceptent de se soumettre à une loi qu’ils se sont donnée à eux-mêmes.

Sous-entendu : pas à une loi imposée par d’autres.

Sous-entendu : pas de loi fondamentale sans l’accord direct du peuple, en connaissance de cause.

Si on oublie cette idée et si on laisse faire une assemblée qui n’a jamais été mandatée par le peuple pour écrire, (ou plutôt recopier), le droit du droit européen, celui qui va remplacer le droit du droit de chaque État membre, si on oublie ce principe, on trahit la démocratie, en tout cas c’est comme ça que je le sens, vu d’en bas.

Comprenez-moi : j’ai bien sûr le plus grand respect pour les membres de la Convention qui était composée de personnalités éminentes.

Mais il reste que jamais elle n’a reçu le mandat du peuple pour faire ce qu’elle a fait. Toute estimable qu’elle soit, cette haute assemblée ne me paraît pas légitime.

On peut ne pas être d’accord là-dessus, mais on devrait pouvoir en parler sans s’empailler.

Je vais continuer à lire vos critiques constructives autant que je peux, et je tâcherai de développer cette mise au point un peu plus tard.

Aujourd’hui, il faut que je corrige des copies :o)

Étienne.
Trets, 13 avril 2005.

E-mail : etienne.chouard@free.fr
Site : http://etienne.chouard.free.fr/Europe/index.htm

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